Les livres géopolitiques sont nécessaires à la compréhension du monde. Le Diploweb.com en présente ici une veille spécialisée, unique sur la Toile, vue chaque mois par plusieurs milliers de personnes qualifiées. Le Diploweb.com ne touche aucune commission des éditeurs ou libraires.
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. Anastasia Fomitchova, Volia - Engagée volontaire dans la résistance ukrainienne, Paris, Grasset, septembre 2025.
« Volia », un mot ukrainien qui n’a pas d’équivalent en français mais qu’on pourrait traduire par “volonté » et “liberté”. Un mot qui incarne à lui seul la détermination de tout un peuple, et qui sert de fil rouge au récit qu’Anastasia Fomitchova nous livre ici. En décidant de raconter son singulier parcours, celui d’une jeune femme prise dans la guerre, de témoigner de son engagement, de l’horreur qu’elle a vécue sur le champ de bataille, de redonner chair et corps aux disparus, de percer le blindage du silence et de l’innommable, Anastasia poursuit par les mots le courageux combat qu’elle a commencé aux premières heures de l’invasion russe. Tout commence pour elle en 2016, deux ans après l’annexion de la Crimée, alors qu’elle est étudiante à Paris. Après la mort de ses amis, auprès desquels elle milite dans la diaspora, elle commence à accompagner des groupes de volontaires qui approvisionnent les unités militaires sur la ligne de front, à l’Est du pays. L’année suivante elle devient infirmière de combat bénévole. La guerre ne la quittera plus. En février 2022, deux jours après le début de l’invasion à grande échelle, elle retourne en Ukraine et participe à la défense de Kyiv, du front Est, et à la contre-offensive sur Kherson. Plus qu’un récit sur la résistance ukrainienne, Volia est aussi une plongée historique dans les racines d’un conflit qui dure depuis plus d’un siècle. A travers son histoire personnelle et familiale, c’est l’héritage violent de l’URSS qui rémane : celui de l’Holodomor – la grande famine orchestrée par Staline qui a tué des millions d’Ukrainiens, en passant par les rouages de la nomenklatura soviétique à laquelle le grand-père d’Anastasia appartenait, sans oublier la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, qui a poussé sa mère à partir en France dans les années 1990. Un récit poignant et terrible qui résonne comme une dette envers ceux qui se sont sacrifiés pour que l’Europe reste libre.
. Maxime Launay, La gauche et l’armée en France. De Mai 68 à nos jours, Paris, Nouveau Monde, novembre 2025.
Comment expliquer l’évolution de la relation entre la gauche et l’armée, longtemps antagoniste, vers un consensus sur la défense nationale ? Alors que la France connaît au lendemain de Mai 68 une crise antimilitariste inédite, celle-ci paraît aujourd’hui largement oubliée. Pourtant, en inscrivant cette histoire dans le temps long de la société française et de son armée (montée de l’individualisme, recul du fait militaire, mémoire douloureuse de la guerre d’Algérie), l’auteur éclaire le passage d’une forte politisation des questions de défense — marquée par la contestation du service militaire, la mobilisation du Larzac ou encore l’opposition aux essais nucléaires — à une désidéologisation du rapport de la gauche à l’armée symbolisée par l’arrivée des socialistes au pouvoir en 1981. S’appuyant sur des sources inédites (témoignages oraux, archives de l’Élysée, du Parlement, des partis politiques, du ministère des Armées et du Renseignement), l’ouvrage analyse l’acculturation croisée entre militaires et responsables de gauche, et la manière dont ils instituèrent une relation décomplexée. Il montre surtout que, malgré les réformes entreprises sous François Mitterrand et ses successeurs, la gauche fut d’abord la continuatrice de l’héritage gaulliste instauré dans le cadre de la Ve République. Il livre par là une réflexion sur la forte dimension politique des questions de défense malgré l’atonie actuelle du débat public.
. Gaëtan Pinalie, Eau et pouvoir - La guerre environnementale et géopolitique d’un modèle économique assoiffé, Paris, Publishroom, octobre 2025.
« Une empreinte en eau à la base de tout » Nourriture, énergie, industrie, économie, bien vivre en ville, bien-être de la planète, géopolitique, immigration, guerres… Tant de sujets complexes, rarement abordés ensemble et pourtant indissociables et corps dépendants. Cette eau, que nous consommons tous quotidiennement et paradoxalement connaissons si peu : directement à travers nos besoins (boire, se laver, cuisiner, nettoyer etc.) et indirectement à travers le processus de fabrication de nos achats (nourriture, électricité, téléphone, vêtements etc.), que nous exportons parfois, et dont nous bénéficions le plus souvent depuis l’étranger. Les problèmes liés à la gestion et la raréfaction de l’eau dans le monde, à son partage et aux conséquences géopolitiques sont ici traités sous un prisme de lecture pratique et sans détours, afin d’éveiller les consciences, d’ouvrir les portes de la réflexion et des responsabilités de chacun : du capitaine d’industrie au politique, en passant par le particulier. Gaëtan offre des échantillons de compréhension, afin de faire de ces questions complexes des entrées simples et abordables par le biais de réflexions fondamentales parfois survolées à l’école, jusqu’à des sujets plus complexes permettant aux prochaines générations de dérouler le fil rouge des impacts de nos modes de vies sur nos villes et pays voisins, tant d’un point de vue écologique, politique, que socio-économique. Un livre qui nous pousse à nous poser des questions sur les responsabilités que nous avons vis-à-vis de l’autre, se trouvant le plus souvent au-delà de nos frontières géographiques et générationnelles. Un être Humain devenu la première force de transformation d’une planète qui gardera l’empreinte visible et profonde de son passage même après son extinction, et ce, principalement suite à la négligence de l’impact environnemental de ses modèles économiques, activités industrielles et comportements irresponsables.
. Andrea Lorenzo Capussela, The Republic of Innovation : A New Political Economy of Freedom, Cambridge, Polity, novembre 2025.
Nous nous accrochons à une idée déformée de la liberté. Être libre, pensons-nous généralement, signifie être sans contrainte. Cette croyance répandue rend nos sociétés moins justes, car elle ne tient pas compte du fait que la liberté d’agir peut signifier la liberté de dominer. Mais, comme le soutient Andrea Capussela dans cette combinaison très originale de philosophie et d’économie, ce n’est pas tout : cela nous rend également moins prospères. La véritable liberté, écrit Andrea Capussela, naît lorsque personne n’est soumis à la volonté d’autrui, qu’il s’agisse de la volonté d’un employeur, des géants de la technologie ou de la soi-disant élite. Une société qui aspire à cet idéal supérieur deviendra plus innovante, car un nombre croissant de personnes bénéficieront d’une sécurité suffisante pour s’épanouir, expérimenter et prendre des risques. Andrea Capussela entremêle la philosophie politique et les théories de la croissance économique, présentant la synergie entre les deux comme la base de programmes politiques susceptibles d’aider les démocraties occidentales à dépasser l’héritage du néolibéralisme et à surmonter leur crise.
. Liu Jieyu, Embedded Generations : Family Life and Social Change in Contemporary China, Princeton ; Princeton University Press, novembre 2025.
Avec Embedded Generations, Liu Jieyu propose une analyse complète de la vie familiale chinoise depuis la révolution communiste de 1949. S’appuyant sur l’analyse de 260 récits de vie et sur de riches données ethnographiques, elle retrace l’évolution des modes de vie des familles au cours des sept dernières décennies, à travers des étapes importantes telles que l’enfance, la cour et le mariage, la sexualité et l’intimité, mais aussi le vieillissement. En utilisant la génération, la fracture entre les zones urbaines et rurales et le genre comme prismes analytiques, elle propose un récit alternatif de la vie familiale chinoise, qui contredit les récits eurocentriques dominants sur la modernisation et l’évolution de la famille. S’opposant à l’idée que les changements sociaux et familiaux soient des progressions historiques linéaires, Liu Jieyu révèle un portrait familial fait de changements complexes, de continuité et de diversité. Plutôt qu’une transition simple du traditionnel au moderne et au postmoderne, elle soutient que les changements dans la vie familiale chinoise ont entraîné l’adaptation et la ‘remise au goût du jour’ des idées et pratiques traditionnelles afin de produire un bric-à-brac d’éléments modernes et traditionnels.
. Rime Allaf, It Started in Damascus : How the Long Syrian Revolution Reshaped Our World, Londres, Hurst, novembre 2025.
Pendant des décennies, les Syriens ont aspiré à une vie normale. Lorsque Bachar al-Assad a été renversé de manière inattendue en décembre 2024, ils ont célébré la chute d’une dictature dynastique. Mais alors qu’ils luttent pour obtenir justice, ils doivent composer avec l’héritage d’un combat pour la liberté commencé bien des années auparavant. Lorsque le règne violent de Hafez al-Assad a pris fin en 2000, beaucoup ont cru que son fils annonçait un changement. Mais Bachar a trahi ces espoirs. Lorsque les Syriens se sont finalement soulevés en 2011, ils ont été impitoyablement écrasés par son régime, soutenu par la Russie et l’Iran, et abandonnés par les puissances occidentales qui prétendaient les soutenir. Aujourd’hui, avec un nouveau pouvoir à Damas, le peuple peut-il forger la Syrie dont il rêve depuis un quart de siècle ? Rime Allaf, elle-même originaire de Damas, raconte une lutte pour la dignité qui a secoué le monde. Elle brosse un portrait intime d’une société dévastée et d’un peuple résilient déterminé à trouver la paix.
. Stephen Broadberry et Mark Harrison (dir.), Economic Warfare and Sanctions Since 1688, Cambridge, Cambridge University Press, novembre 2025.
Comment la guerre économique et les sanctions ont-elles été utilisées dans l’histoire moderne, avec quel succès et quelles conséquences imprévues ? Dans cet ouvrage, d’éminents historiens de l’économie apportent des réponses à travers des études de cas allant de la rivalité entre la Grande-Bretagne et la France au XVIIIe siècle à la guerre civile américaine, en passant par les deux guerres mondiales et la guerre froide. Ils montrent comment les pays confrontés à des mesures économiques ont réagi en résistant, en s’adaptant ou en cherchant à anticiper l’attaque afin de retarder ou de neutraliser temporairement ses effets. En coulisses, cependant, les mesures économiques ont façonné le cours de la guerre : elles ont influencé les plans de guerre, augmenté les coûts de mobilisation de l’adversaire et fait pencher la balance des résultats finaux. Cet ouvrage est le premier à combiner l’étude de la guerre économique et des sanctions, montrant les similitudes, les continuités profondes mais aussi les différences entre ces deux politiques.
. Pierre-Alain Coffinier, Le malaise russe. Carnet d’un "agent de l’étranger" dans la Russie de Poutine, éd. Cerf Patrimoine, 2025.
Bientôt quatre ans après le début de l’agression russe contre l’Ukraine, la Russie n’est pas aussi forte qu’elle veut le faire croire.
Le peuple russe n’a pas voulu la guerre : il la subit, sans se révolter encore, par crainte d’une répression féroce. Mais la crainte est des deux côtés : Poutine, l’artisan du chaos, se méfie de son propre peuple. C’est cette double crainte qu’analyse ici Pierre-Alain Coffi nier : il nous donne de comprendre les aspirations profondes du peuple russe.
« Il y a toujours eu une forme d’énigme autour du peuple russe depuis que la Russie s’est façonnée sous la poigne de ses tsars successifs. L’actuelle guerre en Ukraine n’a fait qu’épaissir ce mystère. […]
C’est tout le mérite du livre de Pierre-Alain Coffi nier que d’apporter à cette interrogation permanente une contribution toute fraîche.
Ces chroniques, nourries de cinq années à Ekaterinbourg à la tête du consulat de France, tissent un tableau très complet de la vie des Russes dans cette région immense de l’Oural et de la Sibérie, mais aussi de toute la Russie, à une période cruciale où ils sont particulièrement éprouvés. Parce qu’il a été à leur contact quotidien, il a pu se faire le témoin attentif de cette Russie la plus authentique […] De cette observation en continu il a tiré des leçons particulièrement pertinentes pour mieux comprendre les ressorts de la société russe. »
Pierre Vimont, ambassadeur de France.
Diplomate attentif aux drames humains, Pierre-Alain Coffinier était consul général à Ekaterinbourg lorsque Poutine a décidé l’invasion de l’Ukraine. Ses notes diplomatiques, vivantes et prises sur le vif, offrent un regard unique sur les Russes de l’intérieur face à la guerre. Elles suscitent immédiatement l’enthousiasme de ses collègues, des diplomates aux plus hautes sphères de l’État, sur un sujet fondamental trop souvent ignoré par la presse.
. Arthur Kenigsberg, « L’Europe de l’Est n’existe pas. Ces pays oubliés où se joue notre avenir », éd. Eyrolle, 2025.
Dépasser les vieux clichés et repenser notre rapport à ces pays essentiels On parle encore d’« Europe de l’Est », mais cette idée est un héritage trompeur de la guerre froide imposé par Staline. Contrairement au mythe de Yalta, le partage du continent ne fut pas un accord, mais une imposition brutale de l’URSS. La Pologne, la Hongrie, la Tchécoslovaquie (aujourd’hui République tchèque et Slovaquie), la Roumanie ou encore la Bulgarie ont ainsi été forcées de vivre sous le joug communiste. Après la chute du communisme en 1989, ces pays ont repris leur destin en main, mais en France, ils restent souvent perçus à travers de vieux clichés. Beaucoup ignorent que la Pologne est devenue la sixième économie d’Europe et que l’Estonie, tout comme l’Ukraine, est à la pointe de la cybersécurité. Ces pays, souvent perçus en France comme « en retard » sont en réalité des acteurs essentiels de la résilience européenne. L’essai d’Arthur Kenigsberg fait l’analyse de ces incompréhensions et de leurs conséquences afin de briser les stéréotypes et tracer une voie vers les opportunités françaises dans la région. Avec la guerre en Ukraine, ces territoires sont devenus un enjeu crucial pour l’avenir de l’Europe.
. Amina Hassani, La justice du capital. Quand les multinationales (dé)font la loi, Paris, La Fabrique, novembre 2025.
Des grandes entreprises qui font condamner des États pour avoir entravé leurs profits en adoptant des législations sociales ou environnementales : telle est la scène qui se rejoue quotidiennement dans les tribunaux privés de l’arbitrage d’investissement (ou RDIE, ‘Règlement des différends entre investisseurs et États’), pièce maîtresse du capitalisme globalisé. Façonnée au cœur des empires déclinants pour préserver, ‘par la magie du droit’, le pillage des ressources dans les pays décolonisés, cette justice du capital n’a cessé d’étendre sa toile par le truchement d’accords internationaux et de traités de libre-échange. Dans ses tribunaux, on tranche en secret des affaires qui concernent le plus grand nombre… au bénéfice des multinationales et des ‘marchands de droit’ qui font tourner la machine. Amina Hassani rassemble toutes les pièces de l’intrigue et montre comment l’arbitrage érode la souveraineté des États et dépossède les populations pour protéger la circulation et l’accumulation du capital en tout temps et en tout lieu. Alors que le scandale s’est fait jour, ses défenseurs rêvent d’étendre encore ses tentacules, menaçant tout projet de transition écologique et de justice sociale.
. Benjamin Wilson, Strange Stability : How Cold War Scientists Set Out to Control the Arms Race and Ended Up Serving the Military-Industrial Complex, Cambridge, Massachusetts, Harvard University Press, novembre 2025.
Les scientifiques disent-ils la vérité au pouvoir ? Pendant la guerre froide, un groupe de stratèges et de conseillers scientifiques l’affirmait. Se présentant comme des figures rationnelles et modérées, ils insistaient sur le fait que la destruction mutuelle assurée était la logique naturelle de l’ère atomique : tant que la dissuasion nucléaire était crédible, personne ne tirerait le premier. Cette doctrine, connue sous le nom de ‘stabilité stratégique’, est devenue le fondement du mouvement de contrôle des armements, valant à ses promoteurs une admiration généralisée en tant que penseurs indépendants et artisans inébranlables de la paix. Mais dans cette contre-histoire cruciale, Benjamin Wilson montre que nous les avons mal compris, eux et leurs efforts. Il révèle que les partisans du contrôle des arsenaux n’ont pas œuvré pour freiner la course aux armements nucléaires, mais pour marginaliser les approches plus radicales du désarmement. Strange Stability corrige avec force des décennies de mythification autour du contrôle des armements.
. Dani Rodrik, Shared Prosperity in a Fractured World : A New Economics for the Middle Class, the Global Poor, and Our Climate, Princeton, Princeton University Press, novembre 2025.
Lutter contre le changement climatique, sauver la démocratie et éradiquer la pauvreté sont des défis planétaires urgents, mais les dirigeants du monde entier continuent de mener des politiques périmées qui se concentrent sur l’un ou l’autre de ces objectifs tout en aggravant les compromis entre eux. Shared Prosperity in a Fractured World montre comment ces trois objectifs peuvent et doivent être conciliés. Dani Rodrik propose une nouvelle vision audacieuse de la mondialisation, dans laquelle nous accélérons la transition écologique pour parvenir à une planète durable, renforçons la classe moyenne pour restaurer les fondements de la démocratie et accélérons la revitalisation économique dans les pays en développement afin de mettre fin à la pauvreté. La montée de l’autoritarisme a démontré notre incapacité à apaiser les inquiétudes économiques. Le nationalisme économique a fait planer le spectre d’un protectionnisme accru et d’une détérioration des perspectives de croissance économique. Et l’automatisation et d’autres nouvelles technologies ont sapé les avantages d’une main-d’œuvre peu qualifiée et bon marché dans le secteur manufacturier et l’industrialisation axée sur l’exportation. Dani Rodrik révèle comment nous pouvons restaurer la prospérité grâce à de nouvelles formes d’action collaborative entre les secteurs public et privé, afin de promouvoir les énergies renouvelables et les industries vertes, les emplois de la classe moyenne et l’amélioration de la productivité dans les services à forte intensité de main-d’œuvre, même en l’absence de coopération mondiale. Il explique pourquoi ce nouveau type de mondialisation doit également reconnaître le désir légitime des gouvernements de poursuivre leurs intérêts économiques, sociaux et sécuritaires de manière autonome.
. David Marsh, Can Europe Survive ? The Story of a Continent in a Fractured World, New Haven, Yale University Press, novembre 2025.
L’Europe évolue aujourd’hui dans un monde en mutation rapide et polarisé, dominé par la rivalité sino-américaine. L’Union européenne et les États non membres qui l’entourent, malgré leurs succès initiaux après la chute du mur de Berlin, n’ont pas réussi à mettre en œuvre une stratégie pour prospérer au XXIe siècle. La sortie du Royaume-Uni de l’Union a affaibli les deux parties et l’invasion de l’Ukraine par la Russie a mis en évidence ses lacunes. Comment les États du continent devraient-ils se positionner dans les décennies à venir ? S’appuyant sur des archives inédites et des entretiens avec plus de 150 personnalités, David Marsh examine la crise actuelle de l’Europe, depuis la montée du populisme jusqu’au malaise franco-allemand, en passant par la rupture des relations avec la Russie de Poutine. Des failles apparaissent dans l’union monétaire, tandis que la lutte contre le changement climatique a eu un impact sur la croissance. Confrontée à son plus grand défi depuis la Seconde Guerre mondiale, l’Europe doit trouver de nouvelles réserves de résilience et rechercher de nouveaux partenariats internationaux pour assurer son succès.
. Raoul Delcorde, Suède – La lumière des silences, Bruxelles, Nevicata, novembre 2025.
Il fut un temps où le très progressiste royaume de Suède était considéré comme un modèle. Une économie dynamique au succès mondial, rythmée par les refrains disco du groupe Abba. Mais cette Suède-là existe-t-elle encore ? Face à la menace russe, le royaume a décidé d’intégrer l’OTAN. Des faits divers alarmants ont remis en cause le mythe d’une sociale-démocratie paisible. La Suède est un pays qui vit ses mutations dans le silence et la lumière des aurores boréales. Elle est aussi une puissance régionale qui a dessiné les contours de notre Europe. C’est ce mélange de discrétion, de grandeur et de volontarisme social ébranlé par la modernité que nous racontent ces pages. Ce petit livre n’est pas un guide. Il est un passeport pour comprendre les Suédois et percevoir ce qui se cache vraiment dans les brumes froides de la Scandinavie. Un grand récit suivi d’entretiens avec Christian Koninckx (historien), Kai Hammerich (chef d’entreprise et haut fonctionnaire) et Lena Anderson (auteure et journaliste).
. Branko Milanovic, The Great Global Transformation : National Market Liberalism in a Multipolar World, Londres, Allen Lane, novembre 2025.
Le néolibéralisme mondial est à bout de souffle, tandis qu’un nouvel ordre économique international s’installe. Les blocs commerciaux, les guerres tarifaires, les sanctions économiques et les champions nationaux ont le vent en poupe ; le nationalisme, les mouvements anti-immigration et l’extrême droite sont en plein essor. Le libéralisme est rejeté par la sphère civique, alors que le statu quo des cinquante dernières années s’effrite. Que reste-t-il dans son sillage ? S’appuyant sur des recherches originales, Branko Milanovic révèle les bouleversements qui façonnent notre monde. Il détaille les faits : comment la puissance économique croissante de l’Asie est en train de créer une nouvelle ‘classe moyenne’ mondiale dans le cadre de la plus grande redistribution des revenus depuis la révolution industrielle. Il explore nos craintes : pourquoi sommes-nous de plus en plus malheureux, alors que le monde devient plus riche et plus égalitaire ? Et il nous montre le combat qui nous attend : alors que la ploutocratie fait son retour, la guerre mondiale menace et un nouveau système façonne silencieusement nos nations, poussant le mécontentement à son paroxysme.
. Henri Goursau, Dictionnaire des Forces armées et Forces de l’ordre françaises – Le plus grand dictionnaire de terminologie militaire, Saint-Ouen, Editions Goursau, novembre 2025.
Pour la première fois, la guerre racontée en 115 000 mots et expressions dans un dictionnaire, pour tout savoir sur les missiles, les drones, les conflits de haute intensité, la guerre informationnelle, les campagnes de désinformation, les usines à trolls, la cyberguerre, etc. Quand les mots ne sont plus de simples outils de communication, mais qu’ils deviennent des armes puissantes. Ils sont une force de frappe importante. Pour faire la guerre, il faut trois choses : des hommes, des armes et des mots. Les hommes tiennent le front, les armes frappent les corps et détruisent les infrastructures et les mots frappent les esprits. Qui maîtrise les trois gagne la guerre. Depuis l’avènement du numérique, la guerre informationnelle tend à se substituer à la guerre traditionnelle. C’est la guerre des mots, la doctrine militaire de la domination informationnelle. La guerre ne se gagne plus seulement avec des drones, des missiles, des chars, des avions et des navires. La guerre est devenue informationnelle, invisible, mais totale. Aujourd’hui, elle se mène avec des mots, des paroles, des discours. Des mots qui frappent. Des mots qui manipulent. Des mots qui divisent. Des mots qui détruisent. Des mots devenus des projectiles qui tuent. C’est la guerre de l’information, la guerre de manipulation, la guerre de déstabilisation, la guerre d’intimidation et de soumission, la guerre de propagande mensongère et d’ingérence. Une guerre psychologique, où les esprits sont les nouveaux territoires à conquérir. Et où le langage devient arme et le silence défaite. A l’ère numérique, il est particulièrement aisé de façonner les opinions publiques en recourant à l’influence et à la manipulation. Une nouvelle forme de guerre asymétrique. Les fake news remplacent les bombes. Les deepfakes brouillent la réalité. Les trolls deviennent des soldats invisibles. Les algorithmes sont les nouveaux généraux. Les mots ne servent plus à nommer la guerre ou à la raconter : les soldats, les armes, les batailles – ils servent à faire la guerre. Ils ne décrivent plus seulement les combats – ils les déclenchent. Ils ne visent plus à convaincre – mais à vaincre et à soumettre. Dans cette infoguerre, à l’âge de l’intelligence artificielle, de la guerre cognitive, de la guerre hybride, de la propagande numérique et des campagnes de désinformation, les mots sont devenus un champ de bataille à part entière. Et qui néglige la puissance des mots perd l’âme de sa nation. Unique sur le marché, ce dictionnaire de référence offre un contenu linguistique incomparable de quelque 115 000 mots et expressions du vocabulaire militaire, de la police et de la gendarmerie.
. Alain Dontaine, Gaza, Géopolitique de la puissance, éd. Un monde nouveau, 2025.
Cet ouvrage examine les impacts géopolitiques de la guerre à Gaza en replaçant la question palestinienne dans sa profondeur historique, depuis l’effondrement de l’Empire ottoman jusqu’aux accords d’Abraham. Il analyse la centralité de cette cause dans le monde arabe, la politique israélienne de colonisation et les violations du droit international dénoncées par de nombreuses ONG. Il met en lumière l’impuissance des institutions internationales, le soutien indéfectible des grandes puissances à Israël, et la montée d’une mobilisation mondiale portée notamment par la jeunesse. À travers cette guerre, c’est une nouvelle donne géopolitique du Moyen-Orient qui se dessine, marquée par l’effacement des principes universels de droit.
. Laura K. Field, Furious Minds : The Making of the MAGA New Right, Princeton, Princeton University Press, novembre 2025.
Donald Trump n’est pas un grand penseur, mais sa victoire à l’élection présidentielle de 2016 a offert une formidable opportunité pour ceux qui le sont et a déclenché une radicalisation et une reconfiguration du monde intellectuel conservateur américain. Dans Furious Minds, Laura Field, qui a passé près d’une décennie dans les cercles universitaires conservateurs, retrace l’ascension de la nouvelle droite américaine, ce réseau d’universitaires, d’intellectuels publics et d’influenceurs qui alimentent idéologiquement le trumpisme. Ce mouvement comprend des personnalités telles que Patrick Deneen, Christopher Rufo, Peter Thiel et J.D. Vance. Leur programme est conçu pour durer et a des implications désastreuses à long terme pour la démocratie libérale. La nouvelle droite a des précédents dans l’histoire américaine, mais elle se distingue par sa jeunesse, sa misogynie et ses succès extraordinaires, notamment l’accession de Vance à la vice-présidence. Ce mouvement, qui rassemble des membres du Claremont Institute, des nationaux-conservateurs, des postlibéraux et des extrémistes de droite, prône une économie nationaliste, des frontières hermétiques, l’isolationnisme et des valeurs sociales réactionnaires. Il a contribué à l’élaboration de la stratégie du 6-janvier et a créé le Projet 2025. Mais avant tout, la nouvelle droite est engagée dans une vaste guerre culturelle contre le pluralisme libéral moderne. Elle est déterminée à exploiter le pouvoir de l’État et à l’utiliser de manière nouvelle et illibérale, des campus universitaires à la scène internationale, le tout motivé par le fantasme de restaurer une Amérique pure.
. Laurence Tubiana et Emmanuel Guérin, Le climat est un sport de combat, Paris, Albin Michel, novembre 2025.
Jamais la question du réchauffement climatique n’avait autant polarisé, divisé, déchaîné/embrasé/exalté les esprits — enjeu d’une véritable bataille culturelle, voire marqueur identitaire. Et pourtant, les effets du dérèglement sont déjà là, sous nos yeux. Feux de forêt, canicules à répétition, fonte des glaciers… Pour y faire face, chacun — gouvernements, entreprises, médias, citoyens, ONG, municipalités — a son rôle à jouer. Mais qui possède les pièces maîtresses de l’échiquier ? Qui tire les ficelles de notre avenir à tous ? Et que se passe-t-il réellement lors des COP ? Œuvrant au cœur de ce système, Laurence Tubiana et Emmanuel Guérin ont consacré leur vie à la bataille contre le changement climatique. Ils ont contribué aux victoires décisives, comme l’Accord de Paris, et essuyé bien des revers et des déceptions. Sans jamais renoncer ni perdre espoir. De la COP de Copenhague en 2009 à nos jours, c’est cette histoire qu’ils racontent, ses héros et ses détracteurs, ses succès et ses échecs, à la manière d’un thriller géopolitique.
. Michael Steinberger, The Philosopher in the Valley : Alex Karp, Palantir and the Rise of the Surveillance State, New York, Simon & Schuster, novembre 2025.
Palantir développe des logiciels d’intégration de données : sa technologie agrège de vastes quantités d’informations et identifie rapidement des modèles, des tendances et des connexions qui pourraient échapper à l’œil humain. Fondée en 2003 pour aider le gouvernement américain dans sa lutte contre le terrorisme — la CIA a été l’un de ses premiers investisseurs —, Palantir est aujourd’hui un géant mondial pesant 400 milliards de dollars, dont les logiciels sont utilisés par les principaux services de renseignement (y compris le Mossad), l’armée américaine, le National Health Service en Angleterre et des géants tels qu’Airbus et BP. De l’IA à la lutte contre le terrorisme, en passant par le changement climatique, l’immigration, la fraude financière, les soins de santé et l’avenir de la guerre, l’entreprise est au cœur des questions les plus cruciales du XXIe siècle. Son PDG milliardaire, Alex Karp, est une figure marquante de la scène économique mondiale. Juif métissé et atteint de dyslexie sévère, Karp a fait de Palantir un géant technologique sans avoir aucune formation en commerce ou en informatique. Il est plutôt un philosophe de formation, connu pour ses opinions bien arrêtées sur toute une série de questions et pour sa volonté de se confronter aux implications morales et éthiques du travail de Palantir. Ces questions ont pris un caractère d’urgence supplémentaire pendant l’ère Trump, qui a également attiré l’attention sur l’activisme politique de Peter Thiel, ami proche de Karp et cofondateur de Palantir. Dans The Philosopher in the Valley, le journaliste Michael Steinberger raconte l’histoire d’Alex Karp et de Palantir depuis ses débuts. Il offre de nouveaux détails biographiques et un riche portrait psychologique de l’homme qui dirige l’une des entreprises les plus secrètes au monde. Riche en révélations, cet ouvrage traite du pouvoir technologique, de l’État de surveillance et de l’avenir qui nous attend.
. Avner Greif, Joel Mokyr et Guido Tabellini, Two Paths to Prosperity : Culture and Institutions in Europe and China, 1000–2000, Princeton, Princeton University Press, novembre 2025.
Dans cet ouvrage historique, trois économistes de renom proposent une nouvelle explication audacieuse des raisons pour lesquelles l’Europe et la Chine ont évolué selon des trajectoires si différentes. Au XIe siècle, alors que l’Europe était encore arriérée et pauvre, la Chine était une civilisation riche et sophistiquée. Pourtant, l’Europe est devenue le berceau de la démocratie et de la révolution industrielle tandis que la Chine a stagné jusqu’à la fin du XXe siècle et a toujours été gouvernée par des autocraties. Two Paths to Prosperity retrace l’émergence de deux organisations sociales très différentes dans la Chine et l’Europe prémodernes, le clan et la corporation, et montre comment elles ont été des facteurs clés dans la divergence économique et politique de ces deux grandes civilisations. Au début du Moyen Âge, les biens publics tels que le partage des risques, le culte religieux, l’éducation et la résolution des conflits étaient fournis par des organisations non étatiques dans les deux sociétés. La Chine s’est de plus en plus appuyée sur la coopération familiale au sein des clans, tandis que les liens familiaux plus faibles en Europe ont donné naissance à des corporations telles que les guildes, les universités et les villes autonomes. Bien qu’ils remplissaient des fonctions similaires, les clans et les corporations reposaient sur des principes très différents, avec des conséquences qui perdurent encore aujourd’hui. Two Paths to Prosperity montre comment la parenté élargie dans la société chinoise a facilité la consolidation de l’autocratie et entravé l’innovation et le développement économique, et comment les corporations en Europe ont influencé la formation des institutions étatiques et préparé le terrain pour la révolution industrielle.
. Aymeric Roucher, Ultra-intelligence, Jusqu’où iront les IA ?, Paris, Odile Jacob, octobre 2025.
Jusqu’où l’IA va-t-elle transformer le monde du travail et nos sociétés ? Comment maintenir la France et l’Europe dans la course à la souveraineté technologique ? Ce livre, écrit par un ingénieur en intelligence artificielle, explique en termes accessibles les décennies d’innovation qui ont mené des réseaux de neurones aux Large Language Model. À partir des enjeux en présence, les données, l’énergie ou la puissance de calcul, il analyse les ressources de l’IA pour dépasser notre conception de l’intelligence. Demain, les agents IA – des programmes capables d’exécuter des tâches en autonomie – atteindront une performance qui disqualifiera en partie le travail humain. L’auteur assume avec lucidité les conséquences d’une telle ultra-intelligence artificielle : il n’y aura pas un transfert d’emplois pour tous. Devant les immenses promesses de l’IA, il est temps de mesurer aussi ses risques écologiques ou sociaux, afin de préparer une transition sereine. Face à l’ultra-intelligence des machines, comment réinventer nos sociétés ?
. Neil Makaroff, Décarboner ou décliner - La transition écologique au secours, Paris, L’aube, novembre 2025.
En pleine tempête géopolitique, dix ans après l’Accord de Paris, le climat n’est plus une urgence pour les responsables politiques. En cause ?? Une vague réactionnaire qui déferle sur nos démocraties et fait de la transition écologique une cible à abattre, déployant des efforts tous azimuts pour nous maintenir à l’ère des énergies fossiles. Pourtant, c’est loin d’être une fatalité ? : ce plaidoyer percutant pour une riposte en faveur de la décarbonation le démontre. La solution réside en une transition écologique Made in Europe alliant solidarité sociale et transformation industrielle, qui garantirait aux Européens émancipation et prospérité. Un enjeu aussi vital que leur réarmement face à la Russie.
. Pierre-Antoine Donnet, Taïwan – Survivre libres, Bruxelles, Nevicata, novembre 2025.
Ce pays n’en est pas un. Du moins, pas pour la grande majorité des États membres des Nations unies. Taïwan est une île survivante. Une rescapée des convulsions brutales de l’histoire de la Chine contemporaine. Or Taïwan et les Taïwanais existent. Son économie est l’une des plus dynamiques de la planète. La domination de ses industriels sur le marché mondial des processeurs et des semi-conducteurs est presque sans partage. Taïwan tient debout pas la force de sa population et sa détermination à demeurer libre. Il fallait, pour raconter l’émergence et l’insolente résistance de Taïwan, un auteur qui connaisse cette île de l’intérieur, capable de nous en décrire le cœur battant. Ce petit livre n’est pas un guide. Il arpente les routes montagneuses de l’île et vogue sur les eaux convoitées du détroit de Formose afin de comprendre le miracle taïwanais. Un miracle dont les plus funestes oracles affirment qu’il pourrait, un jour, déboucher sur une guerre d’envergure. Alors qu’aujourd’hui, les 24 millions de Taïwanais ne réclament que la paix. Un récit suivi d’entretiens avec Ka Chih-ming (historien), Tchen Yu-chiou (ex-ministre de la Culture, musicienne) et Wu Shou-Ling (cheffe d’orchestre).
. Sébastien Laurent, Peter Jackson, L’essor du renseignement moderne. Une histoire mondiale de l’espionnage, Paris, Nouveau Monde, octobre 2025.
Recrutements d’espions à l’étranger, campagnes de désinformation sur les réseaux, exécutions extrajudiciaires, agences techniques procédant à des écoutes dans le monde entier : les déclinaisons du renseignement se multiplient. Ce livre explore les origines du renseignement moderne. Il retrace une histoire mondiale allant de l’Antiquité à nos jours, mettant en exergue les pratiques de l’espionnage, puis leur progressive institutionnalisation, mais aussi les hommes et les femmes qui ont mis en œuvre ces activités singulières. En s’appuyant sur des archives anciennes et contemporaines ainsi que sur une abondante documentation, les auteurs donnent à voir ce qu’a été le renseignement dans la très longue durée, dans une écriture qui conduit jusqu’au temps présent.
