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La Belgique et l'Union européenne, par Bart Ouvry,

diplomate belge, Ministre Plénipotentiaire

 

Quelles sont les priorités de la Présidence belge de l'Union européenne, au deuxième semestre 2001 ? Quelles relations les Belges entretiennent-ils avec la construction communautaire ? Quels sont les apports de ce pays à cette oeuvre de longue haleine ? Diplomate belge, Bart Ouvry répond, après avoir été à Bruxelles l'Adjoint du Directeur de la Coordination européenne au Ministère des Affaires Etrangères.

Biographie de l'auteur en bas de page.

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Les particularités de la Belgique dans la construction européenne sont multiples, en voici trois.

Premièrement, la Belgique est un des six des pays fondateurs de la Communauté Économique Européenne, par le traité de Rome (1957). Cela signifie qu'être membre de l'Union européenne fait depuis longtemps partie des esprits et s'intègre désormais à l'identité belge.

Deuxièmement, la Belgique se trouve à la croisée des cultures européennes avec ses trois langues nationales : le néerlandais, le français et l'allemand. En effet, 60 000 belges sont germanophones. Trois communautés linguistiques cohabitent donc sur ce territoire de 30 528 km² . En outre, les Belges sont à cheval entre les cultures germaniques et méditerranéennes, sans oublier la francophonie. La capitale, Bruxelles, est une ville particulièrement multiculturelle, grâce à l’apport d’une communauté d’hommes d’affaires internationaux, de fonctionnaires européens, de diplomates et de journalistes de nombreux pays, etc. Pour ce pays doté de nombreux ports sur la Mer du Nord (Anvers, Gand, Zeebrugge), l'ouverture sur le monde extérieur fait donc partie de l'identité nationale.

Troisièmement, la Belgique est l’hôte des trois institutions de l'Union européenne qui forment le triangle institutionnel essentiel à son fonctionnement. Bruxelles est le siège de la Commission qui constitue à bien des égards le moteur de la construction européenne. En partage avec le Luxembourg, Bruxelles héberge également le siège du Conseil des ministres de l'Union européenne. Enfin, les réunions des Commissions du Parlement européen se tiennent à Bruxelles, tandis que la plupart des séances plénières se déroulent à Strasbourg, en France.

Sans vouloir diminuer le rôle de Strasbourg et de Luxembourg, dans la pratique, Bruxelles peut être considérée comme la capitale de l'Europe. Cela implique pour le citoyen belge une véritable proximité des institutions européennes. Beaucoup de Belges connaissent personnellement des fonctionnaires européens ou ont visité le siège du Parlement européen ou du Conseil . L'Union européenne est donc très visible dans notre quotidien.

Ces trois caractéristiques expliquent pourquoi l'Union européenne fait partie de la réalité de tous les jours des citoyens belges, voire de l'identité belge.

Pour la Belgique, l'Union européenne est un démultiplicateur

A un niveau plus politique, l'Union européenne a une importance majeure. Parce qu'elle est un démultiplicateur de puissance pour ce pays de 10,2 millions d'habitants, confronté aux processus de la mondialisation. L’Etat belge n’a qu’une emprise très limitée sur les grandes entreprises privées actives sur son territoire mais ayant leur centre de décision à l'étranger. Depuis les années 1960, d'ailleurs, le développement économique du pays s'est construit grâce à des investissements de multinationales principalement américaines qui considéraient notre territoire comme une porte d’entrée sur le Marché Commun européen. L'Union européenne est donc pour nous à la fois une nécessité absolue en tant qu’instance régulatrice et une dimension nécessaire au développement économique du pays.

Le niveau européen devient en conséquence un niveau de prise de décision naturel du point de vue d'un homme politique belge, apportant un champ d'action à la fois plus étendu et plus effectif. Cela explique pourquoi les décideurs belges acceptent plus facilement que d'autres l’idée de faire partie d'une entité supranationale.

