UE : quelle politique migratoire ?
De Lampedusa au programme post-Stockholm : quelle solidarité migratoire européenne ?

Par Corinne BALLEIX, le 21 janvier 2014  Imprimer l'article  lecture optimisée  Télécharger l'article au format PDF

Corinne Balleix, politologue et enseignante à Sciences Po, vient de publier à La Documentation française "La politique migratoire de l’Union européenne", (coll. « Réflexe Europe »).

Après les drames de Lampedusa et Malte, la politique migratoire européenne a parfois été accusée d’inexistence, ou du moins d’être insuffisamment solidaire à l’égard de certains Etats membres.

QU’EN est-il après les Conseils européens d’octobre et décembre 2013 [1], et les conclusions de la Task Force pour la Méditerranée [2] ? Et quelle solidarité migratoire se dessine dans la perspective du programme post-Stockholm (2010-2014) ?

UE : quelle politique migratoire ?
Corinne Balleix
Auteure de "La politique migratoire de l’Union européenne" à La Documentation française


I. La solidarité au fondement de la politique migratoire européenne

1. En dépit de la diversité des flux [3] et des politiques migratoires nationales, une politique commune d’asile et d’immigration s’est développée de manière remarquable en moins de trente ans : absente des traités de Rome et de l’Acte unique européen, elle est d’abord apparue sous une forme totalement intergouvernementale dans le cadre de la Convention de Schengen, en 1985, puis elle est entrée dans le troisième pilier du traité de Maastricht en 1992 ; s’étant progressivement communautarisée depuis le traité d’Amsterdam, elle relève à présent dans le traité de Lisbonne de la procédure législative ordinaire (art 77 à 79 TFUE), constitue globalement une compétence partagée (art 4 TFUE), et couvre les domaines des contrôles aux frontières, de l’asile, de l’immigration légale (regroupement familial, travail), et de l’intégration. Trois facteurs principaux permettent d’expliquer ces évolutions : l’approfondissement de la libre circulation au sein de l’espace européen a transformé en question d’intérêt commun le contrôle des frontières extérieures de cet espace, toutes sortes de trafics pouvant sinon bénéficier de la suppression des frontières intérieures ; les difficultés des États membres, pris individuellement, à gérer le phénomène transnational complexe des migrations, et le fait que les afflux de migrants se concentrent sur quelques États membres a rendu nécessaires des solidarités entre les Etats membres situés aux frontières extérieures de l’UE et les principaux pays de destination [4].

A lire aussi de Pierre Berthelet : La « gouvernance de Schengen » à la suite des crises migratoires de 2011 et 2015. D’une réforme à l’autre : quoi de neuf ?

Le principe de solidarité entre États membres doit être entendu dans un double sens : c’est parce que les États membres sont solidaires et loyaux dans leur engagement commun à renforcer leurs frontières extérieures qu’ils peuvent envisager une libre circulation des personnes dans l’espace européen (art. 67 TFUE) ; mais, pour les États membres les plus concernés par les phénomènes migratoires, le principe de solidarité implique aussi un partage équitable des charges, notamment financières, de la gestion des frontières extérieures (art. 80 TFUE).

2. S’agissant des règles de loyauté, dans le domaine du contrôle aux frontières, le code frontières Schengen de 2006 [5] vise à définir des conditions et modalités communes de contrôles aux frontières intérieures et extérieures de l’Union, tandis que le code sur les visas de 2009 [6] fixe des listes de pays dont les ressortissants sont ou non astreints à des obligations de visas, et cherche à harmoniser les conditions et procédures de délivrance de ces visas, ce qui devrait tendre à harmoniser l’attractivité des Etats membres vis-à-vis des migrants. Dans le domaine de l’asile, le règlement Dublin [7] a pour objectif de désigner l’Etat responsable de l’examen des demandes d’asile. Cet Etat peut être différent du pays d’entrée du demandeur d’asile, dans le cas d’un regroupement familial par exemple, mais il est vrai que le règlement tend à responsabiliser l’Etat membre qui a pris la plus grande part dans la venue d’un migrant. L’enregistrement des empreintes digitales des demandeurs d’asile dans le système EURODAC [8] permet leur traçabilité, et contribue à lutter contre le « shopping de l’asile », un transfert des multi-demandeurs d’asile vers l’Etat responsable de leur première demande d’asile pouvant être organisé. Enfin, dans le domaine de l’immigration légale, différentes directives (sur les résidents de longue durée [9], sur les étudiants et chercheurs [10], ou sur les travailleurs hautement qualifiés (directive « carte bleue » [11]), notamment, visent à harmoniser dans l’UE les conditions de séjour de ces différentes catégories de migrants.

La solidarité prend aussi la forme de la mise en commun d’informations sur les personnes cherchant à émigrer vers l’Europe. Le Système d’information Schengen (SIS), mis en place dès la convention de Schengen et renouvelé en avril 2013 (SIS-II) [12] permet de partager des informations sur des personnes dont l’entrée dans l’espace Schengen a été refusée, soit parce qu’elles représentaient un danger pour l’ordre public ou la sécurité et la sûreté nationale, soit parce qu’elles ont été éloignées après avoir séjourné irrégulièrement dans un Etat de l’espace Schengen. Le système d’information sur les visas (VIS) mis en place à partir de 2004 [13] permet quant à lui une traçabilité des demandes de visas, notamment pour lutter contre le « visa shopping ». Le système européen de surveillance des frontières (EUROSUR) qui est entré en fonction en décembre 2013 permet aux États membres d’échanger des informations opérationnelles et de coopérer entre eux et avec l’Agence Frontex afin de réduire le nombre de migrants pénétrant irrégulièrement dans l’UE, et de prévenir la criminalité transfrontière. Enfin, un projet de « Frontières intelligentes » (Smart Border Package) [14], en discussion depuis février 2013, viserait à mettre des technologies modernes au service de l’efficacité des contrôles aux frontières : un système fiable et rapide d’enregistrement simplifierait les contrôles des personnes voyageant fréquemment dans l’Union européenne, tandis qu’un système d’entrée/sortie permettrait, notamment, de repérer des visiteurs demeurant sur le territoire de l’UE au-delà de la durée de leur visa (overstayers).

