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www.diploweb.com Géopolitique de l'Europe et de la Turquie

  Enrichissements progressifs et appauvrissements relatifs,

par Pierre Verluise, spécialiste de géopolitique 

 

Comment la hiérarchie de la richesse a-t-elle évoluée  durant la préparation du plus important élargissement communautaire jamais réalisé ? Cette étude amène à une nouvelle représentation de la répartition du PIB par hab. en SPA à l’ouest de l’Eurasie. Alors que les habitants des poids lourds économiques comme l’Allemagne, la France et l’Italie s’appauvrissent de manière relative, des Etats entrés plus récemment dans l’UE améliorent leur classement, comme la plupart des candidats pour 2004. Ce qui témoigne, d’une certaine façon, de la dynamique vertueuse de l’intégration communautaire mais doit amener certains  pays fondateurs à s’interroger  sur leur mode de fonctionnement. Faire de "l'Europe" un bouc émissaire reste un peu court.

Cette étude est accompagnée de trois cartes et d'un graphique.

Biographie de l'auteur en ligne

Notes de la partie ci-contre:

(1)EUROSTAT, Statistiques en bref, Economie et finances, 53/2004. Prix et parités de pouvoir d’achat, Silke Stapel, Jarko Pasanen et Sebastian Reineke, « Parités de pouvoir d’achat et indicateurs économiques dérivés pour l’UE, les pays candidats et l’AELE. Résultats définitifs pour 2002 et résultats provisoires pour 2003 », 8 pages.

(2) INED, Population et sociétés, « Tous les pays du monde (2003) », Gilles Pison, n° 392, juillet – août 2003, 5 p. Population estimée pour mi-2003.

 

Depuis 1995, qui s’enrichit et qui s’appauvrit en Europe ? Pour l’Union européenne, cette date correspond au début des négociations d’adhésion de plusieurs candidats pour 2004 ou 2007. Comment les pouvoirs d’achat ont-ils évolués dans les pays membres et dans les pays candidats ? Cette étude apporte des éléments de réponse surprenants à partir de trois cartes et d’un graphique. Comment ces représentations sont-elles construites ? 

Sources 

Grâce à Eurostat, nous disposons du PIB par habitant en SPA (UE25 = 100) pour l’UE25, les pays candidats ( Bulgarie, Roumanie, Croatie, Turquie) et l’AELE, à l’exception du Liechtenstein. Cette source (1) propose des résultats définitifs pour les années 1995 à 2002 et des résultats provisoires pour 2003.

Parce qu’un PIB par habitant peut faire illusion s’il n’est pas rapporté à une population, nous le mettrons en relation avec la population mi-2003 de chaque Etat présenté, à partir des estimations de l’Institut national des études démographiques (2).

Etat des lieux provisoire en 2003

 

Afin d’avoir en tête les données les plus récentes – mais provisoires – il importe de débuter le propos par une première carte intitulée : « Europe et Turquie : PIB en SPA en volume total par Etat en 2003, base 100 = UE25 »

  Date de la mise en ligne: fin mai 2005

 

 

 

   

         

Mots clés - key words (première partie) : pierre verluise, géopolitique, économie, géographique, science politique, histoire, relations internationales, europe, union européenne, ue25, pays candidats, pays membres de l’union européenne, aele, produit intérieur brut par habitant, pib en spa, eurostat, ined, 1995, 1996, 1997, 1998, 1999, 2000, 2001, 2003, 2004, 2005, population, enrichissement, appauvrissement, croissance économique, élargissement communautaire, institutions, représentations.

Note de la partie ci-contre: 

(1) Sauf pour Malte pour qui les données communiquées débutent en 1999.

 

Légende de la carte ci-dessus:

. La hauteur de chaque parallélépipède est proportionnelle au PIB par habitant en SPA pour l’année 2003.

.  La surface de chaque carré est proportionnelle à la population estimée mi-2003 de l’Etat concerné.