. Teva Meyer, Géopolitique du nucléaire - Pouvoir et puissance d’une industrie duale, Paris, Cavalier Bleu, novembre 2025.
Le nucléaire, avec ses images choc liées à la bombe, est géopolitique par essence. Mais, jusqu’à récemment, le périmètre se limitait au nucléaire militaire, aux risques de sa prolifération et à son contrôle. Or, on découvre depuis peu la portée géo¬politique du nucléaire civil et surtout, son étroite imbrication avec le militaire. De la sécurisation des ressources à la diplomatie des centrales, chaque étape du système nucléaire a ses jeux d’acteurs propres et s’appuie sur des territoires précis qui sont autant de lieux de pouvoir que l’on cherche à contrôler politiquement, économiquement et militairement. Dans une approche originale, mêlant civil et militaire, Teva Meyer montre l’importance croissante du nucléaire dans les relations internationales.
. Tim Marshall, Prisonniers de la géographie - Dix cartes pour être incollable en géopolitique, Paris, Marabout, octobre 2025.
Prisonniers de la géographie est devenu un classique incontournable pour décrypter la géopolitique à travers le prisme des paysages, des frontières et des ressources naturelles. Cette édition, entièrement revue et enrichie, tient compte des événements majeurs et des bouleversements mondiaux de la dernière décennie. Montagnes, mers, déserts ou encore ressources naturelles : à travers dix cartes détaillées, Tim Marshall revisite l’influence persistante de la géographie sur les choix et les stratégies des nations. Il analyse également l’actualité géopolitique telle que le conflit en Ukraine et la guerre à gaza, la puissance militaire et stratégique croissante de la Chine, la puissance mondiale américain ou encore les rivalités des grandes puissances africaines. Plus qu’un livre, Prisonniers de la géographie est un outil essentiel pour tout lecteur curieux, qu’il soit novice ou passionné de géopolitique, pour l’aider à comprendre ce qui se passe dans notre monde en perpétuelle évolution.
. Tanguy Struye de Swielande, Le dragon et l’éléphant. Chine-Inde, les deux géants du XXIe siècle, CNRS éditions, 2025.
Dans un monde en transition géopolitique, la Chine et l’Inde jouent toutes deux sur les facteurs croissants de multipolarité pour atteindre leurs objectifs. Même si leurs intérêts se rejoignent dans une méfiance, voire un rejet, de l’hégémonie américaine, la trajectoire qu’elles empruntent diffère profondément.
Les deux géants asiatiques ont chacun de nombreux atouts, mais leurs faiblesses structurelles pourraient bien contrevenir à leurs objectifs. Depuis Pékin, ces vulnérabilités l’empêchent d’envisager une croissance globale libre de toute influence américaine. À New Delhi, de nombreux facteurs freinent la croissance de l’État et sa projection de puissance, y compris dans son voisinage proche.
En proposant une étude de ces deux puissances concurrentes plus que complémentaires et de leur relation marquée par une forte rivalité, l’ouvrage montre que, malgré certains intérêts convergents, une véritable alliance reste pour le moment peu probable.
. J. Michael Cole, The Taiwan Tinderbox : The Island-Nation at the Center of the New Cold War, Cambridge, Polity, octobre 2025.
L’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022 a choqué le monde entier et bouleversé l’idée selon laquelle une guerre conventionnelle à grande échelle était inconcevable au XXIe siècle. À l’autre bout de la planète, Taïwan, pays démocratique, est confronté à la menace croissante d’une prise de pouvoir militaire par la Chine — un conflit dont l’impact sur la communauté internationale serait catastrophique.
J. Michael Cole, expert renommé de Taïwan et ancien officier du renseignement, explique comment cette nation du Pacifique est devenue une poudrière susceptible de déclencher un conflit mondial à grande échelle. S’appuyant sur un accès sans précédent aux sources gouvernementales taïwanaises et sur deux décennies d’observation sur le terrain, il explore les causes profondes du conflit entre Taïwan et la Chine, depuis les politiques identitaires qui rendent inconcevable une unification pacifique jusqu’à l’ascension de Xi Jinping, le dirigeant chinois le plus puissant et le plus autoritaire depuis Mao Zedong.
Proposant une analyse approfondie de la manière dont la guerre en Europe influence les préparatifs de Pékin, Taipei et Washington en vue d’une éventuelle confrontation entre les deux rives du détroit, The Taiwan Tinderbox explique pourquoi la défense de Taïwan doit être érigée au rang de priorité pour la communauté internationale et l’avenir de la démocratie.
. Joel S. Wit, Fallout. The Inside Story of America’s Failure to Disarm North Korea, New Haven, Yale University Press, octobre 2025.
Depuis près de quarante ans, les États-Unis tentent d’empêcher la Corée du Nord de se doter d’armes nucléaires et des missiles nécessaires à leur lancement. Joel S. Wit, ancien fonctionnaire du département d’État, conduit les lecteurs au cœur des négociations sur le nucléaire, des débats politiques acharnés et des manœuvres diplomatiques secrètes, et raconte à quel point les États-Unis et la Corée du Nord ont frôlé la confrontation armée à plusieurs reprises. S’appuyant sur plus de trois cent entretiens avec des responsables à Washington, Pékin et Séoul, ainsi qu’avec les contacts de l’auteur à Pyongyang, cet ouvrage retrace la manière dont six présidents américains ont abordé le problème de la Corée du Nord.
Wit fait de Barack Obama et Donald Trump les deux présidents les plus responsables de l’échec à enrayer la course de la Corée du Nord vers la construction d’un arsenal nucléaire, car c’est sous leurs mandats successifs que Pyongyang a acquis la capacité de menacer toutes les villes d’Amérique du Nord. Wit dresse également un portrait sans précédent de Kim Jong-un qui réfute l’image caricaturale d’un homme impulsif et illogique.
Comme son père et son grand-père, Kim est un despote impitoyable, mais aussi un négociateur avisé et informé, déterminé à assurer l’avenir de sa dictature en explorant la voie diplomatique ou, à défaut, en se dotant d’un arsenal nucléaire.
. Lukas Aubin, Géopolitique de la Russie, Paris, La découverte, novembre 2025.
À l’heure de la guerre en Ukraine, la compréhension de la géopolitique de la Russie est plus que jamais nécessaire. Quels sont les objectifs et les armes du président russe ? Sur quel roman national fonde-t-il son action politique ? Comment redéfinit-il les territoires de sa puissance à l’étranger ? Prépare-t-il une nouvelle offensive ? Quelles sont les limites de son pouvoir ? Cet ouvrage répond à ces questions. Au-delà, il offre au lecteur des clés pour comprendre la Russie aujourd’hui. Puissance eurasiatique enclavée, ce pays-continent navigue entre Orient et Occident. Selon le pouvoir russe, cette situation géographique lui confère un rôle de pivot civilisationnel et politique au rayonnement planétaire. Pourtant, son président ne dispose plus des moyens militaires et économiques qui furent ceux de l’URSS. Dès lors, il use de stratagèmes variés qui visent à étendre son influence à l’international. Nouer de nouvelles alliances avec les pays non occidentaux, restructurer son économie, diviser l’Occident... Son objectif invariable Imposer un nouvel ordre mondial au sein duquel la Russie occuperait une place prépondérante.
. Marc Lazar, Pour l’amour du peuple. Histoire du populisme en France, XIXᵉ-XXIᵉ siècle, Paris, Gallimard, octobre 2025.
Depuis un siècle et demi que la République s’est installée, la vie politique française est scandée de moments où apparaissent des mouvements antisystèmes atypiques, plus ou moins durables, qu’on rassemble souvent sous le qualificatif de populistes. De prime abord, l’emploi de ce terme peut paraître problématique.
Qu’ont en commun le général Boulanger et Marine Le Pen, les maoïstes et les Gilets jaunes, Jean-Luc Mélenchon et Bernard Tapie ? Ces formations comme leurs dirigeants sont dissemblables et leurs objectifs politiques sont contradictoires. Cependant, ils partagent ce qui forme le cœur de leur discours : une exaltation du peuple, uni dans la même volonté, ainsi qu’un rejet affiché des élites.
Il ne sera pas ici question de juger les populismes, d’en décrire les contours sous les traits d’une maladie ou d’en rester à une approche strictement théorique. Dans cet essai érudit, Marc Lazar s’attache à définir le phénomène populiste, analyse chacune de ses manifestations et met ainsi en lumière comment son charme opère, aujourd’hui plus que jamais. Cette histoire du populisme contribue aussi à notre connaissance de la démocratie en France.
. Mia Bennett et Klaus Dodds, Unfrozen. The Fight for the Future of the Arctic, New Haven, Yale University Press, octobre 2025.
Nulle part ailleurs la double menace du changement climatique et des tensions géopolitiques n’est aussi forte qu’en Arctique. La banquise fond rapidement, les feux de forêt font rage et le pergélisol se meurt. Dans le même temps, l’intérêt mondial pour cette région s’accroît à mesure qu’elle passe du statut de désert de glace à celui de voie navigable internationale.
Mia Bennett et Klaus Dodds examinent l’état actuel de l’Arctique et montrent comment la région est en train de devenir un terrain d’expérimentation pour presque tout — de la gouvernance autochtone aux technologies sous-marines. La concurrence géopolitique croissante s’accompagne de perturbations environnementales. Des pays comme la Russie, la Chine et les États-Unis investissent dans l’Arctique et consolident leurs intérêts en matière d’accès stratégique, d’exploitation des ressources et de construction d’alliances.
Les conséquences de cet anthropocène arctique émergent sont véritablement mondiales : de l’élévation du niveau des mers due à la fonte des glaciers, des tensions entre les grandes puissances déterminées à protéger leur territoire et leurs ressources, ou du bien-être des peuples autochtones qui luttent depuis des siècles pour leurs droits et leur reconnaissance.
. Serhii Plokhy, The Nuclear Age. An Epic Race for Arms, Power and Survival, Londres, Allen Lane, octobre 2025.
Le 16 juillet 1945, l’ère nucléaire a commencé avec l’explosion de la première bombe atomique et les mots de Robert Oppenheimer : maintenant, je suis devenu la Mort, le destructeur des mondes. Si la menace d’une destruction mutuelle assurée a permis de contenir un paysage géopolitique tendu et en ébullition, des événements tels que la catastrophe de Tchernobyl et des incidents évités de justesse comme la crise des missiles de Cuba ont montré que la destruction totale ne tenait qu’à un dysfonctionnement, une erreur ou un malentendu.
Alors que les gouvernements renforcent leurs arsenaux nucléaires, que les traités visant à limiter l’acquisition et l’utilisation des armes nucléaires sont abandonnés et que les armes nucléaires sont de plus en plus à la portée d’acteurs non étatiques, nous sommes à l’aube d’une renaissance de l’industrie nucléaire. Depuis la première fission artificielle de l’atome en 1917 et la course à la création de la première bombe atomique pendant la Seconde Guerre mondiale, en passant par la course effrénée aux armements de la guerre froide, jusqu’à l’impérialisme, la motivation néocoloniale et les guerres d’aujourd’hui, la menace posée par les armes nucléaires est plus que jamais d’actualité.
En examinant les motivations des principaux acteurs, Serhii Plokhy aborde la question cruciale de notre temps : que pouvons-nous apprendre de la première course aux armements nucléaires qui puisse nous aider à mettre fin à la nouvelle ?
. Andrew Ross Sorkin, 1929. Inside the Greatest Crash in Wall Street History — and How It Shattered a Nation, Viking, octobre 2025.
En 1929, le monde a assisté avec stupéfaction à la chute libre de Wall Street, qui a anéanti des fortunes et déclenché une dépression qui allait bouleverser toute une génération. Mais derrière les téléscripteurs clignotants et les traders paniqués, un autre drame se jouait, celui des visionnaires et des fraudeurs, des titans et des rêveurs, de l’euphorie et de la ruine. Grâce à un accès à des archives historiques et à des documents récemment découverts, Andrew Ross Sorkin plonge les lecteurs dans le chaos du krach, dans les coulisses d’une bataille acharnée entre Wall Street et Washington et dans l’univers de personnages hors du commun dont l’ambition et la naïveté ont conduit à la ruine. Les sommets vertigineux et les creux brutaux de cette époque reflètent de manière inquiétante le monde d’aujourd’hui, où les marchés s’envolent, les tensions politiques s’intensifient et la lutte pour l’influence financière se joue une fois de plus. Ce n’est pas seulement une histoire d’argent. 1929 est un récit sur le pouvoir, la psychologie et l’illusion séduisante que « cette fois-ci, c’est différent ». Il traite des signaux d’alarme ignorés, des financiers tombés en disgrâce et des sceptiques qui ont vu le krach arriver, mais qui ont été écartés jusqu’à ce qu’il soit trop tard.
. A. Wess Mitchell, Great Power Diplomacy. The Skill of Statecraft from Attila the Hun to Kissinger, Princeton, Princeton University Press, octobre 2025.
Depuis la nuit des temps, les sociétés humaines ont été confrontées à des ennemis trop nombreux ou trop féroces pour être vaincus uniquement par la force des armes. Dans ces moments dramatiques, les dirigeants avisés ont eu recours à la diplomatie pour réorganiser le jeu en leur faveur et contrer des adversaires apparemment invincibles. Dans Great Power Diplomacy, l’historien et diplomate américain A. Wess Mitchell raconte l’histoire oubliée de la manière dont les empires les plus légendaires de l’histoire ont utilisé la diplomatie comme un outil de grande stratégie pour déjouer, surpasser et survivre à des adversaires militairement supérieurs. À travers quinze siècles d’histoire, Great Power Diplomacy fait revivre les moments périlleux, les personnalités hautes en couleur et les intrigues politiques complexes qui ont conduit à certaines des plus grandes réussites diplomatiques de l’histoire, mais aussi à ses plus grands désastres. Parmi les protagonistes figurent des géants tels que Richelieu, Metternich, Bismarck et Kissinger, mais aussi des personnages moins connus tels que des scélérats, des eunuques, des ivrognes et des imbéciles. À chaque tournant, la fortune a favorisé les grandes puissances qui ont eu la clairvoyance et l’habileté nécessaires pour former des alliances gagnantes, diviser les coalitions ennemies et, lorsque cela était nécessaire, faire la paix avec leurs adversaires les plus acharnés. Ce type de diplomatie est devenu un art perdu ces dernières années, les élites occidentales s’étant bercées de l’illusion que la mondialisation et la propagation de la démocratie créeraient un monde sans frontières où les nations vivraient en harmonie et où la guerre serait abolie. Mais, comme le révèle Great Power Diplomacy, nous devons redécouvrir les secrets de l’habileté diplomatique alors que le monde entre dans une nouvelle ère d’instabilité où des grandes puissances de la taille d’un continent se disputent des territoires, des ressources et du prestige. Le riche passé de la diplomatie peut nous servir à nous préparer à cet avenir plus dangereux.
. Barbara Cassin, La guerre des mots. Trump, Poutine et l’Europe, Paris, Flammarion, octobre 2025.
J’ai eu besoin comme jamais d’écrire ce livre-ci. Il y va de la culture comme résistance. Trump et Poutine croient en la puissance du langage, ils veulent en être les maîtres. En supprimant des mots, ils pensent qu’ils suppriment les choses : Trump fait des listes, Poutine parle d’opération militaire spéciale. Chacun invente sa novlangue : free speech est un bâillon, un démocrate est un nazi. Et moi, j’ai peur qu’on ne puisse plus dire : ceci est un mensonge. Ils détestent l’Europe d’aujourd’hui et sont nostalgiques d’une Europe chrétienne, morale, conservatrice, sans trans ni woke. Or c’est celle qui revient en force. Est-ce celle-là que nous voulons ? Comment lutter ? À travers la guerre des mots, c’est à la culture qu’ils s’en prennent. Je crois que la culture, la capacité de juger qu’elle implique, est une forte manière de résister, une manière politique, à notre portée. Si j’avais à définir la culture de l’Europe, je dirais simplement : il y a des choses à entendre, il y a des livres à lire.
. Claudia Moatti, Sur la politique. Cinq grandes leçons romaines, Paris, École française de Rome, octobre 2025.
Repenser la res publica, d’où vient — mais par quels détours, quels malentendus ! — le terme moderne de république, c’est, à travers l’expérience romaine antique, éclairer de grandes questions actuelles : qu’est-ce que le peuple ? Quelle part de conflictualité peut-on tolérer dans l’espace public ? La participation directe est-elle plus démocratique que le système représentatif, la liberté toujours désirable ? Quelle place reconnaître à l’Autre dans la cité ? Ou encore : comment un individu ou un groupe, en s’auto-proclamant défenseur de la grandeur de l’État, devient-il autoritaire ? En convoquant cinq grandes notions romaines — res publica, seditio, populus, libertas, societas —, cet ouvrage met la politique à l’épreuve de la langue latine et les concepts en tension avec les pratiques et les conflits de sens. Il analyse aussi quelques-unes de leurs reconfigurations dans d’autres périodes et selon d’autres enjeux, non pour établir des continuités ou des ressemblances, mais pour affiner les questions et faire comprendre l’importance de la référence au passé pour appréhender les défis contemporains.
. Kevin Passmore, The Maginot Line. A New History, New Haven, Yale University Press, octobre 2025.
La ligne Maginot était une merveille d’ingénierie des années 1930. Les immenses forts, enfouis jusqu’à 80 mètres sous terre, abritaient des hôpitaux, des cuisines modernes, des centres téléphoniques et même des trains électriques. Des kilomètres de galeries souterraines menaient à des casemates dissimulées dans le terrain et à des tourelles qui s’élevaient du sol pour tirer sur l’ennemi. Les fortifications étaient invulnérables à l’artillerie la plus lourde et à la guerre chimique. Malgré ces préparatifs considérables, la France tomba aux mains de l’Allemagne en un peu moins de six semaines. Huit décennies plus tard, la ligne Maginot reste dans les mémoires comme une réponse coûteuse et malavisée à un danger évident. Kevin Passmore en propose un réexamen. Il retrace les controverses qui ont entouré sa construction, la vie des hommes qui ont servi dans les forts, l’impact sur les habitants germanophones de la frontière et la lutte contre l’espionnage interne. Loin d’être un pas en arrière, la ligne Maginot était un projet ambitieux de modernisation.
. Pierre Lévy, Au cœur de la Russie en guerre - Récit de l’ambassadeur de France, Paris, Tallandier, octobre 2025.
À Moscou, Pierre Lévy n’a connu que deux mois normaux. Rapidement, il affronte la pandémie, la montée des tensions, la radicalisation du pouvoir puis le déclenchement de la guerre le 24 février 2022, sans compter le coup de force de Prigojine en juin 2023… Dans son récit, on suit le diplomate mis face au choix ultime : la paix ou la guerre entre les nations. Combinant les réflexions sur son expérience personnelle et ses visions de la situation géostratégique, il nous raconte les coulisses de l’ambassade en environnement hostile, tout en nous donnant une analyse précise du régime de Vladimir Poutine et de sa confrontation ouverte avec « l’Occident collectif ». Sans complaisance sur l’action des Européens et de leurs alliés, l’ambassadeur dessine des pistes pour la France et l’Union européenne, soumises à des enjeux de sécurité existentiels. Un témoignage pour l’Histoire.
. Laurent Joly, Bernard Costagliola, Virginie Sansico, Vichy - Histoire d’ une dictature 1940-1944, Paris, Tallandier, octobre 2025.
Plus de quatre-vingts ans après sa disparition, le régime de Vichy continue de hanter notre mémoire collective. En quelques jours, en juillet 1940, la République s’est effondrée. Derrière le maréchal Pétain, héros national devenu chef de l’État français, et le politicien sans scrupules Pierre Laval, des opportunistes jouant la carte allemande et des doctrinaires d’extrême droite prennent le pouvoir. La dictature s’installe, pour le pire. Optant pour la collaboration politique en 1940, choisissant la voie du crime antisémite en 1942, le gouvernement finit par dresser quasiment toute la population contre lui. Cette page sombre est ici racontée comme jamais auparavant, à partir d’archives inédites, des derniers témoignages exhumés et d’approches historiques renouvelées, attentives aux ressorts psychologiques, à la complexité des parcours et aux marges de manœuvre des acteurs. Au fil de la lecture, apparaît ainsi un tableau pénétrant et contrasté. L’ouvrage montre à la fois la fuite en avant et l’aveuglement égotiste des principaux dirigeants du régime pétainiste, la mise en œuvre de politiques criminelles parfois tempérée par des fonctionnaires formant une véritable zone grise au cœur de l’État, et une opinion publique longtemps attentiste mais inclinant en faveur des Alliés. Une réflexion puissante sur les conséquences funestes de l’amoralité en politique et des conclusions historiques qui interrogent notre présent.
. Ludovic Tournès, Histoire de la diplomatie culturelle dans le monde. Les États entre promotion nationale et propagande, Paris, Armand Colin, octobre 2025.
Des cours de langue dispensés par les comité de l’Alliance française sur tous les continents à l’exportation de la K-pop et à la politique du Cool Japan, en passant par les émissions de Jazz de Voice of America, les tournées du Bolchoï pendant la guerre froide, ou encore les séries télévisées turques, cet ouvrage présente pour la première fois une histoire mondiale des diplomaties culturelles permettant de comprendre ce phénomène qui a pris une ampleur sans précédent depuis le milieu du XIXe siècle. On y croisera les États qui orchestrent en coulisse, les associations qui préparent ou relayent sur le terrain, mais aussi les artistes, intellectuels, sportifs ou scientifiques, qui participent à des degrés divers à ces stratégies de valorisation culturelle devenus au cours du XXe siècle un élément majeur des politiques extérieures étatiques. Loin d’avoir été submergées par la mondialisation, les nations n’ont pas cessé de jouer un rôle structurant dans les circulations culturelles internationales contemporaines, et au XXIe siècle plus encore que jamais.
. Máriam Martínez-Bascuñán, El fin del mundo común. Hannah Arendt y la posverdad, Madrid, Taurus, octubre 2025.
Au lendemain de la première investiture présidentielle de Trump, son attaché de presse a déclaré que l’événement avait rassemblé le plus grand nombre de spectateurs de l’histoire. Pour défendre ce qui était manifestement un mensonge, une conseillère de la Maison Blanche avait affirmé qu’il s’agissait de faits alternatifs. Dans cet essai, Máriam Martínez-Bascuñán soutient qu’à ce moment-là, une ère politique s’est terminée et une autre a commencé. Avec l’aide de l’intelligence prémonitoire d’Hannah Arendt, elle met en lumière ce nouveau paradigme. Le problème posé par l’apparition des faits alternatifs, des post-vérités et des pré-mensonges n’est pas qu’ils éliminent la vérité — après tout, la vérité n’est pas une valeur absolue en politique —, mais qu’ils détruisent le monde commun qui, depuis un certain temps, permettait la délibération démocratique. Sans une image commune du monde, il devient impossible de débattre des questions qui nous préoccupent et notre condition de citoyens perd tout son sens. La pluralité des regards ne peut s’exercer que si nous regardons tous la même chose. Les idées d’Arendt, d’une actualité saisissante, et leur contraste avec celles d’autres penseurs tels qu’Orwell, Foucault ou Platon, servent de guide pour l’analyse de cette nouvelle réalité, dont la complexité ne saurait conduire au désespoir.
. Romain Lucazeau, Marguerite Imbert, Olivier Paquet, Hautes tensions, 9 scénarios pour penser nos futurs énergétiques, Paris, Tallandier, septembre 2025.
En nous propulsant en 2040 et jusqu’en 2150, le recueil Hautes Tensions propose neuf scénarios se déroulant dans le « monde d’après » la transition énergétique et environnementale. Ces histoires (huit nouvelles et une bande dessinée) sont le fruit d’un travail inédit entre des auteurs de science-fiction, des dessinateurs et des experts de la prospective et de l’innovation d’EDF. Tantôt dystopiques, tantôt contemplatives ou satiriques, elles offrent une nouvelle manière d’aborder les enjeux énergétiques et géopolitiques. Que se passerait-il si chaque citoyen produisait sa propre énergie ? À quoi ressemblerait une société sans énergie fossile ? Et si le climatoscepticisme devenait la norme ? À quoi ressembleront nos ruines du monde des énergies fossiles, quand nos sociétés utiliseront pleinement le potentiel de l’électricité ? Et si les géants de la tech devenaient fournisseurs d’énergie gratuite ? Autant de questions – parfois radicales, toujours plausibles –, auxquelles ces scénarios nous invitent à réfléchir.
. Sabine Dullin, Réflexions sur le despotisme impérial de la Russie, Paris, Payot, octobre 2025.
Un despote et une vision impériale : telle est la prison où l’identité russe est enfermée depuis des siècles. Et ce n’est pas Vladimir Poutine, au pouvoir depuis vingt-cinq ans et artisan de la guerre en Ukraine, qui le démentira ! Il ne fait pas de doute qu’un régime pluraliste et ouvert ne peut émerger durablement en Russie tant que les Russes ne tournent pas aussi le dos à cette identité impériale qui se drape dans un faux anti-impérialisme et une fausse défense existentielle. Telle est la thèse audacieuse de cet essai qui se poursuit par un choix de textes — pour certains peu connus — d’Européens qui, du XVIe au XXIe siècle, ont interrogé le despotisme impérial de la Russie. Leur actualité est troublante. Car ne nous y trompons pas : fascinés et critiques, ces textes sont également un miroir tendu à l’Europe, lui renvoyant ce qu’elle fut : coloniale, impérialiste et fasciste — et ce qu’elle pourrait bien devenir : antidémocratique.
. Nicole Gnesotto, Fractures dans l’Occident : Comment en est-on arrivé là, comment en sortir ?, éd. Odile Jacob, 2025
Quelque chose ne va plus dans l’Occident, quelque chose s’est brisé, sournoisement, progressivement, que nous n’avons pas vu venir.
Pour quelles raisons des sociétés aussi développées, libres, prospères, éduquées que les sociétés occidentales finissent-elles par honnir ce qui a fait leur puissance et leur liberté ? Qu’avons-nous raté ? Il faut impérativement tenter de comprendre ce vent de folie qui fracture l’Occident si l’on veut répondre, contrecarrer, freiner, voire arrêter le triomphe d’un autoritarisme à venir, fossoyeur des libertés les plus fondamentales de nos sociétés.
C’est peut-être en Europe, cette autre moitié jadis si puissante de l’Occident, que résident les réponses. Deviendra-t-elle un mollusque soumis aux injonctions américaines, ou le dernier des Mohicans pour la défense et l’illustration d’un Occident encore démocratique ?
Il n’y a que l’Europe qui puisse relever le défi.
. Olivier Antoine, Géopolitique du soja, éd. Armand Colin, 2025.
Fondement essentiel de la sécurité alimentaire, le soja s’est imposé en moins d’un siècle comme la principale source de protéines des systèmes agroalimentaires globaux. Redessinant les paysages agricoles, il a entraîné dans son sillage des impacts environnementaux notables – déforestation, généralisation des OGM, usage intensif de pesticides – et nourri de nouvelles rivalités entre puissances mondiales.
Quels sont les risques et les avantages pour les pays producteurs et importateurs ? Pourquoi le Brésil, les États-Unis, et la Chine se disputent-ils le contrôle de cette ressource stratégique ? Pourquoi l’Union Européenne continue-t-elle de dépendre si massivement de cette ressource ? Et alors que de nouvelles frontières du soja se dessinent, dans des pays comme la Russie et certains États africains, quelles alternatives émergent pour remplacer le "roi soja" ?
À travers une analyse des grands pôles de production et de flux commerciaux, cet ouvrage examine les enjeux de souveraineté alimentaire et les tensions inhérentes à l’expansion d’un modèle agricole mondialisé.
Un voyage géopolitique captivant, entre défis économiques, conflits environnementaux et résilience des communautés locales face à un modèle agricole mondialisé.
. Dominique Bourg, Jean-François Holeindre, « Guerre et climat », éd. Frémeaux et associés
Un livre de Dominique Bourg et Jean-Vincent Holeindre - Fondements anthropologiques, moraux et politiques de la guerre. Crises politiques, retours de la guerre, recomposition idéologique et mutations des régimes. Une nouvelle grammaire des conflits (asymétries, terrorisme, hybridation), le climat comme facteur de conflictualité planétaire.
Le multilatéralisme permet une plus grande coopération, comme l’illustre par exemple le Traité sur la haute mer, qui formalise un accord entre les États pour protéger la majeure partie de l’espace maritime non souverain. Mais, dans le même temps, l’interdépendance est aussi un vecteur de conflictualité, à travers par exemple la guerre pour les ressources, observable également sur mer. Rappelons-le : l’interdépendance peut pousser à la pacification comme à la guerre. Laquelle va l’emporter ?
Ce livre naît d’un constat rigoureux : les effets du changement climatique ne relèvent plus uniquement de la sphère environnementale. Ils reconfigurent en profondeur la grammaire des conflits, en agissant comme facteurs structurels de déstabilisation stratégique.
Dominique Bourg et Jean-Vincent Holeindre mettent ici au jour une transformation silencieuse mais décisive : à côté des conflits pour l’accès aux ressources, ce sont des guerres issues de la dynamique même du dérèglement climatique qui émergent. Sécheresses, effondrement de la production agricole, déplacements de population ou vulnérabilité des infrastructures deviennent des enjeux centraux dans la reconfiguration géopolitique globale. L’intérêt de ce dialogue tient à la confrontation de deux rationalités : celle, critique et éthique, d’une pensée écologique structurée autour des limites planétaires ; celle, stratégique, d’un réalisme nourri de l’histoire longue des conflits. Ensemble, ils bâtissent une typologie des nouvelles formes de guerre — asymétrique, hybride, climatique — et interrogent la pertinence de catégories anciennes comme la dissuasion ou la souveraineté dans un monde où la menace peut être la sécheresse, l’emballement thermique ou la désagrégation territoriale.
Dominique Bourg, philosophe franco-suisse, spécialiste de l’écologie politique, professeur honoraire à l’Université de Lausanne. Il s’est imposé comme l’un des penseurs majeurs de l’Anthropocène, articulant critique du progrès, transition écologique et refondation démocratique. Auteur d’essais, et directeur de collections aux PUF et Frémeaux PUF, il plaide pour une politique du bien commun à l’échelle planétaire.
Jean-Vincent Holeindre, politiste et professeur à l’université Paris-Panthéon-Assas, spécialiste de la pensée stratégique et des relations internationales. Il a été directeur scientifique de l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire (IRSEM). Ses recherches portent sur la guerre juste, le terrorisme et les mutations de la conflictualité en croisant philosophie politique, études stratégiques et éthique des relations internationales.
. Alain Dontaine, Gaza, géopolitique de la puissance, Paris, Un Monde Nouveau, octobre 2025.
Cet ouvrage examine les impacts géopolitiques de la guerre à Gaza en replaçant la question palestinienne dans sa profondeur historique, depuis l’effondrement de l’Empire ottoman jusqu’aux accords d’Abraham. Il analyse la centralité de cette cause dans le monde arabe, la politique israélienne de colonisation et les violations du droit international dénoncées par de nombreuses ONG. Il met en lumière l’impuissance des institutions internationales, le soutien indéfectible des grandes puissances à Israël, et la montée d’une mobilisation mondiale portée notamment par la jeunesse. À travers cette guerre, c’est une nouvelle donne géopolitique du Moyen-Orient qui se dessine, marquée par l’effacement des principes universels de droit.
. Anne-Laure Amilhat Szary, Géopolitique des frontières - Découper la terre, imposer une vision du monde, Paris, Cavalier Bleu Editions, septembre 2025.
Objets géographiques paradoxaux, les frontières quadrillent le monde depuis l’époque moderne et fondent la base des relations internationales, présupposant d’une part l’égalité de droit entre les territoires qu’elles délimitent et d’autre part une distribution exclusive de la souveraineté. Mais ce concept est désormais instable : dépassant les limites binaires du dedans/dehors de l’État, les frontières sont en effet devenues mobiles, comme autant de dispositifs complexes de tri des flux de la mondialisation. Si leur linéarité semble renforcée par la recrudescence de murs qui les ferment, ce n’est qu’un trompe-l’œil car une grande partie des mécanismes frontaliers est invisible. À travers une approche géo-¬historique qui décentre le regard européen et permet une relecture tant économique que politique des frontières, ce livre propose une plongée originale dans les implicites de leur construction. Désormais disloquées, fonctionnant en prenant appui sur des lieux hétéroclites, les frontières contemporaines évoluent d’une manière qui transforme en profondeur notre rapport à l’identité. Au fil des pages, on comprend comment ré-ouvrir les possibles politiques à partir de ces lignes qui semblent pourtant enfermer nos imaginaires.
. Cédric Tellenne, Idées reçues sur la géopolitique et la géoéconomie, Paris, Cavalier Bleu Editions, octobre 2025.
Géopolitique et géoéconomie, de plus en plus présentes dans le débat public, souffrent de contours flous et très discutés. Ces imprécisions nourrissent bon nombre d’idées reçues quant à leur nature même et leurs objectifs, tant la géopolitique – que l’on réduit souvent aux relations internationales –, que la géoéconomie parfois considérée à tort comme la remplaçante de la géopolitique.
Or, ces deux disciplines apportent, ensemble, des éléments de compréhension du monde dans un contexte de nouveau désordre international, où la conflictualité semble l’emporter durablement sur la paix, à rebours de tous les discours sur la « Fin de l’histoire ». La guerre et les nouvelles crises dépassent désormais le seul cadre militaire pour gagner l’économie, la technologie, l’information, etc., et se déploient dans un espace géographique élargi, terrestre, maritime et aérien, mais aussi spatial et cyberspatial. Déclinant débats, puissances et conflits en 20 idées reçues parmi les plus répandues, Cédric Tellenne dresse un tableau précis, riche en exemples et citations, des enjeux géopolitiques de ce début du XXIe siècle.
. Marc-Antoine Eyl-Mazzega, Diana Gherasim, Géopolitique du carbone- L’Europe en quête de puissance climatique, Paris, Cavalier Bleu Editions, octobre 2025.
Alors que le monde reste très largement carboné et que le pic des émissions de gaz à effet de serre n’est pas encore atteint, la régulation du carbone et les technologies bas carbone sont un enjeu de rivalité entre puissances étatiques, entreprises, ONG et individus. Le climat, qui oblige à l’action commune malgré et au-delà des rapports de force, pose de multiples défis. Comment concilier développement des uns et protectionnisme climatique des autres ? Quelle justice climatique entre pays riches et pollueurs, et pays émergents ou vulnérables ? Assiste-t-on à la naissance de nouvelles puissances climatiques ? Dix ans après l’Accord de Paris sur le climat, les auteurs dressent un état des lieux et des perspectives géopolitiques et géoéconomiques liées à la transition énergétique et à la décarbonation.
. Ophélie Coelho, Géopolitique du numérique - L’impéralisme à pas de géants, Paris, Editions de L’Atelier, novembre 2025.
