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www.diploweb.com L'eau en Asie centrale : incidences d'un nouveau contexte géopolitique

Conclusion et notes, par Jeremy Allouche, doctorant

Une meilleure coordination entre les différentes républiques constituent un début de solution pour résoudre la problématique de l’eau en Asie centrale.
Les notes de l'article se trouvent en bas de page   < partie précédente

En 2001-2002, l'évolution de la guerre civile en Afghanistan rend le problème de la gestion du bassin de la mer d’Aral encore plus complexe. Les Soviétiques ont laissés aux cinq républiques la difficile tâche de réorganiser la gestion de l'eau en Asie centrale. Les difficultés politico-socio-économiques que connaissait cette région rendent les solutions encore plus complexes. Il est tout d’abord clair que l’aide des institutions internationales est absolument nécessaire, sans toutefois retomber dans les erreurs du passé, comme le projet japonais américain pour la mer d’Aral. En premier lieu, une plus grande aide financière pour restaurer et réparer ces systèmes d’irrigation paraît donc indispensable.

Mis à part ce point central, il apparaît que le problème de l’eau en Asie centrale ne peut être dissocié des relations inter-étatiques entre ces six républiques, en incluant l’Afghanistan. Depuis l’indépendance de 1991, chaque État a poursuivi une politique extérieure qui a, en quelque sorte, galvanisé les tensions entre ces différents États. Les cinq républiques ont en fait construit une identité et une politique internationale afin de mieux se différencier. L’instabilité politique du Tadjikistan face aux ambitions régionales de l’Ouzbékistan, la concurrence entre les pays producteurs d’énergie ainsi que le jeu des grandes puissances régionales et internationales pour les voies de transport afin d'exploiter ces richesses, ont amené une relation de méfiance entre les différentes républiques. Ce fait est d’autant plus accentué que les différents régimes de ces cinq républiques poursuivent une politique autoritaire qui ne favorise pas l’émergence d’un dialogue. Il accentue, au contraire, les tensions interethniques. Dans ce contexte, la guerre civile en Afghanistan constitue peut être un tournant dans la stabilité régionale de cette région.

La distanciation par rapport à l’héritage soviétique ne constitue peut être pas une solution viable. La base de la coopération entre chaque État peut se construire autour de cet héritage. Les projections futures de demande en eau de chaque État, tout en incluant celle de l'Afghanistan, ne peuvent être réalisées. En contrepartie, une meilleure coordination et un échange entre les différentes républiques dans le sens de la proposition kazakh pour l’Afghanistan constituent, de notre point de vue, un début de solution pour résoudre la problématique de l’eau en Asie centrale.

Jeremy Allouche allouchej@hotmail.com

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  Date de la mise en ligne : décembre 2002
    Notes de l'article    
    (1) Djalili, M. R & Kellner, T (2001), Géopolitique de la nouvelle Asie centrale, Paris : Presses universitaires de France, Publications de l’Institut universitaire de hautes études internationales, p. 19-20.

(2) Voir Sorel, Albert (1885), L'Europe et la Révolution Française pour définir ce concept. Voir aussi Foucher, Michel (1988), Fronts et Frontières: Un tour du monde géopolitique, Paris: Fayard, pp. 65-70 pour sa critique. On a attribué la paternité de ce concept à Richelieu (Testament Latin).

(3) Ellis, W. S. (1990), "The Aral : A Soviet sea lies dying", National Geographic, February, p. 83; O'Dry, S. (1991), "La voix du désert d'Aral", L'Express, août, pp. 52-55 ; Orechkine, D (1990), "la mer d'Aral menacée de disparition", La Recherche, No. 226, 21 novembre, pp. 1380-1388 ; Allais, Catherine (1992), "Six périls pour une planète", Le Monde diplomatique, p. 2 ; The Economist (1991), "A way of life evaporates", 21 september, p. 59, UNU (United Nations University) (1992), Environmental Management of the Aral Sea Region. Report of the International Symposium held at UNU Headquarters, Tokyo, Japan, 29 September 1992. Global Infrastructure Fund Research Foundation Japan.