Il n’est pas exact de dire que la politique migratoire de l’Union européenne n’existe pas.

3. Enfin, la solidarité prend la forme de soutiens apportés aux Etats membres, qu’ils soient financiers ou opérationnels : pour la période 2007-2013, quatre Fonds européens (Fonds pour les frontières extérieures de l’Union (1,82 Md€), Fonds européen pour le retour (676 millions d’euros), Fonds européen pour les réfugiés (614 millions d’euros) et Fonds européen pour l’intégration (825 millions d’euros) ont cherché à rééquilibrer entre Etats membres la charge financière des migrants. Pour l’année 2013, l’Italie a bénéficié d’une allocation de 92 millions d’euros au titre des Fonds pour les frontières extérieures, réfugiés et retour, et Malte de 23 millions. Pour la période 2014-2020, deux nouveaux Fonds –Fonds « Asile et migration » et Fonds « Sécurité intérieure »- remplaceront les quatre fonds actuels et devraient être dotés respectivement de 3,1 et 3,7 milliards d’euros.

Différents mécanismes opérationnels visent également à soutenir les Etats membres dans leur gestion des flux migratoires.
Dans le domaine des contrôles aux frontières, l’agence FRONTEX [15], mise en palace en 2005, assiste les Etats membres dans des opérations de contrôle des frontières extérieures communes maritimes, terrestres ou aériennes. S’agissant des demandes de visas, des accords européens de mutualisation devraient permettre à des Etats membres disposant d’un réseau diplomatique modeste de bénéficier des équipements et du personnel d’autres Etats membres dotés d’un réseau diplomatique plus étoffé.

Dans le domaine de l’asile, la directive sur la protection temporaire adoptée en juillet 2001 [16] a pour objectif d’organiser, dans le cas d’afflux massifs de personnes déplacées, une répartition des demandeurs d’asile entre Etats membres afin d’assurer un équilibre entre les efforts consentis par chacun d’entre eux. Le Bureau européen d’appui en matière d’asile, qui a commencé à fonctionner à Malte en juin 2011 [17] doit soutenir la coopération pratique entre Etats membres, notamment par le partage d’informations sur les pays d’origine, l’envoi d’équipes d’appui technique, ou le soutien à des transferts de demandeurs d’asile.

Enfin, le règlement Dublin modifié en 2013 [18] prévoit qu’un mécanisme d’alerte rapide permette d’identifier un Etat membre (la Grèce ?) dont le système d’asile serait notoirement défaillant, et que des mesures de solidarité appropriées puissent être apportées à cet Etat.

Ainsi, au regard de tous les dispositifs de solidarité existants, il n’est pas juste de dire que la politique migratoire de l’Union européenne n’existe pas.

II. Pourtant, la solidarité entre Etats membres apparaît à la fois fragile et menacée

Quelles que soient les règles communes dans les domaines du contrôle aux frontières, de l’immigration légale ou de d’asile, les Etats membres restent toujours maîtres, en dernier ressort, de la décision d’autoriser ou non l’entrée ou le séjour d’un ressortissant de pays tiers, et ils divergent dans les politiques qu’ils conduisent. La politique migratoire est une politique à géométrie variable, le Royaume-Uni, l’Irlande et le Danemark bénéficiant de clauses dérogatoires leur permettant de choisir, dans certaines limites, de participer ou non aux différents éléments de cette politique [19]. Autre exemple montrant le manque de vision commune, en 2012, le taux d’octroi d’une protection internationale en première instance varie de 0,9% en Grèce à 90,1% à Malte [20]. Le manque de solidarité transparaît aussi dans le fait que les règles européennes ne prévoient pas de reconnaissance automatique des décisions d’octroi d’une protection internationale [21]. En 2012, un programme pilote concernant Malte a permis 105 relocalisations dans l’espace Schengen de personnes à qui ce pays avait octroyé une protection internationale, contre 307 relocalisations aux Etats-Unis, la solidarité américaine vis-à-vis de ce petit pays apparaissant en l’espèce supérieure à la solidarité intra-européenne.

En outre, plusieurs dispositifs européens destinés à renforcer la solidarité entre Etats membres restent inutilisés ou mal employés, et ne peuvent se développer : très peu de centres communs de traitement des visas ont vu le jour (à Chisinau, en Moldavie, et à Praia, au Cap-Vert), et leur bilan apparaît mitigé, les Etats membres étant de fait très réticents à partager leur souveraineté dans ce domaine. Dans celui de l’asile, la directive sur la protection temporaire adoptée en 2001 n’a jamais été appliquée, alors même que les flux liés aux Printemps arabes, et surtout à la crise syrienne, depuis 2011, justifieraient amplement d’y recourir [22]. De même, alors que le système Dublin/EURODAC et le BEA sont censés permettre d’organiser des transferts de demandeurs d’asile entre Etats membres, les transferts ne concernent en fait que 1,7% des demandeurs d’asile. Les coûts et de la complexité administrative de ce mécanisme [23] expliquent en grande partie leur faible nombre. En outre, en 2011, ce sont la Cour européenne des droits de l’homme et la Cour de justice de l’Union européenne qui ont empêché des transferts de demandeurs d’asile vers la Grèce, estimant que les procédures d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs d’asile y étaient constitutives de « traitements inhumains et dégradants [24]. Dernier exemple de dispositif peu utilisé, dans le domaine de l’immigration légale, lorsqu’il s’agit d’attirer des migrants hautement qualifiés, les Etats membres se livrent une concurrence farouche et cherchent à maximiser leurs avantages comparatifs. Ceci explique le caractère facultatif, et finalement peu utilisé de la directive « carte bleue » qui vise à harmoniser les conditions d’accueil en Europe de cette catégorie de migrants. Au-delà, le manque de solidarité européenne dans le domaine de l’immigration légale, qui s’explique par le fait que ce type d’immigration touche aux questions d’emploi, très sensibles, se traduit par l’abandon de l’idée d’un code européen traitant de l’ensemble des catégories d’immigrants légaux, et par une fragmentation continue des statuts des migrants en fonction de la catégorie (chercheur, saisonnier…) à laquelle ils appartiennent.