Il y a à peine une trentaine d’années, les technologies numériques étaient absentes de nos vies. Leur arrivée à grande vitesse dans notre quotidien, initiée d’abord par les investissements des États, est aujourd’hui surtout le fait d’acteurs privés. L’approche géopolitique du numérique permet d’explorer la toile complexe des relations de pouvoir qui se tissent entre les puissances étatiques et les multinationales du numérique. Ces géants, Gafam et autres Big Tech, qui détiennent des réseaux de câbles sous-marins, des plateformes de services mondialement utilisées et une masse importante de données, développent aujourd’hui de véritables stratégies d’expansion territoriale. Leur omniprésence a engendré des rapports de dépendance inquiétants qui, avec le temps, risquent même de devenir un moyen de pression ou de négociation auprès des États. Quels risques courons-nous vraiment ? Et comment peut-on (encore) en sortir ? Voyage à la fois historique et géographique, ce livre nous donne à voir un nouveau théâtre d’opérations où, loin de l’utopie d’un internet sans frontières, l’impérialisme technologique avance à pas de géants.
. Tanguy Struye de Swielande, Le dragon et l’éléphant. Chine-Inde, les deux géants du XXIe siècle, Paris, CNRS Editions, octobre 2025.
Dans un monde en transition géopolitique, la Chine et l’Inde jouent toutes deux sur les facteurs croissants de multipolarité pour atteindre leurs objectifs. Même si leurs intérêts se rejoignent dans une méfiance, voire un rejet, de l’hégémonie américaine, la trajectoire qu’elles empruntent diffère profondément. Les deux géants asiatiques ont chacun de nombreux atouts, mais leurs faiblesses structurelles pourraient bien contrevenir à leurs objectifs. Depuis Pékin, ces vulnérabilités l’empêchent d’envisager une croissance globale libre de toute influence américaine. À New Delhi, de nombreux facteurs freinent la croissance de l’État et sa projection de puissance, y compris dans son voisinage proche. En proposant une étude de ces deux puissances concurrentes plus que complémentaires et de leur relation marquée par une forte rivalité, l’ouvrage montre que, malgré certains intérêts convergents, une véritable alliance reste pour le moment peu probable.
. Fred Constant, Jean-Christophe Gay, « Atlas des Outre-mer », Cartographe : Aurelie Boissiere, éd. Autrement, 2025.
Les outre-mer, ces territoires du « lointain », sont caractérisés par une grande diversité. Fruits d’une histoire complexe, ils demeurent mal connus, malgré une actualité toujours vive.
Comment les définir et où se trouvent-ils ? Quelle est leur importance géopolitique aux yeux des États auxquels ils sont rattachés ?
Quel est le poids des legs colonial et postcolonial dans leurs structures sociales, politiques et culturelles ?
Quelles sont les dynamiques démographiques, socio-économiques et environnementales en place ?
Quels sont les défis à relever pour ces territoires en devenir, traversés par des crises multiples ?
Riche de plus de 100 cartes et documents, cet atlas apporte un regard neuf sur les outre-mer, en particulier français. En mettant en lumière les difficultés auxquelles ils sont confrontés, mais aussi les atouts dont ils disposent, l’ouvrage s’interroge sur la place qu’ils occupent et celle qu’ils veulent tenir ainsi que sur leur modèle de gouvernance.
. Olivier Godard, « Le Grand Atlas du monde », cartographe : Mélanie Marie, Alexandre Nicolas, éd. Autrement, 2025.
L’Atlas indispensable des années collège.
200 cartes et infographies issues des Grands Atlas Autrement, adaptées au programme d’histoire et de géographie du collège et expliquées par Olivier Godard, enseignant passionné et fondateur du concours Carto !
Histoire
Antiquité, Moyen Âge, période moderne et contemporaine : tous les grands évènements qui ont fait l’histoire de l’humanité.
Géographie
Habiter le monde, développement économique et social, changement climatique, mondialisation et géopolitique : les notions essentielles pour mieux comprendre notre société.
Un ouvrage de référence pour tous les passionnés.
. Frank Tétart, « Grand Atlas 2026 », cartographe Thomas Ansart, éd. Autrement, 2025.
L’ouvrage indispensable pour comprendre le monde.
Plus de 100 cartes inédites et mises à jour et 50 infographies et documents.
Un tour d’horizon complet des grands enjeux internationaux.
. Pierre-Alexandre Mounier, Frank Tétart, « Atlas historique des capitales déplacées. 70 capitales qui ont déménagé au fil des siècles », éd. Autrement, 2025
Paris sera toujours Paris… Oui, mais elle n’a peut-être pas toujours été capitale de la France ! On croyait les capitales, ces villes incarnant la puissance des nations, immuables et éternelles, mais les auteurs nous démontrent ici le contraire.
Une ville qui prend les eaux, une guerre civile ou un conflit international, une volonté d’affirmer son indépendance… Les raisons ne manquent pas pour déplacer le pouvoir d’une ville à une autre. Or ces fluctuations trahissent souvent les bouleversements d’un pays tout entier : comprendre pourquoi on a abandonné Calcutta pour New Delhi ou Fès pour Rabat, c’est aussi comprendre les mutations de l’Inde ou du Maroc.
Avec les histoires de 70 capitales, cet ouvrage offre un panorama fascinant : de Kyoto à Yamoussoukro, de Berne à Palikir en passant par Rio de Janeiro ou Washington, voyagez autour du monde et dans le temps avec ce livre enrichi de magnifiques cartes.
. Laurent Carroué, « Atlas de la mondialisation. Tensions, crises et basculement du monde ». Cartographe : Aurelie Boissiere, éd. Autrement, 2025
Les bouleversements des dernières années modifient les logiques d’organisation de la mondialisation. De nouvelles problématiques apparaissent, les rapports de forces évoluent et les équilibres s’ajustent en permanence. Cette troisième édition, largement remaniée pour rendre compte de ces changements, revient sur les enjeux de la géopolitique mondiale.
Les origines historiques de la mondialisation, et les étapes de la mise en place des mondialisations successives, depuis les grandes découvertes jusqu’à la mondialisation financière.
Le fonctionnement du système productif mondial.
Le rôle des territoires – centres, interfaces, périphéries et marges – et les stratégies des acteurs de la mondialisation.
Les grands enjeux d’avenir au cœur des débats pour un développement durable dans un monde plus solidaire et démocratique.
Les 90 cartes et infographies, en variant les échelles, rendent le monde plus intelligible pour que chacun d’entre nous devienne un citoyen éclairé et responsable.
. Collectif, « Atlas de l’Amérique précolombienne ». Cartographe : Aurelie Boissiere. Édition dirigée par : Brigitte Faugère. Collection dirigée par : Nicolas Goepfert, éd. Autrement 2025
Les civilisations ancestrales qui ont peuplé les Amériques émerveillent par la diversité et la richesse de l’héritage qu’elles ont laissé. Cet atlas invite ainsi à découvrir ces cultures – des sociétés riches, structurées, dynamiques – depuis les origines et jusqu’à ce que la colonisation les réduise et les transforme radicalement :
La Mésoamérique, correspondant à l’actuel Mexique, où se sont développés Olmèques, Mayas et Aztèques.
Les Andes, en Amérique du Sud, avec la culture Inca qui culmina avant l’arrivée des Européens.
Les autres civilisations qui, de l’Arctique à la Terre de Feu en passant par les Caraïbes ou l’Amazonie, ont évolué dans ces immenses territoires parfois hostiles.
Plus de 120 cartes, plans, documents et infographies inédits dévoilent la variété, l’organisation, les dynamiques et les échanges de ces civilisations fascinantes.
. Anceau (Éric), Figeac (Jean-François), Rey (Marie-Pierre)(dir.), « La Guerre de Crimée, première guerre contemporaine », éd. Classiques Garnier, 2025.
La guerre de Crimée (1853-1856) a eu une influence décisive dans l’histoire du fait militaire, préfigurant les guerres du xxe siècle. Cette étude tente d’inscrire le conflit dans une histoire transnationale, impliquant les soldats sur le front et les sociétés se mobilisant en arrière de celui-ci.
. Camille Alexandre, « Le Proche-Orient iranien, 1er février 1979 -7 octobre 2023 », éd. O. Jacob, 2025
L’attaque du Hamas en Israël, le 7 octobre 2023, n’est pas un coup de tonnerre dans un ciel sans nuages. On ne peut la comprendre sans la replacer dans son contexte : c’est ce que propose ce livre. Or ce qui se fait jour au fil des pages n’est pas ce qu’on pourrait croire. Car l’auteur démontre que, s’il apparaît à première vue comme un soubresaut du conflit israélo-palestinien, le 7-Octobre est surtout la conséquence d’une mécanique qui s’est mise en branle à Téhéran le
1er février 1979, jour de la révolution khomeyniste.
Camille Alexandre propose une relecture radicale de la géopolitique du Proche-Orient en mettant en lumière le rôle central et souvent méconnu de la République islamique d’Iran.
Combinant approche historique et décryptage théologique, l’auteur remonte aux racines de la révolution islamique pour retracer les dynamiques régionales des quarante dernières années et la construction d’un axe militaro-religieux structuré autour de Téhéran. Son but : enserrer l’« entité sioniste », l’ennemi à abattre, non pas au nom des droits des Palestiniens, mais au nom d’un projet théologique – libérer la Terre sainte. Les tueries du 7-Octobre sont le premier coup porté par la « Résistance islamique » au cœur même du sanctuaire qu’est Israël pour le peuple juif.
À contre-courant des lectures fragmentées ou émotionnelles, une chronique implacable qui s’étend de 1979 au 7 octobre 2023 et révèle l’unité idéologique et militaire d’un projet d’expansion issu de la révolution iranienne.
Le 7-Octobre n’est pas un dérapage, c’est un aboutissement. Un texte engagé, rigoureux, éclairant, qui retrace la véritable histoire de cette région.
Camille Alexandre est spécialiste des relations internationales. Arabophone et persanophone, Camille a travaillé plus de dix ans dans divers pays du Proche- et du Moyen-Orient, et a développé une expertise sur les mondes arabe et perse, ainsi que sur leurs interactions jusqu’à nos jours.
. Camille Alexandre, « Le Régime iranien à livre ouvert », éd. O. Jacob, 2025.
La République islamique d’Iran est au cœur de l’actualité, et pourtant on la connaît mal et on ne la comprend pas. Que penser d’un système qui se dit républicain, mais n’élit pas son chef suprême ? qui célèbre la justice, mais institutionnalise la répression ? qui prétend parler au monde, mais ne répond qu’à Dieu ?
« L’Iran n’est pas vraiment une théocratie », « les réformateurs sont des opposants au régime » ou encore « l’Iran ne veut pas l’arme nucléaire puisqu’il y a une fatwa qui l’interdit » : cet ouvrage examine et démonte méthodiquement trente idées fausses qui brouillent la compréhension du pouvoir iranien, en s’appuyant sur les textes fondateurs, le fonctionnement réel des institutions, les dynamiques de pouvoir et les faits historiques.
Camille Alexandre s’emploie à dissiper les couches de confusion, de malentendus, de fantasmes, pour donner à voir ce qu’est vraiment la République islamique : le support d’un projet religieux, révolutionnaire et militarisé, celui de la revanche des « déshérités », en Iran comme dans toute la région.
Un livre essentiel pour quiconque veut comprendre la nature réelle du régime iranien et son fonctionnement.
Camille Alexandre est spécialiste des relations internationales. Arabophone et persanophone, Camille a travaillé plus de dix ans dans divers pays du Proche- et du Moyen-Orient, et a développé une expertise sur les mondes arabe et perse, ainsi que sur leurs interactions jusqu’à nos jours.
. Vincent A. Lépinay, Estelle Lezean, « Connaissances françaises de la Russie
XIXe siècle – 24 février 2022 », Les Presses SciencePo, 2025.
L’ouvrage interroge la façon dont s’élaborent des connaissances sur un pays étranger et comment se nouent les conversations entre deux nations. Il montre aussi combien l’invasion de l’Ukraine est venue bouleverser cet édifice. Lire la suite
Après la défaite de 1870 face à la Prusse, la France tente de se rapprocher diplomatiquement de la Russie. Débute alors une riche et longue histoire d’explorateurs passionnés par la culture et la langue russes. Chercheurs, universitaires et intellectuels français s’attachent à saisir un objet qui n’a eu de cesse de se transformer : l’ Empire russe devenu Union soviétique, puis Fédération de Russie. Au cours de presque un siècle et demi, ils ont construit, parfois sans pouvoir accéder à leur terrain d’étude, des représentations françaises de la Russie et une discipline : les études russes.
Pour raconter cette histoire, Vincent A. Lépinay et Estelle Lezean ont mobilisé les outils des humanités numériques et développé une sociologie innovante des transformations de l’université française. En partant des travaux sur la Russie, ils interrogent la façon dont s’élaborent des connaissances sur un pays étranger et comment se nouent les conversations entre deux nations. Ils montrent aussi combien l’invasion de l’Ukraine est venue bouleverser cet édifice. Les chercheurs français se trouvent désormais contraints de repenser, à distance, jusqu’aux fondements de leur discipline.
. Habib Namane, Dynamique du marché pétrolier - Économie, Géopolitique et Environnement, Paris, L’envolée des mots, juin 2025.
Dynamiques du Marché Pétrolier : Économie, Géopolitique et Environnement vous plonge dans les profondeurs fascinantes du secteur énergétique mondial, révélant comment les forces du pétrole et du gaz façonnent notre avenir. Ce livre propose une exploration captivante des dynamiques complexes du marché, tout en mettant en lumière l’émergence des énergies renouvelables comme une solution indispensable face aux défis actuels. Découvrez comment les produits pétroliers et gaziers, malgré leur dominance historique, sont confrontés à une transformation radicale sous l’effet de la volatilité des prix, des crises environnementales, et des nouvelles réglementations. Explorez les coulisses de la chaîne d’approvisionnement énergétique, des processus de raffinage aux stratégies de couverture contre les fluctuations de prix. Ce livre se distingue par sa vision audacieuse des énergies renouvelables, en soulignant leur rôle crucial dans la transition énergétique. Vous serez fascinés par les innovations technologiques qui ouvrent la voie à un avenir plus durable, tout en naviguant dans un paysage en constante évolution. En parallèle, l’ouvrage aborde les répercussions humanitaires et géopolitiques des crises énergétiques, notamment les déplacements massifs de populations causés par la surexploitation des ressources et les dérèglements climatiques. Cette analyse approfondie vous fera comprendre les liens entre les crises énergétiques et les enjeux sociaux globaux.
. Marcel Bourdette-Donon, Grands Lacs - Géopolitique, mémoire et conflits de souveraineté en Afrique centrale, Paris, L’harmattan, septembre 2025.
Écrire depuis Kigali n’est pas écrire sur Kigali. C’est écrire avec elle, en elle. Refuser la vieille cartographie du monde, faite de centres et de périphéries. Reconnaître que les paroles du Sud ne gravitent plus autour de l’Occident, mais s’organisent sous leur propre ciel. Et que dans cette constellation mouvante, l’Afrique a pleinement voix au chapitre. Dans cet ouvrage, l’auteur arpente les tensions, les silences et les violences politiques qui traversent la région, à la lumière d’une expérience vécue en République démocratique du Congo, au Burundi et au Rwanda. Billet après billet, il démonte les narrations dominantes, interroge les discours figés et réaffirme la légitimité d’un récit africain autonome, lucide, souverain, dérangeant.
. Olivier Bachelard, Didier Vinot, Les nouveaux espaces-temps de travail - Enjeux théoriques et retours du terrain, Paris, Ma Editions, octobre 2025.
Les crises — sanitaire, géopolitique, climatique — de la décennie 2020 ont transformé radicalement nos conceptions et relations au travail. La prise de conscience collective que tout peut s’arrêter brutalement, que nos environnements tant écologiques, qu’économiques ou de paix sont fragiles ont mis en position centrale la question de la place et du sens du travail pour nos concitoyens. Concrètement sont impactés tout autant la gestion du temps que celle des espaces de collaboration et de coopération. Nous entrons dans une ère d’un nouvel espace-temps du travail.
. Valentine Zuber, Blandine Chelini-Pont, Roland Dubertrand, Géopolitique des religions - Un nouveau rôle du religieux dans les relations internationales ?, Paris, Cavalier Bleu Editions, octobre 2025.
Loin de décliner irrémédiablement comme certains théoriciens de la sécularisation le prédisaient, les religions sont redevenues des acteurs incontournables des relations internationales. On le mesure au réveil de la violence à justification religieuse qui constitue un élément saillant de guerres ethniques ou nationales (conflit israélo-palestinien et guerre de Gaza, conflit indo-pakistanais, guerre civile yéménite, violences interreligieuses accrues dans la région des Grands Lacs, au Nigeria, en Inde, au Myanmar, au Soudan…) ou du terrorisme (d’Al-Qaïda à Daech, en passant par les tueries initiées par des suprématistes défendant l’Occident chrétien). L’influence des religions dans le monde ne peut pourtant pas se résumer à cette seule violence. Leur activité à l’international répond à de multiples motivations : répandre leur message spirituel, promouvoir une morale, renforcer la cohésion de leurs adeptes. Elles jouent également un rôle important dans le développement d’une culture de paix et de dialogue et dans le règlement de certains conflits, par la pratique du dialogue interreligieux, de la médiation et du secours humanitaire. À l’origine de certains conflits, les religions peuvent tout aussi bien oeuvrer à leur résolution…
. Arthur Boutellis, Rivalités pour la paix - Géopolitique de l’ONU, Paris, Armand Colin, septembre 2025.
Alors que les opérations de paix ont longtemps fait consensus parmi les États Membres de l’ONU, elles subissent aujourd’hui de plein fouet les conséquences des intérêts et valeurs de plus en plus divergents de grandes et moyennes puissances. Ce livre met à jour les modes de puissance et d’influence déployées à l’ONU tant au siège des Nations Unies que dans la conduite des opérations menées sur le terrain. À New York, les nominations de chefs de mission et envoyés spéciaux sont de plus en plus politisées par des puissances rivales. Sur le terrain, ce sont d’autres jeux de pouvoir qui se manifestent à travers les contributions en troupes, le comportement des pays hôtes et diverses « forces parallèles » qui influent également sur la conduite des casques bleus. Force est de constater que le durcissement des relations internationales engendre non seulement des gagnants et des perdants, mais commence aussi à avoir des conséquences délétères sur les opérations de paix qui risquent d’être moins impartiales, moins légitimes, et moins pertinentes à l’avenir.
. François Polet, Nouvelle géopolitique de l’Afrique, Paris, Syllepse Editions, septembre 2025.
L’expulsion de la France du Sahel constitue un retournement géopolitique. Il s’inscrit dans un mouvement de redistribution des influences en Afrique, dans le contexte des recompositions à l’œuvre depuis le début de la guerre russo-ukrainienne. Indubitablement, la nouvelle guerre froide redonne un poids stratégique au continent, du fait de la compétition entre puissances - grandes mais aussi moyennes - pour ses ressources naturelles, ses marchés, ses bases militaires, ses votes dans les enceintes onusiennes. Et en dépit de son dédain apparent pour l’Afrique, l’administration Trump y poursuit l’ambition états-unienne de contrer la Chine dans le domaine des minerais stratégiques. Si cette nouvelle configuration rend des espaces de souveraineté aux États, qu’en est-il de la capacité du continent à formuler un point de vue africain pour peser sur les grands enjeux mondiaux, en matière de sécurité collective, de changement climatique ou d’ordre économique ?? Cette capacité progresse globalement quoique de manière très inégale, du fait de la pesanteur des hiérarchies internationales comme du déficit de coordination entre diplomaties, y compris dans le cadre de la coopération Sud-Sud. Ces difficultés reflètent les blocages dans la marche vers l’intégration politique de la région. Destinée à mettre en oeuvre le vieux projet panafricain, l’Union africaine éprouve les plus grandes peines à imposer un cadre collectif à ses membres, en témoigne son impuissance face à la crise qui ravage l’est du Congo.
. Guillaume Lagane, Géopolitique de l’Europe, Paris, Puf, septembre 2025.
La Russie va-t-elle envahir les pays baltes ? Les États-Unis vont-ils annexer le Groenland ? Les pays européens vont-ils devoir s’allier avec la Chine ? Toutes ces questions nous paraissaient purement théoriques, sinon absurdes, il y a encore cinq ans. Mais, depuis le début de la guerre en Ukraine et la réélection de Donald Trump, l’Europe se pose de façon inédite la question de sa sécurité, peut-être même de sa survie. Elles se souvient que des guerres l’ont déchirée, que des rivalités la traversent, que des puissances étrangères la menacent. En d’autres termes, l’Europe redécouvre la géopolitique. Cet ouvrage examine l’héritage des Européens, celui d’un continent riche en potentialités mais aujourd’hui affaibli par de multiples défis, autant économiques que démographiques ou militaires. Il examine aussi les possibilités qui s’offrent au Vieux Continent, depuis la coopération renouvelée avec l’Amérique, recherchée par le camp atlantiste, jusqu’à la création d’une véritable autonomie stratégique, sans oublier la possibilité d’un effacement des États européens en tant qu’acteurs indépendants dans la gigantomachie que deviennent les relations internationales.
. Hisham Kilani, L’Axe Eurasien : L’Iran au cœur du nouvel ordre mondial, Paris, Global East-West LTD, août 2025.
À une époque où les plaques tectoniques de la géopolitique mondiale se recomposent sous nos yeux, Le Dernier Échec de L’Empire offre une analyse magistrale et indispensable des forces qui façonnent le nouvel ordre du XXIe siècle. Cet ouvrage ambitieux décrypte la fin de l’hégémonie occidentale à travers le prisme d’un acteur central et souvent mal compris : l’Iran. Loin de le présenter comme une simple puissance régionale, ce livre le révèle comme un pivot civilisationnel et stratégique, au cœur de l’émergence d’un puissant axe eurasien avec la Russie et la Chine. Plongez dans un voyage fascinant qui s’étend de l’antiquité perse de Cyrus le Grand à la Révolution islamique de Khomeini, et au-delà. Explorez la résilience culturelle d’une civilisation millénaire, son art, sa poésie et son identité complexe qui lui permettent de naviguer dans les eaux tumultueuses de la politique moderne. L’auteur vous guide avec brio à travers les arcanes de la diplomatie iranienne, ses stratégies de survie face aux sanctions économiques, son rôle dans les conflits du Moyen-Orient et ses dynamiques sociales internes, où la jeunesse aspire au changement. Au-delà de l’Iran, ce livre est une exploration des nouvelles dynamiques de pouvoir. Il analyse en profondeur l’alliance stratégique avec Moscou et Pékin, non pas comme une simple coalition de circonstance, mais comme le fondement d’un ordre mondial multipolaire en gestation. Quels sont les enjeux énergétiques, militaires et technologiques de cet axe ? Quels scénarios de coopération ou de confrontation se dessinent à l’horizon ? Véritable tour de force, Le Dernier Échec de L’Empire est bien plus qu’un livre sur l’Iran. C’est une clé de lecture essentielle pour quiconque souhaite comprendre les forces profondes qui redéfinissent notre monde, le déclin d’un empire et l’aube incertaine d’une nouvelle ère. Un ouvrage incontournable pour saisir le présent et anticiper l’avenir.
. Katharina Pistor, The Law of Capitalism and How to Transform It, New Haven, Yale University Press, septembre 2025.
Même si le capitalisme est généralement décrit comme un système économique, il s’agit en réalité d’un régime juridique profondément ancré. Le droit fournit les éléments nécessaires pour codifier des objets simples, des promesses et des idées en tant qu’actifs financiers.
Il offre également les moyens d’échapper aux contraintes juridiques que les sociétés ont souvent imposées au capitalisme. Souvent loué pour avoir créé des niveaux de richesse sans précédent dans l’histoire de l’humanité, le capitalisme est également en grande partie responsable des deux plus grands problèmes auxquels l’humanité est actuellement confrontée : l’érosion de la cohésion sociale et politique, qui sape le gouvernement démocratique, et les menaces qui découlent du changement climatique.
En explorant les moyens par lesquels les systèmes juridiques occidentaux permettent aux individus de faire valoir leurs intérêts au détriment de la société, Katharina Pistor révèle comment le capitalisme est un système non durable conçu pour favoriser les inégalités. Elle propose des idées pour repenser la manière dont la transformation du droit et de l’économie peut nous aider à créer un système plus juste — avant qu’il ne soit trop tard.
. Pierre Charbonnier, La coalition climat, Paris, Seuil, septembre 2025.
Les politiques climatiques se trouvent dans une situation paradoxale : en dépit du consensus scientifique, de l’agenda diplomatique, de l’activisme social, et peut-être d’une certaine légitimité morale, la traduction politique effective de l’impératif climatique est en panne. Partout, le « front du refus » paraît l’emporter. Cet essai vise à identifier à quelles conditions sociales et intellectuelles une coalition climat pourrait se former pour renverser la coalition fossile.
La notion de « coalition climatique » permet de repenser la dynamique politique de la transformation écologique en partant de ses acteurs concrets, de leur confrontation aux intérêts attachés au modèle économique insoutenable. Le climat ne peut plus être envisagé comme un enjeu parmi d’autres, il doit constituer la clef de lecture, la porte d’entrée dans les dynamiques socio-économiques contemporaines.
Nous sommes engagés dans une mutation historique sans être en possession d’un guide suffisamment développé pour la traverser : c’est ce à quoi cet essai de théorie et de sociologie politiques entend contribuer.
. Nathanaël Wallenhorst, 2049. Ce que le climat va faire à l’Europe, Paris, Seuil, septembre 2025.
À quoi ressemblerait notre vie quotidienne, en 2049, sur une Terre qui franchirait les principaux points de basculement ?
Fort de savoirs sans cesse actualisés, Nathanaël Wallenhorst anticipe d’une façon très concrète ce que pourrait être 2049 côtés écosystème, climat et société. Aurons-nous toujours des saisons en 2049 ? De quoi sera faite notre alimentation ? Quels seront nos loisirs ? Climat, eau, santé et migrations, l’auteur raconte notre quotidien dans ce futur proche si rien ne change.
Dessinant ainsi la trajectoire de nos sociétés, l’auteur révèle ce que seront nos conditions d’existence dans vingt-cinq ans. Alors, comment aimerons-nous ? Comment travaillerons-nous ? Comment vivrons-nous ensemble à Thessalonique, en Laponie ou à Rennes ? C’est à toutes ces questions que sont apportées des réponses. Démonstration solide, l’ouvrage dresse un constat clair et détaillé de ce que serait l’habitabilité humaine dans les décennies à venir, si nous n’agissons pas aujourd’hui.
. Julien Bueb, Géopolitique du sable, Une ressource omniprésente, auxiliaire de puissance et de conflits, Paris, Cavalier Bleu, juin 2025.
À la fois omniprésent à la surface de la planète, notamment dans les déserts, et invisible dans la variété de ses usages dans notre quotidien, le sable est la ressource la plus consommée au monde. Accompagnant l’urbanisation massive à l’échelle mondiale, son extraction dépasse celle des combustibles fossiles et provoque d’importantes dégradations environnementales. Ressource très lucrative pour certains pays et les mafias qui s’y implantent, elle permet à d’autres d’accroître leur territoire et d’asseoir leur puissance maritime et sécuritaire. Tous les ingrédients sont donc réunis pour faire du sable une ressource éminemment géopolitique. Car, s’il n’est pas directement à l’origine de conflits, il en est un auxiliaire clé. La géopolitique du sable conduit aussi Julien Bueb à s’interroger sur l’extractivisme et, plus largement, sur le libéralisme et le capitalisme, et les dérives qui lui sont attachées.
. Christopher Clark, A Scandal in Königsberg, Bristol, Allen Lane, septembre 2025.
Aujourd’hui partie intégrante de l’enclave russe de Kaliningrad, sur la Baltique, l’ancienne ville portuaire prussienne et allemande de Königsberg a toujours été un endroit quelque peu endormi, condamné à être célèbre pour avoir été autrefois la résidence d’Emmanuel Kant. Mais à la fin des années 1830, pendant une courte période, elle a fait parler d’elle pour de mauvaises raisons.
Des accusations sensationnelles sont lancées, laissant entendre que sous la surface endormie de la ville se cacheraient de sombres courants érotiques et des trahisons déchirantes. Pour les autorités prussiennes, c’est exactement le genre d’effondrement moral qu’elles redoutaient. Au lendemain des guerres révolutionnaires et napoléoniennes, qui avaient bouleversé toute une génération, chaque écart pouvait être considéré comme le signe avant-coureur de nouvelles tempêtes.
A Scandal in Königsberg fait revivre une époque et un lieu que nous situerions aujourd’hui dans les années tranquilles du « Biedermeier », entre les bouleversements sismiques des années 1810 et 1840. Mais ce petit tourbillon dans lequel la soif spirituelle, la vanité, la rivalité professionnelle, l’incontinence sexuelle, la naïveté et le caprice humain menaçaient de déchirer une ville, a quelque chose d’intemporel.
. Françoise Mélonio, Tocqueville, Paris, Gallimard, « Biographies », septembre 2025.
Il est le plus profond penseur de la démocratie, l’observateur le plus aigu de la société américaine et l’interprète indépassable de la transition inachevée en France des temps aristocratiques à l’ère démocratique.
L’œuvre de Tocqueville échappe à l’organisation ordinaire de nos savoirs. Elle est, autre singularité, inséparable de sa situation personnelle, familiale, historique. L’une se lit dans l’autre. La Démocratie en Amérique, L’Ancien Régime et la Révolution, les Souvenirs sur la IIe République, comme son immense correspondance avec les grands esprits de son époque mobilisent la puissance de sa pensée au service de l’action politique. Né sous le Premier Empire, mort sous le Second, il ne cesse, dès sa jeunesse, de sonder les bienfaits et les pathologies d’une démocratie qu’il sait inévitable.
Cette biographie est la première à nouer le lien intime entre l’homme privé et l’acteur politique, son enracinement aristocratique et son consentement à la démocratie, une sensibilité romantique et une intelligence théorique des passions humaines, mœurs et lois mêlées. Elle reconstitue l’unité d’une vie sans cesse agitée par les résurgences révolutionnaires, les menaces d’un individualisme délétère et la hantise du déclin de la France auquel il imagine, un moment, trouver le remède dans la colonisation.
On découvre, au fil des pages, un homme attachant, attentif à ses compatriotes normands, fidèle à ses amis, amoureux infidèle de sa femme, rebelle à toute espèce de dogmatisme, mélancolique mais jamais désespéré… Et, pour finir, un des maîtres de la prose française.
. Karine Sitcharn, Gouverner la jeunesse. De Gaulle et l’ambition impériale (1954-1974 Antilles – Algérie – France), Paris, Gallimard, septembre 2025.
En confrontant les témoignages de soldats originaires des Antilles et des Vosges, l’historienne guadeloupéenne Karine Sitcharn présente une vision inédite de la guerre d’Algérie : un conflit qui façonne la politisation et la construction identitaire des appelés.
Au même moment, le général de Gaulle, en définissant ce qu’est un Français, décide des territoires qui resteront dans le giron national et de ceux qui seront décolonisés, par déficit de « francité ». Face à l’hégémonisme américain et soviétique, le Général entend porter haut la voix de la France dans le monde.
Munie d’une autorisation exceptionnelle, l’autrice, qui a dépouillé les archives tamponnées « très secret » de Jacques Foccart sur l’outre-mer, nous plonge au cœur d’une raison d’État résolue à préserver la puissance française.
En ces années 1950-1970, un espace mondialisé s’ouvre aux mouvements sociaux : paysans, ouvriers, étudiants occupent ainsi le devant de la scène sociale et politique. Mai 1967 en Guadeloupe, mai 1968 en France sont les porte-drapeaux de ces « luttes et de ces rêves ».
Par l’enquête et le témoignage, à hauteur de femmes et d’hommes, l’autrice dévoile de véritables échappées belles dans les rapports de domination.
. Kerry Goettlich, From Frontiers to Borders : How Colonial Technicians Created Modern Territoriality, Cambridge, Cambridge University Press, août 2025.
Comment la territorialité moderne est-elle apparue et quelles en sont les conséquences ? Cet ouvrage examine ces questions fondamentales dans une perspective mondiale unique. Kerry Goettlich soutient que les frontières linéaires sont le produit de rencontres coloniales particulières, plutôt que d’être essentiellement une pratique intra-européenne imposée artificiellement aux régions colonisées. Il reconceptualise la territorialité moderne comme un phénomène distinct de la souveraineté et de l’État, fondé sur des pratiques et des expertises de délimitation et de démarcation. S’appuyant sur des sources primaires et secondaires, From Frontiers to Borders examine la façon dont cette expertise de démarcation frontalière a émergé dans les colonies de peuplement en Amérique du Nord et en Inde britannique, des cas qui mettent en lumière différents types de domination et d’influence coloniales. Il explore également certaines des conséquences de la mondialisation de la territorialité moderne, en exposant les origines coloniales des études sur les frontières et l’impact des experts en matière de frontières sur la Conférence de paix de Paris de 1919-1920.
. Tim Berners-Lee, This Is for Everyone : The Unfinished Story of the World Wide Web, New York, Farrar, Straus and Giroux, septembre 2025.
Peut-être l’inventeur le plus influent du monde moderne, Sir Tim Berners-Lee est un technologue d’un genre particulier. Né la même année que Bill Gates et Steve Jobs, il demeure célèbre pour avoir diffusé son invention, le World Wide Web, sans aucune contrepartie commerciale. Son adoption généralisée a tout changé, transformant l’humanité en première espèce numérique. Nous vivons, travaillons, rêvons, nous disputons et nous connectons grâce au web.
Dans ces Mémoires intimes, Berners-Lee raconte l’histoire de son invention emblématique, explorant la façon dont elle a inauguré une nouvelle ère de créativité et de collaboration tout en libérant des forces puissantes qui mettent en péril la vérité et la vie privée et polarisent le débat public.
Avec l’humour et la franchise qui le caractérisent, il raconte comment il est arrivé au CERN, le laboratoire européen de physique des particules, en tant que jeune ingénieur et comment il a rapidement eu l’idée étonnante d’ajouter des hyperliens à l’Internet alors naissant. Son objectif était de libérer une vague de créativité et de collaboration au profit de tous, un objectif qu’il poursuit encore aujourd’hui.
Parsemé d’anecdotes riches et de réflexions amusantes, This Is for Everyone est le récit de l’essor du monde numérique. Alors que le développement rapide de l’IA apporte de nouveaux risques et de nouvelles possibilités, Berners-Lee offre également un guide essentiel pour les décisions à venir et montre comment nos vies numériques peuvent être repensées pour le bien de l’humanité plutôt que pour le profit ou le pouvoir.
. Jean Vioulac, Philosophie de la catastrophe. L’esprit du nihilisme et son destin, Paris, PUF, septembre 2025.
Le questionnement philosophique naît depuis Platon de l’embarras. Une pensée qui aujourd’hui ne se préoccuperait pas de la catastrophe en cours ne ferait que manifester son insignifiance.
La nouveauté de l’événement déconcerte la philosophie qui doit réagir en proposant de mettre au jour les fondements de ses théories et les processus réels de l’Histoire. Une logique de soumission est à l’œuvre dès la Grèce ancienne.
L’auteur interroge les ressorts de la soumission totale à l’hégémonie du Capital. Dans le consentement à l’automatisation s’assouvit l’archaïque désir de retour à l’inanimé : la pulsion de mort.
. Dan Wang, Breakneck : China’s Quest to Engineer the Future, New York, W. W. Norton & Company, août 2025.
Depuis près d’une décennie, l’analyste des nouvelles technologies Dan Wang, « observateur talentueux de la Chine contemporaine » (Ross Douthat), vit au cœur des progrès étonnants et chaotiques du pays. Les ponts imposants, les voies ferrées rutilantes et les usines tentaculaires de la Chine ont amélioré ses résultats économiques en un temps record. Mais ces changements rapides ont également provoqué des remous douloureux dans toute la société. Cette réalité — répression politique et croissance spectaculaire — n’est pas un paradoxe, mais plutôt une caractéristique de la mentalité chinoise en matière d’ingénierie.