(4) de Villiers, Marq (2000), L'eau, Solin/Actes Sud/Leméac (Paris), Chapitre VII : La mer d'Aral. Une illustration du principe des conséquences imprévues, p. 146.

(5) ‘Grande mer’ alimentée par l'Amu Darya.

(6) ‘Petite mer’ alimentée par le Syr Daria.

(7) Wegerich, Kai (2001), "Not a simple path : A sustainable future for Central Asia", SOAS Water Issues Study Group, Occasional Paper No. 28 (February).

(8) Klötzli, S (1994), "The Water and Soil Crisis in Central Asia – a Source for Future Conflicts?", ENCOP Occasional Paper, No. 11, May, 75 p.

(9) Levintanus, Arkady (1992), "Saving the Aral Sea", Journal of Environmental Management, Vol. 36, pp. 193-199, p. 193.

(10) The Economist, 'A Way of Life evaporates', 21/09/91, p. 59.

(11) Dans la province ouzbek de Jizak, en moins de 5 ans, cela fait déjà plus de trois fois que l'on a observé une épidémie de typhoïde. Voir Mohammed Ashurali-ugli (pseudonyme), "Uzbekistan : Typhoid outbreak linked to water crisis", IWPR Reporting Central Asia, No. 119, 10/05/2002.

(12) En effet, ce changement climatique altère la production de riz qui a besoin de plus de 200 jours de pluie durant l’année. Avec ce climat continental, les jours de pluie ont baissé.

(13) Micklin, Philip (2000), Managing Water in Central Asia, London : The Royal Institute of International Affairs, p. 1.

(14) Micklin, Philip (2000), op. cit., p. 4.

(15) Tel que défini par l’hydrologue Martin Falkenmark, le seuil de stress hydrique est de 500 m3/personne/an. Pour l’Amu Darya, ce seuil est de 3200 m3 et de 1100 m3 pour le Syr Darya (contre 960 pour le bassin de la Seine). Selon " Major watersheds of the world ", World Resources 2000-2001, < www.wri.org> .

(16) Même situation que pour le Nil. C’est l’Egypte qui consomme le plus d’eau alors qu’elle est le pays en aval.

(17) Micklin, P. (2000), op. cit., p. 8-9.

(18) Si ce n'est avant, voir Micklin, P. (2000), op. cit., p. 24-5.

(19) De Villiers, Mark (2000), op.cit., p. 148. Voir aussi à ce sujet, Gleason, Gregory (1991), " The Struggle for Control over Water in Central Asia : Republican Sovereignty and Collective Action ", Report on the USSR, 21/06/91, p. 11.

(20) En particulier la rivalité anglo-russe dans la région. Voir à ce sujet "D.A. Miljutin et la politique extérieure de la Russie" dans Hammer, M (1993), Questions de méthode et regards sur la Russie pré-révolutionnaire, Genève : IUHEI, pp. 71-87.

(21) Voir à ce sujet Joffe. M (1995), "Autocracy, Capitalism and Empire : The Politics of Irrigation", The Russian Review, Vol. 54, No. 3, pp. 365-88 (July) et Lipovsky, I (1995), "The Central Asian Cotton Epic", Central Asian Survey, Vol. 14, No. 4, pp. 529-42.

(22) Comme l'indique Bruno de Cordier, mis à part les Etats-Unis, l'autre grande puissance exportatrice de coton est la Grande-Bretagne, qui fut à l'époque la principale rivale politique de la Russie. D'après lui, l'importation par les russes du coton d'Inde britannique et d'Egypte fut consciemment sabotée par des taxes très élevées ce qui rendit l'attrait pour l'Asie centrale d'autant plus grand. Bruno de Cordier (1996), "Conflits ethniques en Asie centrale", Central Asian Survey, Vol. 15, No.3/4, pp. 399-411, footnote 1.

(23) Voir Liposky, I (1995), op. cit., p. 532. Voir aussi Clem, R.S (1997), "The new Central Asia: prospects for development" in Bradshaw, M.J, Geography and transition in the post soviet republics, Wilney : New York, pp. 175-6.

(24) Livovsky, I (1995), op. cit, p. 530.