Enfin, le manque de solidarité transparaît dans le fait que les Etats membres ne sont pas toujours loyaux dans l’application des règles communes : dans la pratique, le système Dublin/EURODAC ne fonctionne pas correctement, certains Etats membres (Grèce, Italie, Malte) tardant à enregistrer ou n’enregistrant pas les données personnelles de demandeurs d’asile, leur laissant ainsi le temps de quitter leur territoire et de solliciter l’asile dans un autre Etat membre. Lors des printemps arabes, au premier trimestre 2011, l’Italie, qui estimait que l’Union européenne ne lui témoignait pas suffisamment de solidarité face à l’afflux de 28 000 personnes sur ses côtes, enfreignant possiblement le principe de coopération loyale, avait décidé unilatéralement, le 5 avril 2011 d’octroyer aux migrants des titres humanitaires de séjour de 6 mois leur permettant de circuler dans le reste de l’espace Schengen. En réaction, la France, craignant un afflux de ces migrants vers son territoire, bien qu’en fait, leur nombre n’ait pas dépassé 400 personnes, et portant vraisemblablement atteinte au principe de proportionnalité, avait réintroduit des contrôles sur sa frontière avec l’Italie [25].

Les insuffisances dans le contrôle des frontières extérieures risquent d’entraîner le rétablissement de contrôles aux frontières intérieures de l’espace Schengen.

Or, cette crise dans la solidarité migratoire européenne s’est résolue par une entaille dans le principe cardinal de la construction européenne qu’est la libre circulation des personnes à l’intérieur de l’espace Schengen  : la réforme de la gouvernance de l’espace Schengen adoptée par le Conseil le 8 octobre 2013 [26] élargit, au-delà des craintes pour l’ordre public et la sécurité publique, les critères de réintroduction des contrôles aux frontières intérieures de l’espace Schengen au cas de déficiences sérieuses et persistantes d’un Etat membre dans le contrôle des frontières extérieures de l’espace Schengen. Ainsi, de la même manière que la libéralisation des mouvements de personnes a rendu nécessaire le développement d’une solidarité européenne dans le contrôle des frontières extérieures, les insuffisances dans le contrôle des frontières extérieures risquent-elles d’entraîner le rétablissement de contrôles aux frontières intérieures de l’espace Schengen.

III. La récente crise dans la solidarité entre Etats membres résolue par une externalisation de la politique migratoire européenne ?

Lors des récents naufrages à proximité de Lampedusa et de Malte, des appels ont été lancés en faveur d’un renforcement de la solidarité européenne afin d’alléger le fardeau pesant sur l’Italie et Malte. Une nouvelle réforme du règlement Dublin incluant un mécanisme de répartition entre Etats membres des demandeurs d’asile a été évoquée. Pourtant, considérant que, pour l’année 2012, l’Italie n’avait accueilli que 15 700 demandes d’asile, et Malte 2 000, contre 77 500 en Allemagne et 60 500 en France [27], les chefs d’Etat ou de gouvernement, qui n’ont pas souhaité déresponsabiliser les Etats périphériques du contrôle des frontières extérieures de l’Union, n’ont pas jugé nécessaire de modifier le règlement Dublin pour organiser une nouvelle répartition des demandeurs d’asile entre Etats membres.

Lors du Conseil européen des 24 et 25 octobre [28], les Etats membres ont pu être solidaires sur deux points : « l’impératif de prévention et de protection », et « le principe de solidarité et de partage équitable des responsabilités ». Ces orientations ont été précisées dans les conclusions de la Task Force pour la Méditerranée [29], puis confirmées par le Conseil européen des 19 et 20 décembre 2013 [30].

1. Prévention et protection contre l’immigration irrégulière ?

Pour mieux contrôler les flux de migrants, le Conseil européen et la Task Force proposent d’intensifier la lutte contre la traite des êtres humains, et le trafic des migrants, et de rendre la politique de retour plus effective.

A cette fin, Europol renforcera ses coopérations avec des agences européennes de lutte contre les trafics d’êtres humains et le crime organisé (FRONTEX, le BEA et Interpol), et avec les Etats membres. A cette fin, la Task Force propose que FRONTEX et Europol signent rapidement des accords opérationnels d’échanges de données personnelles. En outre, L’UE soutiendra des programmes de renforcement des capacités dans les principaux pays tiers concernés par les problématiques de trafic de personnes et crime organisé, notamment en Afrique. Par ailleurs, la réflexion sur le recours à certains instruments de politique étrangère et de défense commune pour lutter contre des organisations criminelles dans des pays tiers se poursuit. Enfin, l’Union européenne cherchera à renforcer les textes européens organisant des sanctions, en particulier l’aide à l’entrée, au transit et au séjour irrégulier (directive de novembre 2002) [31]. Cependant, il faudra veiller à ce que les échanges de données personnelles ne portent pas atteinte aux droits fondamentaux des migrants, et à ce que les mesures de sanctions, qui sont nécessaires pour crédibiliser la lutte contre les réseaux, ne conduisent pas à une incrimination d’actions d’assistance humanitaire. De plus, il faut être conscient que, les visas pour les Etats membres étant difficiles à obtenir, en l’absence de passeurs, la plupart des personnes ayant besoin d’une protection internationale ne pourraient parvenir jusqu’en Europe, et que l’intensification de la lutte contre la traite des êtres humains et le trafic des migrants pourra aussi restreindre l’accès de ces personnes aux procédures d’asile européennes.

L’Union cherchera en outre à multiplier des accords de réadmission par lesquels des pays tiers s’engageant à réadmettre leurs propres nationaux, ou des ressortissants de pays tiers ou apatrides ayant transité par leur territoire. Depuis 1999, l’Union européenne a négocié 18 accords avec des pays tels la Russie, l’Ukraine, le Pakistan, le Sri Lanka, les pays des Balkans, le Cap Vert, et 13 accords sont effectivement en vigueur.