Dans Breakneck, Dan Wang mêle analyse politique, économique et philosophique à des enquêtes pour révéler un nouveau cadre permettant de comprendre la Chine, qui nous aide également à voir plus clairement les États-Unis. Alors que la Chine est un État ingénieur poursuivant sans relâche des mégaprojets, les États-Unis sont au point mort. L’Amérique s’est transformée en une société de juristes qui bloque tout par réflexe, le bon comme le mauvais.
Alliant une analyse acérée à une narration immersive, Wang dresse un portrait saisissant d’une nation en pleine mutation. Breakneck traverse des métropoles telles que Shanghai, Chongqing et Shenzhen, où l’État ingénieur a créé non seulement des infrastructures éblouissantes, mais aussi un sentiment d’optimisme. Le livre expose également les dérives de l’ingénierie sociale, notamment la surveillance des minorités ethniques, la répression politique et les traumatismes liés à la politique de l’enfant unique et à la stratégie « zéro Covid ».
À une époque marquée par l’animosité et la méfiance, Dan Wang dévoile aussi les similitudes choquantes entre les États-Unis et la Chine. Breakneck révèle comment chaque pays peut montrer la voie à l’autre : les citoyens chinois seraient mieux lotis si leur gouvernement apprenait à valoriser les libertés individuelles, tandis que les Américains le seraient si leur gouvernement apprenait à embrasser l’ingénierie et à produire de meilleurs résultats pour le plus grand nombre, et non pour une minorité.
. Daniel Gunnar Kressel, Hispanic Technocracy. From Fascism to Catholic Authoritarianism in Spain, Argentina, and Chile, 1945–1991, Cambridge, Cambridge University Press, août 2025.
Hispanic Technocracy explore l’émergence, l’apogée et le déclin d’une école de pensée post-fasciste qui s’est matérialisée en tant qu’idéologie d’État pendant la guerre froide sous trois régimes militaires : l’Espagne de Francisco Franco (1939-1975), l’Argentine de Juan Carlos Onganía (1966-1973) et le Chili d’Augusto Pinochet (1973-1988).
Dans cette histoire intellectuelle et culturelle, Daniel Gunnar Kressel examine la manière dont l’Espagne franquiste a précocement remplacé son idéologie fasciste par un modèle économique néolibéral. Appuyée par l’Opus Dei, dans le contexte du « miracle économique » des années 1960, elle a favorisé l’émergence d’une modernité « européenne dans les moyens » et « hispanique dans les fins ».
Il met en lumière la manière dont un réseau transatlantique d’idéologues a ensuite promu ce modèle en Amérique latine, le présentant sous les traits d’un État autoritaire adapté à leur processus de modernisation. Il montre enfin comment les idéologues argentins et chiliens ont adapté la boîte à outils idéologique franquiste à leur situation politique, dépassant ainsi le modèle original.
. Didier Fassin, Leçons de ténèbres. Ce que la violence dit du monde, Paris, La Découverte, septembre 2025.
La violence hante le monde. Des homicides aux génocides, des abus sexuels aux guerres civiles, des répressions de protestations aux persécutions de minorités, des mouvements citoyens qui la dénoncent aux silences institutionnels qui l’occultent, elle est partie intégrante de la vie en société et de l’expérience humaine. Présente dans le discours politique et la production artistique, dans l’espace public et les réseaux sociaux, elle ne cesse d’être questionnée, contestée, redéfinie, par la loi et le droit comme par les mobilisations sociales et le discours savant, dévoilant ses multiples dimensions, symbolique et structurelle, morale et psychique, de genre et d’État.
Paradoxalement, toutefois, les sciences sociales n’ont commencé à l’analyser que tardivement. Inversement, les mythes et récits de ses origines ont sans cesse été réactualisés à des fins idéologiques, tandis que la psychanalyse, l’éthologie et la philosophie politique l’exploraient dans diverses perspectives généalogiques.
Mais la violence n’est pas seulement un objet d’étude, elle est aussi une matière vivante dont s’emparent écrivains et cinéastes, juristes et témoins, militaires et militants. Son écriture et ses représentations interrogent les manières de la qualifier et de l’attester, la possibilité de la refuser ou au contraire de la défendre.
En étudiant ses formes, il s’agit d’appréhender ce que le monde dit de la violence et ce que la violence fait au monde.
. Faisal Devji, Waning Crescent. The Rise and Fall of Global Islam, New Haven, Yale University Press, août 2025.
Jusqu’au XIXe siècle, l’islam était appréhendé comme un ensemble de croyances et de pratiques.
Mais après que les musulmans ont commencé à considérer leur foi comme un acteur historique sur la scène mondiale, ils ont eu besoin de raconter à nouveau la naissance de l’islam et d’imaginer sa mort possible. Faisal Devji soutient que ce changement, déclenché par la crise de la souveraineté musulmane à l’époque des impérialismes européens, a permis de réfléchir à la notion d’action dans un contexte mondial : un islam libéré de l’autorité des souverains et des religieux avait le potentiel de représenter l’humanité elle-même comme une nouvelle réalité empirique.
Les musulmans ordinaires, désormais reconnus comme les représentants privilégiés de l’islam, ont été libérés des formes traditionnelles d’autorité islamique. Mais leur conception de l’islam comme agent impersonnel de l’histoire signifiait qu’il ne pouvait être défini en termes religieux ou politiques. Son existence en tant que sujet civilisationnel, puis idéologique, a également privé des figures telles que Dieu et le Prophète de leur subjectivité théologique et a ôté à la communauté musulmane son pouvoir d’action politique. Devji met en lumière cette histoire et explore ses ramifications pour le monde musulman contemporain.
. Juan Sebastián Carbonell, Un taylorisme augmenté. Critique de l’intelligence artificielle, Paris, Amsterdam, septembre 2025
Depuis une décennie, entreprises, gouvernements et médias ne ménagent pas leurs efforts pour vendre le rêve d’une révolution numérique. La refuser serait passer à côté de la marche inéluctable de l’histoire.
D’autres, à l’inverse, s’inquiètent d’une prise de pouvoir par les machines qui aura raison de nos emplois et de nos libertés. De discours apologétiques en prophéties apocalyptiques, on en oublierait que le changement technologique ne s’impose pas à la manière d’une fatalité naturelle.
Voulu, encadré et construit, il est par essence politique. Au lieu de se laisser aveugler par l’apparente nouveauté de l’intelligence artificielle, il faut la replacer dans l’histoire longue de l’organisation du travail. Elle prolonge et intensifie la logique tayloriste née dans les usines Ford : le travail est décomposé en une série de tâches, la conception séparée de l’exécution. Le déploiement du management algorithmique a pour principal but d’accentuer le contrôle de la main-d’œuvre, et sa déqualification.
Résister à l’emprise des machines, comme l’ont fait les luddites il y a deux siècles, ce n’est donc pas rejeter le progrès mais s’attaquer aux intérêts du patronat.
. Barthélémy Courmont, Natalia Guilluy-Sulikashvili, Jérôme Roudier. De la chute du mur de Berlin au conflit ukrainien. Trajectoires politiques, stratégiques et économiques en Europe de l’Est. Paris, Editions L’Harmattan, mai 2024.
Depuis la chute du mur de Berlin, deux générations de leaders politiques et économiques se sont succédées en Europe Centrale et Occidentale. Au terme de trente années d’évolution, apparaît une nouvelle génération de leaders qui n’ont pas connu les régimes antérieurs et héritent d’une transition problématique. Se pose ainsi la question de l’homogénéité de sociétés qui ont parfois pris des trajectoires très différentes, mais n’en sont pas moins encore souvent assimilées de façon réductrice à des « pays de l’Est ». De même, tandis que la guerre marque son retour sur le sol européen avec l’offensive russe en Ukraine, l’importance accordée à la trajectoire de ces pays semble plus que jamais déterminante.
Les cas explorés dans cet ouvrage collectif rassemblant des experts du monde francophone et d’Europe centrale et orientale explorent le phénomène du changement de génération et questionnent son impact réel sur l’évolution politique et économique, impactant la prise de décision en Europe de l’Est.
. Ben Gitai. Cartographies du pouvoir. Histoire du paysage de la vallée du Jourdain. Paris, Metis Presses, juin 2024.
Cartographies du pouvoir décrit l’histoire saisissante de la vallée du Jourdain à travers l’étude du site de Naharayim/Al-Baqoura, terrain de luttes de pouvoir pour la terre et pour l’eau depuis des siècles. Il nous immerge dans des dynamiques politiques et culturelles complexes et nous révèle les aspirations concurrentes liées aux ressources vitales contestées.
Présentant de nombreuses cartes inédites et spectaculaires et les comparant à l’échelle du temps, Ben Gitai montre à quel point ces documents ont été instrumentalisés par les régimes successifs – ottoman, britannique et israélo-jordanien – qui ont transformé le site et son paysage au cours des cent-cinquante dernières années. Ce corpus cartographique dialogue avec des photographies d’époque et des visualisations par nuages de points qui permettent d’actualiser la compréhension du site et de ses strates.
. Hugues Eudeline. Géopolitique de la Chine. Une nouvelle thalassocratie. Paris, PUF, septembre 2024.
Au début du XIXe siècle, la Chine est le pays le plus riche au monde. Incapable de se moderniser, l’empire puis la république vont connaître une longue phase de déclin jusqu’à la mort de Mao Zedong. Pour redevenir la puissance de premier rang qu’elle était avant le « siècle d’humiliation » et assurer la croissance économique nécessaire à son développement, l’État, pour la première fois de son histoire, privilégie la mer. En 1978, le président Deng Xiaoping, qui sera imité par ses successeurs, ouvre le pays au commerce mondial par ses ports, lui permettant un succès économique fantastique. En 2013, Xi Jinping a annoncé « l’initiative de la ceinture et de la route », dont la principale composante est la « route maritime de la soie du XXIe siècle », créant des partenariats inédits à travers le monde. Mais cette expansion commerciale s’accompagne d’ambitions géostratégiques qui rebattent les cartes en mer de Chine et mettent à mal l’équilibre mondial. Pour protéger ses intérêts, la Chine se dote ainsi d’une flotte puissante et diversifiée, capable d’intervenir partout dans le monde. Depuis 2016, elle a dépassé l’US Navy en nombre d’unités. La Chine est la nouvelle puissance maritime mondiale : faut-il s’en inquiéter ?
. Nathalie Duclos, Ex-Combatants and International Statebuilding. Veterans as Peace Brokers in Kosovo. Londres, Routledge, juin 2024.
This book examines the international efforts to regulate violence in Kosovo since 1999 through the United Nations Mission in Kosovo (UNMIK) and covers 15 years of international presence.
The book analyses the process of implementing international policies from a sociological perspective, and looks at the adaptations and arrangements of public policies achieved through the transactions of international actors with local actors, who are at the heart of policy implementation. In particular, it analyses the disarmament, demobilisation, and reintegration of combatants (DDR) programme and shows the extent to which it was co-produced with Kosovo Liberation Army (KLA) leaders co-opted by international administrators. These analyses take the opposite view to the work that considers ex-combatants as spoilers. In Kosovo, the combatant leaders acted as peace brokers, facilitating demobilisation and exercising disciplinary control over rank-and-file combatants. Their position as brokers helped them to take control of the new state being built under international administration. This book shows the importance of the relationship between ex-combatants and the state and illustrates the multiplicity of their possible trajectories, including political ones. To elucidate the dynamics of co-production in shaping DDR policies and hybridising international policies as well as in state formation, the book relies on around a hundred interviews with ex-combatants of the KLA and with international personnel, as well as on the archives of international organisations and observations in the field.
This book will be of much interest to students of international statebuilding, peace and conflict studies, Balkan politics and international relations.
. Romain Sèze. Se sacrifier pour la cause. Trajectoires des femmes djihadistes. Paris, CNRS Editions, septembre 2024.
En France, un quart des personnes incarcérées pour des faits de terrorisme jihadiste sont des femmes. Presque absentes dans les années 1990, en arrière-plan dans la décennie suivante, elles sont devenues des protagonistes à part entière de l’islamisme radical au cours des années 2010, marquées par de multiples attentats sur le sol français et par l’essor de l’État islamique en Syrie. Qui sont ces femmes ? De quels milieux, de quels genres de famille viennent-elles ? De quelles manières se sont-elles engagées pour la cause, jusqu’au sacrifice et à l’action violente ? Aujourd’hui, quels regards portent-elles sur leur parcours ? Et qu’est-ce que ces derniers nous disent de la société française du début du XXIe siècle ?
À distance des polémiques ou des préjugés, cette enquête exceptionnelle qui retrace les différentes étapes et la diversité des trajectoires d’engagement de ces militantes a été menée au sein même des prisons françaises, auprès de l’ensemble des détenues concernées.
. Yoletty Bracho, Fabrice Andréani, Thomas Posado, Lucie Laplace (dirs.). Alternances critiques et dominations ordinaires en Amérique latine. Crises, résistances et continuités. Rennes, PUR Editions, juin 2024.
Neuf enquêtes de jeunes chercheurs en sciences sociales examinent de façon transversale le politique au sein des sociétés latino- américaines : politiques sociales au Brésil et du logement au Venezuela ; extractivisme et anti-extractivisme au Mexique et en Équateur ; travail et action syndicale au Chili ; participation des populations indigènes et des femmes au Guatemala et au Mexique ; régulation de la violence et de la contestation en Colombie.
Conjuguant les approches « macro » ou « par le haut » du monde social (institutions, régimes, crises, élites), et celles dites « micro » ou « par le bas » (marginalisation, subalternité, mobilisations protestataires), le livre saisit les modalités de reproduction de l’ordre social dans des contextes régulièrement marqués par des alternances gouvernementales placées sous le signe de la « rupture ». À rebours des catégorisations partisanes et des démarches classificatoires, il identifie ainsi quelques-unes des logiques clé par lesquelles les alternances critiques s’accommodent, se nourrissent, invisibilisent ou redéployent les structures fondamentales des dominations ordinaires.
. Andrew Lambert, No More Napoleons. How Britain Managed Europe from Waterloo to World War One, New Haven, Yale University Press, juin 2025.
À l’issue des guerres napoléoniennes, une paix fragile s’installa en Europe. Les frontières du continent furent redessinées et l’Empire français, qui représentait autrefois une menace majeure pour la sécurité britannique, fut réduit à néant. Mais après des décennies de conflits incessants, l’économie britannique était accablée par une dette écrasante. Comment ce petit État insulaire et maritime pouvait-il assurer l’ordre outre-Manche ? Andrew Lambert propose une nouvelle lecture dynamique du XIXe siècle, montrant comment les décideurs politiques britanniques ont façonné un système européen stable qu’ils pouvaient équilibrer depuis leurs côtes. Grâce à un déploiement judicieux de sa puissance navale contre les forces continentales et à la stratégie défensive d’hommes d’État tels que le duc de Wellington, la Grande-Bretagne a empêché tout rival européen d’émerger pour constituer une menace, a reconstruit son économie et a établi sa domination navale et commerciale à travers le monde. C’est l’histoire remarquable de la façon dont la Grande-Bretagne a maintenu tout un continent sous contrôle, jusqu’à l’effondrement final de cet ordre délicatement équilibré au début de la Première Guerre mondiale, qui est ici retracée.
. Catherine Van Offelen, Risquer la prudence. Une pratique de la sagesse antique, Paris, Gallimard, juin 2025.
Comment prendre les bonnes décisions, faire les justes choix ? Cette vertigineuse question hante la condition humaine. La Grèce antique apporta une réponse lumineuse : la phronèsis. Les temps modernes ont maladroitement traduit le mot par « prudence », réduisant la force des audacieux à la faiblesse des frileux. Or la phronèsis désigne une sagesse pratique qui emprunte à la fois à la raison et à l’intuition, au corps et à l’esprit, à la morale et à la ruse. Synthèse des vertus, elle permet d’accepter le risque sans se précipiter vers le danger, de comprendre le monde sans être paralysé par le savoir, de naviguer dans l’incertain sans s’aveugler de chimères. Aujourd’hui, ne voulant rien risquer, l’homme est tétanisé. Pouvant tout essayer, il ne sait plus agir. Converti au principe de précaution, il se retient d’oser. La phronèsis propose un art de trancher. Elle ne nous a jamais autant manqué que dans notre présent désorienté, et nous offre un cap pour échapper à la folie du monde.
. Dédé Watchiba, Géopolitique des Grands Lacs africains - Entre crises et renaissance, Paris, L’harmattan, juin 2025.
Le bassin des Grands Lacs africains est une région stratégique, riche en ressources naturelles, mais déchirée par des tensions géopolitiques et des rivalités historiques. La République Démocratique du Congo, le Rwanda, l’Ouganda et leurs voisins s’y affrontent pour le contrôle des richesses et des corridors économiques, sous l’oeil des puissances internationales. Cet essai analyse les causes profondes des conflits, les luttes d’influence et les enjeux liés à l’exploitation minière. Il éclaire les dynamiques d’instabilité mais aussi les opportunités de transformation et de coopération régionale. À travers une approche documentée, sont explorées les voies possibles pour sortir de la spirale des crises : meilleure gouvernance des ressources, développement d’infrastructures transnationales, et renforcement du rôle des organisations régionales. À un tournant historique, le destin des Grands Lacs africains pourrait basculer vers la stabilité ou replonger dans le chaos, selon les choix politiques et économiques à venir.
. Derek R. Peterson, A Popular History of Idi Amin’s Uganda, New Haven, Yale University Press, juin 2025.
Idi Amin Dada a dirigé l’Ouganda entre 1971 et 1979, infligeant d’atroces violences à la population de son pays. Comment son régime a-t-il pu survivre pendant huit calamiteuses années ? S’appuyant sur des archives récemment découvertes, Derek Peterson reconstitue la logique politique de l’époque, en se concentrant sur les gens ordinaires — fonctionnaires, conservateurs et artistes, hommes d’affaires, patriotes — qui ont investi leur énergie et leurs ressources pour faire fonctionner le gouvernement. Derek Peterson révèle comment Amin Dada a amené des gens ordinaires à se considérer comme des soldats en première ligne dans une guerre mondiale contre l’impérialisme et l’oppression coloniale. Comment ils ont travaillé sans relâche pour que les institutions gouvernementales continuent de fonctionner, même lorsque les ressources se sont taries et que la violence politique est devenue omniprésente. De cette étude de cas sur la façon dont des personnes intègres, talentueuses et patriotes, se sont sacrifiées au service d’un dictateur, Peterson tire des leçons pour notre époque.
. Petar Petrov, La politique gazière de l’Union européenne avec la Russie, Entre dépendance et diversification, Paris, l’harmattan, juin 2025.
L’Union européenne, fortement dépendante des importations de gaz russe, se trouve à la croisée des chemins dans un contexte mondial de plus en plus instable. Ce livre offre une analyse approfondie des enjeux économiques, politiques et environnementaux liés à cette relation complexe d’interdépendance. À travers une approche historique et géopolitique, Petar Petrov met en lumière les racines de la dépendance énergétique européenne vis-à-vis de la Russie et les défis qu’elle soulève. Il examine les dynamiques de marché, le rôle stratégique de Gazprom, et les tensions croissantes entre sécurité énergétique et intégration européenne. Face à la nécessité urgente de diversifier ses sources d’approvisionnement, l’Union européenne est appelée à repenser sa stratégie énergétique et à construire un futur énergétique durable. Cet ouvrage explore les solutions possibles, de la libéralisation du marché de l’énergie à l’accélération des initiatives en faveur des énergies renouvelables.
Accessible et documentée, cette étude est un ouvrage essentiel pour comprendre les relations énergétiques entre l’Europe et la Russie et leurs implications pour l’avenir de l’UE dans un monde en mutation.
. Ivan Sand, L’Honorable correspondant, Paris, Nouveau Monde, coll. Sang-Froid, 2025, 240 p.
« Comme je vous l’ai déjà dit, ce que vous allez lire peut vous perturber, mais c’est votre choix. Je vous laisserai ensuite un ou deux jours pour digérer tout ça et on se reverra pour parler du rôle d’honorable correspondant. »
Lorsque les services secrets français lui proposent de devenir un de leurs informateurs, Benjamin Curiel n’en croit pas ses oreilles. Ancien militaire et spécialiste de la Russie, il a été forcé de quitter l’armée après que la DGSE a refusé sa candidature plusieurs années auparavant.
Désormais installé à Tel-Aviv avec sa femme et ses deux filles, il est à la tête d’une des plus prometteuses start-up du monde de la défense et détient des informations très sensibles. La proposition des services français pourrait lui permettre de comprendre enfin les raisons de son éviction.
Une obsession dangereuse qui va le placer au cœur d’une rivalité entre la DGSE et le Mossad, et bouleverser bien plus que ses seules ambitions professionnelles.
Ivan Sand est officier de l’armée de l’air et a occupé différents postes en état-major et dans des centres de recherche des armées. L’honorable correspondant est son premier roman.
. Carlo Masala, La guerre d’après - La Russie face à l’Occident, Paris, Grasset, juin 2025.
Après plusieurs années de conflit, des centaines de milliers de morts, un « accord » est trouvé dans la guerre lancée par la Russie contre l’Ukraine, qui gèle de facto le front et récompense l’agresseur en lui sacrifiant les territoires annexés. Mais qu’advient-il ensuite ? Nous sommes en mars 2028. Les troupes russes s’emparent de la petite ville estonienne de Narva, franchissant la frontière d’un territoire protégé par l’OTAN : l’agression des pays baltes commence… L’Europe ne s’est pas suffisamment réarmée depuis la fin de la guerre en Ukraine, et la plupart des nations dotées d’une puissance militaire significative ont désormais à leur tête des chefs d’État nationalistes. L’article 5 de l’OTAN, qui prévoit de venir en aide à l’un de ses membres s’il est attaqué, va-t-il s’appliquer ? L’Alliance prendra-t-elle le risque d’une guerre totale, alors que la diplomatie russe joue l’apaisement tout en brandissant la menace nucléaire ? Deuxième choc : Un sous-marin russe se dirige vers l’île Hans, située entre le Canada et le Groënland, pour y établir une base stratégique. L’affrontement paraît inévitable... Nous avons pris l’habitude de nous dire que ces histoires d’anticipation finissent toujours bien. Et si, cette fois-ci, ce n’était pas le cas ? Les « jeux de guerre » sont utilisés depuis longtemps par les armées du monde entier, manipulant des outils de prédictibilité sophistiqués nourris par nos connaissances politiques, stratégiques, mais aussi sociales et économiques, afin d’éclairer un futur proche et de se prémunir contre le pire. Le professeur et expert militaire Carlo Masala déroule ici un scénario implacable pour mettre en lumière les risques majeurs et immédiats qui guettent nos sociétés occidentales. Immense succès en Allemagne et en cours de traduction dans toute l’Europe, La guerre d’après est un essai de géopolitique-fiction fascinant, qui se lit comme l’avertissement ultime face à notre inaction collective.
. Christian Grataloup, Vision(s) du Monde - Histoire critique des représentations de l’Humanité, Paris, Dunod, juin 2025.
Afrique, Occident, Pacifique, Asie, Nord/Sud, Orient, Europe… autant de grands ensembles qui permettent de parler du Monde en le découpant. Pourtant aucun n’est naturel, aucun n’est neutre. S’ils peuvent isoler, stigmatiser, servir à fonder une identité, ce sont avant tout des représentations, historiquement datées, et aujourd’hui en plein mouvement. L’Orient est un rêve colonial évanoui, et l’Occident ne semble pas avoir plus de sens. Les continents sont une fiction qui n’a rien de réel, les aires de civilisations sont plus que suspectes… Certaines parties du Monde s’effacent de notre vocabulaire, comme l’Océanie. D’autres prennent une signification nouvelle, comme l’Asie. D’autres encore se veulent identitaires, tout en échouant à se définir, comme l’Europe. Personne ne justifie plus le couple Nord/Sud, mais il hante encore le discours économique. Toutes ces visions géographiques, qui sont autant de grands récits du Monde, sont issues du regard que les Européens ont porté sur les autres pour mieux se définir eux-mêmes. Christian Grataloup reconstruit leur genèse, les superpose, les articule, analyse et critique leurs dynamiques pour proposer une nouvelle lecture de l’espace de l’Humanité.
. Guillaume Devin, Notre système international, Dans quel monde vivons-nous ?, Paris, Cavalier Bleu, août 2025.
Dans quel monde vivons-nous ? Cette antienne de plus en plus présente et pressante, traduit un désarroi face à ce qui nous apparaît de plus en plus comme un désordre. Or, nous vivons certes dans un monde de contradictions entre des intérêts, des valeurs, des acteurs... mais nous vivons dans le même monde dont la vision d’ensemble nous échappe. Donner à cet ensemble une forme de cohérence est ce à quoi Guillaume Devin s’attache en décrivant notre système international, non pas comme le seul produit de rapports de forces, de dynamiques anonymes et abstraites, mais comme un système tout à la fois polycentré, hétérogène, mondialisé, multilatéral et complexe, composé d’acteurs concrets, de politiciens, de diplomates, d’activistes, en un mot de citoyen.nes qui ont leurs responsabilités dans l’état du monde. Saisir que nous faisons système du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest, pour le meilleur comme pour le pire, c’est ainsi prendre conscience de nos interactions et interdépendances, et enjoindre ainsi nos opinions et nos diplomaties à la prudence et à la solidarité.
. Isabelle Dasque, Le pouvoir des femmes de diplomates - XIXe-XXIe siècles, Paris, Nouveau Monde, mai 2025.
La princesse de Lieven, Hélène Hoppenot, Nicole Alphand, Catherine Clément : proches des cercles du pouvoir, les épouses de diplomates participent aux affaires diplomatiques et influencent les rapports internationaux. Elles déploient des modes d’actions inédits, complémentaires de ceux de leurs maris, pour servir les intérêts de la France à l’étranger.
Parcourant deux siècles d’histoire, Isabelle Dasque évoque aussi bien l’ambiguïté de leur statut, leur rôle de représentantes officieuses, d’informatrices, de médiatrices, de gestionnaires ou encore de soutiens aux communautés françaises à l’étranger, que la vie quotidienne, à la fois publique et privée, parfois risquée ou pour le moins inattendue, sous les lambris des ambassades.
Fondé sur des sources inédites, cet ouvrage émaillé d’anecdotes sur la vie diplomatique dévoile pour la première fois le pouvoir réel de ces femmes à l’époque contemporaine.
. Arthur Onkoant, Au-delà de la Communauté internationale - Une critique acerbe de son pouvoir et ses liturgies, Paris, Les Impliqués, juin 2025.
Le nouvel ordre mondial s’apparente à une manipulation des consciences devenue une nécessité pour la préparation et l’organisation des luttes révolutionnaires. C’est en ce sens que les mouvements ascendants extrêmement rapides de conflits démocratiques entre les États rendent explicite le nouvel impérialisme du monde. Cet ouvrage analyse la domination oligarchique d’une certaine Communauté internationale sur le reste du monde à travers la production et la transformation des liens de pouvoir. L’auteur présente non seulement cette dimension caractéristique, mais aussi cette dimension pratique qui met en exergue le modèle de démocratie, le modèle de peuple, le modèle d’État et le modèle de gouvernement.
. Anna Colin Lebedev, Ukraine : la force des faibles, Paris, Seuil, juin 2025.
Où l’Ukraine a-t-elle puisé les ressources pour penser, organiser, maintenir la défense ? Comment fait-on face à une agression armée, quand on n’a ni la meilleure armée du monde, ni la puissance économique et politique, ni un État solide ? C’est justement de ses faiblesses que l’Ukraine a su, le moment venu, tirer sa plus grande force. Les fondements de la résistance de 2022 ont été posés en 2014 et dans les années qui ont suivi, pour que, derrière chaque arme, il y ait un Ukrainien prêt à combattre, et de nombreux autres prêts à organiser et soutenir le combat.
. Collectif, Cabinet de curiosités géographiques. 32 questions qui font le tour du monde, édition dirigée par : Matthieu Garrigou-Lagrange, Illustrations : Jean Leveugle, éd. Autrement, 2025.
« Aujourd’hui, dans un monde où le centre est partout et nulle part, nous sommes tous l’antipode de quelqu’un. »
Où est le sud ? De quoi est morte la mer Morte ? La terre peut-elle s’effondrer sous nos pieds ? Peut-on cartographier nos émotions ?… Autant de questions insolites que vous n’avez sûrement jamais pensé à vous poser ! Les auteurs ont pourtant relevé le défi de les prendre au pied de la lettre et d’y répondre de façon à la fois approfondie et accessible.
Libre à vous de flâner dans ce cabinet de curiosités soigneusement choisies, au gré de textes surprenants et des illustrations (pas si sérieuses) concoctées par Jean Leveugle. L’occasion de s’instruire, de rire aussi, et de (re)découvrir la géographie.
. Michaël Levystone, L’Asie centrale en 100 questions. Au croisement des grandes puissances, éd. Tallandier, 2025.
Les cinq États centrasiatiques – Kazakhstan, Kirghizstan, Ouzbékistan, Tadjikistan et Turkménistan – forment-ils un ensemble homogène ? Quelles sont les principales richesses minières de l’Asie centrale ? Est-elle une passerelle pour le trafic des drogues afghanes ? La Russie représente-t-elle une menace ou une garantie pour la région ?
Située au croisement des puissances russe, chinoise, indienne, iranienne et turque, marquée par le retour des talibans en Afghanistan et la guerre en Ukraine, l’Asie centrale suscite l’attention internationale. Car ces cinq États, qui ont tous proclamé leur indépendance de l’URSS en 1991, s’emploient comme jamais à promouvoir leurs intérêts dans une Eurasie en pleine reconfiguration et à faire entendre leur voix au sein d’organisations régionales dominées par Moscou et Pékin. De la Caspienne à l’Altaï, l’emplacement stratégique de l’Asie centrale sur le trajet des Nouvelles Routes de la Soie et son fort potentiel en matière d’énergies, de terres rares mais aussi d’agriculture offrent à la région de fortes perspectives économiques. Néanmoins, les défis à relever sont nombreux : développement des forces armées, lutte contre les conséquences du réchauffement climatique, émergence d’une nouvelle génération de citoyens aspirant à davantage de libertés. En 100 clés passionnantes, Michaël Levystone nous éclaire sur cette région en plein essor encore trop méconnue.
. Sylvain Domergue, Géopolitique des espaces maritimes, Coll. U, Armand Colin, 2025
Perturbation des exportations de blé en mer Noire, accident de l’Ever Given dans le canal de Suez, attaques houties sur le trafic maritime en mer Rouge ou assèchement des écluses du canal de Panama..., autant d’exemples qui montrent que la mondialisation demeure intrinsèquement dépendante des espaces maritimes. Une dépendance qui dépasse largement le seul cadre de l’économie et du commerce international : les mers et les océans constituent depuis toujours l’une des matrices vitales des équilibres climatiques et environnementaux planétaires, dont dépendent tant d’activités humaines. La maritimisation du monde soulève en parallèle de nombreux enjeux dans les champs des sciences politiques et des relations internationales.
Comment en sommes-nous arrivés à une telle dépendance à ces espaces maritimes ? Quels enjeux d’appropriation, mais aussi de gouvernance sécuritaire et environnementale soulèvent-ils ? En quoi, et pourquoi, sont-ils des lieux privilégiés de la confrontation entre puissances ? Dans quelle mesure présentent-ils, en parallèle, des opportunités uniques d’échange et d’intégration ?
En proposant un regard géopolitique, cet ouvrage embarque son lecteur pour un voyage autour du monde à la rencontre des mers et des océans, à l’heure des défis posés par l’accentuation des risques environnementaux, l’essor des tensions interétatiques, et le développement des menaces transnationales.
. Frank Close, Destroyer of Worlds. The Deep History of the Nuclear Age : 1895-1965, Londres, Allen Lane, juin 2025.
La découverte accidentelle par Henry Becquerel, à Paris en 1896, d’une légère tache sur une plaque photographique a déclenché une série d’avancées qui allaient déclencher l’ère atomique.
Destroyer of Worlds raconte la façon dont la recherche de cette source cachée d’énergie nucléaire, qui a commencé de manière innocente et collaborative, a été submergée par la politique des années 1930, et comment la dévastation d’Hiroshima et de Nagasaki a ouvert la voie à une possibilité plus terrible encore : une bombe thermonucléaire qui pourrait détruire toute vie sur terre à partir de n’importe quel endroit.
Cette histoire s’étend sur des décennies et des continents, de Becquerel à Ernest Rutherford — le scientifique néo-zélandais basé à Cambridge qui a été le premier à diviser l’atome — en passant par Enrico Fermi à Rome, Otto Hahn et Lise Meitner à Berlin et les Joliot-Curie à Paris, jusqu’à l’émergence de Robert Oppenheimer, avant de s’achever sur des développements de plus en plus horribles aux États-Unis et en URSS. Le rôle de trois femmes remarquables — Lise Meitner, Ida Noddack et Irène Curie — est examiné sous un nouveau jour et de nouveaux éléments sont apportés sur le travail d’Ettore Majorana, l’assistant de Fermi, qui a mystérieusement disparu en 1938, peut-être après avoir pressenti le pouvoir explosif de l’énergie nucléaire.
. Hervé Pierre, Le général Beaufre. Père de la stratégie française, Paris, Perrin, juin 2025.
André Beaufre (1902-1975) suit sa scolarité au collège Sainte-Barbe sous la menace des canons allemands. Contre l’avis de son père, le jeune bachelier entre à Saint-Cyr. Débute alors pour lui une carrière militaire dont les grandes étapes se confondent avec l’histoire militaire de la France jusqu’à la fin de la guerre d’Algérie. Lieutenant dans le Rif où il est grièvement blessé en 1925, il est capitaine de tirailleurs marocains dix ans plus tard, avant d’assister à l’effondrement de juin 1940. Compagnon de fuite du général Giraud en 1942, il participe à la libération de la France. Après l’Indochine, il devient général commandant une division en Algérie et prend enfin la tête des forces terrestres engagées à Suez en 1956.
En 2025, pour le cinquantième anniversaire de sa disparition, l’auteur lui consacre une biographie d’envergure, après avoir fait de l’étude de sa pensée le motif d’une thèse de doctorat soutenue en 2020. Célèbre à l’étranger, redécouvert en France depuis une trentaine d’années, le « Clausewitz français » est couramment cité à l’appui des analyses les plus en vues sur la conflictualité contemporaine. Traduit dans plus d’une vingtaine de langues, son livre phare — Introduction à la stratégie — est une référence dans le monde entier.
Du point de vue conceptuel, Beaufre ne fait en effet rien de moins que de redessiner l’espace de la stratégie en combinant des domaines d’action qui lui étaient étranger. Ce qu’il nomme en l’espèce « stratégie totale », qui s’apparente aujourd’hui à la très en vogue « approche globale », est la réponse au constat d’un monde en situation systémique de « paix-guerre ». Le triptyque contestation-compétition-affrontement, qui scande les prises de parole du chef d’état-major des armées (CEMA), exprime ce « retour aux extrêmes ». Pour y répondre Beaufre traduit le remède — la stratégie totale — en posologie pouvant couvrir un large spectre des maux, de l’arme nucléaire au combat de partisans en passant par la guerre classique.
. Joseph Torigian, The Party’s Interests Come First : The Life of Xi Zhongxun, Father of Xi Jinping, Silicon Valley, Stanford University Press, juin 2025.