En matière économique, le développement de la Belgique a été accéléré par la construction européenne. Si nous avons eu dans les années soixante ces investissements de multinationales américaines et autres - qui nous ont apporté leur savoir-faire et une certaine ouverture sur le monde et des débouchés pour nos exportations - c'est parce que les décideurs voulaient s'implanter dans un pays membre du Marché commun sans pour autant s'implanter dans un grand pays membre tel que la France ou l'Allemagne, où ils auraient été confrontés à de grands "champions nationaux". Ils trouvaient en Belgique un terrain plus neutre, où ils pouvaient s'implanter facilement et avec le soutien actif des autorités belges.

. Quels apports ?

La participation de la Belgique à la construction européenne est loin d'être négligeable, en voici trois illustrations.

Paul Henri Spaak

Premier exemple. Dès les négociations en vue de l'élaboration du Marché commun, plusieurs rencontres ont eu lieu à Bruxelles et le ministre des Affaires étrangères de l'époque, Paul Henri Spaak, a joué un rôle clé. Le 21 avril 1956, il a notamment remis un rapport sur la création d'un marché commun, commandé un an plus tôt par les ministres des Affaires étrangères des "Six". Jean Monnet a écrit dans ses mémoires: ".. le mérite politique de ce document considérable revint à l’homme d’État belge qui avait bien travaillé pour l’Europe." Ce rapport a servi de base à la conférence intergouvernementale du 29 mai 1956 à l'issue de laquelle est prise la décision d'engager une négociation diplomatique pour créer une Communauté Économique Européenne. Le 26 juin 1956 s'ouvrent à Bruxelles les négociations sur les nouveaux traités européens … qui aboutissent le 25 mars 1957 à la signature des traités de Rome instituant la Communauté Économique Européenne et la Communauté Européenne de l’Énergie Atomique.

Le rapport Tindemans

Deuxième exemple. Le 8 janvier 1976, la publication du rapport Tindemans sur l'Union européenne est encore une contribution belge importante. En effet, il est arrivé à un moment où on se rendait compte de la nécessité de développer la dimension politique de ce qui restait alors essentiellement une entité économique, comme l'exprimait l'expression "marché commun". Tindemans était à l'époque chef de la diplomatie belge et c'est suite à son rapport qu'est née la coopération politique européenne. Celle-ci est plus tard devenue le deuxième pilier de la politique européenne, la Politique Européenne de Sécurité Commune (PESC), qui devient aujourd'hui la Politique Européenne de Sécurité et de Défense (PESD). En venant au moment propice, le rapport Tindemans a contribué à donner une nouvelle dimension à la construction européenne.

Karel Van Miert face à Boeing

Troisième exemple. Plus récemment, un Belge a joué un rôle important dans la Commission présidée par Jacques Santer (1995-1999). En effet, Karel Van Miert a eu un rôle crucial dans le développement de l'autorité de la Commission en matière de concurrence. J'étais, à cette époque, à Bruxelles où j'ai pu suivre de très près sa bataille dans le dossier Boeing. Il a su résister aux pressions extrêmes de cette grande multinationale américaine, y compris à l’action de l’administration Clinton sur la Commission. En imposant la volonté de la Commission dans un dossier de fusion entre deux sociétés privé américaines, il a placé la Commission sur l'échiquier international. L’affaire Boeing a prouvé que l’action de l’Union européenne peut fournir les moyens pour contrer les visées oligopolistes d'une grande société américaine qui bénéficie du plein soutien de son gouvernement.

. La présidence suédoise

Notons tout d’abord qu’au moment de cet entretien (mai 2001) le conseil européen de Göteborg n’a pas encore eu lieu – il est donc bien trop tôt pour dresser un bilan complet de la présidence suédoise de l'Union européenne, au premier semestre 2001. Je me limite donc à quelques appréciations personnelles.