Pour aider les pays tiers à lutter contre l’immigration irrégulière, l’Union européenne peut soutenir le développement de leurs systèmes de contrôles frontaliers. Cependant, l’Union européenne apparaît plus demandeuse de ces accords que les pays tiers, qui bénéficient de transferts de fonds de migrants et doivent supporter des charges financières liées aux réadmissions. Sans contreparties telles les facilitations de visas ou l’augmentation de l’aide au développement, certains de ces accords, notamment avec le Maroc, peinent à se concrétiser. Surtout, les systèmes d’asile des pays tiers n’offrent pas toujours aux demandeurs d’asile les mêmes garanties de respect de leurs droits fondamentaux que ceux des Etats membres [32]. Il est par exemple arrivé que l’Ukraine, avec qui l’Union européenne a signé un accord de réadmission en 2007 tente de renvoyer en Russie des personnes reconnues réfugiées par le HCR [33]. De plus, certains accords de réadmission ont été signés avec des pays - Sri-Lanka, en 2005 ou Pakistan en 2010 –où des persécutions pour des motifs religieux, politiques ou ethniques sont pourtant bien connues.

Enfin, même si elle a été critiquée [34], la directive « retour  » de décembre 2008 [35], définit des normes et procédures communes pour le retour de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier qui sont protectrices de leurs droits fondamentaux. Les Etats membres doivent notamment tenir compte de l’intérêt supérieur de l’enfant, de la vie familiale et de l’état de santé des personnes concernées et ils doivent respecter le principe de non-refoulement (art 5). Or, aux termes de son article 2, la directive s’applique aux ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier « sur le territoire d’un État membre ». Elle pourrait donc être interprétée comme ne s’appliquant pas aux personnes appréhendées lors du franchissement des frontières extérieures de l’Union.

Dans le même esprit, les Etats membres, au sein du Conseil européen se sont entendus pour demander un renforcement des activités de l’Agence FRONTEX en Méditerranée et le long des frontières du Sud-est de l’UE, ainsi que de ses coopérations avec d’autres agences, notamment l’Agence européenne de sécurité sanitaire et le Centre satellitaire de l’Union européenne.

Le choix d’intervenir le plus loin possible des côtes européennes afin d’empêcher au maximum l’accès des migrants aux territoires des Etats membres pourrait contribuer à régler la question du partage entre Etats membres du fardeau de l’accueil de ces migrants et demandeurs d’asile.

La mise en œuvre rapide d’EUROSUR, en décembre 2013, permettra l’extension à la Libye, puis au Maroc et à l’Egypte d’un programme Sea horse Network de coopération de FRONTEX avec des pays tiers pour une détection renforcée des mouvements irréguliers transfrontaliers. L’accent sera notamment mis sur la détection de petits bateaux d’immigrants irréguliers dans des ports de départ. Un appel sera lancé à tous les navires pour qu’ils respectent leurs obligations internationales de secours en mer en faveur de migrants en perdition, tout en les assurant qu’ils ne seront pas sanctionnés et qu’ils pourront débarquer rapidement les personnes prises en charge.

Le choix d’intervenir le plus loin possible des côtes européennes afin d’empêcher au maximum l’accès des migrants aux territoires des Etats membres pourrait contribuer à régler la question du partage entre Etats membres du fardeau de l’accueil de ces migrants et demandeurs d’asile, dans la mesure où l’Italie, Malte et la Grèce, mais aussi la France ou l’Allemagne les recevraient en moins grands nombres [36]. Certes, la Commission prévoit d’octroyer 30 millions d’euros à l’Italie et 20 millions d’euros pour les autres Etats membres recevant les afflux de migrants les plus importants. Cependant, la Task Force souligne que la solidarité envers ces Etats membres, notamment via des opérations conjointes de FRONTEX, des soutiens du BEA, ou des relocalisations au sein de l’UE de personnes protégées par l’Italie ou Malte doit aller de pair avec leur pleine responsabilité dans le contrôle des frontières extérieures de l’Union.

De fait, l’externalisation accrue de la politique migratoire européenne permettrait d’éviter des querelles entre Etats membres sur le partage des charges liées aux migrants, et d’éloigner les tentations de rétablissement des contrôles aux frontières intérieures de l’espace Schengen.

Cependant, cette externalisation accrue de la politique migratoire de l’Union, qui déplace sur les pays tiers la charge de l’accueil des migrants pourra-t-elle pallier les faiblesses de la solidarité intra-européenne ? Ne risque-t-elle pas de se faire au détriment du respect des droits fondamentaux des migrants ?

2. Solidarité et de partage équitable des responsabilités avec des pays tiers ?

Pour maintenir un niveau élevé de protection des droits fondamentaux des migrants en général, et des demandeurs d’asile en particulier, le Conseil européen propose de renforcer la coopération dans les pays tiers dans le domaine du développement et dans celui de l’asile. Il s’agit d’un vaste chantier.

. S’agissant des actions de court et moyen terme pour limiter les flux, l’objectif affirmé de l’Union européenne est de dissuader des migrants irréguliers de se lancer dans des voyages périlleux.
L’Union européenne envisage ainsi de soutenir les infrastructures de contrôle frontalier des pays tiers, en particulier au Sud et à l’est de la Méditerranée. Des campagnes d’informations sur les risques liés à l’immigration irrégulière seront développées. Par ailleurs, des actions de renforcement des capacités de ces pays, via notamment la mise à disposition d’officiers européens de liaison (ILO), devraient être soutenues, notamment en Turquie ou au Maroc. Une nouvelle génération de programmes Euromed police devrait être mise en œuvre à partir de 2014, et le Programme WAPIS (West African Police Information System) conduit par Interpol devrait être renforcé. Un programme Sea horse Network Atlantique de coopération de FRONTEX avec des pays tiers, qui associe actuellement l’Espagne, le Portugal, le Sénégal, la Mauritanie, le Cap-Vert, et le Maroc à la lutte contre l’immigration irrégulière devrait être étendu à la Libye, puis au Maroc et à l’Egypte. Des partenariats de mobilité entre l’Union européenne et des Etats tiers, tels le la Tunisie, la Jordanie, l’Egypte, la Libye l’Algérie ou le Liban, visant à organiser des migrations légales en échange d’engagement de ces pays dans la lutte contre l’immigration irrégulière devraient aussi être finalisés ou négociés. Cependant, la Task force pour la Méditerranée souligne l’importance, pour la mise en œuvre efficace de cette coopération, de la bonne volonté des Etats tiers et de la nécessaire prise en compte par l’UE de leurs attentes.

