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CIA. Cinq années de colère

Catherine Durandin

CIA. Cinq années de colère s’avère être une somme intéressante des événements qui ont récemment marqué la CIA et la politique étrangère américaine. A cet égard, le livre s’adresse à un public assez large allant du citoyen cherchant à en savoir plus sur le sujet à l’historien ou au politologue qui cherche un complément d’information bien documenté.

Compte-rendu par Ronald Hatto

 

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Paris, Armand Colin, 2007.

Cet ouvrage de Catherine Durandin sur la CIA a l’avantage de présenter trois grands axes de réflexion rarement analysés dans une même analyse : l’affaiblissement d’une organisation de renseignement pourtant fort réputée ; les difficultés, depuis le 11 septembre 2001, dans les relations entre la CIA et l’Exécutif américain ; enfin, la crise d’identité qui frappe les élites dirigeantes américaines depuis la fin de la guerre froide. L’ouvrage est clair et concis. Il croise et entrecroise les éléments de ces trois axes tout au long d’un récit qui s’avère stimulant.

 

Bouc émissaire 

CIA. Cinq années de colère s’attache tout d’abord à démontrer la crise que connaît la CIA depuis les attentats du 11 septembre. Attaquée de tous bords pour n’avoir pas prévue ces attentats, la CIA s’est retrouvée dans la position peu envieuse de bouc émissaire de problèmes qui concernent en fait toutes les agences de renseignement américaines. D’où la « rébellion » de certains agents qui n’ont pas hésité à se confier soit ouvertement, en publiant leurs Mémoires, soit de façon anonyme, en laissant filtrer des informations sous forme de fuites. Ces fuites, qui visaient la plupart du temps à dédouaner l’Agence pour les erreurs commises par les politiques, expliquent les tensions avec certains membres de l’Exécutif.

 

Luttes de pouvoir

Une des facettes les plus intéressantes du livre est justement cette mise en perspective des luttes de pouvoir qui se sont exercées entre les politiques et la CIA après le 11 septembre. On y voit les efforts de Donald Rumsfeld et des membres de son entourage (Paul Wolfowitz, Richard Perle) pour discréditer une Agence déjà bien mal en point. Pour Catherine Durandin, « Donald Rumsfeld, celui qui sera bientôt surnommé le "tsar du Pentagone" a un objectif : contourner la CIA en créant ses propres structures d’analyse puis de renseignement. Objectif qu’il transforme en plan d’action, chez lui, dans son fief, au Pentagone » (p. 48). Ainsi, plutôt que d’œuvrer à la remise sur pied d’une organisation efficace et apte à faire son travail de collecte d’information, certains membres de l’Administration du président G. W. Bush ont préféré l’affaiblir davantage au profit d’organes plus facilement contrôlables ou en exigeant de son directeur (George Tenet) qu’il se montre docile.

 

Crise d'identitaire de l'hyperpuissance

Si cette attitude des « patrons » de la CIA a un effet néfaste sur ses activités et sur ses objectifs, elle ne serait, en fait, que le reflet d’une crise d’identité plus profonde qui frappe ceux qui incarnent les Etats-Unis (l’intelligence personnifiée de la collectivité selon Raymond Aron). Ce qui fait dire à Catherine Durandin qu’ « Au-delà du jeu des personnes et des carrières, des honneurs et des promotions, la crise du renseignement américain s’inscrit dans plusieurs registres, à différentes échelles d’une crise politique et identitaire plus large de l’hyperpuissance américaine. » (p. 101). En d’autres termes, il est fini le temps où « Avec l’URSS, une compétition se jouait : concurrence idéologique mais aussi économique et technologique. Avec le monde diffus d’Al-Qaida par exemple, où est la concurrence : "dans la conquête des esprits et des cœurs" ? » (p. 188). Au final, c’est une des trames importantes du livre, autant la CIA que le pouvoir politique sont en crise d’identité. Et ni l’un ni l’autre ne semble avoir trouvé de solution à cette crise.

 

L’ouvrage de Catherine Durandin est donc un condensé des difficultés rencontrées par la CIA depuis le 11 septembre mais également, et c’est là son intérêt, les différentes controverses qui ont touché l’administration de G. W. Bush (prisons de la CIA, torture, fiabilité douteuse des alliés israélien, pakistanais ou saoudien) ainsi que les « réponses » souvent maladroites de cette Administration aux questions qui lui étaient posées. CIA. Cinq années de colère s’avère être une somme intéressante des événements qui ont marqué la CIA et la politique étrangère américaine (y compris dans son aspect interne de formulation). A cet égard, le livre s’adresse à un public assez large allant du citoyen cherchant à en savoir plus sur le sujet à l’historien ou au politologue qui cherche un complément d’information bien documenté.

Ronald Hatto

Copyright 20 août 2007-Hatto/www.diploweb.com

 

Date de la mise en ligne: septembre 2007

 

 

 

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