Le dirigeant chinois Xi Jinping est l’un des hommes les plus puissants au monde, mais aussi l’un des moins bien compris. On peut toutefois en apprendre beaucoup sur Xi Jinping et la nature du parti qu’il dirige à travers la mémoire et l’héritage de son père, le révolutionnaire Xi Zhongxun (1913-2002). Le père de Xi a servi le Parti communiste chinois (PCC) pendant plus de sept décennies. Il a été le bras droit de dirigeants éminents tels que Zhou Enlai et Hu Yaobang. Il a contribué à la création de la base communiste qui a sauvé Mao Zedong en 1935 et a lancé les zones économiques spéciales qui ont propulsé la Chine dans l’ère des réformes après la mort de Mao. Il a dirigé les efforts du Front uni du Parti envers les Tibétains, les Ouïghours et les Taïwanais. Et bien qu’il ait initialement cherché à éviter la violence en 1989, il a finalement soutenu la répression du Parti contre les manifestants de Tiananmen. The Party’s Interests Come First est la première biographie de Xi Zhongxun écrite en anglais. Cette biographie est à la fois un récit complet de la révolution chinoise et des premières décennies de la République populaire de Chine, et une histoire profondément personnelle sur la recherche de son identité dans un contexte politique plus large. S’appuyant sur une multitude de nouveaux documents, d’entretiens, de journaux intimes et de périodiques, Joseph Torigian raconte de manière saisissante la vie de Xi Zhongxun, un homme qui a passé toute son existence à lutter pour trouver un équilibre entre ses sentiments personnels et les exigences du Parti. À travers le regard du père de Xi Jinping, Torigian révèle l’extraordinaire pouvoir organisationnel, idéologique et coercitif du PCC — mais aussi son terrible coût humain.
. Paul Charon, Alain Frachon, Clément Renault, Le monde à venir vu par la CIA, Paris, Des Equateurs, mai 2025.
Chaque année, la communauté du renseignement américain remet au président des États-Unis une synthèse des menaces qui pèsent sur les USA et le monde libre. Ce rapport collecte des milliers de données et d’analyses fournies par les agents dans tous les coins du monde. La guerre contre les drogues comme le fentanyl peut-elle déboucher sur un conflit avec le Mexique, voire le Canada, perçu comme l’un des principaux producteurs de cet opioïde de synthèse ? Faut-il s’attendre à de nouveaux attentats perpétrés par l’État islamique ? L’Iran dispose-t-elle de l’arme nucléaire ? La Chine et les États-Unis se préparent-ils à entrer en guerre ? Et pourquoi le Groenland suscite-t-il tant de convoitises ? Dans ce livre prospectif et captivant, vous découvrirez aussi comment fonctionnent les services de renseignement sous l’ère de Donald Trump et si nous pouvons continuer à leur faire confiance.
. Tom Arnold-Forster, Walter Lippmann : An Intellectual Biography, Princeton, Princeton University Press, juin 2025.
Walter Lippmann est l’un des politistes les plus influents et les plus originaux de l’Amérique moderne. À la fois journaliste et théoricien politique, il a façonné des idées sur le libéralisme et la démocratie, la nature de l’opinion publique, le pouvoir et l’empire des États-Unis, les rôles des journalistes, des experts et des citoyens. Tom Arnold-Forster propose une réévaluation de la vie intellectuelle de Lippmann, offrant de nouvelles perspectives sur une carrière à l’intersection du journalisme et de la théorie démocratique.
Il montre comment Lippmann a contribué à orienter les débats publics du libéralisme américain, de l’ère progressiste à la guerre froide. En resituant ses idées dans leur contexte historique, il remet en question le topos selon lequel il était avant tout un théoricien de l’expertise et de la technocratie. Au contraire, Lippmann apparaît comme un penseur politique tourné vers le grand public et polyvalent, qui s’est consacré à l’étude de la signification et du fonctionnement de la politique dans les démocraties modernes. Couvrant des sujets allant de la liberté de la presse à la réforme urbaine en passant par la politique économique et étrangère, tout en retraçant l’évolution de Lippmann du socialisme libéral de ses débuts vers un libéralisme conservateur, ce livre explore la manière dont la pensée de Lippmann éclaire les crises et les paradoxes de la démocratie.
. Fred Constant, Géopolitique des outre-mer, Entre déclassement et (re)valorisation, Paris, Cavalier Bleu, mai 2025.
Souvent perçus comme des curiosités périphériques, plus ou moins éloignées et exotiques, vestiges d’un passé révolu, les outre-mer sont en réalité des miroirs grossissants des rapports de puissance et d’influence dans le monde. L’actualité internationale en atteste abondamment : de la menace d’annexion du Groenland par les Etats-Unis aux ingérences de la Russie dans la politique française à Mayotte, de l’intransigeance du Royaume-Uni à l’égard de Diego Garcia aux interférences de l’Azerbaïdjan en Nouvelle-Calédonie ou en Polynésie française. Hier comme aujourd’hui, ces « extrêmes stratégiques », paradoxalement négligés par les spécialistes des relations internationales, offrent pourtant un angle d’analyse original à l’intersection de la politique locale, nationale et internationale. à l’heure d’une remise en cause inédite de l’ordre international, Fred Constant analyse comment les reconfigurations qu’il emporte, affectent les assignations géopolitiques des outre-mer corollaires à la mondialisation.
. Andrew Hartman, Karl Marx in America, Chicago, The University of Chicago Press, mai 2025.
Les États-Unis ont longtemps été considérés comme la nation anti-marxiste par excellence, mais les idées de Marx ont inspiré un large éventail de personnes à formuler une vision plus précise des enjeux du projet américain. Les historiens ont souligné l’empreinte laissée sur les États-Unis par les penseurs des Lumières tels qu’Adam Smith, John Locke et Thomas Paine, mais Marx est rarement considéré au même titre que ces figures. Pourtant, ses idées sont aujourd’hui plus pertinentes que jamais en raison de la place centrale du capitalisme dans la vie américaine. Dans Karl Marx in America, l’historien Andrew Hartman soutient que même si Karl Marx n’a jamais mis les pieds en Amérique, ce pays a été imprégné, façonné et transformé par lui. Depuis le début de la guerre civile, Marx est un spectre qui hante la machine américaine. Pendant l’âge d’or, les socialistes voyaient en Marx un antidote au pouvoir incontrôlé des entreprises. Pendant la Grande Dépression, les communistes se sont tournés vers Marx dans l’espoir de transcender l’économie capitaliste destructrice. Les jeunes militants des années 1960 se sont inspirés de Marx pour se rassembler et protester contre une guerre à l’étranger. L’influence de Marx est également évidente aujourd’hui, alors que les Américains sont de plus en plus sensibles aux questions d’inégalité, de travail et de pouvoir.
. Carlo Masala, La guerre d’après, La Russie face à l’Occident, Paris, Grasset, juin 2025.
Après plusieurs années de conflit, des centaines de milliers de morts, un « accord » est trouvé dans la guerre lancée par la Russie contre l’Ukraine, qui gèle de facto le front et récompense l’agresseur en lui sacrifiant les territoires annexés. Mais qu’advient-il ensuite ? Nous sommes en mars 2028. Les troupes russes s’emparent de la petite ville estonienne de Narva, franchissant la frontière d’un territoire protégé par l’OTAN : l’agression des pays baltes commence… L’Europe ne s’est pas suffisamment réarmée depuis la fin de la guerre en Ukraine, et la plupart des nations dotées d’une puissance militaire significative ont désormais à leur tête des chefs d’État nationalistes. L’article 5 de l’OTAN, qui prévoit de venir en aide à l’un de ses membres s’il est attaqué, va-t-il s’appliquer ? L’Alliance prendra-t-elle le risque d’une guerre totale, alors que la diplomatie russe joue l’apaisement tout en brandissant la menace nucléaire ? Deuxième choc : Un sous-marin russe se dirige vers l’île Hans, située entre le Canada et le Groënland, pour y établir une base stratégique. L’affrontement paraît inévitable... Nous avons pris l’habitude de nous dire que ces histoires d’anticipation finissent toujours bien. Et si, cette fois-ci, ce n’était pas le cas ? Les « jeux de guerre » sont utilisés depuis longtemps par les armées du monde entier, manipulant des outils de prédictibilité sophistiqués nourris par nos connaissances politiques, stratégiques, mais aussi sociales et économiques, afin d’éclairer un futur proche et de se prémunir contre le pire. Le professeur et expert militaire Carlo Masala déroule ici un scénario implacable pour mettre en lumière les risques majeurs et immédiats qui guettent nos sociétés occidentales. Immense succès en Allemagne et en cours de traduction dans toute l’Europe, La guerre d’après est un essai de géopolitique-fiction fascinant, qui se lit comme l’avertissement ultime face à notre inaction collective.
. Edward Luce, Zbig. The Life of Zbigniew Brzezinski, America’s Great Power Prophet, New-York, Simon & Schuster, mai 2025.
Zbigniew Brzezinski a été l’un des principaux architectes de la chute de l’Union soviétique, qui a mis fin à la guerre froide. Enfant de Varsovie, au cœur des terres de sang de l’Europe centrale, Brzezinski a transformé sa haine féroce envers le pillage de sa patrie par l’Allemagne nazie et l’Armée rouge en une quête permanente de liberté. Né l’année où Joseph Staline consolidait son pouvoir et décédé quelques mois après le début du premier mandat de Donald Trump, Brzezinski a été façonné par les luttes de pouvoir mondiales du XXe et du début du XXIe siècle, qu’il a lui-même contribué à façonner. Conseiller des présidents américains de John F. Kennedy à Barack Obama et figure de proue de la politique étrangère à la fin des années 1970 sous Jimmy Carter, Brzezinski a converti sa renommée de soviétologue en pouvoir à Washington. Avec Henry Kissinger, son rival de toujours avec lequel il entretenait une relation tumultueuse, il incarnait la nouvelle génération d’universitaires d’origine étrangère qui s’épanouissait dans l’« université de guerre froide » américaine et qui a évincé la classe gentleman des WASP de Washington qui dirigeait la politique étrangère américaine depuis si longtemps. L’influence de Brzezinski, renforcée par son amitié inhabituelle avec le pape Jean-Paul II, d’origine polonaise, découlait de sa connaissance du « talon d’Achille » de Moscou : le fait que ses peuples, telles que les Ukrainiens, et ses États satellites, dont la Pologne, aspiraient à se libérer de l’emprise du Kremlin. Ni faucon ni colombe, Brzezinski fut un critique virulent de la guerre en Irak menée par George W. Bush et l’un des premiers partisans d’Obama. Parce qu’il allait à contre-courant de la tendance à rejoindre des factions à Washington et qu’il était parfois prêt à abandonner les démocrates pour les républicains, Brzezinski est en quelque sorte un orphelin de l’histoire. Son rôle historique a été largement sous-estimé. Dans le parcours presque cinématographique de sa vie, on retrouve le grand récit du siècle américain et la lutte des grandes puissances qui a suivi.
. John Cassidy, Capitalism and Its Critics. A History : From the Industrial Revolution to AI, New-York, Farrar, Straus and Giroux, mai 2025.
À une époque où l’intelligence artificielle, le changement climatique, les inégalités, les guerres commerciales et la montée du populisme de droite en réaction à la mondialisation remettent fondamentalement en question le système économique international, Capitalism and Its Critics offre une histoire kaléidoscopique du capitalisme mondial — de la Compagnie des Indes orientales et de la révolution industrielle à la révolution numérique. Mais John Cassidy adopte ici une approche nouvelle et audacieuse : il raconte l’histoire à travers les yeux des détracteurs du système. Des luddites anglais qui se sont rebellés contre les premières automatisations industrielles aux communistes allemands et russes du début du XXe siècle, en passant par les « dépendistes » latino-américains, la campagne internationale pour une rémunération du travail domestique des années 1970 et le mouvement moderne pour la décroissance, ce récit traverse le globe. Il évoque des noms familiers – Smith, Marx, Luxemburg, Keynes, Polanyi – mais s’intéresse également à des personnages moins connus, tels que Flora Tristan, militante française pour un syndicat universel ; Thomas Carlyle, prophète conservateur de la dépravation morale du marché ; John Hobson, premier théoricien de l’impérialisme ; J. C. Kumarappa, propagandiste de l’économie gandhienne ; Eric Williams, l’auteur trinidadien d’une célèbre thèse sur l’esclavage et le capitalisme ; Joan Robinson, l’économiste de Cambridge et critique de Keynes ; et Samir Amin, l’économiste franco-égyptien de gauche et analyste de la mondialisation. Mêlant biographies, histoire panoramique et exploration vivante des théories économiques, Capitalism and Its Critics met en lumière les racines profondes de nombreuses questions parmi les plus urgentes de notre époque.
. Marcus Rediker, Freedom Ship. The Uncharted History of Escaping Slavery by Sea, New-York, Viking, mai 2025.
Pas moins de 100 000 esclaves ont réussi à fuir les horreurs de l’esclavage dans le Sud avant la guerre de Sécession, trouvant refuge dans un réseau de passages clandestins à travers l’Amérique du Nord, aujourd’hui connu sous le nom de « chemin de fer clandestin » (Underground Railroad). Cependant, les images de fugitifs transportés clandestinement d’une maison sûre à une autre ne rendent pas compte de toute l’ampleur de ces voyages éprouvants : de nombreuses évasions ont eu lieu non pas par voie terrestre, mais par voie maritime. Freedom Ship offre un regard nouveau sur le monde secret des passagers clandestins et des navires qui les ont transportés vers la liberté à travers le Nord et jusqu’au Canada. S’étendant des voies fluviales complexes des Carolines aux rives de la baie de Chesapeake et aux ports de Boston, ces récits mettent en lumière les histoires méconnues de ceux qui ont cherché la liberté en prenant la mer, parmi lesquels le légendaire abolitionniste Frederick Douglass et Harriet Tubman, l’une des architectes les plus célèbres du chemin de fer clandestin.
. Stève Sainlaude, La France face aux Etats-Unis : une tradition d’opposition, Paris, La Raviniere, juin 2025.
Ancienne grande puissance, la France dénonce régulièrement l’hégémonie américaine. Dans la course aux récriminations, elle est probablement l’État occidental où la critique s’exprime le plus régulièrement, le plus bruyamment, parfois le plus solitairement et même, de temps à autre, le plus sévèrement. Quand les États-Unis voulurent étendre leur emprise territoriale, la France a plus d’une fois œuvré pour endiguer leur expansion. Puis, lorsque la république fédérale américaine est devenue puissance mondiale, dans un mouvement inversement proportionnel au recul de la France sur la scène internationale, ses dirigeants ont dénoncé de façon quasi systématique la suprématie de Washington. Avec La France face aux États-Unis, Stève Sainlaude revient sur les origines de cette politique d’opposition. À partir d’archives inédites, il retrace le fil de relations parfois tendues, mais jamais rompues qui, de la vente de la Louisiane par Napoléon à la crise des tarifs douaniers ouverte par Donald Trump en passant par le fameux discours de Phnom Penh du général de Gaulle, lient les deux nations depuis plus de deux siècles. Écrit dans un style vivant et foisonnant d’anecdotes, ce passionnant essai d’histoire diplomatique satisfera les spécialistes par la rigueur de son contenu tout en sachant intéresser un large public.
. Andrew Preston, Total Defense. The New Deal and the Invention of National Security, Boston, Harvard University Press, mai 2025.
La sécurité nationale peut sembler être une notion intemporelle. Les États ont toujours cherché à se fortifier et l’État moderne tire sa légitimité de la protection de sa population. Pourtant, la notion de sécurité nationale a en réalité une histoire très particulière — très américaine, et très surprenante. Le concept de sécurité nationale est apparu dans les années 1930, dans le cadre d’une campagne de la Maison-Blanche en réponse à la montée du fascisme. Avant cela, la légitimité de la défense nationale était définie comme la protection du territoire souverain contre toute invasion. Mais le président Franklin D. Roosevelt et son entourage craignaient que le public américain, rassuré par deux vastes océans, ne prenne pas au sérieux les risques à long terme posés par l’hypermilitarisation de puissances étrangères. Selon Andrew Preston, les partisans du New Deal ont développé la doctrine de la sécurité nationale pour remplacer l’ancienne idée d’autodéfense : désormais, même les menaces géographiquement et temporellement éloignées devaient être considérées comme des dangers à combattre, tandis que les concurrents idéologiques représentaient une menace pour le « mode de vie américain ». Total Defense montre que ce n’est pas un hasard si un libéral comme Roosevelt a promu cette vision. La sécurité nationale, tout comme la sécurité sociale, était une promesse du New Deal : l’État était tenu de protéger les Américains autant des armes et des navires de guerre de l’Allemagne nazie et du Japon impérial que du chômage et de la pauvreté des personnes âgées. Le changement de perception de la menace qui en a résulté, tant chez les décideurs politiques que chez les citoyens ordinaires, a transformé les États-Unis, entraînant une expansion massive du gouvernement et plaçant le pays dans un état de guerre permanent.
. Hélène Miard-Delacroix, Les émotions de 1989. France et Allemagne face aux bouleversements du monde, Paris, Flammarion, mai 2025.
La certitude d’assister à un moment de bascule dans les équilibres du monde dessine la fin d’une ère qui a commencé en 1989-1990, dans l’incrédulité, l’inquiétude mais aussi dans une joie intense. Plus encore que les changements réels qu’elle a entraînés, c’est le souvenir d’émotions puissantes qui fait la postérité de 1989, rare césure positive de l’histoire contemporaine. La mémoire de 1989 est tellement dominée par l’incroyable joie à la chute du mur de Berlin qu’on en oublierait presque que la fin de la RDA et l’unification allemande en 1990 ont été précédées de tant de peur et d’indignation, à Tian’anmen, à Leipzig, à Prague, puis à Bucarest et Timisoara. L’historienne Hélène Miard-Delacroix retrace ici la dynamique avec laquelle, entre émerveillement et espoir, les Européens ont eu l’impression d’assister à un jeu de dominos et parfois de subir les événements. En prenant ensemble la France et l’Allemagne, ce récit original et vivant révèle des circulations inattendues d’émois dans un chœur aux voix nombreuses. Il montre que les émotions sont un moyen d’appréhender le changement et une ressource de l’action publique. Partagées, elles peuvent aussi révéler et consolider des communautés de culture et de valeurs dans un moment de grands ébranlements.
. Maya Kandel, Une première histoire du trumpisme, Paris, Gallimard, mai 2025.
Le trumpisme est le phénomène politique majeur du premier quart du XXIᵉ siècle. S’il frappe l’actualité par ses outrances, son histoire débute dans les années 1980. Il naît de la rencontre entre un personnage hors norme, Donald J. Trump — héritier, entrepreneur et star de la téléréalité —, quelques idées fortes et un socle électoral républicain en recomposition. Spectacle permanent, en prise avec les évolutions des moyens de communication, il dessine mensonge après mensonge une réalité alternative. Porté par une contre-élite hétéroclite, réunissant autour de lui chrétiens évangélistes, idéologues nationaux-conservateurs, masculinistes et titans de la tech, il est en passe de remplacer les structures de pouvoir actuelles et leurs bastions culturels. Dorénavant plus grand que Trump, le trumpisme entend détruire l’ordre international hérité de la Seconde Guerre mondiale. En comprendre les ressorts est essentiel pour saisir ce qui nous arrive, et ce qui nous attend.
. Pierre Cornu, Stéphane Frioux, Anaël Marrec, Charles-François Mathis et Antonin Plarier, Les natures de la République. Une histoire environnementale de la France 1870-1940 (vol. 2), Paris, La Découverte, mai 2025.
Moment pivot dans l’histoire environnementale de la France, la IIIe République est profondément marquée, jusque dans son idéologie, par une certaine conception de la nature et de l’environnement. Elle se distingue par une identité duale, tout à la fois celle de la petite paysannerie et des paysages ruraux, et celle des hauts lieux de la modernité dont Paris est l’archétype. La période prise entre les bouleversements du premier XIXe siècle et la « Grande Accélération » d’après 1945, se caractérise par un fort volontarisme politique qui cherche à accompagner le « progrès » — notamment celui porté par la deuxième industrialisation — dans les transformations qu’il fait subir au territoire. Si les moyens ne sont pas toujours à la hauteur, l’ambition est là : jardiner le plus intensément possible la France, la rendre productive dans tous ses recoins pour favoriser la prospérité de la nation. Cette mise à profit des ressources naturelles s’appuie également sur un empire colonial qui s’étend et se structure, et dont l’environnement est bouleversé par le prométhéisme républicain et sa logique d’extraction. Pour ce régime, né et mort de défaites militaires, et qui a dû affronter les horreurs du premier conflit mondial, la guerre est l’horizon constant : elle détermine à son tour un rapport singulier à une nature à mobiliser ou à soigner. La IIIe République est ainsi ce moment historique singulier, tissé d’audace et de prudence dans le rapport des contemporains à la modernité et à l’environnement, où s’esquisse le visage de la France d’aujourd’hui.
. Sylvie Bermann, L’ours et le dragon, Russie-Chine : Histoire d’une amitié sans limites ?, Paris, Tallandier, mai 2025.
Diplomate en poste à plusieurs reprises en Russie et en Chine, Sylvie Bermann retrace la longue histoire de ces deux pays. Elle nous éclaire sur ces deux géants dont le pacte stratégique est en train de dessiner l’avenir du monde. Après des siècles de relations en dents de scie, caractérisées par l’obsession du commerce pour Saint-Pétersbourg et la préservation de leurs frontières pour la Chine impériale, leurs liens s’étoffèrent à l’accession au pouvoir de Catherine II. Dans une volonté de modernisation et d’expansion, la Russie s’empare au XIXe siècle de territoires mandchous. La prise de pouvoir du Parti communiste chinois en 1949 scelle l’alliance sino-soviétique dans un rapport toutefois inégal. Grands gagnants de la mondialisation et hantés par l’effondrement de l’URSS, les Chinois ne cachent pas leur dédain pour le « grand frère » qui n’a pas su construire de puissance économique, trop dépendant de ses hydrocarbures. Malgré ce renversement des rapports de force, la croisade contre les valeurs occidentales de Pékin et Moscou, sur fond de rivalité sino-américaine, façonne désormais leur vision du monde et influe sur le Sud global. À la croisée de l’Histoire et de la géopolitique, Sylvie Bermann analyse la stratégie des deux Empires dont le sort semble déclarée « sans limites » est surveillée par un Donald Trump décidé à s’inviter avec fracas dans cette nouvelle donne.
. Fatima Moussaoui, Iran’s Military Power Projection and the Empowerment of Ansar Allah, Cham, Springer Cham, mai 2025.
La République islamique d’Iran, bien qu’elle soit devenue célèbre pour ses choix de politique étrangère et ses actions sur la scène internationale, reste une énigme pour l’Occident. Ce livre propose une analyse introspective des fondements de cet État islamique unique, et révèle ce qui le rend résistant, ainsi que les tentatives pour le maintenir. En adoptant une approche pluridisciplinaire utilisant des grilles anthropologiques, philosophiques, psychologiques et militaires, l’ouvrage revisite le pouvoir du clergé et met en évidence sa signification originelle et sa capacité à être mis au service de politiques en phase avec le contexte politique contemporain de l’Iran. Ce livre intéressera les étudiants et les spécialistes de la stratégie militaire, de la sécurité internationale et de la géostratégie, ainsi que les officiers militaires et les décideurs politiques qui bénéficieront de la perspective nouvelle qu’il ajoute à la vision occidentale d’un pays dont la pensée stratégique et militaire est encore largement inconnue ou mal comprise.
. Nicolas Tenzer, Fin de la politique des grandes puissances - Petits et moyens États à la conquête du monde, Paris, L’observatoire Editions, avril 2025.
Et si la puissance n’appartenait plus aux grandes nations ? Nicolas Tenzer en est certain : les traditionnelles grandes puissances voient leurs jours comptés. Les États-Unis de Trump ont brisé l’Alliance atlantique ; la Chine, qui reste une puissance de prédation, s’enlise dans ses contradictions internes ; la Russie est placée sous le signe du no future. En face d’elles émergent des acteurs plus agiles susceptibles de réinventer les règles du jeu international : l’Estonie, pionnière dans les alertes sur la sécurité de l’Europe, la Turquie si elle parvient à choisir son camp, la Syrie libérée de ses occupations criminelles, mais aussi les moyennes puissances de l’Asie centrale et de l’Est. Ensemble, les démocraties du Nord, du Sud et de l’Est regrouperont leurs forces contre les puissances révisionnistes. Ensemble, elles pourront faire face aux pseudo-Empires. La France et le Royaume-Uni auront à jouer un rôle moteur dans cette recomposition. Quant à l’Ukraine, sa résistance héroïque démontre la capacité des États moyens à tenir tête aux anciennes puissances. À travers une analyse des nouveaux rapports de force, Nicolas Tenzer révèle comment ces États « intermédiaires » redessinent la carte du monde : ils créent des alliances inédites, développent des stratégies d’influence originales et prouvent qu’on peut d’autant mieux peser sur la scène internationale qu’on n’est pas une superpuissance. Demain, la sécurité du monde et la liberté des peuples reposeront sur la détermination des petites et moyennes nations. L’épisode Trump aura peut-être été le moment de cette prise de conscience.
. Beatriz Bragoni, Las mujeres de la Revolución, Barcelone, Edhasa, mai 2025.
Les révolutions forgent l’histoire. Elles surgissent, inexorables, et changent radicalement le présent, et donc l’avenir. Elles font et défont les tissus sociaux, politiques et économiques. Elles relient des événements apparemment fortuits en nœuds solides, noyaux fondamentaux de notre trame collective. Les vies individuelles, petites et anonymes, sont transformées. La révolution les rend extraordinaires. C’est le cas des femmes qui peuplent ces pages. Des femmes dont l’existence a été reléguée aux oubliettes ou, dans le meilleur des cas, subordonnée à celle des hommes en tant que personnages secondaires. Mais leurs actions, leurs destins et leurs décisions ont marqué l’histoire. On y parle de paysannes et de caciques, de femmes brunes et métisses, de Buenos Aires et du Paraguay dans les premières décennies du XIXe siècle. Du destin de femmes réalistes et de princesses transatlantiques ; de l’intime et du privé comme contrepartie inévitable du public. Sous la direction de Beatriz Bragoni, Las mujeres de la Revolución rassemble un collectif d’historiennes et d’anthropologues afin de donner corps et voix au réseau féminin qui a façonné la vie publique et privée à l’âge des révolutions.
. Jérémy Lamri, 2040 : 5 futurs possibles et comment s’y préparer, Paris, Eyrolles, avril 2025.
L’avenir ne se prévoit pas, il se prépare. Face à l’intelligence artificielle, aux crises écologiques et aux transformations sociales, le monde évolue à un rythme sans précédent. À quoi ressemblera notre vie en 2040 ? Et surtout, comment nous y préparer ? Explorez cinq scénarios de futurs possibles, où se croisent prospectives scientifiques, avancées technologiques et dynamiques sociétales. Loin des dystopies alarmistes ou des utopies naïves, ce livre propose une réflexion pragmatique et documentée sur les grandes forces qui façonneront demain. Découvrez le potentiel de l’économie quaternaire et de ses leviers d’action, pour accompagner les bouleversements à venir et construire un avenir à la hauteur de nos ambitions collectives. Un ouvrage indispensable pour tous ceux qui veulent comprendre et agir pour le futur.
. Mark M. Lowenthal, Vigilance Is Not Enough. A History of United States Intelligence, New Haven, Yale University Press, mai 2025.
Chaque nation dispose d’un appareil de renseignement, c’est-à-dire d’un moyen permettant à ses plus hauts responsables d’obtenir les informations nécessaires sur des questions sensibles. Mais chaque nation le fait différemment — en fonction de son histoire, de sa situation géographique et de ses traditions politiques. Dans cet ouvrage, Mark M. Lowenthal examine le développement des services de renseignement américains afin d’expliquer comment et pourquoi les États-Unis sont passés, en l’espace de quelques années, d’une absence quasi totale de services de renseignement à une position de puissance mondiale dominante dans ce domaine. Il aborde également les choix difficiles à faire pour maintenir cette domination dans une démocratie libérale. Il décrit comment l’absence de tradition en matière d’espionnage a à la fois entravé et favorisé les efforts américains pour développer des services de renseignement pendant et après la Seconde Guerre mondiale. Il souligne le pragmatisme politique — qui a conduit à des choix difficiles — avec lequel la plupart des directeurs des services de renseignement ont opéré ; la tension constante entre la sécurité et les libertés civiles dans une démocratie constitutionnelle ; la tension entre la nécessité du secret et la responsabilité requise pour une gouvernance démocratique ; et la manière dont l’importance croissante de la technologie a modifié à la fois les méthodes et les objectifs de la collecte de renseignements.
. Déborah V. Brosteaux, Les Désirs guerriers de la modernité, Paris, Seuil, avril 2025.
Face aux guerres dans lesquelles les pays d’Europe sont impliqués, nous oscillons en permanence entre anesthésie et frénésie. Certaines situations guerrières donnent lieu à un échauffement affectif, un « regain » d’énergies psychiques et sociales, tandis que d’autres sont à peine nommées, reléguées au loin. Cette enquête philosophique creuse l’ambivalence de nos rapports à la guerre, inscrite au cœur de l’histoire sensible de la modernité. Inspiré des écrits de Walter Benjamin, de W. G. Sebald ou encore de Klaus Theweleit, l’ouvrage explore ces affects guerriers à travers le XXe siècle, et interroge leur héritage : la froideur de la mise à distance, le déni des ruines après 1945, le désir d’intensification de l’expérience de soi, qui mobilise les imaginaires en 1914-1918 et s’engloutit dans les tranchées… voire mute en passions fascistes qui se nourrissent activement de la dévastation. Déborah V. Brosteaux prend au sérieux ces désirs, y compris dans leurs attraits. Et se demande : quelles transformations affectives activer pour résister aux mobilisations guerrières ?
. Jean-Robert Raviot, Vladimir Poutine et la Russie. Biographie politique d’un monarque au XXIe siècle - Analyse des enjeux russes. Editions Frémeaux et associés, 2025.
Vladimir Poutine, chef d’État russe depuis plus de deux décennies, incarne une trajectoire politique qui s’apparente à celle d’un monarque au XXIe siècle. À la fois produit de l’histoire russe et concepteur de son propre mythe, Poutine se distingue par une carrière qui débute dans l’ombre des services de renseignement, pour ensuite se hisser au sommet du Kremlin. Personnage complexe : stratège redoutable, chef de guerre qualifié tour à tour de tsar ou de tyran ou de Hitler moderne, Poutine est l’une des figures politiques les plus représentées et caricaturées au monde. Ses choix stratégiques controversés sont présentés comme autant de réponses à l’hégémonie occidentale. Poutine est décrit non seulement comme un chef d’État, mais aussi comme le porte-parole, voire l’architecte d’un nouvel ordre mondial opposant l’Occident au reste du globe.
La plupart des publications occidentales offrent une vision unilatérale et critique de Vladimir Poutine et de la Russie. La volonté de Frémeaux & Associés, avec cette biographie contextualisée de Poutine par Jean-Robert Raviot, directeur du Master des études russes et post-soviétiques à Paris-Nanterre, propose une approche nouvelle et plus nuancée. Ce travail replace Poutine dans son contexte historique, culturel et politique, en tenant compte des spécificités et enjeux géopolitiques russes. L’auteur cherche à offrir une perspective équilibrée sur les motivations du Kremlin et le soutien populaire à Poutine, aidant à comprendre les logiques sous-jacentes à ses relations parfois tendues avec l’Occident. Cet ouvrage commandé à la fois pour le public, mais aussi pour nos dirigeants, vise à élargir l’analyse au-delà des préjugés géopolitiques.
Jean-Robert Raviot est professeur à l’Université Paris Nanterre, où il dirige le Master en études russes et post soviétiques et co-dirige la formation bilingue franco-russe de droit. Ancien directeur des Collèges universitaires français de Saint-Pétersbourg et de Moscou, il est spécialiste de l’histoire politique de la Russie post-soviétique. Auteur notamment de « De l’URSS à la Russie : la civilisation soviétique » (avec Taline Ter Minassian, Ellipses, 2006), ou en 2024 « Le logiciel impérial russe » chez L’Artilleur.
. Didier Chaudet, Géopolitique de l’Afghanistan des Talibans, Paris, VA Press, mai 2025.
Plus encore parce que l’Afghanistan est redevenu un « Émirat », tenu par des Talibans mal connus, et, à bien des égards, inquiétants, il s’agit d’un État-pivot. C’est-à-dire un pays dont les évolutions internes peuvent avoir des conséquences très importantes bien au-delà de ses frontières. Ici, plus précisément, sur trois zones géographiques différentes (Asie du Sud, Asie centrale, Moyen-Orient). Et, de là, sur les intérêts des puissances de ce début de 21e siècle (Chine, Russie, États-Unis, Inde, et, dans une certaine mesure, pays européens). L’Afghanistan restera donc plus important qu’on ne le pense, même si il n’est plus que sporadiquement dans nos médias. On ne peut pas se permettre de ne pas comprendre sa géopolitique, ou d’en rester à une approche des Talibans comme irrationnels, mystérieux, incompréhensibles. Et il serait peu judicieux d’attendre qu’à nouveau, l’Afghanistan des Talibans fasse la « une » des journaux, très probablement pour de mauvaises raisons, pour offrir aux lecteurs francophones toutes les clés pour comprendre l’Afghanistan des Talibans. L’inquiétude que suscite le nouveau régime fait déjà émerger une demande pour un ouvrage capable d’expliquer cette région du monde. C’est l’ambition de l’auteur de cet ouvrage, après avoir expliqué le phénomène Taliban, et les évolutions politiques/géopolitiques afghanes, dans ses papiers et dans les médias, depuis 2008.
. Giuliano da Empoli, L’heure des prédateurs, Paris, Gallimard, avril 2025.
Aujourd’hui, l’heure des prédateurs a sonné et partout les choses évoluent d’une telle façon que tout ce qui doit être réglé le sera par le feu et par l’épée. Ce petit livre est le récit de cette conquête, écrit du point de vue d’un scribe aztèque et à sa manière, par images, plutôt que par concepts, dans le but de saisir le souffle d’un monde, au moment où il sombre dans l’abîme, et l’emprise glacée d’un autre, qui prend sa place. Giuliano da Empoli nous livre le compte-rendu aussi haletant que glaçant de ses pérégrinations au pays de la puissance, de New York à Riyad, de l’ONU au Ritz-Carlton de MBS. Il nous guide de l’autre côté du miroir, là où le pouvoir s’acquiert par des actions irréfléchies et tapageuses, où des autocrates décomplexés sont à l’affût du maximum de chaos, où les seigneurs de la tech semblent déjà habiter un autre monde, où l’IA s’avère incontrôlable… Aucun doute, l’heure des prédateurs a sonné. L’auteur du Mage du Kremlin les regarde en face, avec la lucidité d’un Machiavel et la hauteur de vue du moraliste.
. Mathieu Corteel, Ni dieu ni IA. Une philosophie sceptique de l’intelligence artificielle, Paris, La Découverte, avril 2025.