Dans le domaine de l’asile, des programmes de protection régionaux, financés par l’Union européenne visent à aider des pays tiers à améliorer leurs infrastructures locales et leurs capacités administratives et juridiques dans l’accueil des demandeurs d’asile et le traitement de leurs demandes. Certains programmes ont déjà été mis en place en Afrique du Nord (avec la Libye, la Tunisie, et l’Egypte) et dans la Corne de l’Afrique (Kenya, Djibouti). Ils devraient cependant être renforcés pour inclure des pays de la région du Sahel. En septembre 2013, l’Union européenne, regroupant ici la Commission et les Etats membres, avait mobilisé 1,8 milliard d’euros en faveur des 7 millions de personnes touchées par le conflit syrien, et apparaissait comme le fer de lance de l’aide d’urgence et l’aide à la reconstruction en faveur de cette région. Plus spécifiquement cependant, la Commission européenne élabore un programme de protection régionale incluant le Liban, la Jordanie et l’Irak pour traiter des conséquences du conflit en Syrie, et limiter les risques de déstabilisation des pays voisins qui accueillent actuellement 2,3 millions de réfugiés. L’expérience des programmes de protection régionaux montre cependant que, lancés dans des pays qui ne sont pas exemplaires en matière de respect des droits de l’homme (Ukraine, Biélorussie), ils ne sont pas toujours mis en œuvre dans l’esprit de protection des droits fondamentaux qu’ils sont censés diffuser.

Aussi, la Task force et le Conseil européen de décembre 2013 soulignent-elle l’importance des programmes de réinstallation, qui visent à offrir à des personnes reconnues réfugiées hors d’Europe par le HCR la possibilité de s’installer légalement et durablement dans un Etat membre, sans avoir à se lancer dans un voyage hasardeux, en l’absence de visas délivrés par les Etats membres. Quand on sait qu’en 2012, seulement 4 500 personnes ont pu bénéficier d’une réinstallation dans un Etat membre [37], et qu’en décembre 2013, l’Union européenne n’accueille que 12 340 personnes fuyant le conflit syrien, soit 0,54% du nombre total de personnes mises en mouvement par ce conflit, et essentiellement sur un fondement humanitaire, et non sur le fondement d’une protection conventionnelle [38], les défis apparaissent immenses. Au premier semestre 2014, la Commission envisage d’organiser avec le HCR une conférence sur la réinstallation des personnes les plus vulnérables. Il s’agirait sans doute que l’UE, qui accueille en 2012 17% du total des réfugiés dans le monde [39] prenne pleinement sa part mondiale du traitement et de l’accueil des demandeurs d’asile.
Par ailleurs, dans la perspective de la stratégie européenne qui remplacera le programme de Stockholm (2010-2014), la Commission fera des propositions visant à définir une approche commune pour l’octroi de visas humanitaires à des personnes en quête d’une protection. Cette protection humanitaire pourrait être moins contraignante pour les Etats membres que les protections conventionnelle et subsidiaire existant actuellement, les droits offerts aux personnes qui en bénéficieraient étant vraisemblablement plus précaires [40]. La Task Force prévoit en outre le lancement d’une étude de faisabilité sur la possibilité pour des demandeurs d’asile d’accéder à des procédures européennes conjointes de traitement de leur demande à l’extérieur du territoire de l’Union, à laquelle serait associés le Bureau européen d’appui en matière d’asile, l’Agence européenne des droits fondamentaux, FRONTEX, le HCR, l’Organisation mondiale du travail et l’Organisation des migrations internationales. Le tri par l’Union européenne des personnes ayant véritablement besoin d’une protection internationale serait dès lors effectué au plus près des zones de conflit, et l’application externalisée des procédures et critères européens constituerait une garantie pour les demandeurs d’asile de respect de leurs droits fondamentaux dans le traitement de leur demande.

. Au-delà, pour « s’attaquer aux causes profondes des flux », telles la pauvreté, les violations des droits de l’homme, les conflits, le manque de perspectives économiques, les conditions de travail peu satisfaisantes et le sous-emploi, notamment, le Conseil européen demande un « soutien approprié » aux pays d’origine et de transit via l’aide au développement, dans le cadre, en particulier, de la politique européenne de voisinage et de l’approche globale des migrations.

De fait, depuis le Conseil européen de 2005 [41], l’Union européenne cherche à développer une « approche globale des migrations, qui fait le pari d’un triple gain (« triple win »), dans lequel les besoins du marché du travail européen seraient satisfaits, les migrants bénéficieraient d’un statut plus stable, et le développement des pays d’origine serait soutenu. L’organisation de l’immigration légale devrait ainsi contribuer à réduire les pressions migratoires irrégulières. Depuis 2010, un Portail européen sur l’immigration fournit dans les pays de départ des informations sur les besoins des marchés du travail des Etats membres. Diverses directives (sur les chercheurs, étudiants, personnels hautement qualifiés) ont pour objectif de sécuriser certains droits liés au séjour de ces personnes, permettant notamment une meilleure reconnaissance de leurs diplômes et favorisant les migrations circulaires. Une directive sur les travailleurs saisonniers, actuellement en discussion, devrait également contribuer au développement de migrations circulaires. Pour la période 2014-2020, l’aide européenne au développement dans le domaine des migrations passera notamment via un nouveau programme Euromed Migration et représentera 7 % des actions thématiques de l’Instrument de coopération au développement (ICD), soit 1,37 md€. Elle sera destinée, en particulier, au développement de formations professionnelles et universitaires adaptées aux besoins des pays d’origine. En outre, des mesures sont prises pour favoriser les transferts de migrants, qui représentent plus de trois fois l’aide publique au développement (406 milliards de dollars de transferts de fonds de migrants contre 126 milliards d’APD mondiale en 2012 [42] . Les Partenariats de mobilités s’intègrent également dans cette approche globale des migrations.


3. Pourtant, en période de contrainte budgétaire forte, comment l’Union européenne pourra-t-elle assurer la mise en œuvre de sa coopération avec des pays tiers ?

Atteindre l’objectif revendiqué d’une meilleure maîtrise des flux de migrants, qui s’effectue dans le respect de leurs droits fondamentaux nécessitera en effet des soutiens importants aux systèmes d’asile et de contrôle des frontières des pays tiers.

