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www.diploweb.com présente " Quelle France dans le monde au XXI e siècle ? ", par Pierre Verluise

5. QUELLE MONDIALISATION CONSTRUIRE ?

Partie 5.3. Quels sont les effets de la mondialisation sur le territoire français ?

 

Introduction - 1. Comment les Français voient-ils le monde ? - 2. Quelles sont les images de la France à l'étranger ? - 3. Quels sont les outils disponibles ? - 4. Quelle politique étrangère ? - 5. Quelle mondialisation construire ? - Conclusion - Postface de Gérard Chaliand : Stratégie d'influence
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Les Français sont-ils égaux face à la mondialisation ? Indépendamment du facteur social, il est un élément auquel on pense peu : la situation géographique.

En fonction de leur lieu de résidence, tous les Français ont-ils les mêmes chances dans la mondialisation ?

Denise Pumain, géographe et directrice d’une collection consacrée aux villes, pointe du doigt les conséquences de la mondialisation sur le territoire : " L'accélération des vitesses de communication a eu pour conséquence d'accroître l’attractivité des plus grandes villes, au détriment des villes de moins de 200 000 habitants.

La taille et le poids des villes sont en effet très importants dans la mise en réseau internationale. Cette évolution favorise les villes où se développent des activités diversifiées qui permettent d'exercer les fonctions complexes qui impliquent à la fois des gens formés pour les réaliser et des consommateurs suffisamment nombreux et exigeants pour constituer un marché.

Un effet de seuil

La mondialisation a, ainsi, des effets sensibles sur le territoire. Les villes françaises capables d'avoir des relations avec des agents économiques d'autres pays sont celles qui bénéficient d’un niveau d'équipement et de ressources humaines rare dans les villes de moins de 200 000 habitants, voire 1 million pour certaines fonctions très spécialisées. Or, il n’existe en France qu’une trentaine de villes de plus de 200 000 habitants". Il s’agit, par ordre décroissant, des agglomérations suivantes : Paris, Lyon, Marseille, Lille, Bordeaux, Toulouse, Nantes, Nice, Toulon, Grenoble, Strasbourg, Rouen, Valenciennes, Grasse-Cannes-Antibes, Lens, Saint-Etienne, Nancy, Tours, Béthune, Clermont-Ferrand, Le Havre, Rennes, Orléans, Montpellier, Dijon, Mulhouse, Reims, Angers, Brest et Douai.

Un malheur ou un atout ?

Denise Pumain reprend :"Le surdimensionnement de Paris - dont l’agglomération rassemble 7 fois plus d’habitants que Lyon, deuxième agglomération du pays - a longtemps été critiqué. Cependant, il faut bien admettre que cela peut devenir une chance dans le contexte de la mondialisation, non seulement pour la France mais aussi pour l'Europe. Londres et Paris sont les deux grandes villes qui peuvent actuellement inscrire l'Europe dans le petit club des très grandes villes très développées. Au niveau des élites mondiales, l'attractivité d’une ville se joue aussi sur le plan des images. A cet égard, l'image de Paris peut être un atout. Pour autant, il faut évidemment veiller à ne pas engorger Paris et à ne pas défavoriser les autres régions.

Il importe, en effet, de prendre conscience que si Lyon éprouve des difficultés à se mettre en compétition avec les autres grandes villes européennes et mondiales - ce qui est un effet indirect de plusieurs siècles de centralisation en faveur de Paris - c'est encore plus vrai des centaines de villes dont la population est moins nombreuse.

A court terme, il est donc peu vraisemblable que la diffusion des innovations liées à la mondialisation arrive rapidement dans les villes de moins de 200 000 habitants. Ne serait-ce que parce que le pourcentage de cadres diminue fortement en dessous de ce seuil.

Un risque

Cette évolution du territoire liée à la mondialisation ne retire pas aux villes de moins de 200 000 habitants leur raison d'être, ne serait ce que par leur richesse patrimoniale. Eu égard aux investissements consentis dans le passé par la collectivité pour ces villes, cela représenterait un coût de les abandonner. Reste qu'on est menacé de voir se produire à l'échelon des villes petites et moyennes les phénomènes d'abandon et de "désertification" qui se sont produits dans les campagnes françaises depuis 1880 ".

En tête

En revanche, l’Ile de France poursuit son développement accéléré, plus rapide que celui des autres régions. Son Produit Intérieur Brut (PIB) a atteint dernièrement 2 178 milliards de francs, ce qui la place en tête de toutes les régions européennes. Elle précède, en effet, la Lombardie (1 415 milliards), le Grand Londres (1 206) et la Rhénanie Nord-Westphalie (765). La supériorité de l’Ile de France est d’autant plus significative qu’elle produit 5 % de la richesse de l’Union européenne avec seulement 3 % de sa population.