Il y avait trois grands chantiers pour la Suède : l'élargissement de l'Union européenne aux pays d'Europe centrale et orientale, l'emploi et l'environnement.

Débat

Concernant l'élargissement, il y a eu un débat très important lors de la réunion informelle des ministres des Affaires étrangères européens à Nyköping. C'est la première fois que se développe une véritable discussion politique au sujet de l'élargissement, du point de vue des Quinze de l'Union européenne actuelle. Bien entendu, les pays membres sont venus avec leurs inquiétudes. La France a attiré l'attention sur l'agriculture, l'Espagne sur les fonds structurels. L'Allemagne, l'Autriche et la Finlande ont parlé des risques de migrations transfrontalières et de la nécessité de penser le mouvement des personnes. Pour la première fois, les pays membres se sont vraiment positionnés dans le débat. Cela n’implique nullement que ce débat politique va se conclure sous la présidence suédoise, mais nous sommes entrés dans une nouvelle phase - plus politique - des négociations d’adhésion.

Pologne, usine sidérurgique. Crédits: Commission européenne

L'emploi

Concernant l'emploi, le Conseil européen de Stockholm du 23 mars 2001 a été un moment important. L'emploi est un sujet sur lequel nous voyons un consensus en train de se construire. Ce processus s'inscrit dans la continuité du Conseil européen de Luxembourg en décembre 1997. La présidence belge compte d'ailleurs s'inscrire dans cette continuité, en précisant les critères quantitatifs et qualitatifs en matière d’emploi.

L'environnement

Concernant l'environnement, la récente décision du Président G.W. Bush de ne pas faire adhérer les Etats-Unis à la convention de Kyoto modifie la donne et les perspectives pour les mois à venir. Ce geste risque de rendre caduc tout le dispositif en matière de lutte contre le réchauffement de la planète. Le Conseil européen de Göteborg en juin 2001 aura le développement durable comme un des thèmes principaux et la présence du président Bush à ce sommet devrait permettre de renouer le dialogue et la coopération avec les Etats Unis en matière d'environnement. Ceci posé, quel est le programme de la nouvelle présidence ?

. Le programme de la présidence belge au deuxième semestre 2001

Notre programme compte sept lignes de force.

Quelles structures ?

Premièrement : la discussion "Futur de l'Europe". Celle-ci aborde et dépasse les questions institutionnelles. Notre rôle n'est certainement pas de chercher à conclure ce débat mais bien davantage de chercher à donner des lignes de force, des paramètres. Il faut poser les bonnes questions. Que voulons-nous faire ensemble au niveau européen ? Avec quelles structures et institutions ? Comment légitimer ce processus vis à vis des opinions publiques ? Finalement, comment structurer la vie politique au sein d'une Union européenne élargie ?

Lors du Conseil européen de Nice (décembre 2000), quatre thèmes ont été mentionnés - la diffusion des compétences, le statut de la Charte des droits fondamentaux, la simplification du traité, le rôle des Parlements nationaux. Cependant, cette énumération n'est pas limitative, puisque la phrase se termine par "entre autres". Le but de la discussion déjà en cours et qui doit s'accélérer sous la présidence belge est : quels sont les thèmes que nous voulons introduire dans le débat ? Il s'agit d'une discussion à long terme, puisque le but est d'aboutir en 2004.

Dans la déclaration qui devra être adopté par le Conseil de Bruxelles, le but est de poser les bonnes questions et d'arrêter une méthodologie. Beaucoup plaident pour une convention et se réfèrent au modèle utilisé pour élaborer la Charte des droits fondamentaux. Le modèle est bien là, mais il a été utilisé pour une tâche très spécifique. Il faudra inévitablement ajuster la formule pour un débat aussi large que celui du futur de l’Europe. Ne serait-ce que parce que le traité le prévoit, il faudra également prévoir une Conférence intergouvernementale à ce sujet. Ces discussions nous tiennent beaucoup à cœur. Le Premier ministre belge s'est déjà exprimé à ce sujet.