. Ne faudrait-il pas conditionner l’aide aux performances des pays tiers dans la lutte contre l’immigration irrégulière ? Certes, des appuis financiers européens tels ceux qui sont censés contribuer à la réintégration des migrants dans leur pays d’origine sont parfois perçus par ces derniers comme des facteurs incitant au contraire au retour des personnes éloignées dans l’Union européenne (« pull factor »), et les conditions de leur octroi pourraient être davantage réglementées.

Si elle veut impliquer les pays tiers dans la lutte contre l’immigration irrégulière, l’Union européenne devra en payer le prix.

Cependant, dans ces négociations sur le contrôle des frontières, l’Union européenne ne se trouve pas toujours en position de force vis-à-vis des pays tiers, qui sont moins demandeurs qu’elle de ces contrôles frontaliers, car ils bénéficient des transferts de migrants et doivent supporter des charges financières liées à la réadmission. Nous avons vu que des accords de réadmission avec le Maroc, l’Algérie, et la Chine, notamment, peinent à se concrétiser, parce que ces pays jugent insuffisantes les incitations proposées par l’Union européenne. Ceux avec l’Ukraine, la Fédération de Russie et la Turquie ont vraiment abouti après que l’UE se soit engagée, à leur demande, à négocier des assouplissements des régimes de visas [43]. Dans un Etat très affaibli comme la Libye, qui a bien d’autres préoccupations que le contrôle de ses frontières, quel pourrait être l’impact d’une suspension de l’aide européenne pour manque d’efficacité dans le contrôle de ses frontières et la lutte contre les trafics de migrants ? En vue de l’extension du programme de surveillance maritime Sea Horse à la Méditerranée, la Task force note qu’il faudra « convaincre » la Tunisie, l’Algérie et l’Egypte de prendre part à ce réseau. Sauf dans des cas très limités, conditionner les aides risque d’être d’une efficacité limitée.

. Ainsi, si elle veut impliquer les pays tiers dans la lutte contre l’immigration irrégulière, l’Union européenne devra en payer le prix. La Task force pour la Méditerranée propose de mobiliser, outre le Fonds « asile et migration » (3,1 Md € pour la période 2014-2020) et le Fonds « sécurité intérieure » (3,7 Md€) des financements de l’aide au développement, en particulier du futur instrument de voisinage (15,4 Md€ au total), du FED (30,2 Md€ au total) et même de l’Instrument de stabilité (2,3 Md€ au total), pour venir en aide aux personnes vivant dans des camps de réfugiés. Comme tous ces fonds seront probablement insuffisants, la Task force fait en outre appel à des financements additionnels de la part des Etats membres.

. Mais, pour que les Etats tiers s’impliquent vraiment dans les objectifs européens de maîtrise des flux de migrants, il importe sans doute qu’ils soient convaincus que leurs intérêts sont vraiment pris en considération
.

A cet égard, il conviendra sans doute de ne pas mélanger financements migratoires et financements de l’aide au développement, l’aide européenne au développement ne devant pas être utilisée, par exemple, pour financer des infrastructures de contrôle frontalier sans retombée économique nationale.

Les demandes des pays tiers portent en outre sur des possibilités élargies d’immigration légale versl’Union européenne, notamment via l’octroi assoupli de visas. Sachant que le développement n’entraînera pas dans un premier temps une diminution des flux migratoires vers l’Union européenne [44], et que l’Union européenne, qui vieillit, a besoin de migrants, en particulier hautement qualifiés pour maintenir ses perspectives de croissance [45], tout un travail de régulation des flux d’immigration légale, moins coûteuse que les aides au développement et les contrôles frontaliers devra se poursuivre. Il s’agira de renforcer l’efficacité de l’approche globale des migrations, qui est parfois perçue comme un instrument trop exclusivement au service de l’immigration « choisie » dans l’Union européenne, et d’augmenter les avantages que peuvent en tirer les migrants et les pays tiers. Les recherches doivent donc se poursuivre dans deux domaines spécifiques :

. celui des migrants hautement qualifiés : actuellement en effet, l’appétit européen pour les migrants hautement qualifiés ne garantit pas un engagement très fort dans la lutte contre la fuite des cerveaux. Cela se traduit, notamment, par un code de conduite éthique envisagé dans la directive « carte bleue » assez peu contraignant. De plus, les Etats membres n’appliquent pas toujours les dispositions facultatives de cette directive quand ils se trouvent en concurrence pour attirer des cerveaux. Dans le cadre des négociations actuelles d’une directive sur les détachements intragroupe, les Etats membres, très soucieux à la fois de maîtriser l’entrée des travailleurs migrants, et de faire jouer la concurrence entre leurs différents systèmes sociaux rencontrent de grandes difficultés à harmoniser leurs conditions d’accueil de ces migrants hautement qualifiés. Ils devront donc surmonter leurs oppositions pour sécuriser les droits de ces migrants dans l’ensemble de l’UE, et rendre plus attractives les migrations circulaires, afin de maximiser les retombées de ces migrations sur les pays d’origine, notamment par des stratégies de réinsertion valorisantes [46].

. En outre les transferts de migrants, qui représentent de 9 à 24% du PIB de certains pays en développement [47] devraient également être améliorés afin d’en réduire les coûts et d’accroître leur impact sur le développement. Il s’agirait notamment d’en améliorer les cadres règlementaires afin de renforcer la concurrence entre opérateurs de transferts et de limiter les transferts informels, parfois opaques ; il s’agirait aussi de promouvoir la bancarisation au sud, et le développement d’activités bancaires dans les pays d’origine à partir de pays de résidence [48] ; et enfin de soutenir des innovations financières (e-banking) contribuant au développement des systèmes de financement d’actions porteuses de développement dans les pays tiers.

*

Ainsi, pour être à la hauteur des valeurs dont elle est porteuse, l’Union européenne ne peut-elle se contenter de renforcer ses contrôles frontaliers et d’externaliser sa politique migratoire. Elle ne pourra demander la solidarité des pays tiers dans le traitement des migrants, et être crédible dans sa promotion auprès d’eux de systèmes d’asile et d’immigration respectueux des droits fondamentaux des migrants que si elle montre l’exemple de la générosité à leur égard, et si elle fait preuve d’innovation et d’écoute à l’égard de ces pays.