.  Sur la carte, le volume représenté à droite correspond à la population moyenne des Etats de l’UE25 (18,15 millions), calculée en divisant la population totale de l’UE25 par son nombre d’Etats. La hauteur de ce volume correspond à la base 100 du PIB pour l’UE25 en 2003.

. Les couleurs du fond de carte indiquent la relation à l’UE. En blanc, hors UE (Islande, Norvège, Suisse). En gris foncé, les six Etats fondateurs de la CEE en 1957. En gris moyen le reste des Etats de l’UE25. En gris clair les 4 candidats. N.B. Il en va de même pour les deux cartes suivantes.

Commentaire de la carte « Europe et Turquie : PIB en SPA en volume total par Etat en 2003, base 100 = UE25 »

Ce mode de représentation permet de voir pour chaque Etat le poids relatif de sa population et le poids relatif de son économie.  

Comment s’organise cet espace ? La mégalopole européenne compte visiblement le Royaume-Uni, le Danemark, les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg, l’Allemagne, la  France, l’Autriche et l’Italie. Hors UE, le poids économique de la Suisse l’intègre de fait dans cette mégalopole. Autour de cette zone apparaissent des périphéries différenciées.

La disponibilité d’une série cohérente de données définitives remontant à 1995 (1) permet maintenant de découvrir les dynamiques qui se cachent derrière « l’instantané » des données provisoires 2003. Autrement dit, comment la hiérarchie de la richesse a-t-elle évoluée  durant la préparation du plus important élargissement communautaire jamais réalisé ?  

Pour cela, découvrons la deuxième carte : « L'Europe  et la Turquie:  évolution du PIB par hab. en SPA, 1995-2003, base 100 UE25» 

   

 

 

 

   

         

Mots clés - Key words (deuxième partie): cartes, cartographie, groupes, chiffres, données statistiques, gagnants, perdants, eurasie, classement, hiérarchie, pays fondateurs de la cee , mégalopole européenne, périphéries de la mégalopole européenne, europe balte et centrale, pays d’europe centrale et orientale, peco, évolution, progrès, dynamique, crise, variations, Luxembourg, norvège, irlande, suisse, danemark, autriche, pays-bas, islande, royaume-uni, belgique, suède, finlande, france, allemagne, italie, espagne, chypre, grèce, slovénie, malte, portugal, république tchèque, hongrie, slovaquie, estonie, pologne, lituanie, croatie, lettonie, roumanie, bulgarie, turquie.

 

Légende de la carte ci-dessus

. La surface de chaque carré est proportionnelle à la population estimée mi-2003 de l’Etat concerné.

. La hauteur de chaque parallélépipède est proportionnelle au PIB par habitant en SPA pour l’année 2003. Le volume représenté correspond donc à l’année 2003.

. La face supérieure de chaque parallélépipède correspond au sens de l’évolution du PIB par hab. en SPA de 1995 à 2003. 

- En rouge, les pays dont le PIB par hab. en SPA a progressé, quelle que soit la valeur de cette progression.

- En bleu, les pays dont le PIB par hab. en SPA a diminué, quelque soit la valeur de cette diminution.

Commentaire de la carte « L'Europe  et la Turquie:  évolution du PIB par hab. en SPA, 1995-2003, base 100 UE25» 

Cette carte met évidence la régression du PIB par hab. en SPA des Etats suivants : Allemagne, France, Belgique et Italie. Soit, quatre des six pays fondateurs de la CEE. Ce qui justifie le choix d’indiquer le territoire de ces pays par un grisé spécifique sur le fond de carte. C’est une des informations majeures de cette étude. Font exception le Luxembourg et les Pays-Bas. La régression des quatre Etats fondateurs mentionnés semble se propager à certains pays limitrophes : Danemark,  République tchèque, Autriche et Suisse (hors UE).  

Les pays à la périphérie du groupe précédent paraissent avoir mieux profité depuis le milieu des années 1990. Ceci est particulièrement vrai pour les derniers pays entrés, à l’exception de la République tchèque, Malte et Chypre. La première souffre peut-être de la proximité de l’Allemagne. Les deux îles méditerranéennes subissent notamment les effets indirects du 11 septembre 2001 sur les flux touristiques.  