Dissimulées dans nos moteurs de recherche, réseaux sociaux, générateurs de textes ou d’images et autres assistants vocaux, les intelligences artificielles ont appris de nous pour produire des contenus à notre place. Du devoir de l’étudiant paresseux à l’article scientifique, en passant par le deepfake, le journalisme ou encore l’art visuel, les IA participent désormais à tous les types de production culturelle et se propagent de proche en proche dans chaque recoin de nos vies. Nous partageons avec elles nos souvenirs, nos désirs, nos affects, nos connaissances et nos créations sans la moindre limite. Et si leur développement conduisait non pas à l’émergence d’une machine consciente, comme leurs promoteurs et leurs détracteurs l’envisagent, mais à l’expropriation et à l’exploitation de notre intelligence collective ? En interrogeant la démultiplication infinie de simulations qui nous illusionnent, cet ouvrage (probablement écrit par une IA) nous entraîne à coups de paradoxes dans le vide du non-sens bien ordonné. Au gré d’un inquiétant voyage à la rencontre de cerveaux plongés dans des cuves, de robots dactylographes, de perroquets stochastiques, de policiers quantiques et de chatbots psychopathes, Mathieu Corteel nous amène à questionner la tentation de nous déposséder de nos qualités humaines et d’en investir des calculatrices toutes-puissantes. Qu’est-ce que la délégation de nos pouvoirs d’action, de création et de décision à des interfaces auxquelles nous attribuons une pensée implique concrètement dans des domaines tels que le travail, le soin, la surveillance, le vote ou encore l’éducation ? Que deviennent nos mondes humains en s’hybridant à nos machines connectées ?
. Mohammed Chérif Bouhouya, Géopolitique-Géostratégie : L’évolution des conceptions, Le choc de la prééminence, Paris, Trois Colonnes, mars 2025.
Dans un monde au bord de l’effritement, où les États se voient relégués à des rôles secondaires, ce livre audacieux dévoile les enjeux cruciaux de la coexistence des ambitions chinoises et américaines. Plongez dans une analyse profonde de la géopolitique et de la politique internationale, explorant les fondements des grandes puissances et les régions pivotales de notre globe. Entre passé, présent et un avenir incertain, découvrez comment chaque nation doit se préparer à une ère de mondialisation intense et à l’inévitable confrontation. Une lecture essentielle pour comprendre les dynamiques qui redessinent le paysage mondial.
. Víctor Manuel Amado Castro et Antonio Rivera, Más allá de la derecha. Diez casos mundiales, Madrid, Catarata, avril 2025.
Cet ouvrage collectif propose une analyse approfondie de l’extrême droite et du conservatisme radicalisé dans le contexte mondial actuel. À travers une douzaine de cas, il explore les différents visages de ces mouvements dans des pays tels que l’Espagne, l’Italie, la France, la Russie, le Brésil, les États-Unis, Israël et l’Inde. Chaque chapitre dévoile les causes internes et externes qui ont conduit à la montée de ces idéologies, de leurs racines historiques à leurs manifestations contemporaines, à travers l’étude de figures clés telles que Viktor Orbán, Donald Trump, Jair Bolsonaro et Javier Milei, qui représentent un changement de leadership politique et une évolution vers l’autoritarisme populiste. Les auteurs analysent comment ces mouvements remettent en cause les démocraties libérales, érodent leurs institutions et promeuvent des modèles autoritaires nationalistes et anti-démocratiques. Ils cherchent à comprendre de manière critique comment la radicalisation de la droite remodèle le paysage politique mondial et son impact sur l’avenir de nos sociétés démocratiques.
. Elizabeth Couzineau-Zegwaard, Olivier Meier et Laurent Tarnaud, Le temps des transitions, Paris, EMS Editions, mars 2025.
Dans un contexte d’urgence écologique, comment nos systèmes peuvent-ils évoluer durablement ? Préfacé par Erik Orsenna, cet ouvrage propose une analyse approfondie des multiples facettes de la crise environnementale et des transformations nécessaires pour y faire face. En introduisant la pensée marxienne appliquée aux enjeux écologiques contemporains, les auteurs s’intéressent aux défis actuels : réchauffement climatique, évolutions numériques et mutations biologiques. Structuré en deux parties, le livre explore les transitions des systèmes, des organisations et des individus. Il propose une approche plurielle des notions de transition et de métamorphose, en abordant les systèmes socio-écologiques à travers les prismes de l’alimentation et du territoire, en questionnant l’impact des véhicules électriques sur la mobilité durable et en analysant les contradictions de l’industrie du luxe face aux défis climatiques. L’ouvrage examine également des leviers tels que le « démarketing vert » pour les entreprises, ainsi que les transformations engendrées par la digitalisation et l’intelligence artificielle dans nos vies professionnelles et sociales. Le livre s’intéresse enfin aux transitions individuelles et sociales face au vieillissement, explorant la complexité de « devenir vieux » aujourd’hui. En conclusion, une interview exclusive de Sandrine Tarnaud, responsable Data et IA chez Microsoft France, illustre les adaptations organisationnelles nécessaires face aux défis climatiques et technologiques, tout en posant la question de la comptabilisation de la durabilité en entreprise. Cet ouvrage invite à une réflexion approfondie sur notre capacité d’adaptation face aux bouleversements mondiaux, proposant une approche multidimensionnelle pour bâtir un avenir plus durable.
. Gilles Dorronsoro, Le plus grand des maux. Sociologie des guerres civiles, Paris, CNRS Editions, avril 2025.
Les guerres civiles ont accompagné toute l’histoire de l’humanité. Comment mieux définir et circonscrire cette notion ? Contrairement à une idée répandue qui les cantonne aux pays du Sud, les guerres civiles sont un phénomène universel qui, en questionnant l’évidence des routines, rend visible ce qui fonde la reproduction de l’ordre social. À partir d’enquêtes de terrain, l’auteur développe une approche à la fois comparatiste et qualitative des guerres civiles contemporaines comme affrontements violents d’ordres sociaux à partir de trois hypothèses. D’abord, les guerres civiles, loin d’être des processus internes, sont des phénomènes transnationaux dont la dynamique dépend des contraintes, des ressources et des normes du système international. Ensuite, la formation d’un ordre social insurgé passe par l’instauration de nouvelles institutions qui transforment une société dans ses aspects les plus essentiels : rapports de genre, droits de propriété, hiérarchie entre groupes. Enfin, les guerres civiles créent les conditions d’une transformation des rapports entre habitus, stratégie et réflexivité. Ainsi, les possibilités d’établir de ces stratégies sont limitées en raison d’un fort degré d’incertitude, ce qui se traduit par une multiplication de stratégies à court terme qui visent à l’évitement, l’adaptation ou la survie.
. Giuliano Da Empoli, L’Empire de l’ombre - Guerre et terre au temps de l’IA, Paris, Gallimard, avril 2025.
Sur la scène : Donald Trump, Vladimir Poutine, Xi Jinping. Une fébrilité planétaire - le risque d’une déflagration mondiale. Le spectacle est impressionnant, mais que se passe-t-il vraiment dans l’ombre ? Une transformation profonde est en cours. Il est devenu urgent de la comprendre. Des idéologues du Kremlin aux techno-césaristes de la Silicon Valley, de nouvelles élites cherchent à forger des empires. La puissance de feu, matérielle et intellectuelle, du projet qui s’impose depuis la Maison-Blanche est incontestable. Comme toujours en pareil cas, ses partisans ont tendance à le présenter comme inéluctable. Mais l’acharnement avec lequel ils s’en prennent à l’Europe nous dit qu’ils la considèrent tout de même comme un obstacle à la mise en oeuvre de leurs plans. S’en rendre compte, c’est prendre conscience que nous avons davantage de pouvoir que nous l’imaginons et construire un avenir alternatif. Le point de départ doit être le refus de la soumission. Puisque le défi est philosophique et culturel, toute résistance commence par la connaissance. C’est ce qui fait de ce quatrième volume de la revue un vademecum nécessaire à tout citoyen convaincu que la vassalisation heureuse ne peut pas être sa destinée. Giuliano da Empoli Avec les contributions de Daron Acemoglu, Sam Altman, Marc Andreessen, Lorenzo Castellani, Adam Curtis, Mario Draghi, He Jiayan, Benjamín Labatut, Marietje Schaake, Vladislav Sourkov, Peter Thiel, Svetlana Tikhanovskaïa, Jianwei Xun, Curtis Yarvin.
. Jure Georges Vujic, Géopolitique de la Croatie, Paris, SPM Lettrage, avril 2025.
L’intérêt porté à la géopolitique de la Croatie a été et est, il faut bien le reconnaître, généralement limité. Il est vrai que ce territoire s’est trouvé le plus souvent, pendant environ deux millénaires, jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale, aux marges d’empires et dans une situation où sa pérennité dépendait autant des puissances qui l’environnaient que de lui-même. Puis, durant une large partie de XXe siècle, précisément dans l’entre-deux-guerres puis de la fin de la Seconde Guerre mondiale à la fin des années 1990, son intérêt géopolitique était à nouveau réduit puisqu’il semblait ne relever que de la géopolitique interne de l’État au sein duquel il se trouvait, la Yougoslavie. La Croatie n’a donc pu à nouveau relever d’analyses de géopolitique externe que depuis son accession à l’indépendance en 1991. En dresser les caractéristiques géopolitiques, comme le propose le livre de Jure Georges Vujic, est essentiel. Cela interroge sur l’histoire, sur la question européenne, sur l’importance de la géographie sur le caractère démocratique possible après l’enfermement dans un régime communiste, et plus généralement sur la question de la place géopolitique des petites nations.
. Laurent Le Gall, La politisation, Paris, La Découverte, mars 2025.
En France, les élections législatives surprises de l’été 2024 n’ont cessé de poser la question pendante de la politisation. Mais qu’est-ce qu’être politisé ? Ce mot banal dans le lexique des sciences sociales est par ailleurs utilisé au quotidien. Il renvoie à des pratiques et à des représentations qui ont en commun des investissements dans un espace politique irréductible au seul ordre électoral. S’il fallait ne retenir qu’une définition de la politisation, ce serait la requalification d’un certain nombre d’activités sociales en des activités politiques. L’ouvrage part de cette interrogation centrale : qu’est-ce qui fait qu’un geste, une action, une mobilisation est, apparaît ou est présenté comme politique ? Il y est question tout autant de « frontières du politique » que de croyance démocratique, de carrières militantes que d’apathie. Si la politisation recouvre un ensemble de processus qui conduisent à produire un état (le sujet politisé), elle est aussi un prisme qui permet de lire, autrement, les vies en société.
. Seydou Kanté, Géopolitique de l’émigration irrégulière - L’exemple du Sénégal, Paris, Association Population & Avenir, avril 2025.
Nombre de publications questionnent l’immigration Mais n’est-il pas essentiel d’examiner ce qui la précède, soit l’émigration ? C’est l’objet de ce livre qui se concentre sur un aspect spécifique, mais à forte importance géopolitique, l’émigration de nature irrégulière. Dans ce dessin, l’auteur explore l’exemple du Sénégal, pays caractérisé chaque année par d’importants flux de départ de Sénégalais souhaitant rejoindre des pays du Nord. Quels en sont les multiples causes, de nature très diverse ? Quelle est la géographie des routes migratoires maritimes, terrestres ou transatlantiques, des Sénégalais quittant leur pays ? La réponse argumentée à ces questions permet d’éclairer les enjeux géopolitiques pour le Sénégal et dans ses relations avec les pays de destination, dont ceux de l’Union européenne. En outre, le livre propose trois scénarios prospectifs qui conduisent à une réflexion sur les solutions possibles pour réguler ce phénomène et atténuer ses effets, en adoptant une approche globale. Le livre est précédé d’une préface dans laquelle le recteur Gérard-François Dumont précise clairement le concept d’émigration irrégulière et présente ses dimensions géopolitiques.
. David Blanchon, L’eau en 30 questions, Paris, Documentation française, mars 2025.
Un livre de poche pédagogique et facile d’accès pour faire le tour des questions que l’on se pose sur l’eau, sa gestion, les ressources, les risques liés aux inondations, aux sécheresses et aux effets du dérèglement climatique, les inégalités d’accès à l’eau sur la planète, les conflits liés à l’eau…
. Jérémy Lamri, 2040 : 5 futurs possibles et comment s’y préparer, Paris, Eyrolles, avril 2025.
L’avenir ne se prévoit pas, il se prépare. Face à l’intelligence artificielle, aux crises écologiques et aux transformations sociales, le monde évolue à un rythme sans précédent. À quoi ressemblera notre vie en 2040 ? Et surtout, comment nous y préparer ? Explorez cinq scénarios de futurs possibles, où se croisent prospectives scientifiques, avancées technologiques et dynamiques sociétales. Loin des dystopies alarmistes ou des utopies naïves, ce livre propose une réflexion pragmatique et documentée sur les grandes forces qui façonneront demain. Découvrez le potentiel de l’économie quaternaire et de ses leviers d’action, pour accompagner les bouleversements à venir et construire un avenir à la hauteur de nos ambitions collectives. Un ouvrage indispensable pour tous ceux qui veulent comprendre et agir pour le futur.
. Lambert Issaka, Demain, la Confédération des États de l’Afrique centrale ?, Paris, L’harmattan, mars 2025.
Ni le Cameroun, ni le Gabon, encore moins l’Angola ou la République démocratique du Congo ne pourront maîtriser les immenses problèmes qui attendent l’Afrique centrale demain.
Il faudra pour cela une sorte d’État fédéral, qui laissera aux nations le soin d’assurer le respect des droits spécifiques de chaque peuple en valorisant leur formidable potentiel culturel, gérant au mieux leurs intérêts et disposant des moyens nécessaires pour défaire les menaces démographiques, écologiques, économiques, alimentaires, financières, énergétiques et politiques qui pèsent sur cette partie du monde. Il s’armera aussi des outils pour s’affranchir des pressions des institutions financières internationales ou d’autres tentations néocoloniales pour satisfaire enfin les quatre besoins essentiels de l’Afrique à savoir l’industrialisation, les infrastructures, l’éducation ou la formation ainsi que la défense. Un tel État existera un jour, sans doute, après un désastre.
Ce livre permet de mieux comprendre les variables qui conditionnent l’évolution du système international dans lequel les États d’Afrique centrale devraient trouver leur place.
. Michal Kurtyka, L’énergie, source et avenir de l’Europe, Paris, Boleine, mars 2025.
À l’instar de la période qui suivit la Seconde Guerre mondiale, l’Europe se trouve de nouveau à un tournant décisif de son histoire, et l’énergie est, une fois de plus, au coeur des enjeux. Dans un monde en fragmentation, l’avenir de l’Europe repose sur l’élaboration d’une véritable vision stratégique et sur des capacités effectives de mise en oeuvre dans le domaine énergétique. L’accès à l’énergie conditionne la faculté des Européens à maîtriser leur destin, à préserver leur indépendance face aux pressions extérieures, à créer des emplois et à maintenir le niveau de vie auquel ils se sont accoutumés. L’énergie, à travers une stratégie concertée et pragmatique alliant sécurité et compétitivité, doit redevenir le socle de sa reconstruction et de son renouveau. Expert reconnu mondialement en énergie, ancien Ministre du Climat et de l’Environnement en Pologne, MichaÅ ? Kurtyka devient en décembre 2018 le President de la COP24 et intervient aujourd’hui comme conseiller stratégique chez Eiffel Investment Group. Physicien de formation, Pierre-Philippe Crépin est responsable ESG dans cette société de gestion aux côtés de Jean-Charles Arrago, ingénieur civil des Mines et gérant au sein des stratégies d’investissement de transition énergétique.
. Nicolas Tenzer, Fin de la politique des grandes puissances, Petits et moyens États à la conquête du monde, Paris, L’observatoire, avril 2025.
Et si la puissance n’appartenait plus aux grandes nations ?? Nicolas Tenzer en est certain : les traditionnelles grandes puissances voient leurs jours comptés. Les États-Unis de Trump ont brisé l’Alliance atlantique ; la Chine, qui reste une puissance de prédation, s’enlise dans ses contradictions internes ; la Russie est placée sous le signe du no future. En face d’elles émergent des acteurs plus agiles susceptibles de réinventer les règles du jeu international : l’Estonie, pionnière dans les alertes sur la sécurité de l’Europe, la Turquie si elle parvient à choisir son camp, la Syrie libérée de ses occupations criminelles, mais aussi les moyennes puissances de l’Asie centrale et de l’Est. Ensemble, les démocraties du Nord, du Sud et de l’Est regrouperont leurs forces contre les puissances révisionnistes. Ensemble, elles pourront faire face aux pseudo-Empires. La France et le Royaume-Uni auront à jouer un rôle moteur dans cette recomposition. Quant à l’Ukraine, sa résistance héroïque démontre la capacité des États moyens à tenir tête aux anciennes puissances. À travers une analyse des nouveaux rapports de force, Nicolas Tenzer révèle comment ces États « intermédiaires » redessinent la carte du monde : ils créent des alliances inédites, développent des stratégies d’influence originales et prouvent qu’on peut d’autant mieux peser sur la scène internationale qu’on n’est pas une superpuissance. Demain, la sécurité du monde et la liberté des peuples reposeront sur la détermination des petites et moyennes nations. L’épisode Trump aura peut-être été le moment de cette prise de conscience.
. Sonia Le Gouriellec, Afriques, idées reçues sur un continent composite, Paris, Cavalier Bleu Editions, février 2025.
Parler de l’Afrique plutôt que des Afriques, d’une Afrique « maudite » et hors du temps, est la première des idées reçues. Une idée reçue primordiale de laquelle découlent de nombreuses autres étayées par un discours déterministe, voire essentialiste, sur la démographie, la politique, l’économie, les conflits... parfois partagé par les Africains eux-mêmes. L’Afrique serait ainsi surpeuplée, d’une économie rudimentaire, en proie à l’islam radical, minée par les épidémies. Les guerres ethniques mettraient le continent à feu et à sang, ses pays à la merci de potentats et des appétits des puissances étrangères. À rebours de ces discours qui empêchent de voir les Afriques dans toute leur diversité, Sonia Le Gouriellec montre combien les acteurs politiques du continent s’inscrivent dans des dynamiques qui s’éloignent des représentations usées d’une Afrique victimisée et chaotique. Elle nous invite à mieux comprendre le continent comme celui de lieux d’échanges, de transformations et d’interactions, plutôt que de domination à sens unique, avec le reste du monde.
. Giuliano Da Empoli, L’heure des prédateurs, Paris, Gallimard, avril 2025.
"Aujourd’hui, l’heure des prédateurs a sonné et partout les choses évoluent d’une telle façon que tout ce qui doit être réglé le sera par le feu et par l’épée. Ce petit livre est le récit de cette conquête, écrit du point de vue d’un scribe aztèque et à sa manière, par images, plutôt que par concepts, dans le but de saisir le souffle d’un monde, au moment où il sombre dans l’abîme, et l’emprise glacée d’un autre, qui prend sa place." Giuliano da Empoli nous livre le compte-rendu aussi haletant que glaçant de ses pérégrinations au pays de la puissance, de New York à Riyad, de l’ONU au Ritz-Carlton de MBS. Il nous guide de l’autre côté du miroir, là où le pouvoir s’acquiert par des actions irréfléchies et tapageuses, où des autocrates décomplexés sont à l’affût du maximum de chaos, où les seigneurs de la tech semblent déjà habiter un autre monde, où l’IA s’avère incontrôlable... Aucun doute, l’heure des prédateurs a sonné. L’auteur du Mage du Kremlin les regarde en face, avec la lucidité d’un Machiavel et la hauteur de vue du moraliste.
. Déborah V. Brosteaux, Les Désirs guerriers de la modernité, Paris, Seuil, avril 2025.
Face aux guerres dans lesquelles les pays d’Europe sont impliqués, nous oscillons en permanence entre anesthésie et frénésie. Certaines situations guerrières donnent lieu à un échauffement affectif, un « regain » d’énergies psychiques et sociales, tandis que d’autres sont à peine nommées, reléguées au loin. Cette enquête philosophique creuse l’ambivalence de nos rapports à la guerre, inscrite au cœur de l’histoire sensible de la modernité.
Inspiré des écrits de Walter Benjamin, de W. G. Sebald ou encore de Klaus Theweleit, l’ouvrage explore ces affects guerriers à travers le XXe siècle, et interroge leur héritage : la froideur de la mise à distance, le déni des ruines après 1945, le désir d’intensification de l’expérience de soi, qui mobilise les imaginaires en 1914-1918 et s’engloutit dans les tranchées… voire mute en passions fascistes qui se nourrissent activement de la dévastation.
Déborah V. Brosteaux prend au sérieux ces désirs, y compris dans leurs attraits. Et se demande : quelles transformations affectives activer pour résister aux mobilisations guerrières ?
. Gabriel Entin, En quête de République. Une histoire de la communauté politique en Amérique hispanique, Rennes, Presses universitaires de Rennes, avril 2025.
Durant les révolutions en Amérique hispanique du début du XIXe siècle, une vingtaine de républiques s’organisent sur le continent après trois cents ans de monarchie. Comment expliquer cette explosion républicaine, la plus vaste du monde atlantique ? C’est à cette question que ce livre cherche à répondre. À partir d’une histoire conceptuelle de la république dans le monde hispanique depuis le XVIe siècle, il montre comment se sont entrelacées la nouveauté d’une vision émancipatrice des révolutions modernes et les anciennes références classiques à la res publica de la monarchie catholique. En analysant la révolution d’indépendance en Amérique du Sud, notamment sur le territoire de la vice-royauté du Rio de la Plata, l’ouvrage explore la mise en place d’un scénario républicain face à l’incertitude des abdications royales imposées par Napoléon en 1808. Plus qu’une forme de gouvernement, on voit ici se dévoiler une république catholique qui renvoie tout autant à l’institution d’une communauté politique, centrée sur la cité, qu’à l’articulation d’un langage de liberté publique et de patriotisme. Les deux dimensions ont permis aux révolutionnaires hispano-américains de donner sens à leur expérience dans un contexte de guerre. Cette histoire de la république révèle aussi les ambiguïtés et les enjeux constitutifs du républicanisme atlantique.
. Mathieu Corteel, Ni dieu ni IA. Une philosophie sceptique de l’intelligence artificielle, Paris, La Découverte, avril 2025.
Dissimulées dans nos moteurs de recherche, réseaux sociaux, générateurs de textes ou d’images et autres assistants vocaux, les intelligences artificielles ont appris de nous pour produire des contenus à notre place. Du devoir de l’étudiant paresseux à l’article scientifique, en passant par le deepfake, le journalisme ou encore l’art visuel, les IA participent désormais à tous les types de production culturelle et se propagent de proche en proche dans chaque recoin de nos vies. Nous partageons avec elles nos souvenirs, nos désirs, nos affects, nos connaissances et nos créations sans la moindre limite. Et si leur développement conduisait non pas à l’émergence d’une machine consciente, comme leurs promoteurs et leurs détracteurs l’envisagent, mais à l’expropriation et à l’exploitation de notre intelligence collective ?
En interrogeant la démultiplication infinie de simulations qui nous illusionnent, cet ouvrage (probablement écrit par une IA) nous entraîne à coups de paradoxes dans le vide du non-sens bien ordonné. Au gré d’un inquiétant voyage à la rencontre de cerveaux plongés dans des cuves, de robots dactylographes, de perroquets stochastiques, de policiers quantiques et de chatbots psychopathes, Mathieu Corteel nous amène à questionner la tentation de nous déposséder de nos qualités humaines et d’en investir des calculatrices toutes-puissantes.
Qu’est-ce que la délégation de nos pouvoirs d’action, de création et de décision à des interfaces auxquelles nous attribuons une pensée implique concrètement dans des domaines tels que le travail, le soin, la surveillance, le vote ou encore l’éducation ? Que deviennent nos mondes humains en s’hybridant à nos machines connectées ?
. Ulysse Lojkine, Le fil invisible du capital. Déchiffrer les mécanismes de l’exploitation, Paris, La Découverte, avril 2025.
Les rapports économiques du capitalisme ne s’observent pas à l’œil nu. L’enchevêtrement de la circulation des marchandises, l’usage d’unités de compte monétaires, le mécanisme indirect des interactions par les prix ou la division internationale du travail les rendent illisibles. L’ouvrière marocaine, la caissière française et les grandes banques sont prises dans des liens rigoureux mais opaques, qui créent l’ambiguïté au sujet de questions fondamentales : qui travaille pour qui, qui décide pour qui ?
À condition d’assumer l’abstraction et la rupture avec l’expérience immédiate, il est possible d’y répondre et de mettre en évidence, contre l’illusion libérale de l’égalité contractuelle, les rapports d’appropriation et de pouvoir qui traversent notre société. Comme l’avait dit Marx, ces rapports se révèlent inhérents au fonctionnement même du système capitaliste. Mais, en particulier à l’heure des réseaux de production internationaux, de la finance et de la rente, l’exploitation ne peut être analysée à partir du seul face-à-face entre employeur et salarié. Elle se déploie en cascade, à plusieurs échelles, dessinant une structure qui est aussi celle de la coordination économique.
Point alors un horizon d’émancipation socialiste qui n’est pas celui d’un retour à des communautés locales, ni d’une mobilisation générale au service de l’État, mais d’institutions de synchronisation à grande échelle des fins et des capacités de chacun.
. Alexandre Duyck, Agnès Callamard, Une enquêtrice à l’ONU, Paris, Flammarion, avril 2025.
Rapporteuse spéciale des Nations unies sur les exécutions extrajudiciaires (2016-2021), Agnès Callamard a enquêté sur certaines des affaires les plus sensibles de notre époque : l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi dans l’ambassade d’Arabie saoudite à Istanbul, l’empoisonnement d’Alexeï Navalny ou l’assassinat de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, deux journalistes de Radio France internationale (RFI), à Kidal, dans le nord du Mali. Dans ce récit saisissant, Agnès Callamard dévoile les coulisses de son combat pour la vérité et la justice. De ses débuts de militante jusqu’à ses responsabilités actuelles de secrétaire générale d’Amnesty International, elle retrace son engagement inlassable face aux violations des droits humains à travers le monde. Un témoignage unique sur les mécanismes du pouvoir, les pressions diplomatiques et les risques personnels auxquels font face les défenseurs des droits humains.
Bonus. L’émission Planisphère [1], La puissance américaine est-elle en péril ? Avec M. Quessard
. Christian de Boissieu, Marc Schwartz, La Nouvelle Guerre des monnaies, Paris, Odile Jacob, mars 2025.
Avec les nouvelles technologies numériques, la monnaie est et sera de plus en plus immatérielle. Cette évolution n’a rien de nouveau : depuis l’invention des premières pièces de monnaie sur les rives du fleuve Pactole il y a deux mille sept cents ans, l’histoire de la monnaie est celle d’une dématérialisation progressive, qui s’est accélérée au cours des dernières décennies, sans pour autant faire disparaître les pièces et les billets. Le fait que la monnaie soit un bien commun fondé sur la confiance restera, lui, bien réel. Le rôle de la puissance publique (État, banque centrale) demeurera décisif dans le contrat monétaire avec les citoyens. Mais la nouvelle guerre des monnaies opposera, dans la sphère numérique, monnaies publiques et monnaies privées. De l’émergence des crypto-actifs aux velléités de « dédolla-risation », cet essai clair et rigoureux analyse les nouveaux rebondissements de la guerre des monnaies et fait le point sur tous les aspects que revêtent aujourd’hui la monnaie et les politiques monétaires. Un livre de référence indispensable aux étudiants comme aux citoyens.
. Frédéric Encel, La Guerre mondiale n’aura pas lieu - Les raisons géopolitiques d’espérer, Paris, Odile Jacob, mars 2025.
Selon certains, nous serions à l’aube d’une guerre mondiale, voire déjà en plein conflit planétaire ! Massacres de masse à l’est de l’Afrique, rivalité économique et technologique exacerbée entre la Chine et les États-Unis, guerres en Ukraine et au Proche-Orient, augmentation des budgets militaires, tensions autour de Taïwan et du nucléaire iranien, cyberattaques contre des infrastructures et les relais d’information… le climat géopolitique est en effet délétère et inquiétant. Pour autant, la posture apocalyptique n’a pas de sens. Avec cet essai clair et incisif, Frédéric Encel, géopolitologue reconnu et chevronné, prend le contre-pied des prophètes de malheur, pointe sept réalités objectives qui invalident la « certitude » du pire et fait un sort aux théories de type « choc des civilisations » et autre « piège de Thucydide ». Fort d’une cartographie abondante et d’une structure pédagogique, ce nouveau livre est à la fois un formidable panorama de nos réalités géopolitiques et un précieux outil de compréhension des temps troublés qui sont les nôtres.
. Jean-Arnault Dérens, La géopolitique de l’orthodoxie - De Byzance à la guerre en Ukraine, Paris, Tallandier, avril 2025.
L’image du patriarche Kirill bénissant avions et chars russes partant détruire l’Ukraine a ravivé les clichés d’une orthodoxie belliciste, ultraconservatrice et homophobe, radicalement hostile à l’Otan et aux valeurs démocratiques occidentales. Cet essai à la fois historique et géopolitique nous permet de mieux comprendre le monde orthodoxe, sa culture et son rôle politique. Avec près de 300 millions de fidèles, l’Église orthodoxe est la troisième confession chrétienne, après le catholicisme et le protestantisme. Si elle fascine souvent les Européens pour la beauté de ses liturgies, de ses chants envoûtants et de ses icônes, elle reste très méconnue. Son histoire est marquée par une relation douloureuse avec l’Occident, accusé de l’avoir condamnée à un rôle de rempart face à l’islam. La réalité pourtant est plus nuancée et montre une religion plurielle, qui a souvent cohabité harmonieusement avec le monde musulman. Placée au carrefour des empires disparus – byzantin, ottoman ou russe –, l’orthodoxie a été déchirée par la guerre froide, avant de se retrouver au cœur des conflits de notre temps – guerres des Balkans, d’Irak, de Syrie ou d’Ukraine. Que ce soit dans la Serbie de Miloševi ou la Russie de Poutine, elle a souvent été prise au piège des nationalismes. Le monde orthodoxe n’a jamais semblé aussi divisé que depuis le 24 février 2022. Comprendre et décrypter sa complexité et sa réelle proximité avec les pouvoirs politiques, c’est tout l’enjeu de cet ouvrage aussi passionnant que nécessaire.
. Jonathan Levy, The Real Economy : History and Theory, Princeton, Princeton University Press, avril 2025.
Qu’est-ce que l’économie ? S’agit-il d’un « secteur marchand », d’un « équilibre général » ou du « produit intérieur brut » ? Aujourd’hui, l’économie est tellement préoccupée par les méthodes que les économistes risquent de perdre de vue l’économie elle-même. Pendant ce temps, d’autres disciplines, bien qu’elles aient souvent l’intention de critiquer les méthodes de l’économie, n’ont pas réussi à articuler une vision alternative de l’économie. Avant la montée en puissance de l’économie néoclassique d’après-guerre, des débats acharnés ont fait rage, car de nombreuses visions différentes de l’économie ont circulé et se sont affrontées. Dans The Real Economy, Jonathan Levy renoue avec l’esprit de cette première époque qui, dans toute sa controverse, a donné naissance à la discipline économique. S’inspirant notamment de Thorstein Veblen et de John Maynard Keynes, Levy propose une théorie de l’économie ouverte à un riche examen empirique et historique, couvrant des sujets tels que l’émergence du capitalisme, la notion d’incertitude radicale, la signification de la demande, le désir primitif d’argent, l’histoire des entreprises et la mondialisation contemporaine. S’adressant à tous ceux qui s’intéressent à l’étude de l’économie, Levy fournit une provocation inestimable pour un débat plus large dans les sciences sociales et humaines sur ce qu’est « l’économie ».
. Mickael Correia, Criminels climatiques - Enquête sur les multinationales qui brûlent notre planète, Paris, La Découverte, avril 2025.
Cent entreprises sont responsables de 70 % des émissions globales de gaz à effet de serre. Parmi elles, Aramco, Gazprom et China Energy sont les multinationales qui régurgitent le plus de CO 2 au monde. Inconnues du grand public, elles sont les championnes internationales du pétrole, du gaz et du charbon. Si ce trio était un pays, il serait la troisième nation la plus émettrice, juste derrière la Chine et les États-Unis. Cette enquête inédite révèle comment ces trois géants industriels déploient tout un arsenal de stratégies redoutables – corruption, néocolonialisme, lobbying, greenwashing, soft power, etc. – pour perpétuer notre addiction au carbone. En continuant coûte que coûte à extraire les ressources des entrailles de la Terre, ils attisent sciemment les flammes qui brûlent notre planète et agissent en criminels climatiques. Des clubs privés de New York aux couloirs de l’Élysée, des banques de Pékin aux palaces de Riyad, l’auteur dévoile les cercles de pouvoir au coeur de ce capitalisme fossile et la manière dont ces firmes élaborent dans l’ombre une véritable bombe climatique, mettant en péril toute l’humanité. Alors que le réchauffement global s’accélère à un rythme sans précédent, ce livre désigne les réels responsables du chaos en cours et montre qu’il est urgent de les mettre définitivement hors d’état de nuire.
. Hamit Bozarlan, L’anti-démocratie au XXI e siècle, Biblis, 2025
L’anti-démocratie est-elle le nouveau visage de l’avenir ? Les régimes iranien, russe et turc aimeraient sans doute le faire accroire.
Derrière une façade démocratique, tous trois donnent à voir une même fuite en avant. Culte d’un chef infaillible investi d’une « mission historique » ; « pureté » de la nation trop longtemps humiliée et volonté de revanche face à un Occident corrupteur ; mobilisations de la religion ; organisation d’un État parallèle fondé sur les liens personnels, la corruption et l’accaparement des ressources ; développement d’un appareil sécuritaire pour répondre à une paranoïa savamment entretenue vis-à-vis des « ennemis extérieurs et intérieurs » ; institutionnalisation d’une réalité alternative sur laquelle les faits n’ont plus de prise…
Plongée stupéfiante au cœur des logiques de radicalisation des régimes autoritaires, cette comparaison aiguisée entre l’Iran, la Russie et la Turquie de ce début de XXIe siècle est un puissant avertissement pour nos démocraties qui doutent d’elles-mêmes.
. Ninon Blond, Atlas des déserts, éd. Autrement, mars 2025.
Même si les déserts se définissent par une caractéristique commune – l’aridité qui y règne –, les zones désertiques sont en réalité multiples : déserts de sable ou de roche, chauds ou froids… Ils couvrent un tiers des terres émergées du globe.
• Les déserts ont une longue histoire : la retracer permet de comprendre comment ils se sont formés, comment ils évoluent et quelles sont leurs spécificités.
• Ces espaces ont fait l’objet d’explorations scientifiques ou ayant pour finalité de dénicher les ressources et matières premières dont ils regorgent.
• Des modes de vie et une économie spécifiques s’y sont développés : nomadisme, agriculture, tourisme, construction de villes ultra-modernes…
• Espaces marginaux, les déserts servent de refuge ou de repli et les États tentent de contrôler ces marges stratégiques.
• Les déserts ont toujours fasciné l’homme, qui a développé tout un imaginaire autour de ces lieux : on le retrouve dans la religion, la littérature ou les jeux vidéo.
Plus de 90 cartes et infographies nous font ainsi découvrir les déserts du monde et leurs enjeux : Sahara, Takla-Makan, Gobi, Atacama ou Mojaves… Si ces noms font toujours rêver, la réalité géopolitique les replace au cœur des défis contemporains.
. Philippe Pétriat, Guerre et paix au Moyen-Orient, CNRS éditions, 2025
Depuis la Première Guerre mondiale, une intense conflictualité s’est enracinée entre les États et à l’intérieur des sociétés du Moyen-Orient, impliquant des puissances étrangères à la région et des puissances régionales. Sans se limiter à une approche politique, militaire et diplomatique de la question, ce numéro, qui éclaire les nouvelles formes de guerre (asymétrie des belligérants, registres religieux du combat, phénomènes miliciens), aborde les conflits dans leurs dimensions économiques, sociales et culturelles afin de rendre compte de l’expérience des populations qui les endurent.