Copyright Janvier 2014-Balleix/Diploweb.com


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Corinne Balleix, La politique migratoire de l’Union européenne, (coll. « Réflexe Europe »), La Documentation française

Corinne Balleix
"La politique migratoire de l’Union européenne" (coll. « Réflexe Europe »), La Documentation française

4e de couverture

Axée pour l’essentiel sur la maîtrise des frontières extérieures de l’Union et la lutte contre l’immigration irrégulière, mais aussi sur l’accueil des demandeurs d’asile, la régulation de l’immigration légale et l’intégration des migrants, la politique migratoire européenne n’en reste pas moins dominée par des États membres soucieux de décider souverainement qui peut entrer et séjourner sur leur territoire. Après avoir retracé les étapes marquantes de cette politique, l’auteur de cet ouvrage en dresse le bilan et en évalue la portée : certes, la gestion des frontières extérieures de l’Union est aujourd’hui régie par un ensemble de règles communes, auquel s’ajoutent des dispositifs opérationnels très intégrés ; mais est-elle pour autant efficace, solidaire au niveau européen et respectueuse des droits fondamentaux des migrants ? Que dire de l’accueil réservé aux ressortissants des pays tiers et de la protection accordée aux demandeurs d’asile ou aux réfugiés ? L’harmonisation des règles en matière d’immigration légale, notamment à dimension économique, est-elle suffisante ? Le modèle d’intégration « à double sens » promu par l’Union européenne a-t-il des manifestations tangibles ?

Voir le livre sur le livre de Corinne Balleix, La politique migratoire de l’Union européenne sur le site de La documentation française


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[1Conseil européen, 19 et 20 décembre 2013, « Conclusions », Bruxelles, 20 décembre 2013. Egalement : Conseil européen des 24 et 25 octobre 2013, « Conclusions », Bruxelles, 25 octobre 2013.

[2European Commission, Communication from the Commission to the European Parliament and the Council on the work of the task Force Mediterranean, COM(2013) 869 final.

[3En l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie, le Royaume-Uni et la France, qui ont regroupé en 2012 77% des ressortissants de pays tiers vivant dans l’UE. Eurostat, European Social Statistics, Edition 2013.

[4Après 2001, les craintes d’attaques terroristes ont fait penser aux Etats membres qu’ils devaient renforcer leurs contrôles aux frontières extérieures ; le vieillissement démographique et les évolutions économiques (crise mais besoins de main d’oeuvre hautement qualifiée) ont également contribué au développement de la politique migratoire de l’Union européenne.

[5Règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 15 mars 2006, établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen).

[6Règlement (CE) n° 810/2009 du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 établissant un code communautaire des visas (code des visas).

[7Règlement (UE) N°604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (refonte).

[8Règlement (UE) no 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2000 relatif à la création du système « EURODAC » pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l’application efficace du règlement(UE) no 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant d’un pays tiers ou un apatride et relatif aux demandes de comparaison avec les données d’Eurodac présentées par les autorités répressives des Etats membres et Europol à des fins répressives et modifiant le règlement no 1077/2011 portant création d’une agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle au sein de l’espace de liberté, de sécurité et de justice.

[9Directive 2003/109/CE du Conseil, du 25 novembre 2003, relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée.

[10Directive 2004/114/CE du 13 décembre 2004 relative aux conditions d’admission des ressortissants de pays tiers à des fins d’études, d’échange d’élève, de formation non rémunérée ou de volontariat, Directive 2005/71/CE du 12 octobre 2005 relative à une procédure d’admission spécifique des ressortissants de pays tiers aux fins de recherche scientifique.

[11Directive 2009/50/CE du Conseil, du 25 mai 2009 établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié.

[12Règlement no 1987/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 2006, sur l’établissement, le fonctionnement et l’utilisation du système d’information Schengen de deuxième génération (« SIS-II »).

[13Règlement (CE) no 767/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 9 juillet 2008, concernant le système d’information sur les visas (VIS) et l’échange de données entre les États membres sur les visas de court séjour (dit « règlement VIS »).

[14Commission européenne, Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d’un programme d’enregistrement des voyageurs, COM (2013) 97 final, 28 février 2013 et Commission européenne, Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d’un système d’entrée/sortie pour l’enregistrement des entrées et sorties des ressortissants de pays tiers franchissant les frontières extérieures des États membres de l’Union européenne, COM (2013) 95 final, 28 février 2013. Pour un commentaire critique, voir Heinrich Böll Stiftung, Borderlines : the EU’s New Border Surveillance Initiatives, Assessing the Costs and Fundamental Rights Implications of EUROSUR and the “Smart Borders” Proposals, June 2012.

[15Son règlement a été révise en octobre 2011 : Règlement (UE) no 1168/2011 du Parlement européen et du Conseil, du (CE) no 2007/2004 du Conseil portant création d’une Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne. 25 octobre 2011, modifiant le règlement

[16Directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 relative à des normes minimales pour l’octroi d’une protection temporaire en cas d’afflux massif de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil.

[17Règlement (UE) no 439/2010 du Parlement européen et du Conseil du 19 mai 2010 portant création d’un Bureau européen d’appui en matière d’asile.

[18Règlement (UE) no 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant d’un pays tiers ou un apatride (refonte).

[19Protocole no 19 sur l’acquis de Schengen intégré dans la cadre de l’Union européenne. Protocole no 21 sur la position du Royaume-Uni et de l’Irlande à l’égard de l’espace de Liberté, de sécurité et de justice. Protocole no 22 sur la position du Danemark.

[20Eurostat, « Les Etats membres de l’UE ont accordé la protection à 100 000 demandeurs d’asile en 2012 », eurostatcommuniquédepresse, 96/2013, 18 juin 2013.

[21Décision de la Cour nationale du droit d’asile, sections réunies, 31 janvier 2013, affaire Kariye Anshur.

[22France 24, « Le nombre des réfugiés syriens dépasse les 2 millions selon l’ONU », 3 septembre 2013, france24.com/fr/20130903-syrie-nombre-refugies-syriens-depasse-deux-millions-selon-le-hcr-humanitaire

[23La Cimade, « Le règlement Dublin II et son application en France », 2011, www.cimade.org.

