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"Puissances et influences. Annuaire géopolitique et géostratégique 2000 - 2001",

sous la direction de A. Blin, G. Chaliand et F. Géré

 

Mots clés - key words: arnaud blin, gérard chaliand, françois géré, beaumarchais center for international research, fondation pour la recherche stratégique, centre européen d'étude des conflits, après Guerre froide, monde émergent, occident, paix, guerre, menaces, union soviétique, russie, post-soviétisme, hégémonie américaine, europe, états-unis, démocratie, liberté, sécurité, renseignement, terrorisme, kosovo, balkans, rand corporation, americain enterprise institute, heritage fondation.

Voir une présentation de l'Atlas du nouvel ordre mondial publié par G. Chaliand en 2003

Ed. Mille et une nuits, 2000

Cet ouvrage est le fruit d'une collaboration entre le Beaumarchais Center for International Research et les éditions Mille et une nuits qui ont financé et réalisé cette publication depuis Washington et Paris, ainsi que la Fondation pour la recherche stratégique, en particulier son Centre européen d'étude des conflits. De nombreux articles ont été remarquablement traduits de l'anglais par Michel Valois.

Vingt-quatre auteurs rassemblent ici leurs analyses du monde émergent d'après la Guerre froide, brossant un tableau se refusant à tout alarmisme, excepté sur quelques sujets précis, par exemple en ce qui concerne le trafic de drogues ou la progression du piratage maritime. Le sommaire retient six thèmes : les régions, la religion, les technologies, les nouveaux risques et les nouvelles menaces, l'avenir de la guerre, les perspectives de paix.

Un temps de paix

Gérard Chaliand écrit dans son introduction : "Bien qu'il soit malséant de le proclamer, surtout si l'on espère obtenir des crédits de recherche, le monde actuel ne présente aucune menace externe remettant en cause la paix et la sécurité de l'Occident au sens plein de ce terme, c'est à dire de menace pouvant déstabiliser nos pays de façon réelle et non fantasmagorique. Jamais au cours du siècle la paix n'a paru mieux assurée que depuis l'effondrement de l'Union soviétique. Nous vivons la pax americana, conséquence d'une hégémonie dont la condition était la disparition de tout Etat d'égale puissance. Les risques plutôt que les menaces n'ont pas entièrement disparu pour autant, et il n'y aurait là rien que de très normal si nos sociétés ne s'étaient habituées à être surprotégées : l'Occident pourrait être caractérisé par son refus général de la mort. A cet égard, les Etats-Unis sont en avance sur l'Europe, mais tout annonce que nous nous dirigeons probablement vers la même évacuation psychologique d'un phénomène pourtant naturel. Les démocraties occidentales paraissent avoir pour leurs sociétés un double projet de consommation et de jeunesse illimitées qui pourrait être une des causes de leur fragilité psychologique" (p.15).

Les démocraties doivent pourtant être prêtes à se défendre

A la lecture de la guerre du Kosovo, Seth Cropsey - Visiting Fellow, The American Enterprise Institute (Washington) - attire l'attention sur un danger beaucoup plus réel: "S'habituer à l'idée que nous pouvons gagner les guerres sans nous battre est la recette assurée du désastre pour le jour où nous nous retrouverons dans une situation où nous n'aurons pas d'autre choix que celui de nous battre. […] La démocratie sera toujours sous la menace de ceux dont le pouvoir personnel est mis en péril par son existence même : elle doit vaincre ou périr" (p. 139 et 144).

A ce propos, de quoi avons-nous besoin pour gagner les guerres de demains ? Laurent Muriawec - Senior Policy Analyst, Rand Corporation (Washington) - répond :"D'acuité stratégique, d'une compréhension profonde, anthropologique et culturelle des forces ennemies, de renseignement de haut niveau. Tout ceci se situe en amont de la bataille. De plus en plus, la bataille est gagnée avant l'affrontement" (p. 148). Ce qui paraît essentiel à ce propos, c'est l'avancée scientifique et technique dans le domaine des communications, de la biologie et de l'armement dont bénéficie l'Occident sur le reste du monde.

Liberté et sécurité

Arnaud Blin - directeur du Beaumarchais Center for International Research - développe une intéressante réflexion sur la relation entre démocratie et paix. En effet, la fin du XX e siècle apparaît à la fois marquée par une augmentation du nombre de régimes démocratiques - 116 en 1999 au lieu de 69 dix ans plus tôt (p.196 et 197) - et par l'établissement de relations pacifiques entre ces pays. Pour autant, "les adeptes de la paix démocratique sont loin d'avoir gagné la bataille de la paix. Des obstacles considérables demeurent, notamment sur le continent eurasiatique, pour que s'impose une telle paix. Deux acteurs principaux, la Russie et la Chine, risquent de freiner la progression démocratique et d'injecter une forte dose d'instabilité à l'ensemble du continent" (p. 156). On notera à ce sujet que la Russie consacre en 1995 11 % de son PNB à des dépenses militaires, alors que la France et les Etats-Unis y consacrent respectivement 3,1% et 3,8%. (cf. tableau p. 176 et 177). "En l'an 2000, nul ne peut nier que les zones démocratiques sont aussi des zones de paix. Pour y maintenir la paix, il faut y préserver la démocratie, et vice-versa. Ainsi, dans ces régions, le concept de sécurité est-il désormais lié à celui de démocratie et de liberté. C'est pourquoi l'Europe et l'Amérique, par exemple, ont intérêt à consolider leurs zones de sécurité en promouvant la démocratie à leurs périphéries". (p. 158)

Il subsiste, en effet des risques. François Géré, directeur scientifique de la Fondation pour la recherche stratégique note, par exemple : "La persistance du déclin russe constitue par elle-même une cause de conflit prolongé, multiforme et endémique. Il serait donc préférable de chercher à en mesurer les implications durables, exercice déjà difficile, au lieu de s'obstiner à croire que le redressement est au coin de la rue. Il serait temps de cesser de s'aveugler sur les chances de la démocratie en Russie qui ,culturellement, persiste à considérer que la violence sert la politique et plus encore qu'elle l'accompagne dans son existence même. La leçon mérite une attention particulière quand on prétend intervenir dans les Balkans" (p.11).

Un peu de bon sens ne nuit pas

Dans un article évoquant l'aide financière internationale à la Russie, Ariel Cohen - Research Fellow in Russian and Eurasian Studies, The Heritage Fondation (Washington) - écrit : "Les gouvernements occidentaux et le FMI ont commis ce qui est peut-être l'une des plus importantes bévues de l'histoire de l'aide financière internationale en accordant des prêts à un gouvernement de Moscou et à une Banque centrale de Russie corrompus. […] Il apparaît que les gouvernements occidentaux, et en particulier les responsables du ministère des Finances américain et du FMI, ont fait preuve de laxisme en matière de contrôle préalable et de devoir fiduciaire, voire qu'il n'ont effectué aucun contrôle" (p. 39). A moins que ce ne soit encore plus complexe. Il conclut avec bon sens : "Quant à la Russie, on pourrait peut-être mieux l'assister actuellement sans l'octroi d'une aide financière au gouvernement central de Moscou. Un sérieux nettoyage des écuries d'Augias est nécessaire pour réduire la corruption qui sévit à la Banque centrale russe et au gouvernement fédéral. Lorsque des dispositions adéquates garantissant la transparence et la saine gestion des entreprises auront été mises en place, les investissements intérieurs et étrangers pourront devenir le moteur de la croissance économique russe". (p. 40).

Au total, un lecture stimulante pour qui veut comprendre les lignes de force du monde émergent de l'après Guerre froide.

Pierre Verluise

 
 

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