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Le Point sur
03 “L’arc de crises” : une définition par le conflit
06 Quatre cycles de guerres et de paix aux XXe et XXIe siècles
09 Les grilles de lecture et leur histoire
13 Une nouvelle histoire de la guerre et de la paix
Thèmes et documents
Vers une nouvelle conflictualité
18-19 1967 : la transformation du conflit israélo-palestinien
20-21 Le quadruple choc de l’année 1979
22-23 Le cycle des guerres du Golfe
24-25 Les interventions extérieures du Moyen-Orient
26-27 Les OPEX des puissances extra-moyen-orientales
Les formes modernes de la guerre
28-29 Guérilla et asymétrie
30-31 Jihad et Shahid : les registres religieux du combat
32-33 Urbicides : Mossoul
34-35 Les phénomènes miliciens
Guerre et État
36-37 Conscription et service militaire
38-39 Généraux et hommes politiques
40-41 La guerre pour un État : les Kurdes
42-43 La guerre dans l’État : les guerres civiles
La guerre économique
44-45 Les complexes militaro-industriels
46-47 Les sanctions
48-49 Les ressources agricoles : armes et cibles
Cultures de guerre
50-51 Des films de propagande aux séries Netflix
52-53 Des guerres médiatiques
54-55 Mémoriaux
Construire la paix
56-57 Les recompositions d’un territoire : la Syrie
58-59 Une pépinière pour l’humanitaire
60-61 De Camp David aux accords d’Abraham
62-63 Les médiateurs régionaux
. Stéphane Guerre, Boris Lesueur, Atlas de la France moderne, XVIe - XVII e s., éd. Autremenent, 2025.
À partir du XVIᵉ siècle, la France connaît de nombreuses mutations. Cet atlas, grâce aux plus de 110 cartes et infographies, s’attache à montrer les transformations à l’œuvre durant ces trois siècles, depuis François Ier jusqu’à la chute de Louis XVI :
• Les évolutions politiques sont nombreuses : la royauté reste toute puissante, mais le concept d’État commence à trouver sa place.
• La société est hiérarchisée et d’une grande diversité, les structures sociales organisées en réseaux : si l’agriculture reste l’économie principale, l’industrie se développe et les modes de consommation évoluent.
• Avec la Renaissance et les Lumières, un foisonnement culturel voit le jour : innovations technologiques, voyages, arts, instruction, diffusion de l’information.
• La France s’agrandit en Europe et dans le monde : les colonies s’étendent avec l’ouverture vers l’Atlantique ; en Europe, la guerre fixe le territoire et de nouvelles frontières.
Ces trois siècles sont donc placés sous le signe d’une grande vitalité pour le pays, avant que la Révolution de 1789 ne vienne tout bouleverser, signant la fin de l’Ancien Régime et le début d’une nouvelle ère qui assied les bases de la France contemporaine.
. Baptiste Roger-Lacan, Le roi. Une autre histoire de la droite, Paris, Passés Composés, mars 2025.
« Les Français ne se seraient pas remis de la mort de Louis XVI. En 2015, Emmanuel Macron expliquait que le roi était « l’absent » du « processus démocratique ». Cette absence justifierait le renforcement de l’exécutif sous la Ve République.
Paradoxalement, la monarchie n’a jamais été en position d’être restaurée depuis les années 1870, et pourtant le roi n’a pas disparu. Alors comment ce spleen a-t-il été entretenu ? Il se diffuse sous la IIIe République, lorsque les droites doivent composer avec la fin des espoirs de Restauration. Face à ce vide, elles entretiennent des récits et des théories contre-révolutionnaires. Au cœur de ce dispositif, on trouve la figure du roi, alternative à une république libérale. Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, cet imaginaire est mobilisé dans le débat public. Il survit dans des lieux aussi différents que le château de Versailles, devenu un musée à la gloire de l’Ancien Régime, mais aussi des institutions comme l’Académie française. Il se diffuse grâce à d’immenses succès de librairie, qui nourrissent la nostalgie. Bref, la France ne se comprend pas sans son roi.
. Emily Feng, Let Only Red Flowers Bloom : Identity and Belonging in Xi Jinping’s China, New Jersey, Crown, mars 2025.
L’essor de la Chine et la concurrence de cette grande puissance avec les États-Unis sont l’une des questions les plus importantes de notre génération. Mais pour comprendre la Chine moderne, il faut comprendre les gens qui y vivent et la façon dont l’État chinois tente de les contrôler — leur identité et leur liberté d’expression.
Avec des détails saisissants, cinématographiques, Let Only Red Flowers Bloom raconte l’histoire de près de deux douzaines de personnes qui résistent. Parmi eux, une famille ouïghoure, séparée alors que la Chine détient des centaines de milliers de leurs compatriotes dans des camps ; des avocats des droits de l’homme qui luttent pour défendre les libertés civiles face à des obstacles gigantesques ; un enseignant de Mongolie-Intérieure, contraint de faire des choix difficiles en raison de son soutien à sa langue maternelle ; et un fugitif de Hong Kong qui tente de trouver un nouveau foyer et de vivre en liberté.
Malgré les risques personnels encourus, la journaliste Emily Feng révèle des histoires humaines dramatiques de résistance et de survie dans un pays qui se ferme de plus en plus au monde. Feng illustre ce que signifie aller à contre-courant en Chine et les innombrables façons dont les gens tentent de survivre, avec dignité.
. Ezra Klein, Derek Thompson, Abundance, Maryland, Avid Reader Press/Simon & Schuster, mars 2025.
Retracer l’histoire du XXIe siècle jusqu’à aujourd’hui, c’est retracer une histoire d’inaccessibilité et de pénurie. Après des années de refus de construire suffisamment de logements, l’Amérique connaît une crise nationale du marché immobilier. Après des années de limitation de l’immigration, nous n’avons pas assez de travailleurs. Malgré des décennies d’avertissements sur les conséquences du changement climatique, nous n’avons rien construit qui se rapproche de l’infrastructure d’énergie propre dont nous avons besoin. Les projets publics ambitieux sont achevés en retard et dépassent le budget prévu — quand ils sont achevés. La crise qui se dessine actuellement s’est développée pendant des décennies, parce que nous n’avons pas construit assez.
Abundance explique que nos problèmes actuels ne sont pas le résultat des méfaits d’hier. Au contraire : les solutions d’une génération sont devenues les problèmes de la génération suivante. Les règles et réglementations conçues pour résoudre les problèmes des années 1970 empêchent souvent les projets de densité urbaine et d’énergie verte qui contribueraient à résoudre les problèmes des années 2020. Les lois censées garantir que le gouvernement tienne compte des conséquences de ses actions ont rendu trop difficile pour lui d’agir en conséquence. Au cours des dernières décennies, notre capacité à voir les problèmes s’est aiguisée tandis que notre capacité à les résoudre a diminué.
Le progrès exige de faire face aux institutions de la vie qui ne fonctionnent pas comme elles le devraient. Pour les libéraux, cela signifie reconnaître quand le gouvernement échoue. Pour les conservateurs, cela signifie reconnaître quand plus de gouvernement est nécessaire. Dans un livre explorant comment nous pouvons passer d’un libéralisme qui non seulement protège et préserve à un libéralisme qui construit, Klein et Thompson retracent les obstacles politiques, économiques et culturels au progrès et proposent une voie vers une politique de l’abondance. À une époque où les mouvements de pénurie gagnent du pouvoir dans un pays après l’autre, c’est une réponse qui relève les défis du moment tout en luttant honnêtement contre la rage que tant de personnes ressentent à juste titre.
. Geneviève Verdo, Des peuples en mal d’union. Aux origines de l’Argentine, Paris, Flammarion, mars 2025.
À l’issue du démantèlement de l’Empire espagnol, au début du XIXᵉ siècle, le Río de la Plata est la seule région à ne pas donner immédiatement naissance à un État. En lieu et place de l’Argentine actuelle coexistent quatorze républiques souveraines, qui se gouvernent de façon indépendante pendant une trentaine d’années.
Ce livre retrace la genèse et l’organisation de ces républiques, leurs tentatives d’union constitutionnelle et la façon dont celle-ci se réalise au moyen de pactes bilatéraux. Grâce à une enquête originale et à des documents inédits, Geneviève Verdo offre un nouvel éclairage sur les modalités de la construction politique dans l’Amérique latine du XIXᵉ siècle, issue de la décomposition des structures impériales. Elle invite à privilégier une autre tradition de la culture républicaine, relative à l’autonomie des corps territoriaux et aux pratiques politiques des communautés qui les composent. Ce dépaysement fécond permet de repenser, en miroir de l’Europe, une voie différente de la modernité politique.
. Kevin B. Anderson, The Late Marx’s Revolutionary Roads. Colonialism, Gender, and Indigenous Communism, Paris, Verso, mars 2025.
Dans ses derniers écrits, Marx a dépassé les frontières du capital et de la classe et les contextes de l’Europe occidentale et de l’Amérique du Nord.
Kevin Anderson procède à une analyse systématique des carnets ethnologiques de Marx et de ses écrits sur la Russie, l’Inde, l’Irlande, l’Algérie, l’Amérique latine et la Rome antique.
Ces textes, dont certains n’ont été publiés que récemment, témoignent d’un changement de perspective, qui s’éloigne des visions eurocentriques du monde ou des théories unilinéaires du développement. Le Marx tardif a élaboré une théorie véritablement globale et multilinéaire de la société moderne et de ses possibilités révolutionnaires.
. Mélanie Plouviez, L’injustice en héritage. Repenser la transmission du patrimoine, Paris, La Découverte, mars 2025.
Depuis les années 1970, les inégalités de patrimoine ne cessent de se creuser. L’héritage en est en grande partie responsable : un petit nombre hérite aujourd’hui de beaucoup tandis que la majorité hérite de peu. Est-il juste que notre destin soit déterminé par la fortune – ou l’infortune – de nos parents ? Est-il même efficace que la richesse se transmette héréditairement ? Ces questions anciennes sont de nouveau brûlantes d’actualité.
De là l’importance de ce livre qui exhume les pensées oubliées de l’héritage, depuis la Révolution française jusqu’à l’orée du XXe siècle. Pensées oubliées mais pensées lumineuses qui posent des questions essentielles. L’héritage va-t-il de soi ? Et, si ce n’est pas le cas, que penser à sa place ? Au XIXe siècle, la question de l’héritage était sur toutes les lèvres. Étudiée, interrogée, contestée, la transmission familiale du patrimoine faisait l’objet de multiples projets de réforme ou de transformation radicale.
Certains, à l’instar de Merlin de Douai, de Mirabeau, de Robespierre, d’Agier, de Fichte, des saint-simoniens ou encore de Durkheim, comprirent que cette institution pouvait être retournée contre elle-même. L’héritage, au lieu de propager l’inégalité de génération en génération, ne pourrait-il pas devenir un instrument de justice sociale ?
Grâce à cette passionnante enquête philosophique, Mélanie Plouviez nous invite à tirer pour aujourd’hui les leçons de ces réflexions ensevelies. Car il est urgent, insiste-t-elle, de repenser l’articulation entre la propriété privée et l’intérêt général.
. Claude Meyer, La Chine de Xi Jinping. Menace pour la paix et l’ordre mondial, éd. de l’Aube, 2025
Détrôner le rival américain pour restaurer la suprématie passée de l’empire du Milieu, tel est le « rêve chinois » de Xi Jinping, rêve qui pourrait devenir à terme le cauchemar de l’Occident. En effet, la « renaissance de la nation chinoise » qu’il proclame ne correspond pas au schéma classique de l’effacement d’une puissance dominante au profit d’une puissance ascendante, comme ce fut le cas au début du xxe siècle pour l’Angleterre et les États-Unis. L’avènement de la Chine comme leader mondial poserait à l’Occident des défis inédits, sur les plans culturel, idéologique, géopolitique, économique et militaire. Ces défis se sont exacerbés durant le deuxième mandat de Xi Jinping au point que son « rêve chinois » constitue désormais une menace pour l’ordre mondial… et pour la paix en Indo-Pacifique.
. Charles-François Mathis et Steve Hagimont, La Terre perdue. Une histoire de l’Occident et de la nature XVIIIe-XXIe siècle, Tallandier, mars 2025.
Depuis le XVIIIe siècle, les progrès techniques et scientifiques, les mutations agricoles, l’industrialisation, le développement des transports et des communications ont accompagné une profonde mutation de nos relations avec la nature, que l’on veuille la domestiquer, la comprendre, la sublimer, la préserver ou l’exploiter. Il semblerait au bout du compte que les forêts soient devenues des usines à bois, les rivières des flux dont on oublie qu’ils sont vivants, les océans de vastes poubelles de notre modernité…
Dans cet ouvrage, en une trentaine de thématiques, les auteurs analysent avec profondeur, précision et nuance l’histoire des rapports entre la culture occidentale et la nature durant ces trois derniers siècles. Ils décrivent l’évolution des différents espaces : les campagnes, entre vision romantique et défis écologiques, les montagnes de « l’or blanc », les fleuves industrialisés, les marais « assainis »… Ils montrent leurs différentes représentations dans l’art, l’enseignement ou même les médias. Sans polémique, ces historiens analysent les entreprises de domination de la nature dans les sociétés occidentales et les colonies, la place des femmes – tour à tour sorcières, botanistes ou écoféministes –, l’appropriation des énergies fossiles ou encore les choix politiques face à l’épuisement des ressources et la chute de la biodiversité. Ils explorent enfin les tentatives visant à repousser les limites de la nature ou à la protéger.
Cette somme inédite dévoile les multiples aspects de l’histoire longue de l’emballement écologique et climatique.
. Delphine Deschaux-Dutard, French-German Military Cooperation and European Defence - From Driving Engine to Divergence of Interests ?, Londres, Editions Routledge, Janvier 2025.
Cet ouvrage examine le rôle de la coopération franco-allemande au sein de la coopération militaire européenne et de la défense européenne, et plus particulièrement de la PSDC (Politique de sécurité et de défense commune). L’ouvrage examine si le leadership bilatéral franco-allemand est toujours pertinent dans la défense européenne et la coopération militaire au niveau de l’UE, et analyse les raisons de ses difficultés dans le contexte actuel du retour à la guerre conventionnelle sur le continent européen. Grâce à un modèle de recherche innovant qui combine un cadre conceptuel (institutionnalisme discursif) et des outils issus de la sociologie des relations internationales, le livre offre une perspective à la fois macro et au niveau de l’acteur. L’accent mis sur les discours stratégiques des acteurs français et allemands, et sur les cadres institutionnels dans lesquels ces discours se développent, permet également de mieux saisir la complexité de la coopération militaire et les limites récurrentes du leadership bilatéral de Paris et de Berlin. Basé sur un travail de terrain approfondi à Paris, Berlin et Bruxelles au cours des deux dernières décennies, y compris des données collectées depuis 2022, le livre offre une vue longitudinale de la question ainsi que les développements les plus récents depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine. Ce livre sera d’un grand intérêt pour les étudiants en sécurité européenne, en politique européenne et en études de sécurité en général.
. Jean-Charles Galli, Alexandre Stachtchenko, Bitcoin - Le choc géopolitique, Paris, Armand Colin, avril 2025.
Face aux bouleversements géopolitiques, les banques centrales accumulent de l’or et les BRICS cherchent une alternative au dollar. Et si Bitcoin s’imposait comme la nouvelle monnaie refuge ?
En 15 ans, Bitcoin a conquis des centaines de millions d’utilisateurs et rebattu les cartes du système monétaire mondial. Devise nativement numérique, indépendante des États et des banques, il s’impose comme un acteur géopolitique inédit. Pourquoi redéfinit-il la souveraineté à l’ère numérique ? Comment les puissances mondiales réagissent-elles à cet enjeu stratégique ? Quels bouleversements entraîne-t-il, entre défis énergétiques et ambitions de contrôle ? À travers une analyse inédite, cet ouvrage propose une plongée au cœur de la révolution Bitcoin et explore son rôle comme nouvel instrument géopolitique. Un livre essentiel pour comprendre les mutations en cours et les futurs possibles de cette monnaie d’un nouveau genre.
. Noel Anderson, Wars Without End : Competitive Intervention, Escalation Control, and Protracted Conflict, Oxford, Oxford University Press, avril 2025.
Malgré des souffrances humaines indicibles, des destructions et des pertes massives, et une déstabilisation de grande ampleur, les feux des guerres civiles les plus violentes du monde continuent de brûler. À la lumière de leurs effets dévastateurs, comment pouvons-nous expliquer l’insolubilité des guerres civiles coûteuses et dans l’impasse, mais apparemment sans fin ? Ce livre apporte une réponse en situant les conflits internes dans l’environnement géopolitique plus large dans lequel ils se déroulent. Il met en lumière le rôle essentiel de l’intervention concurrentielle (transferts simultanés et opposés d’assistance militaire de différents États tiers vers le gouvernement et les combattants rebelles) dans la dynamique, la durée et la prévalence mondiale des conflits internes. En fournissant un compte-rendu théorique et empirique complet de cette forme d’ingérence extérieure, il rassemble les dynamiques de négociation sur le champ de bataille, les pressions d’escalade de la concurrence interétatique et les dimensions systémiques de la rivalité géopolitique dans les guerres civiles pour expliquer comment les combats prolongés au sein des États sont liés à une concurrence durable entre ces derniers. Ce faisant, il remet en question les conceptions traditionnelles de la « guerre par procuration » en formulant de nouvelles propositions sur les logiques stratégiques qui la motivent, offrant des angles nouveaux et productifs sur les comportements des groupes armés, les stratégies des intervenants étrangers et les trajectoires des guerres internes. Combinant des analyses statistiques avec des études de cas détaillées s’appuyant sur le travail de terrain, des entretiens originaux, des rapports de renseignement déclassifiés et des études de cas, l’ouvrage propose une analyse de l’impact de la guerre par procuration.
. Patricia Owens, Erased : A History of International Thought Without Men, Princeton, Princeton University Press, mars 2025.
Le domaine académique des relations internationales présente sa propre histoire comme étant en grande partie l’œuvre d’hommes blancs issus des élites. Pourtant, les femmes ont joué un rôle de premier plan dans la création de ce champ interdisciplinaire. Dans Erased, Patricia Owens montre que, depuis ses débuts au début du XXe siècle, les relations internationales ont reposé sur le travail intellectuel des femmes et sur leur expertise dans des domaines tels que l’empire et l’administration coloniale, l’organisation anticoloniale, les puissances non occidentales et les organisations internationales. En effet, les femmes comptaient parmi les principales penseuses internationales de l’époque, influençant le développement du champ en tant que chercheuses, journalistes et intellectuelles publiques — mais aussi en tant qu’épouses hétérosexuelles et partenaires intimes de même sexe.
S’appuyant sur un large éventail de sources d’archives et entremêlant récits personnels, institutionnels et intellectuels, Owens documente les moments et lieux clés de la constitution des relations internationales comme discipline académique distincte en Grande-Bretagne. Elle constate que les idées et l’influence des femmes ont d’abord été marginalisées, puis dévalorisées, ignorées et effacées. En examinant les rôles joués par certaines des penseuses les plus importantes du domaine, notamment Margery Perham, Merze Tate, Eileen Power, Margaret Cleeve, Coral Bell et Susan Strange, Owens retrace les héritages intellectuels et institutionnels du sexisme et du racisme. Elle soutient que la création des relations internationales a été un projet profondément marqué par le genre et la race, échouant ainsi à appréhender la pluralité à l’échelle mondiale. Reconnaître cet échec intellectuel et redécouvrir l’histoire des femmes dans ce domaine ouvre la voie à d’éventuelles sources de renouveau.
. Sacha Lévy-Bruhl, Le grand renversement de l’État social, Paris, Presses universitaires de France, mars 2025.
L’idée que nous serions entrés dans une période de dislocation générale de l’État social – ou État-providence – sature le débat public français. On lui oppose le plus souvent que les dépenses sociales atteignent au contraire des niveaux inédits. De tels débats restent cependant stériles tant qu’ils ne s’appuient pas sur une véritable définition de l’État social et de ce qu’il a représenté au sein de la société française. C’est l’objet de cet ouvrage, qui l’analyse depuis sa naissance jusqu’à ses évolutions les plus récentes, à travers un cadre théorique emprunté à la sociologie durkheimienne et enrichi d’une approche comparative avec le welfare state américain.
L’État social apparaît alors comme une institution qui assume d’abord une fonction de diffusion d’une conception de l’individu dans laquelle ce dernier ne peut être tenu pour responsable de sa situation socio—économique. C’est pourtant ce principe fondateur qu’il a progressivement cessé de porter dans les dernières décennies, allant jusqu’à intégrer au cœur de ses protections des formes de responsabilisation morale inédites. Ce grand renversement plonge la société française dans des déséquilibres majeurs, qui façonnent en grande partie la période politique contemporaine.
. Frédéric Charillon, Géopolitique de l’intimidation - Seuls face à la guerre ?, Paris, Odile Jacob, février 2025.
En quelques années, les discours et actes violents ont transformé la scène internationale : invasion de l’Ukraine et menaces nucléaires par la Russie, manœuvres militaires chinoises autour de Taïwan, attaque contre Israël le 7 octobre 2023 suivie de la destruction de Gaza par l’État hébreu… Les efforts de paix et de dialogue semblent impuissants face à la brutalité du monde : place aux stratégies viriles promettant ordre ou vengeance ! Cette violence est loin d’être irrationnelle : elle est la marque d’une nouvelle ère, celle d’« hommes forts » qui font le pari du fait accompli plutôt que de la concertation. Convaincus de la faiblesse des démocraties libérales, leur stratégie est celle de l’intimidation, déclinée sous plusieurs formes que l’auteur nous aide à décrypter. Du Proche-Orient à l’Asie, du retour
de Donald Trump aux provocations nord-coréennes, le monde bascule. Dans ce contexte, comment les Européens vont-ils pouvoir rester dans l’Histoire ? et avec quels moyens ? Ce livre dresse avec pédagogie un panorama inquiétant mais lucide des dynamiques internationales aujourd’hui à l’œuvre.
. Gérard Chaliand, Le Grand Tournant géopolitique, Paris, Belles Lettres, mars 2025.
Le monde, depuis quelques décennies, est devenu multipolaire donc plus complexe et incertain, tandis que l’hégémonie absolue de l’Occident appartient au passé. En marge de phénomènes comme le dérèglement climatique et ses conséquences ou des innovations apportées par l’intelligence artificielle, on constate un déplacement en cours du centre de la puissance vers l’Asie orientale : Chine et Inde en premier lieu, mais aussi à la périphérie (Indonésie, Japon, Corée du Sud, Vietnam) qui accentue le poids de cette aire entre la mer de Chine et l’océan Indien. La Russie quant à elle, a conclu un mariage de raison avec la Chine qui durera tant que les États-Unis resteront prééminents. Entre-temps, la démographie occidentale est passée de 33 % à 10-12 % de la population mondiale tandis que l’Europe, hier encore enjeu majeur, est déclassée par ce qu’on désigne comme l’Asie/Pacifique, et ne dispose pas elle-même des moyens d’assurer sa propre sécurité. Les conflits irréguliers et leurs conséquences depuis plus d’un demi-siècle ont fortement contribué à l’accélération de cette mutation, dont l’auteur est « un des témoins les plus lucides.
. Henri Mordacq, Le Ministère Clemenceau. Journal d’un témoin, Paris, Passés Composés, mars 2025.
Le Ministère Clemenceau, publié entre octobre 1930 et novembre 1931, constitue l’œuvre majeure et pourtant méconnue du général Henri Mordacq.
Chef du cabinet militaire du président du Conseil et ministre de la Guerre, il est l’intime de Georges Clemenceau de son accession au pouvoir dans la tempête de l’année 1917 jusqu’à sa démission en janvier 1920. Le Tigre l’avait appelé à ses côtés, sachant pouvoir compter sur l’intransigeance et la hauteur de vue du général, dont il connaissait les travaux de stratégie d’avant-guerre, aussi décoré pour son engagement au front pendant les trois premières années de la guerre.
Son ouvrage constitue un témoignage quotidien de l’action gouvernementale de Clemenceau, toute tournée vers la guerre. Aux côtés du Tigre, Mordacq va alors jouer un rôle à la fois crucial et inédit : assurer une fonction de coordination avec les armées en veillant à ce que la décision politique demeure prépondérante sur l’action militaire. Par la pertinence de son regard et grâce à une plume efficace, il donne à lire bien des aspects méconnus des conditions de la victoire de novembre 1918, de la personnalité de Clemenceau et des raisons de son échec au début de 1920.
. Kouadio Siméon Konan, Afrique-France, Conditions pour un avenir, Paris, L’harmattan, mars 2025.
Les relations entre l’Afrique et la France ne sont pas au beau fixe. En l’espace de quelques années, l’ancienne puissance coloniale et le continent, notamment ses ex-colonies, sont passés de l’idylle au désamour. Naguère 1er partenaire commercial, la France occupe aujourd’hui la 5e position. Sur le plan politique, les pays de son ancien « pré-carré » lui tournent le dos l’un après l’autre. Cet état de fait n’est rien d’autre que le résultat de l’attitude condescendante et paternaliste, des ingérences et interventions outrancières et intempestives dans les affaires intérieures de ces États, ainsi que de la lourde main sur leurs économies. Toute situation qui suscite un fort sentiment de rejet de la politique française au sein des peuples qui exigent à présent la reprise en main de leur destinée et la souveraineté nationale comme conditions d’un avenir des relations futures.
. Maxime Lefebvre, La Politique étrangère de la France, Paris, Que-Sais-Je, mars 2025.
L’histoire de la politique étrangère de la France se confond avec celle de la construction de la nation. De la monarchie et l’empire napoléonien notre diplomatie hérite la souveraineté et une certaine idée de la grandeur. Pourtant, du congrès de Vienne à la Seconde Guerre mondiale, le voisin allemand, devenu prépondérant en Europe, a largement rebattu les cartes face à une France diminuée. Depuis 1945, la position de cette dernière, engagée dans la construction européenne, n’est-elle pas celle d’une puissance moyenne d’influence mondiale ? Maxime Lefebvre revient sur cette histoire, et plus largement sur les fondamentaux de notre politique étrangère : les forces et faiblesses de la puissance française, les acteurs et la chaîne de décision, les grandes orientations stratégiques.
. Richard Overy, Rain of Ruin. Tokyo, Hiroshima and the Surrender of Japan, Bristol, Allen Lane, mars 2025.
Durant les derniers mois de la Seconde Guerre mondiale, des centaines de milliers de Japonais, pour la plupart des civils, ont trouvé la mort dans un ultime déchaînement de violence aérienne. Les avions américains commençaient à manquer de cibles plausibles lorsqu’il a été décidé d’utiliser deux armes atomiques dans un dernier et terrible élan pour tenter de mettre fin à la guerre.
Richard Overy revisite cette ultime étape du conflit et le rôle qu’y tinrent les bombardements. Il explore la manière dont la volonté de tuer des civils et de détruire des villes s’est normalisée au fil de la guerre alors que les préoccupations morales s’estompaient et que les scientifiques, les aviateurs et les hommes politiques suivaient une stratégie de destruction massive qu’ils n’auraient jamais approuvée avant son commencement.
Il s’intéresse également aux recherches récentes qui montrent la complexité des efforts déployés pour mettre fin à la guerre dans un Japon où la « reddition » était totalement étrangère à la culture nationale.
. Christine Desouches, De la Francophonie, Paris, Débats Publics Editions, janvier 2025.
Après les sommets de Versailles en 1986 et Chaillot en 1991, la France a accueilli les 4 et 5 octobre 2024 à Villers-Cotterêts le XIXe Sommet de la Francophonie. Ce rendez-vous mondial a revêtu un caractère stratégique pour la France, pour la communauté francophone et pour l’avenir de la Francophonie elle-même. L’Organisation Internationale de la Francophonie à l’instar de la plupart des autres organisations internationales, se trouve, elle aussi, compte tenu du contexte mondial, à la croisée des chemins.
Le crédit qui a été accordé à ce Regroupement volontaire de femmes et d’hommes, d’acteurs gouvernementaux et non gouvernementaux répartis sur cinq continents autour d’une langue commune et de valeurs partagées, animé depuis sa création en 1970 à Niamey, d’un souffle humaniste singulier, s’est en effet sensiblement affaibli.
Les membres de l’OIF sauront-ils trouver les voies d’un sursaut collectif indispensable pour prétendre continuer de peser sur la reconfiguration du monde qui s’annonce, constituer un recours et rester un partenaire indispensable pour les 93 États et gouvernements francophones au XXIe siècle ?
Tel est l’enjeu qu’aborde Christine Desouches dans cet ouvrage. Elle qui a été une des observatrices et actrices privilégiées de la dynamique francophone depuis ses origines, tente d’apporter quelques éclairages à la lumière des processus de construction et d’affirmation d’un espace de solidarité politique et de coopération inventif, confronté aujourd’hui à de nouvelles menaces et à de nouveaux défis.
. Eduard Tokarskiy, La Russie au Conseil de sécurité de l’ONU (1991-2017), Paris, L’Harmattan, janvier 2025.
En 1991, la grande puissance soviétique s’est effondrée. La Russie, malgré des difficultés, est arrivée à succéder à l’URSS au Conseil de sécurité de l’ONU. Le statut de membre permanent l’a aidée à surmonter avec succès la période difficile des années 1990 et lui a donné une influence supérieure à son poids politique réel. Des changements importants dans la politique intérieure au début des années 2000 ont fortement influencé la politique étrangère de la Russie. L’arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine a conduit au rétablissement progressif des positions de ce pays dans le monde. La Russie a commencé à utiliser plus activement le Conseil de sécurité de l’ONU pour réaliser ses intérêts nationaux et s’opposer à l’hégémonie des pays occidentaux. Sa position ferme au sein de cet organe pendant les crises les plus graves des années 2000 et 2010 ainsi que son intervention en Ukraine en 2014 ont fait de la Russie l’un des centres de force importants du monde multipolaire émergent. Ce travail cherche à éclairer cette montée en puissance spectaculaire de la Russie au Conseil de sécurité de l’ONU et sur la scène internationale au cours de la période d’après-guerre froide.
. Frédéric Dufourg, Américains malgré nous - Sous l’emprise culturelle et politique des Etats-Unis, Paris, Decitre, février 2025.
Et si, depuis 1919, notre souveraineté n’avait été qu’un mythe ? Dés la fin de la Première Guerre mondiale, et plus encore après la Seconde, les Etats-Unis ont exercé leur emprise sur l’Europe et la France, influençant profondément notre culture, notre économie et nos choix diplomatiques. Derrière les apparences d’une alliance équilibrée et les coalitions internationales se cache une stratégie méthodique qui impose ses intérêts au détriment de notre indépendance.
Dans cet essai percutant, Frédéric Dufourg dévoile comment des décisions économiques, comme la vente d’Alstom ou la crise des sous-marins australiens, ont été directement dictées par Washington. Il montre également comment l’Union européenne a été, dès ses débuts, alignée sur les intérêts américains pour servir leurs objectifs stratégiques. Les financements occultes de la CIA et l’influence médiatique et culturelle ont constitué de puissants leviers pour asseoir leur domination sur la France.
Et cette emprise continue de redéfinir notre présent. A travers une analyse rigoureuse et documentée, cet ouvrage révèle les mécanismes d’une domination insidieuse et interroge notre capacité à y résister. Frédéric Dufourg, journaliste indépendant et spécialiste des relations internationales, livre une enquête saisissante destinée à tous ceux qui souhaitent comprendre les forces invisibles et les ingérences qui façonnent le monde contemporain.
. Jean-Christophe Rufin, L’empire et les nouveaux barbares, Paris, Cerf, mars 2025.
Émergence d’un nouvel ordre mondial, accroissement des inégalités de développement, fracture planétaire entre Nord et Sud redoublant le clivage Est-Ouest, exacerbation des tensions liées à la question migratoire, édification de murs, physiques ou symboliques, aux frontières... Tout cela, Jean-Christophe Rufin l’avait annoncé dans cet ouvrage visionnaire, publié deux ans après la chute du mur de Berlin, réactualisé à la suite des attentats du 11 septembre, et dont les analyses prémonitoires continuent d’éclairer le monde d’aujourd’hui et de décrypter les enjeux de demain. Un essai lucide, magistral, d’une saisissante actualité. Préface inédite de l’auteur Médecin engagé dans l’action humanitaire, diplomate, ancien ambassadeur de France au Sénégal, Jean-Christophe Rufin a une longue expertise des questions internationales. Son oeuvre littéraire est constituée de nombreux romans, dont Rouge Brésil, couronné du prix Goncourt en 2001. Il est membre de l’Académie française depuis 2008.
. Maxime Lefebvre, La Politique étrangère de la France, Paris, Que Sais-Je, mars 2025.
L’histoire de la politique étrangère de la France se confond avec celle de la construction de la nation. De la monarchie et l’empire napoléonien notre diplomatie hérite la souveraineté et une certaine idée de la grandeur. Pourtant, du congrès de Vienne à la Seconde Guerre mondiale, le voisin allemand, devenu prépondérant en Europe, a largement rebattu les cartes face à une France diminuée. Depuis 1945, la position de cette dernière, engagée dans la construction européenne, n’est-elle pas celle d’une puissance moyenne d’influence mondiale ? Maxime Lefebvre revient sur cette histoire, et plus largement sur les fondamentaux de notre politique étrangère : les forces et faiblesses de la puissance française, les acteurs et la chaîne de décision, les grandes orientations stratégiques.
. Raphaël Chauvancy, Vaincre sans violence - Manuel d’influence et de guerre de l’information, Paris, VA Press, février 2025.
Influencer les masses, manipuler les perceptions, remodeler les réalités : cet ouvrage décrypte les nouvelles formes de conflits où l’esprit devient l’arme ultime. Il révèle comment l’influence et la guerre informationnelle permettent de triompher sans violence en obtenant des victoires durables.
Alliant analyses percutantes, exemples concrets et méthodes détaillées, ce livre offre une définition claire de l’influence et de la guerre de l’information tout en fournissant des outils pratiques, qu’ils soient offensifs ou destinés au débunking. De la construction de narratifs à la manipulation des perceptions, il éclaire les stratégies immatérielles qui redéfinissent les affrontements contemporains.
Un ouvrage indispensable pour comprendre et analyser les conflits modernes dans un monde en perpétuelle compétition.
. Christine Dugoin-Clément Géopolitique de l’ingérence russe - La stratégie du chaos, Paris, Puf, mars 2025.
Bien avant le déclenchement de l’invasion massive de l’Ukraine en février 2022, le conflit faisait déjà rage sur le territoire ukrainien. Cette guerre démarrait dès 2014, alors que le Kremlin usait du « déni plausible » pour nier son implication dans le conflit. Dès lors, les observateurs, analystes et experts étaient témoins d’un nombre croissant d’opérations d’influences qui visaient, selon les besoins, les populations ukrainiennes civiles et militaires, mais aussi les populations occidentales, tout particulièrement celles des pays impliqués dans les tentatives de résolution de ce conflit qui peinait à dire son nom. Cet ouvrage analyse les diverses et nombreuses actions d’influence russes, et particulièrement sur leurs nouveaux déploiements qui dépassent les seules frontières de l’Ukraine : de la campagne Cambridge Analytica aux campagnes de désinformation en Afrique, Christine Dugoin-Clément nous plonge dans cette guerre hybride qui ne fait que commencer.
. Boris Cyrulnik, Boualem Sansal, France-Algérie, Résilience et réconciliation en méditerranée, Paris, Odile Jacob, février 2025.