[24CEDH, 21 janvier 2011, MSS c/Belgique et Grèce, req. no 30696/09 et CJUE, 21 décembre 2011, N.S. / Secretary of State for the Home Department, et M.E. e. a. / Refugee Applications Commissioner Minister for Justice, Equality and Law Reform, aff. jointes C-411/10 et C-493/10.

[25Carrera (Sergio), Guild (Elspeth), Merlin (Massimo), Parkin (Joanna), “Race against Solidarity. The Schengen Regime and the Franco-Italian Affair”, CEPS Paper in Liberty and Security in Europe, April 2011.

[263260th Council meeting, Justice and Home Affairs, 7 and 8 October 2013, press Realease.

[27Eurostat, « Demandes d’asile dans l’UE 27 : le nombre de demandeurs d’asile enregistrés dans l’UE 27 en hausse à plus de 330 000 en 2012 », Communiqués de presse, 48/2013, 22 mars 2013, http://europa.eu/rapid/ press-release_STAT-13-48_fr.htm

[28Conseil européen des 24 et 25 octobre 2013, « Conclusions », Bruxelles, 25 octobre 2013.

[29European Commission, Communication from the Commission to the European Parliament and the Council on the work of the task Force Mediterranean, COM(2013) 869 final

[30Conseil européen, 19 et 20 décembre 2013, « Conclusions », Bruxelles, 20 décembre 2013.

[31Directive 2002/90/CE du 28 novembre 2002 définissant l’aide à l’entrée, au transit et au séjour irréguliers. Egalement : Décision-cadre du Conseil no 2002/946/ JAI, du 28 novembre 2002 visant à renforcer le cadre pénal pour la répression de l’aide à l’entrée, au transit et au séjour irréguliers.

[32Association européenne des droits de l’homme (AEDH), « L’AEDH s’oppose aux accords de réadmission de l’UE », 7 octobre 2013, ldh-france.org/L-AEDH-s-oppose-aux-accords-de.html

[33Amnesty International, « Amnesty demande à l’Ukraine de ne pas extrader un Tchétchène en Russie, 14 janvier 2010 », amnesty.org/fr/news-and-updates/ ukraine-must-not-forcibly-extradite-chechen-man-russia-20100114

[34Il lui a notamment été reproché de permettre un allongement jusqu’à 18 mois de la durée de rétention, qui peut s’appliquer à des mineurs, et de prévoir la possibilité d’interdire une nouvelle entrée dans l’Union européenne pour une durée pouvant aller jusqu’à 5 ans, ce qui peut faire obstacle à des regroupements familiaux.

[35Directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier.

[36En 2012, l’Italie a accueilli que 15 700 demandes d’asile, Malte 2 000, l’Allemagne 77 500 et la France 60 500. Cf. Eurostat, « Demandes d’asile dans l’UE 27 : le nombre de demandeurs d’asile enregistrés dans l’UE 27 en hausse à plus de 330 000 en 2012 », Communiqués de presse, 48/2013, 22 mars 2013, europa.eu/rapid/ press-release_STAT-13-48_fr.htm

[37Eurostat, “Les Etats membres de l’UE ont accordé la protection à plus de 100 000 demandeurs d’asile en 2012”, eurostat, communiquédepresse, 96/2013, 18 juin 2013.

[38Amnesty International : « An International Failure : The Syrian Refugee Crisis », Amnesty International Briefing, 13 December 2013.

[3934% des réfugiés séjournent en Asie et dans le Pacifique. Cf. UNHCR, « Displacement. The New 21st Century Challenge », Global trends, 2012.

[40Aux termes de la directive « qualification », renouvelée en décembre 2011, la durée du titre de séjour octroyé dans le cas d’une protection conventionnelle est de 3 ans minimum, et d’une année minimum dans le cas d’une protection subsidiaire. Cf. Directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection

[41Conseil européen de Bruxelles, « Conclusions », 15 et 16 octobre 2005.

[42« Les envois de fonds en direction des pays en développement se monteront à plus de 400 milliards de dollars en 2012 », banquemondiale.org/fr/news/press-release/2012/11/20/developing-countries-to-receive-over-400-billion-remittances-2012-world-bank-report. Dans le monde, l’aide publique au développement s’est élevée à 126 milliards de dollars en 2012, un.org/fr/millenniumgoals/pdf/mdg_report2013_goal8.pdf

[43Commission européenne, « Cecilia Malström signe l’accord de réadmission avec la Turquie et entame, avec ce pays le dialogue sur la libéralisation du régime des visas », IP/13/1259, 16 décembre 2013. Commission européenne, Évaluation des accords de réadmission, COM (2011) 76 final, 23 février 2011.

[44Wihtol de Wenden (Catherine), Pour accompagner les migrations en Méditerranée, Paris : L’Harmattan, 2013.

[45European Migration Network, Satisfying Labour Demand through Migration, October 2011,, emnbelgium.be/fr/node/1128. Commission européenne, Vers une reprise génératrice d’emplois, COM (2012) 173 final, 18 avril 2012.

[46Traoré (Sadio), « La migration circulaire au Mali. Aspects démographiques et économiques », CARIM, Note d’Asalyse et de Synthèse, 2010/55. Egalement : Flahaux (Marie-France), Mezger (Cora), Saljo (Papa), « Migration circulaire des Sénégalais », CARIM, Note d’Asalyse et de Synthèse, 2011/72.

[47Bourenane (Naceur), Bourjij (Saïd), Lhériau (Laurent), Réduire les coûts des transferts d’argent des migrants et optimiser leur impact sur le développement, Outils et produits financiers pour le Maghreb et la zone franc, AFD, Epargne sans frontière, décembre 2011. Egalement : Banque africaine de développement, Les transferts de fonds des migrants, un enjeu de développement, octobre 2008.

[48La bibancarisation désigne l’accès à la banque des migrants, à la fois dans le pays d’accueil et dans le pays d’origine, dans le cadre d’une action coordonnée nord-sud entre les banques, en associant deux comptes, du nord au sud, l’un mis en place auprès de la banque de son lieu de résidence, l’autre dans son pays d’origine.


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