Nous attendons également que le débat se développe en France, suite aux interventions du Président de la République tout comme du Premier Ministre. Nous croyons qu'il est très important que le débat ne soit pas mené dans un cercle clos, une sorte de tour d'ivoire. Depuis les traités de Maastricht et d'Amsterdam, nous avons augmenté les compétences de l'Union européenne. L'Union économique et monétaire touche très directement la vie des gens. Si le consensus sur la construction européenne s’est affaibli dans l’opinion publique de tous les Etats membres, c'est parce que l’Union détermine toujours plus le quotidien des citoyens. Ces même citoyens, cependant, ont des difficultés à comprendre le fonctionnement d'organismes tels que le Conseil où quinze États négocient et tranchent, dans un cadre dont on ne retrouve nulle part un corollaire au niveau national. L'initiative française d'organiser des discussions au niveau local est très louable et pourrait beaucoup contribuer à accélérer le débat politique national et à populariser l'idée européenne.

Des zones prioritaires

Deuxièmement : l'action extérieure de l'Union européenne. Nous allons ici travailler en fonction de l'agenda international. Par exemple, il va falloir tenir compte dans nos travaux de la tenue à Qatar de la réunion de l'Organisation Mondiale du Commerce. Au niveau géographique, les quatre régions du monde que nous croyons prioritaires durant les six derniers mois de l'année 2001 sont : les Balkans, le Moyen-Orient, la Russie et l'Afrique des Grands Lacs. Les Belges, pour des raisons historiques, sont attachés à cette dernière région et espèrent qu'une action de l'Union européenne pourrait apporter un soutien à la stabilisation politique que l’on voit naître aujourd’hui.

L'élargissement

Troisièmement : l'élargissement de l'Union européenne aux pays d'Europe centrale et orientale.

Considéré sous un angle historique, la concrétisation de l’élargissement touche à ce qui fait l’âme même de l’Union européenne. Il s’agit ici du partage de valeurs communes en matière de démocratie politique, de respect des droits de l’homme, de protection sociale des plus faibles, de protection des minorités, d’économie de marché et de coexistence pacifique au sein d’un Etat de droit. L’élargissement permet de renouer avec l’identité géographique, politique et culturelle de l’Europe. Par conséquent, l’élargissement constitue une des principales priorités de la présidence belge.

En collaboration avec la Commission européenne, la présidence poursuivra les négociations d’adhésion suivant le schéma et le calendrier approuvés par le Conseil européen de Nice de décembre 2000. Priorité sera accordée à la fixation de positions communes de l’Union européenne ainsi qu’à de larges discussions d’orientation dans le cadre des Conseils européens de Gand et de Bruxelles-Laeken. Chaque Etat candidat à l’adhésion sera traité selon ses propres mérites, sur la base d’une intégration totale et effective de l’acquis communautaire.

Lettonie, usine textile. Crédits: Commission européenne

Nous menons des négociations avec douze pays candidats (Estonie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Hongrie, République Tchèque, Slovaquie, Roumanie, Bulgarie, Slovénie, Chypre et Malte).

Il y à déjà un treizième candidat, la Turquie, avec lequel des négociations ne sont pas encore entamées. L'au-delà n'est pas très clair.

Turquie. Crédits: Commission européenne

Il est vrai que nous sommes en train de négocier des accords d'association et de stabilisation avec des pays des Balkans qui voient leur avenir dans le développement de l’Union européenne. De toute façon, le débat à propos des frontières de l'Union européenne n'est pas à l'ordre du jour.

Nous avons un rôle dans les négociations d'adhésion des pays candidats, pour lesquelles une feuille de route a été arrêtée. Après les Suédois, les Belges vont faire leur part en cherchant à jouer le rôle d'un intermédiaire honnête. Chaque pays doit avancer à son rythme, il faut éviter de faire des "paquets politiques" – nous ne sommes pas encore entrés dans la phase finale des négociations.