Nuances

Si la deuxième carte a le mérite d’apporter une représentation aisément compréhensible de l’orientation des dynamiques d’enrichissement ou d’appauvrissement relatifs, elle manque d’informations quantitatives puisqu’on ignore l’importance de la variation positive ou négative. Afin de proposer ensuite une troisième carte à ce propos, il convient d’étudier maintenant les variations des données au moyen d’un graphique : « UE25, candidats et AELE : PIB en SPA par hab. en 2003 ».

   

 

       

         

 

Légende du graphique ci-dessus

L’organisation du graphique a été faite en quatre groupes distincts : UE15, entrants 2004,   candidats, Etats d’Europe hors UE.

Pour chacun de ces groupes la hiérarchie a été crée sur la valeur du PIB par hab. en SPA en 2003.

La partie rose, lorsqu’elle est à gauche de l’axe des abscisses correspond à la valeur d’une régression du PIB par hab.  entre 1995 et 2003.

Lorsqu’elle est à droite de l’axe de l’abscisse, la couleur rose correspond au gain de la valeur du PIB entre ces deux dates.

Dans tous les cas de figure, l’extrémité droite de chaque barre noire correspond à la valeur du PIB par hab. en SPA en 2003. De ce fait, lorsqu’il y a eu perte de PIB (alors la partie rose de la barre est à gauche de l’axe), la valeur totale du PIB en 1995 correspond également à la somme rose + noir.

Commentaire du graphique « UE25, candidats et AELE : PIB en SPA par hab. en 2003 »

 

UE15

11 pays sur 15 de l’UE15 sont au-dessus de 100 (moyenne UE25)

Au sein de l’UE15 on distingue des perdants et des gagnants.

Les grands gagnants sont le Luxembourg (+ 36 points de pourcentage) et l’Irlande (+34). Les gagnants sont l’Espagne (+11), la Grèce (+9), le Royaume-Uni (+8) et la Finlande (+7).

Les pays relativement stables à tendance gagnante sont les Pays-Bas (+1) et le Portugal (+1).

Les pays relativement stables à tendance perdante sont le Danemark (-2), la Belgique (-2), la Suède (-3) et la France (-4).

Les perdants sont l’Autriche (-7), l’Italie (-8) et l’Allemagne (- 11). 

 

Les entrants en 2004

Les perdants sont la République tchèque (-1), Malte (-3 pour la période 1999 à 2003) et Chypre (-3).

Les gagnants sont la Pologne (+5), la Slovaquie (+7) et la Slovénie (+9),

Les grands gagnants sont les pays Baltes et la Hongrie : Hongrie (+ 11) , Lettonie (+11), Lituanie (+12), Estonie (+15).

 

Les candidats

Les perdants sont la Bulgarie (-1) et la Turquie (-2). (Voir une carte: "Les Turcs en Europe occidentale")

Les gagnants sont la Roumanie (+5, pour la période 2000 à 2003) et la Croatie (+9)

 

Les autres Etats, hors UE

La Norvège est gagnante (+15), en partie grâce aux hydrocarbures de la Mer du Nord.

Les perdants sont l’Islande (-6) et la Suisse (-15). La dégringolade suisse est une autre information surprenante de ces données.  

Il faut maintenant conclure cette étude en spatialisant ces données avec une carte de synthèse: « Europe et Turquie: la valeur de l'augmentation ou de la diminution du PIB par hab. en SPA UE25 base 100, de 1995 à 2003 ».

   

 

 

 

   

         

 

 

 

 

 

 

Notes de la partie ci-contre

1. Pierre Antoine Delhommais, « Lettonie, Lituanie, Pologne… les nouveaux Etats membres affichent une croissance insolente »,  in Le Monde, 7 avril 2005, p. 22.