Qui mieux que Boris Cyrulnik et Boualem Sansal aurait pu écrire ce livre à deux voix, où l’histoire de l’Algérie est dépeinte comme une de ces entreprises humaines qu’on ne comprend qu’en mesurant le rôle structurel de la violence dans les sociétés ? Loin des discours officiels, parfois sans ménagement, ils invitent à redécouvrir l’Algérie et les Algériens, la manière dont ils ont mené ou subi leur histoire, fabriqué leurs héros, conquis leur indépendance – pour le meilleur et pour le pire, entre terrorisme et résistance, fanatisme et corruption, violence et soumission. Un livre nécessaire pour sortir des mensonges et des hypocrisies, et penser à bras-le-corps une situation complexe, pour les Algériens comme pour les Français. Et imaginer peut-être, une fois éclaircis les vieux différends, d’oublier l’amertume et les ressentiments pour rendre possible une amitié entre peuples capables de se reconnaître pour ce qu’ils sont, ayant cessé de se leurrer sur le passé.
. Elsa Vidal, La Fascination russe, Paris, Robert Laffont, février 2025.
Comment trente années d’erreurs de jugement, d’indulgence et de complaisance vis-à-vis de la Russie ont abouti à la guerre. Vladimir Poutine a déclenché plus de cinq guerres. Quelle faiblesse nourrit cette volonté française de "ne pas humilier la Russie" ? Qui est l’homme à l’origine de la politique de relance des relations entre la France et la Russie ? Que cachent les termes, souvent invoqués par nos dirigeants, de "réalisme", de "souveraineté", ou "d’intérêts supérieurs de la France" ? Une véritable idéologie, qui nourrit et structure notre attitude complaisante envers la Russie.
. Gilles Kepel, Prophète en son pays, Paris, Flammarion, mars 2025.
Prophète en son pays est un récit de formation qui couvre les quatre décennies pendant lesquelles Gilles Kepel a parcouru le monde arabe et musulman, de l’Égypte au Levant, ainsi que les "banlieues de l’islam" de l’Hexagone et de l’Europe. Kepel fut en effet le premier à identifier et à étudier les mouvements islamistes, lors de l’assassinat de Sadate en 1981, et à observer la naissance de l’islam en France. Contre les idéologies dominantes - du tiers-mondisme d’hier à l’islamo-gauchisme d’aujourd’hui - et les politiques à courte vue des dirigeants français, ses réflexions sur le "djihadisme d’atmosphère" font désormais autorité et alimentent le débat public en France comme à l’international. Il en éclaire ici la controverse face à la déferlante woke qui menace les études circonstanciées de l’islam contemporain et obère la libre réflexion sur notre société française. Avec humour et érudition, Gilles Kepel revient sur quarante ans d’intuitions prémonitoires.
. Patrice Debré, François Bertin, La science nomade au service de la diplomatie - Mémoires d’un diplomate scientifique, Paris, L’harmattan, février 2025.
Qu’est un attaché scientifique d’ambassade ? Le mot reste encore si imprécis et la fonction si riche de sa diversité, qu’il fallait un livre, et mieux, des mémoires, pour en cerner les contours et l’ambition. François Bertin nous y convie avec le regard et l’expérience d’un universitaire qui sut magnifiquement mettre la science au service de la diplomatie française, et vice versa. Certes le lecteur parcourra à travers son regard, son expertise, et ses souvenirs, des missions aussi différentes que les cultures des pays qu’elles servent, évoluant avec lui, parfois à la limite du risque entre l’Asie, le Moyen-Orient ou les États-Unis. Mais c’est surtout apprendre à travers ce magnifique témoignage que la science est sans doute la meilleure des diplomaties pour la sécurité et la paix dans le monde.
. Pierre Blanc, Géopolitique et climat - 2e édition, Paris, Presses de Sciences Po, février 2025.
Comment le changement climatique rebat-il les cartes de la puissance ? En s’appuyant sur des comparaisons mondiales et des exemples historiques, Pierre Blanc porte un regard géopolitique sur le climat. Il analyse les réponses des différents régimes politiques à cette crise inédite, évalue les risques de guerre climatique et la montée des insécurités. Il repère les territoires les plus exposés aux modifications du climat, qu’elles soient favorables ou défavorables. Il examine enfin les nouveaux rapports de pouvoir qui se font jour dans un monde en voie de décarbonation et insiste sur la nécessité pour l’Europe de mettre sa puissance normative au service du climat.
. Anne Toulouse, L’art de "trumper" - Ou comment la politique de Donald Trump a contaminé le monde, Paris, Rocher éditions, janvier 2025.
Depuis l’élection de Donald Trump en 2016, les campagnes présidentielles traditionnelles n’existent plus, nous sommes entrés dans le royaume de la « trumperie ». La politique est devenue un show outrancier dans lequel les institutions sont méprisées.
En France, l’extrême droite s’est reconnue dans le discours de Trump sur le nationalisme et la sécurité. On pense à Marine Le Pen et surtout à Éric Zemmour, mais Jean-Luc Mélenchon ou Sandrine Rousseau pratiquent les mêmes méthodes : distorsion des faits, diabolisation des adversaires, légitimation de la violence dans la rue... La politique est descendue de son piédestal. Trump a imposé X (ex-Twitter) comme un véhicule sans filtre mettant la parole présidentielle au même niveau que la logorrhée qui se déverse sur les réseaux sociaux.
Alors que des clones de Trump ont vu le jour : Jair Bolsonaro, Boris Johnson... les partis classiques assistent à cette évolution avec une sorte de fascination-répulsion, et ne peuvent s’empêcher d’en emprunter quelques traits.
. Bernard Lavarini, L’Occident sur le qui-vive !, Paris, L’Harmattan, janvier 2025.
Sous la poussée des grands défis de l’Humanité – démographie, changement climatique, confrontations économiques et culturelles – nous assistons au bouleversement des facteurs de puissance qui conditionnent la domination des États. Dans ce monde complexe envahi par la violence, L’Occident sur le Qui-vive, devenu vulnérable, doit faire face à des pouvoirs hégémoniques du « Sud global » de plus en plus puissants. De nouveau, un brouillard stratégique s’étend sur toute l’Europe. En pourrait-il surgir une guerre nucléaire, ou plus loin en mer de Chine ? Dans l’évolution des vies et morts des Empires, où en seront en 2049 les États-Unis, la Chine, l’Inde, la Russie, l’Union Européenne ? La Chine sera-t-elle redevenue la première puissance mondiale ? Sur quels moyens l’Occident devra-t-il compter pour résoudre les crises ?
Pour répondre à ces questions décisives, Bernard Lavarini a choisi une réflexion prospective fondée sur les sciences humaines et le savoir scientifique. Mais « pas question de porter un jugement sur les protagonistes. » Il s’est efforcé de n’être qu’un chercheur de vérité qui n’a que des intérêts scientifiques. L’auteur a connu des personnalités éminentes comme le général de Gaulle, qu’il a eu le privilège « d’initier » à la physique du laser, au début de sa carrière. Il a pu, entre autres, échanger avec Michel Carayol, le père de la première bombe thermonucléaire française. Et, il a longuement dialogué avec deux des quatre généraux de l’Apocalypse, Lucien Poirier et Pierre-Marie Gallois, et avec l’ambassadeur de France François de Rose sur la dissuasion nucléaire.
. Cheikh Niang, Emmanuel Caulier, Réflexions d’un diplomate africain sur les défis du continent - La quête des cimes, Paris, L’Harmattan, février 2025.
L’Afrique, riche de contrastes et d’opportunités, se trouve à un tournant crucial de son histoire. Ce livre est à la fois une analyse des défis contemporains du continent et un plaidoyer pour un sursaut diplomatique et une nouvelle conscience collective. S’appuyant sur son expérience dans les arènes internationales, l’auteur exhorte l’Afrique à briser les chaînes qui freinent son développement, à affirmer sa souveraineté et à prendre pleinement sa place dans un monde en mutation. Véhiculant une conviction profonde, il invite les Africains à réinventer leur destin, en alliant mémoire et ambition, sagesse et audace, pour bâtir un avenir à la hauteur de leur potentiel.
. Guibourg Delamotte, Cédric Tellenne, Géopolitique et géoéconomie du monde contemporain. Puissances et conflits, Paris, La Découverte, février 2025.
Les attentats du 11 septembre 2001 ont marqué l’après-guerre froide telle que l’Occident l’avait rêvée : faite de paix et d’unité. En 2024, à nouveau, le monde connaît des guerres qui prennent une ampleur mondiale par leurs conséquences. Il est marqué par de profondes recompositions de puissances : l’Occident paraît faible et divisé face à la Russie, à la Chine et à un Sud global qui réinvente le mouvement des non-alignés. L’ordre international libéral de l’après-1945 est ainsi remis en cause et déstabilisé par une multitude de menaces et de risques. La question des ressources y prend une dimension particulièrement cruciale. La géopolitique et la géoéconomie permettent d’analyser ces changements, et c’est l’ambition de ce manuel que d’offrir au lecteur les clefs de compréhension du monde contemporain (XXe et XXIe siècles). Il aborde dans une première partie les grandes lignes de force géopolitiques et géoéconomiques du monde d’aujourd’hui, en lien avec l’affirmation d’un contexte général de mondialisation qui en complexifie la lecture. Il en fournit les principaux instruments d’analyse en s’appuyant sur la notion de puissance, étudiée d’un point de vue tant théorique que pratique, inscrite dans une chronologie rigoureuse. La seconde partie est régionale : ses auteurs y explorent les enjeux de sécurité des aires et des principales puissances qui les dominent. Entre rivalités, conflits et coopération, les relations intra- et interzones sont passées au crible d’un examen critique à plusieurs échelles. Ce livre s’adresse aux lycéens, aux étudiants en classes préparatoires et des IEP, mais intéressera également toute personne qui s’interroge sur le cours de l’histoire immédiate.
. Ousmane Balde, La cyberdiplomatie- Pouvoir, conflits et diplomatie dans l’ère numérique, Paris, La Bruyère éditions, janvier 2025.
Dans un monde où le cyberespace devient aussi crucial que le territoire géographique, la diplomatie doit évoluer pour répondre aux nouveaux défis. Cet ouvrage plonge dans les méandres de la cyberdiplomatie, explorant comment les innovations technologiques redéfinissent les règles des relations internationales. À travers des analyses approfondies, l’auteur examine l’histoire de la diplomatie numérique, de ses premiers jours à son rôle pivot dans la sécurité mondiale et la politique étrangère aujourd’hui. Le livre met en lumière les acteurs clés du cyberespace — des États et gouvernements aux organisations internationales et acteurs non étatiques comme les multinationales et les ONG. En explorant des outils et méthodes innovants, de l’intelligence artificielle à la blockchain, l’ouvrage décrit comment ces technologies façonnent les stratégies diplomatiques. L’auteur aborde également les dilemmes éthiques et sociétaux majeurs engendrés par le cyberespace, notamment en ce qui concerne la vie privée, la liberté d’expression et les droits humains. L’auteur propose une vision prospective, envisageant l’avenir de la cyberdiplomatie face aux défis émergents et à l’évolution rapide de la technologie.
. Roland Sanviti, Guerres de conquête à l’aube du troisième millénaire, Paris, Éditions Bernard Giovanangeli, janvier 2025.
Sous le règne de la finance criminelle, tel aurait pu être le titre de cet essai. Cependant cette arme non conventionnelle que représente la finance avait toujours été le nerf de la guerre, ne serait-ce que pour aiguiser les appétits et accaparer les richesses des vaincus ? : aussi, la finance criminelle a réuni sur ce champ de bataille à l’échelle de la planète de nouveaux belligérants qui ne souhaitent ni apparaître, ni assumer les actes criminels qu’ils commettent. Sans doute est-ce cela la plus grande différence avec toutes les guerres qui ont endeuillé les familles jusqu’au XIXe siècle. C’est pourquoi le citoyen doit devenir juge et soldat, apprendre à identifier l’instigateur derrière le commanditaire et l’exécutant et promouvoir les institutions qui soient à la mesure de ces enjeux. Parce que cette nouvelle forme de guerre a produit une nouvelle forme d’esclavage, cet apprentissage et le passage à l’action sont devenus vitaux.
. Olivier Petitjean et Ivan du Roy, Multinationales. Une histoire du monde contemporain, Paris, La Découverte, février 2025.
Qu’on consomme leurs produits, qu’on admire leurs marques ou qu’on dénonce leurs pratiques, les multinationales sont omniprésentes dans nos vies. Mais les connaît-on vraiment ? Quand sont-elles apparues ? Comment sont-elles devenues si puissantes ?
Ce livre, associant chercheurs et journalistes, offre une fresque historique et critique inédite sur ces entreprises qui ont contribué à façonner le monde dans lequel nous vivons. Des premiers câbles télégraphiques sous-marins aux géants du Web, de IG Farben au pesticide RoundUp, de Rockefeller à Elon Musk, des » républiques bananières » au lobbying intensif, il retrace leur montée en puissance progressive jusqu’à nos jours. À travers des dates emblématiques, des épisodes-clés et des portraits, il montre comment leur expansion découle de choix économiques et politiques, mais aussi juridiques, techniques, financiers ou culturels.
L’histoire des multinationales épouse celle des relations entre États, des conflits et des grandes crises. Elle suit de près la trajectoire des changements technologiques, que ces entreprises ont contribué à orienter et accélérer. Elle accompagne la mutation de nos vies quotidiennes, à travers l’avènement d’une société de consommation de masse puis du tout-numérique. Elle est aussi l’histoire de la transformation de notre environnement naturel, de l’extraction des matières premières, de la production d’énergie à une échelle toujours plus importante, jusqu’à engendrer des menaces inédites.
L’histoire des multinationales est donc notre histoire.
. Alexander C. Karp et Nicholas W. Zamiska, The Technological Republic. Hard Power, Soft Belief, and the Future of the West, New York, Crown Currency, février 2025.
La Silicon Valley s’est égarée.
Autrefois, les plus brillants ingénieurs y collaboraient avec les pouvoirs publics pour faire progresser des technologies qui changent le monde. Leurs efforts ont assuré la place dominante de l’Occident dans l’ordre géopolitique. Mais cette relation s’est aujourd’hui érodée, avec des répercussions dangereuses.
À présent, le marché récompense l’engagement superficiel dans le potentiel de la technologie. Les ingénieurs et les entrepreneurs créent des applications de partage de photos et des algorithmes de marketing, devenant ainsi, sans le savoir, les réceptacles des ambitions d’autrui. Cette complaisance s’est étendue au monde universitaire, à la politique et aux conseils d’administration. Le résultat ? Une génération entière dont la vocation se résume à la poursuite bornée des exigences d’une économie capitaliste tardive.
Alexander C. Karp, cofondateur et PDG de Palantir, et Nicholas W. Zamiska, proposent une critique virulente de notre abandon collectif de l’ambition, en soutenant que pour que les États-Unis et leurs alliés conservent leur avantage mondial — et préservent les libertés que nous tenons pour acquises — l’industrie du logiciel doit renouveler son engagement à relever nos défis les plus urgents, y compris la nouvelle course aux armements que constitue l’intelligence artificielle. Les gouvernements, quant à eux, doivent adopter les caractéristiques les plus efficaces de l’état d’esprit des ingénieurs qui a fait le succès de la Silicon Valley. Avant tout, ils doivent rejeter la frilosité intellectuelle et préserver un espace pour la confrontation idéologique. La capacité à risquer la désapprobation de la foule, affirment Karp et Zamiska, a tout à voir avec les performances technologiques et économiques. Ce livre lèvera également le voile sur Palantir et son projet politique plus large de l’intérieur, lançant un appel passionné au réveil de l’Occident.
. Guillaume Carnino, Liliane Hilaire-Pérez et Jérôme Lamy, Histoire globale des techniques, Paris, CNRS Éditions, février 2025.
De l’extraction minière à l’aéronautique, de l’Amérique Latine au Japon, du taylorisme au recyclage : une histoire globale des techniques, du XVIIIe siècle à nos jours. L’évolution des techniques constitue le tissu des réalités politiques, économiques, culturelles et quotidiennes des sociétés partout dans le monde : cet ouvrage en offre une synthèse d’histoire globale. Dans la lignée de travaux parus depuis une quinzaine d’années, il propose une étude comparée et connectée des techniques à l’échelle du monde, faisant une large place aux moyens de production et de communication, à l’exploitation des ressources naturelles, aux grands systèmes techniques, aux infrastructures et aux réseaux. Il ouvre également la réflexion aux questionnements transversaux, qu’il s’agisse de la gouvernance des risques, des réparations et de la maintenance, des techniques du quotidien. Il réalise enfin un tour du monde, restituant les diverses significations données aux activités techniques dans les différentes sociétés, et remet ainsi en question aussi bien les approches téléologiques associant technologies et progrès, que les perspectives trop eurocentrées.
Une exploration stimulante des implications socio-économiques des techniques ainsi que des systèmes de représentation et des structures de pouvoir qui ont conduit à l’émergence du monde d’aujourd’hui.
. Julián Casanova, Franco, Madrid, Critica, février 2025.
Personne n’a autant conditionné l’histoire contemporaine de l’Espagne que Francisco Franco Bahamonde (1892-1975). Pourtant, malgré son omniprésence, le dictateur reste méconnu, caché derrière un enchevêtrement d’a prioris et de clichés, de manichéismes et de mensonges.
Cinquante ans après sa mort, Julián Casanova s’est plongé dans des dizaines de témoignages, de livres et de documents qui, avec l’héritage de toute une carrière universitaire et de recherche, lui permettent d’offrir une approche aussi précise que suggestive. Franco a commencé sa conquête du pouvoir par un soulèvement militaire et l’a achevée dans le sang et le feu d’une guerre civile. L’accession au pouvoir absolu a profondément modifié sa personnalité et son entourage. Malgré l’absence d’un corpus idéologique ou programmatique stable et son faible charisme, son héritage continue d’imprégner notre présent.
. Pierre Buhler, Pologne. Histoire d’une ambition, Paris, Tallandier, février 2025.
Maltraitée par l’Histoire, la Pologne fut partagée trois fois entre la Russie, la Prusse et l’Autriche. Aujourd’hui en première ligne d’une Europe qui bascule vers l’Est, sa nouvelle dynamique suscite l’admiration. Il est temps de mieux comprendre les ressorts de ce grand pays avec lequel il faut désormais compter.
Nul n’incarne mieux que le peuple polonais la lutte d’une nation pour sa liberté. Écrasé par des régimes tyranniques et oppresseurs durant sa longue disparition en tant qu’État entre 1795 et 1918, il fut victime d’un sort tragique pendant la Seconde Guerre mondiale, avant de subir le joug soviétique pendant près d’un demi-siècle. Pleinement intégrée dans l’ensemble européen et transatlantique, la Pologne est désormais prospère et souveraine, pivot d’une Europe centrale longtemps traitée à l’Ouest comme une simple périphérie. Méfiante vis-à-vis de la Russie par expérience, elle est depuis février 2022 l’avant-poste du combat européen contre l’expansionnisme de Poutine.
En fin connaisseur, Pierre Buhler plonge dans l’histoire de ce pays ambitieux et analyse les lignes de force du « moment polonais » : l’ancrage profond du catholicisme, la défense farouche de sa liberté et le rempart qu’il constitue à l’Est. Alors que l’Europe se trouve face à son défi le plus existentiel depuis la fin de la guerre froide, cet acteur majeur bouscule le rapport des forces.
. Quentin Skinner, Liberty As Independence. The Making and Unmaking of a Political Ideal, Cambridge, Cambridge University Press, Février 2025.
Qu’est-ce que la liberté ? Comment les conceptions de la liberté ont-elles évolué au fil du temps ? Et quelles en sont les conséquences à l’échelle mondiale ? Ce livre passe en revue l’histoire des conceptions rivales de la liberté, de l’Antiquité à l’époque moderne.
Quentin Skinner part de la conception de la liberté en tant qu’indépendance, depuis l’idéal classique jusqu’au début de l’époque moderne en Grande-Bretagne, avec comme point culminant la prétention de l’oligarchie whig d’avoir transformé cette idée en réalité. Cependant, la vision whig d’un État libre et d’une société civile ayant été ébranlée par la révolution américaine de 1776, s’est affirmée une autre conception de la liberté, qui s’accomplirait par l’absence de contrainte physique ou coercitive.
Liberty as Independence examine de nouvelles dimensions de ces points de vue rivaux, en considérant les liens entre les débats sur la liberté et les débats sur l’esclavage, et plaide en faveur d’un retour à l’idée de liberté en tant qu’indépendance.
. Bruno Tertrais, La Guerre des mondes - Le retour de la géopolitique et le choc des empires, Paris, Alpha, février 2025.
Nous entrons dans une nouvelle ère : la tectonique des plaques géopolitiques s’est remise en mouvement. Les néo-empires sont sortis de leur sommeil et contestent l’ordre international. La Chine et la Russie veulent leur revanche contre l’Occident, et refaire le monde à leur image. La guerre des mondes a commencé. Cette guerre se jouera de l’Ukraine à Taiwan, des fonds marins à l’espace extra-atmosphérique, dans les mines de lithium et dans le cyberespace. Elle sera longue et opposera non pas deux blocs, mais une famille occidentale, plutôt libérale, à une famille eurasiatique autoritaire. Ce sera une lutte d’influence à l’échelle planétaire, émaillée de crises et de conflits régionaux. Sommes-nous comme dans les années 1910, à la veille du grand choc des empires ? Comme dans les années 1930, face à la montée de totalitarismes agressifs ? Ou comme dans les années 1950, au début d’une nouvelle forme de guerre froide ? Et si l’Occident n’était pas si mal placé pour remporter cette nouvelle guerre des mondes ? Et si ses faiblesses étaient moins importantes que celles de ses adversaires ?
. Alain Trannoy, Arundhati Virmani, Économistes et historiens, un dialogue de sourds ?, Paris, Odile Jacob, janvier 2025.
« Chacun peut être amené au cours de sa vie à s’intéresser à l’histoire pour saisir les enjeux d’un affrontement entre groupes sociaux ou mieux appréhender comment les doctrines naissent et disparaissent.
L’économie, de son côté, est devenue omniprésente. On écoute aujourd’hui les économistes comme les Grecs et les Romains écoutaient les oracles. L’histoire et l’économie sont donc des disciplines incontournables.
Dans ces temps troublés, on aimerait que ces deux disciplines, aux méthodes parfois antagonistes, associent leurs génies respectifs, l’histoire offrant la perspective du temps long, l’économie offrant la panoplie la plus actuelle de méthodes quantitatives. » A. T. et A. V. Ce livre tente de faire dialoguer histoire et économie, et de conjuguer leurs méthodes pour encourager les collaborations. Il donne au passage des éclairages inédits sur des questions actuelles, de l’histoire du travail des femmes ou de la colonisation à l’avènement de la pensée scientifique. Un ouvrage essentiel pour penser la fragile fabrique des savoirs en sciences humaines. Alain Trannoy est économiste. Directeur d’études à l’EHESS, il est spécialiste de l’économie publique et de la fiscalité. Arundhati Virmani est historienne. Enseignante-chercheuse à l’EHESS, elle est spécialiste de l’histoire coloniale et contemporaine de l’Inde.
. Anna Chronique, Chroniques de Tunisie - Une Française au pays de la Révolution, Paris, Dunod, janvier 2025.
En 2008, Anna et Boris, des profs en début de carrière et souvent en galère postulent pour partir enseigner à l’étranger. Après des démarches fastidieuses et quelques nuits d’insomnie, ils décrochent chacun un poste pour la Tunisie à la surprise de leurs proches. Sont-ils au courant que le pays est une dictature ? Que sa sécurité cache une répression systématique des opposants et une forte censure ?
Qu’importe ! Anna, Boris et leur chat partent vivre leur nouvelle vie d’expats rythmée par la valse des taxis, le concert nocturne des muezzines et les rencontres hautes en couleurs avec les Tunisiens. Ils parcourent les routes de ce pays riche en vestiges, autant de livres ouverts sur son histoire : de Carthage aux hauts lieux du beylicat et du protectorat français aux exceptionnels sites romains comme El Jem ou Dougga...
Mais tout bascule en décembre 2010, quand éclate la révolution du jasmin qui ébranle les dictatures du monde arabe.
. Isaac Njiemoun Manchou, La création de la monnaie unique commune africaine - Donner à la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLÉCAf) son adjuvant monétaire, Paris, L’Harmattan, janvier 2025.
L’Afrique, riche de son potentiel et de ses ressources, est un marché en expansion, prévu à deux milliards de consommateurs d’ici 2050. Toutefois, les échanges intra-africains restent faibles comparés à ceux avec les autres continents. Pour remédier à cela, la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), créée en 2018 et opérationnelle depuis 2021, vise à dynamiser le commerce interafricain. Trois éléments clés sont indispensables pour son succès : la bonne gouvernance, la diversification économique et une monnaie unique. L’ouvrage met en lumière l’importance d’une souveraineté monétaire africaine, libérée des monnaies coloniales comme le franc CFA, et appelle à accélérer la création de cette monnaie unique, éventuellement nommée « afric », intégrant intelligemment la crypto-monnaie.
. Olivier David, La population mondiale - Répartition, dynamique et mobilité, Paris, Armand Colin, janvier 2025.
La population mondiale a franchi le seuil des 8 milliards d’habitants en 2022 et les dernières projections de l’ONU prévoient une poursuite de la croissance, pour atteindre 10,3 milliards en 2084. Toutefois, l’intensité de cette croissance est très disparate d’une région à l’autre du monde ; et si elle est très soutenue dans certains pays, d’autres doivent faire face à un immobilisme et à un vieillissement sans précédent. Cet ouvrage propose une introduction simple aux notions et concepts utilisés en géographie de la population. Assorti de nombreuses illustrations et de repères faciles à mémoriser, il permet d’aborder et comprendre la grande variété des dynamiques démographiques, et les enjeux pour les populations à venir.
. Thierry de Montbrial, L’ère des affrontements - Les grands tournants géopolitiques, Paris, Dunod, février 2025.
Au début de ce siècle, les Occidentaux ont voulu croire à la mondialisation heureuse grâce à l’expansion de la démocratie et de l’économie de marché. Un quart de siècle a passé, et la planète est engagée dans une Deuxième guerre froide, voire dans les prémices d’une Troisième Guerre mondiale. Le djihadisme s’est étendu dans une aire arabo-musulmane en effervescence. La guerre d’Ukraine a bouleversé le continent eurasiatique. Face à la Chine, les États-Unis se mobilisent pour garder leur primauté. La guerre économique se répand. Menacée de déclassement, l’Union européenne doit se réformer en profondeur pour survivre. Comment en est-on arrivé là ? C’est à cette question que répond ce livre de façon à la fois précise et vivante, tout en s’interdisant, face à la complexité de la réalité, de réduire l’histoire à un combat entre les « bons démocrates » et les « méchants autocrates ».
. Yves Santamaria, L’Algérie et la France - Une terre pour deux peuples (1830-1962), Paris, Odile Jacob, janvier 2025.
Dans ce livre, Yves Santamaria retrace l’histoire commune de la France et de l’Algérie, depuis les débuts de la conquête française jusqu’à la guerre d’indépendance. Il décrit en particulier le sort des populations autochtones, aux prises avec des lois inégales et une promesse de droits civiques jamais honorée. À contre-courant des lectures rétrospectives souvent enclines à penser l’indépendance comme l’issue inéluctable, l’auteur s’efforce de mettre en lumière les occasions manquées qui auraient pu permettre d’éviter l’embrasement. Ainsi, Yves Santamaria montre que, en 1954, quand éclate la guerre, le milieu politique français était en ébullition. Entre l’indépendance totale et le rapatriement des Pieds-noirs, divers projets voient le jour, notamment une division du territoire de l’Algérie qui aurait partagé cette terre entre deux peuples. On suit les opérations militaires, on assiste aux hésitations de De Gaulle, confronté à la radicalité de ses interlocuteurs, OAS et FLN. Au cœur de cette violente guerre de décolonisation, soldée par le rapatriement des Pieds-noirs, on s’aperçoit que d’autres voies étaient envisagées.
. Charlotte Tagus, L’hydropolitique chinoise du mékong, Paris, Spinelle, janvier 2025.
L’hydropolitique chinoise est communément perçue comme impérialiste voire agressive et irrationnelle au regard des actions de la puissance dans le Mékong. Les réalités et perceptions associées à l’hydropolitique du Mékong étant évolutives, notre étude en explore les dynamiques à l’heure de l’identité hydrohégémonique de la Chine et d’enjeux prégnants tels que les changements climatiques. Aussi, appliquée à l’hydropolitique du Mékong notamment définie en termes de sécurité environnementale, nous nous interrogeons sur l’évolution de l’institutionnalisation de la coopération régionale du Mékong et sur la réalité du statu quo afférent. Il est à noter que nous appréhendons par ailleurs plus spécifiquement le discours de la Chine relativement à sa façon de mener son hydropolitique, ainsi que, de manière plus transversale, la question des réalités et des perceptions liées à son hydrodiplomatie du Mékong.
. Didier Ortolland, Les mers de Chine - Géopolitique, confrontation et droit international, Paris, L’harmattan, décembre 2024.
Cet ouvrage propose une étude de la politique chinoise dans ce que la Chine considère comme ses espaces maritimes ainsi que dans les océans dans lesquels Pékin souhaite développer ses ambitions. Il développe particulièrement cette analyse en mers de Chine méridionale et orientale mais aussi dans l’Indopacifique. L’intérêt de la Chine pour les zones polaires et les grands fonds marins y est également étudié. Il aborde l’histoire des « mers de Chine » qui sous-tend les revendications des différents protagonistes régionaux et décrypte la politique des différents acteurs. Il analyse les enjeux des espaces maritimes considérés, politiques, économiques ou stratégiques mais également les menaces que fait planer la politique de Pékin sur le droit international. La rivalité sino-américaine apparaît en filigrane dans toutes ces questions.
. Erik Orsenna, Julien Denormandie, Nourrir sans dévaster, Paris, Gallimard, février 2025.
Nous aimons le pain, mais nous ne chérissons guère les céréaliers. Depuis l’enfance, nous adorons les vaches, mais nous condamnons les éleveurs. En bons Français, nous répétons apprécier manger, mais nous accordons de moins en moins d’attention à notre alimentation. Au pays de Pasteur, nous nous méfions de la science alors que, grâce à elle, une révolution se prépare... Pour tenter de comprendre et de dépasser ces contradictions, nous - Julien, qui a été ministre de l’Agriculture, et Érik, qui aurait rêvé de l’être - sommes partis en voyage. Aux quatre coins de la France, mais aussi ailleurs en Europe. Et en Chine, au Brésil, en Égypte, en Ukraine. Nous avons visité des fermes et des élevages de toutes tailles et des labos prometteurs. Nous avons rencontré des personnages d’aujourd’hui, de demain mais aussi d’hier. Loin de tomber toujours d’accord, nous nous sommes retrouvés sur l’enjeu essentiel : nourrir toujours plus d’êtres humains sans dévaster leur planète.
. Jeanne Loiret, La défense du Japon - Une politique de partenariats, Paris, Du Cygne, janvier 2025.
À un moment où la réélection de Donald Trump ramène le problème de dépendance des alliés des États-Unis sur le devant de la scène, on pourrait être surpris de trouver le Japon au milieu d’une toile de partenaires militaires de plus en plus vaste. Désir d’indépendance ? Ou suivisme des États-Unis dans leur politique de bloc anti-chinoise dans l’Indopacifique ? Si l’importance de Washington dans la défense du Japon ne peut être ignorée, la politique militaire nippone ne doit pas être réduite à son principal allié, et le réseau de partenaires créé par le Japon fait partie d’une politique de défense mûrement réfléchie, visant à défendre son territoire et ses intérêts, et s’inscrivant dans des stratégies d’alliance datant du début du XXe siècle. Les partenariats, pour le Japon, sont une part intrinsèque de sa défense, au même titre que les réformes de son armée ou son système anti-missile. Cette étude tend à montrer pourquoi, comment, et avec quels résultats et limitations le Japon s’allie pour se défendre.
. Claude Martin, La diplomatie n’est pas un dîner de gala - Mémoires d’un ambassadeur, Paris, L’aube, février 2025.
« Claude Martin, ambassadeur de France (ils sont quelques-uns seulement à pouvoir porter ce titre), nous embarque dans un demi-siècle d’histoire de la Chine, de l’Europe et de la France. Observateur passionné, et passionnant, il nous propose ici un récit aussi précis que foisonnant, émaillé d’anecdotes et de portraits. “La France n’envoyait pas ses diplomates à Pékin pour y fréquenter des Suédois ou des Mexicains. Nous étions là pour connaître la Chine.” L’on peut affirmer, au travers de cet extraordinaire ouvrage, qu’il la connaît parfaitement ! Comme il connaît l’Allemagne qu’il a par - courue en voiture, à pied, à vélo, pendant neuf ans. Cet ambassadeur non conformiste a vite compris que la diplomatie “n’est pas un dîner de gala”. Elle est un dialogue entre les peuples. Et entre les hommes qui les gouvernent. Après Charles de Gaulle et Mao Zedong, les personnages célèbres ou inconnus se succèdent – présidents, ministres, ambassadeurs, acteurs de la diplomatie française. Derrière eux, c’est au Quai d’Orsay que l’auteur rend finalement hommage, cette maison qu’il ne cesse de fustiger mais à laquelle il adresse pourtant, à travers ces pages, une belle déclaration d’amour. Ces “Mémoires d’un ambassadeur” sont à lire comme un livre d’histoire bien sûr, mais aussi, dans un monde où toutes les alliances sont à nouveau bouleversées, comme un traité de tolérance que Voltaire aurait certainement apprécié à sa juste valeur. »
. Emmanuel Lincot, L’Asie terre de conflits - Enquête sur la nouvelle poudrière mondiale, Paris, Cerf, février 2025.
L’Asie sera-t-elle l’épicentre des guerres futures ? Quels sont les rapports de force à l’oeuvre ? Quels sont les affrontements à venir ? À l’heure où les grands équilibres du monde vacillent, voici l’indispensable ouvrage pour comprendre, cartes à l’appui, les tensions d’aujourd’hui et les grands enjeux de demain. Sur le plus vaste des continents, les ambitions se percutent, les lignes de fracture se creusent et les camps se forment. Toujours mouvantes, leurs limites se redéfinissent au gré des jeux d’influence et des stratégies de puissance. La Chine étend partout ses Nouvelles Routes de la soie, l’Inde se dresse, le terrorisme islamique prospère et le risque nucléaire s’accroît. Sur terre comme sur mer, les antagonismes se cristallisent aux frontières. Barthélémy Courmont et Emmanuel Lincot convoquent la géographie et l’histoire pour démêler les tensions, pour décrypter les conflits, pour dire la permanence du fait culturel et la réalité de la donne régionale autour du nouveau bassin mondial qu’est le Pacifique. Voici la radiographie des dangers planant sur l’Asie. Voici leurs répercussions sur la planète. Professeur à l’Université catholique de Lille, Barthélémy Courmont est directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS). Il a récemment publié Géopolitique des mondes asiatiques.
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Emilie Bourgoin, étudiante en dernière année de Master Sécurité et Défense à l’Université d’Ottawa (Canada, Ontario), après un BBA à l’EDHEC. Elle a travaillé en alternance au sein de la cellule sûreté d’un grand groupe et assure pour Diploweb.com le suivi hebdomadaire de l’actualité des livres, revues et conférences géopolitiques, ainsi que la rédaction des synthèses des épisodes de l’émission et podcast Planisphère.
Pierre Verluise, docteur en Géopolitique est directeur des publications du Diploweb.com.
[1] Cette émission a été enregistrée le 18 mars 2025.
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Date de publication / Date of publication : 2 octobre 2025
Titre de l'article / Article title : Actualité des livres géopolitiques
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