(25) Cependant, Micklin nous indique que déjà les Russes avaient encouragé l'expansion des zones irriguées dans des parties désertiques qui furent pour la première fois irriguées (la steppe de Golodnaya). Voir Micklin, P. (2000), op. cit., p. 27.

(26) Dukhovny, V.A (1988), "Aral : glyadya pravde v glaza", dans Melyoratsya i vodnoe khozyaystvo, No. 9, p. 27 cité dans Klötzli, S (1994), op.cit., p. 18.

(27) Gleason, Gregory (1991), op. cit., p. 13.

(28) Brezhnev, L.I., Leninskim Kurson, Eight volumes, Moscow: Politicheskaia Literatura, 1970-1981, vol 4., p. 58 cité dans Thomson, T.L ( 1989), Ideology and Policy: The Political Uses of Doctrine in the Soviet Union, Boulder, San Francisco & London: Westview Press.

(29) Koltyakov, V.M (1992), "Concept for preserving and restoring the Aral Sea and normalizing the ecological public health and socioeconomic situation in the Aral Sea", Post-Soviet Geography, Vol. 33, No. 5, p. 285.

(30) Koltyakov, V.M (1991), "The Aral sea Basin : a critical environmental zone", Environment, Vol. 33, No. 1, p. 5. Selon Micklin, 40% de cette surface irriguées à l'époque de l'indépendance fut consacré à la culture du coton.

(31) Chiffre pour l'Asie centrale dans Klötzli, S (1994), op. cit., p. 8.

(32) Nishanov, Rafik (1989), Pravda Vostoka, June 2, p. 1 cité dans Gleason, Gregory (1991), op. cit., p. 13.

(33) Rumer, Boris (1989), Soviet Central Asia : ‘a tragic experiment’, Boston : Unwin Hyman, 204p, p. 40.

(34) Lerman, Z & K. Brooks (1998), 'Land reform in Turkmenistan" in Wegren, S.K (ed), Land reform in the former Soviet Union and Eastern Europe, London : Routledge, p. 165.

(35) Outre le Karakoum, les Soviétiques encouragèrent la construction du canal d'Amu-Bukhara en Ouzbékistan et le canal de Kzyl-Orda au Kazakhstan.

(36) Smith, D.R (1995), "Environmental security and shared water resources in post-soviet Central Asia", Post-Soviet Geography, Vol. 36, No. 6, p. 365.

(37) Le gouvernement ouzbek veut d'ailleurs relancer ce projet. Des propositions dans ce sens furent élaborer dans un forum sur la Mer d'Aral à Taskent et à Nukus. Cependant, l'ambassadeur russe pour l'Ouzbékistan, M. Dmitri Ryurikov, émis de forte réserve sur la réalisation d'un tel projet. Voir Insarova, Karima (2002), "Parched Uzbekistan Covets Russian Waters", The Times of Central Asia, 08/05/2002.

(38) Cela ne veut pas dire que les conflits de l’eau sont apparus à l’époque de l’indépendance. Dans l’été 1989 par exemple, un conflit éclata entre Tadjik et Kirghiz au sujet des droits de propriétés sur l’eau et la terre. Voir Treisman, Daniel (1990), " Rise of Muslim millions threatens empire in disarray ", The Times, 19/01/1990.

(39) A l’avènement de l’indépendance, il fut d’ailleurs rendu compte que des volontaires activistes de Komsomol faisaient des opérations commandos le long des canaux d’irrigation dans les zones frontières pour empêcher les autres nationalités de voler ‘leur eau’. Khisamov, Iskander, " Voda kak prichina pozhana ", Literaturmaya gazeta, January 16, cité dans Gleason, Gregory (1991), op. cit., p. 12.

(40) Micklin, Philip (2000), op. cit., p. 37.

(41) World Bank (1996), Fundamental provision of water management strategy in the Aral Sea Basin, Washington DC : World Bank, p. 53.