La région française qui vient après l’Ile de France est Rhône-Alpes (682), classée au 10 e rang européen. La Bretagne, 7ème au plan français (294) se retrouve au 42e rang européen. La Corse, quant à elle, au 22e rang français, ferme pratiquement la marche des régions européennes, puisqu’elle se classe 187e sur 196.

Quel équilibre ?

Si, depuis le milieu des années 1950, les politiques d’aménagement du territoire ont généralement tenté d’atténuer les disparités régionales, elles n’ont pas modifié une réalité géographique : la seule structure " stable " du territoire demeure la domination de Paris.

Alors que l’opinion la plus répandue consiste à favoriser un développement équilibré du territoire, il faut cependant observer que le développement économique est toujours inégalement distribué dans l’espace.

Pas plus qu’un autre, le territoire français ne peut rester figé en l’état d’un " âge d’or " plus ou moins mythique. Le territoire évolue, en fonction des évolutions de la société qui l’occupe et de la manière dont elle agît par rapport au contexte du moment. Chaque jour, une multitude de personnes, d’entreprises, de collectivités territoriales et d’entités administratives de l’Etat ou de l’Union européenne influencent l’évolution spatiale par leurs décisions conscientes ou inconscientes. Le territoire est chaque jour produit et reproduit - mais pas nécessairement à l’identique - par les évolutions sociales à l’œuvre, tant à l’échelle régionale, qu’aux échelles nationale et mondiale.

L’instrumentalisation du thème de la mondialisation qui a longtemps prévalu n’est pas resté sans conséquence, comme en témoigne la multiplication des " folies " financées par certaines collectivités locales dans le cadre de la décentralisation.

. Que se passe-t-il quand la mondialisation reste incomprise des collectivités territoriales ?

A la suite de la décentralisation engagée en 1982, les régions disposent maintenant d’une marge de manœuvre politique aussi importante que l'Etat central. Ce qui se traduit notamment par un transfert financier au niveau local. Trop souvent, dans l’espoir d’attirer des investisseurs, des mesures peu appropriées sont mises en place, à cause d’une mondialisation mal comprise.

En effet, explique le Professeur El Mouhoub Mouhoud, les décideurs locaux confondent trop souvent l'attractivité des entreprises et la pérennité de la localisation des entreprises. De sorte que des collectivités locales offrent des cadeaux financiers monstrueux aux entreprises françaises ou étrangères pour qu'elles viennent s'installer là et pas ailleurs - terrain gratuit, aide directe, prêt bonifié, exonération de charges sociales pendant cinq ans... - alors que de nombreuses entreprises peuvent avoir des propensions à la volatilité et quitter ce territoire tout aussi rapidement qu'elles y sont venues... en laissant une dette colossale à la charge de la collectivité.

Droit dans le mur

Combien de collectivités locales se sont-elles fourvoyées dans une compétition qui ne cesse de se développer entre régions européennes pour attirer des firmes à coup de subventions des investissements ? Compte tenu d’une mobilité croissante du capital, il serait préférable de prendre conscience qu’il existe des entreprises qui tendent à l'ancrage territorial et d'autres qui ont une propension à la volatilité.

Ces dernières se spécialisent dans la logistique et l'accélération des flux, en utilisant les technologies de l'information et de transports les plus modernes. Puisqu’elles travaillent sur des produits standards et mettent en œuvre des stratégies de court terme, elles peuvent venir un jour pour empocher des aides, ici, et partir un autre jour pour empocher de nouvelles aides, ailleurs. Le coût d'abandon des unités productives devenant de plus en plus faible pour ces entreprises, beaucoup de collectivités locales ont financé totalement à perte leur installation... pour les voir partir un an après.

Gouverner, c'est choisir, bien si possible

Les firmes qui tendent à l'ancrage territorial sont généralement celles qui se trouvent dans des secteurs intensifs en connaissances, en Recherche-Développement (R-D) et en haute technologie. Elles ont, en effet, besoin d’entretenir des relations de longue durée entre la main d'œuvre, les connaissances et les compétences.

En règle générale, la conception de la politique économique locale et nationale reste beaucoup trop financière. Il serait préférable de réfléchir en terme de compétitivité du territoire pour attirer les entreprises qui correspondent au système local d’innovation, c’est à dire aider les territoires à se garantir des avantages compétitifs sur le long terme. Aujourd'hui, la prise de conscience à développer est qu'il ne faut pas viser des secteurs ou des entreprises mais plutôt les hommes, les infrastructures, les collectivités... c'est à dire l'environnement au sens large de la firme, y compris le capital humain. Il faudrait redéployer toutes les aides vers l'environnement des entreprises ".

Ainsi, plusieurs centaines de milliers de personnes impliquées dans la gestion des communes, des communautés urbaines, des départements et des régions sont directement concernées par une perception pertinente de la mondialisation. Indirectement, le quotidien de l’ensemble de la population se trouve mis en jeu. Partie suivante>

Pierre Verluise

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