Quid de la Russie ?

Si nous percevons la Russie comme une priorité diplomatique, c'est parce que le précédent élargissement - avec la Suède et la Finlande - a rapproché géographiquement l'Union européenne de la Russie. Le prochain élargissement, avec des pays d'Europe centrale et orientale, le fera d'autant plus - ne serait-ce qu'en matière de dépendance énergétique. C'est donc une nécessité absolue pour l'Union européenne que de veiller à développer de bonnes relations avec la Russie. La présidence soumettra un plan d’action relatif à la mise en œuvre d’une stratégie commune Union européenne - Russie.

Russie, campagne en 1986. Crédits: Pierre Verluise

Dans le cadre du Sommet qui réunira l’Europe et la Russie au mois d’octobre 2001, l’attention ira principalement aux relations économiques entre les deux parties, aux conséquences de l’élargissement de l’Union européenne, en particulier pour l’enclave de Kaliningrad, à l’élaboration d’une politique européenne de sécurité et de défense ainsi qu’à des questions liées à la justice et aux affaires intérieures. Dans le cadre du dialogue politique avec la Russie, les questions de la stabilisation de la situation dans le Caucase et du renforcement de l’Etat de droit seront également abordées.

La dimension sociale

Quatrièmement : l’Europe sociale, dont l'emploi. Dans le cadre du processus engagé depuis 1997, la présidence belge a reçu à Stockholm le mandat d'améliorer les indicateurs aussi bien quantitatifs que qualitatifs en matière d'emploi. Jusqu'à présent, les critères restent essentiellement quantitatifs, mais la Belgique s’engage à faire évoluer les indicateurs dans une direction aussi qualitative. En effet, il faut non seulement augmenter la quantité d'emplois créés, mais il faut aussi veiller à améliorer la qualité du travail. Nombre d'emplois créés ces dernières années étaient précaires. Un statut précaire implique une incertitude au niveau de la consommation et pèse en conséquence sur la croissance économique.

Par ailleurs, la Présidence belge essayera de parvenir à un accord sur des objectifs communs concernant la question des retraites. Nous croyons que le processus de coordination ouvert peut permettre d'avancer sans heurter de sensibilités nationales ou de groupes de la population. Pour autant, l'Union européenne considère que la politique familiale - qui est l'autre manière de voir le problème - reste du domaine des politiques nationales.

Vers une politique commune de l'immigration ?

Cinquièmement : le secteur Justice et Affaires intérieures. Nous allons notamment organiser une grande conférence sur les migrations. Nous croyons, notamment, qu'il faut harmoniser entre États membres les procédures d'asile. Sinon, nous risquons de tomber dans le piège d'une forme de concurrence, où des mesures prises dans un pays peuvent susciter une réorientation des flux de demandeurs d'asile vers d'autres pays. La présidence accordera la priorité à l’élaboration d’une politique commune en matière d’asile et de migration. Pour ce qui est de l’asile, l’accent sera mis sur l’harmonisation des procédures d’octroi et sur l’accueil des réfugiés. En effet, les réfugiés ont droit à la protection de l’Union européenne. Ce principe ne peut être remis en question et certainement pas cette année qui nous verra célébrer le 50ème anniversaire de la Convention de Genève. En revanche, il importe également de dégager une répartition plus équitable de la charge et de déterminer avec plus de précision à quel Etat membre revient la responsabilité de traiter la demande d’asile.

Pour ce qui est de l’immigration, une première impulsion sera donnée en faveur de l’élaboration d’une politique d’ensemble tenant compte des multiples facettes du problème : la prévention et le développement de partenariats avec les pays d’origine, la gestion des flux migratoires, l’intégration, l’emploi.