(42) Ni d'ailleurs la population. Une récente étude de Tim Hannan et de Sarah l. O'Hara ont montré qu'une politique de coût réel de l'eau est irréaliste. Les deux auteurs s'appuient sur l'expérience du Turkménistan où seulement 2% des sommes demandées par l'organisation de la gestion du Canal de Karakoum furent collectés. Hanna, T. & S. L. O'Hara (1999), "Irrigation and water management in Turkmenistan : past systems, present problems and future scenarios", Europe-Asia studies, Vol. 51, No. 1, p. 34. A ce sujet, l’eau en Asie centrale a toujours été perçue comme un bien gratuit. Une approche économique des ressources va donc prendre un certain temps. Voir à ce sujet Gleason, G. (1991), op. cit., p. 18.

(43) "La crise de l'eau en Asie centrale", The OSCE and the Multiple Challenges of Transition in the Caucasus and Central Asia (1991-2001), Conférence à l'IUHEI, 6-8 décembre 2001, p. 8.

(44) O'Hara, Sarah L. (1997), "Agriculture and land reform in Turkmenistan since independence", Post-Soviet Geography and Economics, Vol. 38, No. 7, p. 440 (September).

(45) La Banque Mondiale vient tout récemment d’accorder un prêt pour la mer d’Aral. " Kazakhstan : World Bank help for Aral Sea ", EurasiaNet, 24/02/02.

(46) Ataev, Niyaz (2000), "The Turkmenbashi-Aral sea", Ecostan news, Vol. 7, No. 7, (July); Ataev, Niyaz (2000), "The lake of the golden century", Ecostan news, Vol. 7, No. 9-10, (September-October)

(47) Voir à ce sujet Dukhovny, V & K. Yakubov (2001), "The opinion of the scientific information center of the ICWC of the Aral Sea basin on the construction of the lake of the 'golden century of Turkmenistan", Ecostan news, Vol. 8, No. 1, pp. 9-11, 8 mars) [www.ecostan.org] ; Insarova, Karina (2002), " Tashkent ‘threatened’ by Turkmen reservoir ", IWPR Reporting Central Asia, No. 105.

(48) Smith, D.R (1995), op. cit, p. 351. Pour le problème de l’eau en Asie en général, voir le court article de Henning, Job. C. (2000), " Water : Potential Spark of Asian Regional conflict ", Central Asia Caucasus Analyst, 24/05/00.

(49) Heather, Clark (1998), Agence France Presse, 23 Septembre 1998.

(50) Tishkov, Valeryi (1996), Ethnicity, nationalism and conflict in and after the Soviet Union, Londres : Sage, p. 174.

(51) Comme, par exemple, les relations entre Ouzbek et Tadjik dans la région de la vallée de Ferghana et en particulier pour la région de Khodzent mais aussi entre Kazakh et Ouzbek pour la région de Chimkent. Dans ces deux régions, le gouvernement ouzbek appuie ces demandes territoriales dues aux larges minorités ouzbeks qui habitent dans ces régions ce qui donnerait la possibilité au gouvernement ouzbek de contrôler une plus grande partie de la vallée fertile de Ferghana ainsi que les réservoirs de Kayrakum (Tadjikistan) et le lac artificiel de Chardara.

(52) Klötzli, S (1994), op. cit., p. 43.

(53) Acronyme en anglais.

(54) En effet, le Kirghizstan considère le Syr Darya comme une rivière nationale (et non internationale) et s'est donc gardé une part importante avant l'écoulement du débit évalué selon la commission ICWC.

(55) Ces incidents constituent tout simplement une répétition des incidents de l'année 1993. Voir à ce sujet Klötzli, S (1994), op. cit., p. 38.

(56) La situation de l’eau en Afghanistan est précaire. Voir rapport de Schimann, Peter (2000), " Water shortage in Afghanistan : An approach of the problem ", United Nations Coordinator’s Office, Drough Response Unit, Islamabad. < http://www.pcpafg.org/Programme/drought/documents/water_shortage_in_Afghanistan.rtf>.

(57) Arab News, 02/04/1993 cité dans Klötzli, S (1994), op. cit., p. 48, note de bas de page 209.

(58) " Afghan head thanks Uzbekistan, Repeatedly ", RFE/RL Central Asia Report, Vol. 2, No. 9, 7 mars 2002.

(59) Cet accord date d’ailleurs de décembre 1999, accord signé avec les Talibans.

(60) En particulier sur le climat.

   
         

 

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