2. Marc Roche, « Bien que robuste, l’économie britannique montre des signes d’essouflement », in Le Monde, 11 mai 2005, p. 23.

 

 

Légende de la carte ci-dessus

. La surface de chaque carré est proportionnelle à la population mi-2003 de l’Etat concerné.

. La hauteur de chaque parallélépipède correspond pour les Etats dont le PIB par hab. en SPA diminue (bleu) à sa valeur en 2003. Pour les Etats dont le PIB par hab. en SPA a augmenté de 1995 à 2003 (rouge) il correspond à sa valeur en 1995.

. Le volume de la pyramide convexe (rouge) ou concave (bleu) correspond au volume global du PIB gagné ou perdu. Le volume d’une pyramide étant égal à la surface de sa base multipliée par le tiers de sa hauteur, pour représenter un gain ou une perte, cette hauteur est multipliée par trois. Pour les pyramides concaves, le creux correspond au volume global de la perte. 

Commentaire de la carte «Europe et Turquie: la valeur de l'augmentation ou de la diminution du PIB par hab. en SPA UE25 base 100, de 1995 à 2003»

Cette dernière carte met en évidence que beaucoup de pays situés « à la périphérie » de l’UE sont en fait économiquement plus dynamiques pour la période 1995-2003 que certains Etats du « vieux centre continental ». Sauf la Suède et l’Autriche, les pays qui ont le plus progressé sont généralement ceux qui appartiennent aux dernières générations d’arrivants dans l’UE. Cela est vrai du Royaume-Uni qui se trouve hors de la zone euro, de l’Irlande, de l’Espagne, du Portugal, de la Grèce, de la Finlande et de tous les pays d’Europe balte et centrale entrés en 2004 dans l’UE, sauf la République tchèque.

On observe aussi que l’arc de pauvreté relative constitué par les pays d’Europe balte et centrale est marqué depuis le milieu des années 1990 par une progression souvent significative du PIB par hab. en SPA. Il convient, cependant, de ne pas oublier que la « transition » a généralement été marquée durant la première moitié des années 1990 par une importante régression du PIB de ces Etats. En outre, il ne faut pas perdre de vue que le PIB par hab. en SPA de ces pays étaient souvent en 1995 entre le tiers et la moitié de la moyenne UE25. Ce sont ceux dont le niveau de départ était le plus bas qui ont connu la plus forte progression. Enfin, il importe d’avoir à l’esprit que la répartition de cet enrichissement reste très inégale, une minorité accaparant le plus souvent une part considérable des gains.  

Quant à la Turquie, chacun constate qu’elle semble à la traîne. 

Conclusion

Cette étude nous amène donc à une nouvelle représentation de la répartition du PIB par hab. en SPA à l’ouest de l’Eurasie. D’un côté, les habitants des poids lourds économiques comme l’Allemagne, la France et l’Italie s’appauvrissent de manière relative. Il est vrai qu’au fur et à mesure que le PIB moyen progresse en Europe, les Etats affichant un PIB par hab. en SPA à peu près stable apparaissent en régression. D’un autre côté, les Etats entrés plus récemment dans l’Union européenne améliorent généralement leur classement, comme la plupart des Etats candidats pour 2004. Ce qui témoigne, d’une certaine façon, de la réussite de l’intégration communautaire mais doit amener certains  pays fondateurs à s’interroger sur leur mode de fonctionnement. Faire de "l'Europe" un bouc émissaire reste un peu court.  

Selon les données provisoires communiquées par la Commission le 4 avril 2005, les pays d’Europe balte et centrale devraient connaître durant l’année 2005 une croissance du PIB plus élevée que le reste de l’Union européenne (1). En revanche, l’économie britannique aborde peut-être une dégradation de sa conjoncture (2).

Pierre Verluise Manuscrit clos le 12/05/2004

Consulter une étude complémentaire, sur la période 1996-2006: "Quelles sont les dynamiques socio-économiques à l'oeuvre en Europe ? par Pierre Verluise. Avec deux cartes inédites.

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