La présidence intensifiera la lutte contre l’immigration illégale, certainement en ce qui concerne la traite des êtres humains. Les Etats candidats à l’adhésion doivent être associés au renforcement de la réglementation commune pour le contrôle des frontières extérieures de Schengen. En effet, ils seront à l’avenir intégrés dans le système de contrôle, avec le soutien de l’Union européenne.

Nous voudrions aussi mettre en place sous notre présidence Eurojust, une agence chargée de réunir des juges d'instructions disposant de mandats pour agir au niveau européen. En effet, la criminalité ordinaire ou financière ne respecte pas les frontières. Dans certaines affaires, pouvoir mener des enquêtes au niveau européen pourrait accélérer le travail de la justice. L’objectif d’Eurojust est de renforcer la collaboration pénale entre les Etats membres ainsi que la lutte contre le crime international. Eurojust est ainsi appelé à devenir l’équivalent judiciaire d’Europol.

L'euro

Sixièmement : l'introduction de l'euro et la promotion d'une croissance économique durable et d'une politique économique commune. Il faut savoir que la Suède n'étant pas membre de la zone euro, la Belgique assure déjà depuis le 1er janvier 2001 la présidence de l'eurogroup pour une durée exceptionnellement prolongée à un an.

Le second semestre 2001 est une phase de mise en œuvre. Les campagnes d'information seront organisées principalement par les pays concernés. L'eurogroup aura une mission d'étalonnage, pour voir quelles sont les meilleures méthodes, afin d'arriver aux meilleurs résultats au moment clé. Il faudra une attention particulière pour les retraités et les Petites et Moyennes Entreprises.

L'environnement

Septièmement : le développement durable. Les questions environnementales doivent être intégrées dans toutes les politiques de l'Union européenne, y compris dans la politique de transport. Nous espérons que le deuxième paquet "Sécurité maritime" sera adopté durant la présidence belge. Il y aura ensuite un troisième paquet, car il s'agit d'un processus graduel.

. Un état d'esprit

En guise de conclusion, il est important de savoir qu'une Présidence de l'Union européenne dirige les travaux du Conseil européen, tout en étant une composante du triangle institutionnelle, avec le Parlement européen et la Commission. Nous sommes donc un acteur, entre autres.

Lors de la présentation des priorités de la Présidence belge une certaine presse française a critiqué le fait que nous n'ayons pas de priorités plus pointues. C'est parce que nous travaillons dans la continuité, en équipe avec les autres institutions communautaires et quatorze autres pays membres. Une présidence a un rôle d'impulsion important et crucial, c'est vrai, mais pendant une période limitée à six mois, dans un cadre institutionnel qui nous oblige à composer avec les autres, pour servir les intérêts de l'Union européenne.

Dans le cadre de sa présidence, la Belgique entend enregistrer des progrès dans tous les domaines de compétence relevant de l’Union européenne. L’Union européenne doit ainsi gagner en transparence, en efficacité, en cohérence et en fermeté et jouir d’une plus grande légitimité démocratique.

Bart Ouvry, Ministre Plénipotentiaire

Entretien avec Pierre Verluise

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Biographie de Bart Ouvry, diplomate belge, Ministre Plénipotentiaire

 

 

 
  • Né le 1.2.1961.

  • 1982 : Etudes d’histoire moderne et de sciences de communication (1985) à l’Université de Gand (Belgique).

  • 1986 : Entrée dans la carrière diplomatique belge.

  • 1988 : En poste au Koweït.

  • 1990 : Membre du Cabinet Commerce Extérieur, à Bruxelles (Belgique).

  • 1991 : Représentant Permanent adjoint près de l’AIEA à Vienne (Autriche).

  • 1995 : Conseiller à la Représentation de la Belgique près de l’Union Européenne à Bruxelles.

  • 1997 : Adjoint du Directeur de la Coordination européenne au Ministère des Affaires Étrangères, à Bruxelles.

  • Depuis juillet 2000, Ministre Plénipotentiaire à l’Ambassade de Belgique à Paris (France).

 

 

 

 

 

 

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