Géographie : nouveau programme de Seconde

Les Européens dans le peuplement de la terre

Par Alexandre DUCHESNE, Gérard-François DUMONT, le 7 septembre 2011  Imprimer l'article  lecture optimisée  Télécharger l'article au format PDF

Alexandre Duchesne est Agrégé de Géographie, Professeur au Lycée français de Riyad, Conseiller pédagogique de l’Agence de l’Enseignement Français à l’Etranger, rédacteur dans la revue Population & Avenir. Gérard-François Dumont est Professeur à l’Université de Paris-IV-Sorbonne, Président de la revue Population & Avenir.

Quelle place et quel rôle démographiques l’Europe a-t-elle exercé dans le monde depuis 25 siècles ? Ce questionnement peut être résumé selon le texte suivant développé à partir de la revue Population & Avenir. Il éclairera chacun sur les relations entre démographie et géopolitique comme il aidera de manière significative les enseignants dans la mise en œuvre des nouveaux programmes de géographie de la classe de Seconde (France).

CONTRAIREMENT à ce que l’on pense souvent, les évolutions démographiques ne sont nullement linéaires. Cela est vrai pour la population dans le monde, pour celle de l’Europe comme à l’échelon infracontinentale. L’évolution de la population dans le monde est donc contrastée dans le temps. Pendant l’Antiquité et le Moyen Âge, elle n’est pas rectiligne : la fin de l’Empire romain, ou encore la peste noire à la fin du Moyen Âge, entraîne un déclin démographique qui révèle des sociétés fragiles soumises aux aléas, guerres, famines ou pandémies. Ainsi, considérée à la fin du Moyen Âge par rapport au début de l’ère chrétienne, la population dans le monde se caractérise à peine par un doublement.


Comment utiliser ce texte "clé en main" pour construire votre exposé ou votre cours ?

Ce texte sur « Les Européens dans le peuplement de la terre » indique entre parenthèses les différents documents permettant de le justifier présentés dans la revue Population & Avenir  [1] (n° 699, septembre-octobre 2010, pp. 9-12.) Reproduits sur papier ou présentés à l’écran, les documents permettront de construire le cours.

A savoir : dans chacun de ses numéros, la revue Population & Avenir propose un exercice agrémenté de figures de cartes et d’illustrations conformes aux programmes de l’enseignement secondaire, mais aussi utile dans l’enseignement supérieur. En outre, les exercices parus dans les quatre pages centrales de Population & Avenir sont pour chacun un enrichissement de connaissances permis par une stimulation des capacités d’analyse et de synthèse.


Ensuite, la population dans le monde connaît une forte croissance, surtout après 1800 (document 1 : deux graphiques [2] de l’évolution de la population dans le monde de l’Antiquité au Moyen Âge, puis des Temps modernes à aujourd’hui). La croissance démographique de l’Europe explique ce décollage, suivi ensuite par la croissance des populations asiatiques (Chine et Inde), américaines, puis africaines. Ainsi la population dans le monde passe-t-elle d’à peine un milliard vers 1800 à plus de 6 milliards deux siècles plus tard [3]. Le XXe siècle apparaît vraiment comme le siècle de la croissance démographique maximale dans le monde, une croissance qui ne concerne alors que faiblement l’Europe, dont la croissance maximale s’est déroulée au XIXe siècle.

L’Europe, un des grands foyers de peuplement…

L’Europe demeure, depuis l’Antiquité, un des grands foyers de peuplement mondial. Cependant, la part de sa population dans le monde varie. Elle reste située entre 15 et 20% de l’Antiquité aux temps modernes. Puis, après la forte croissance démographique européenne du XIXe siècle, en 1900, plus d’un quart des habitants de la terre vit en Europe. Le XIXe siècle est donc le siècle de la population européenne : l’Europe est, avec le monde chinois, la région la plus peuplée du monde. Cela tient au fait que l’Europe est le premier continent à réaliser les progrès économiques, sanitaires et hygiéniques qui engendrent ce qu’il est convenu d’appeler la transition démographique et, plus précisément la première étape de la transition.

La transition démographique (document 3 : texte explicatif de cette notion [4] et figure du schéma de la transition démographique) comprend deux étapes successives : au cours de la première, la mortalité baisse, alors que la natalité reste aux niveaux antérieurs, ce qui induit un accroissement naturel en augmentation. Les progrès sanitaires et médicaux sont à l’origine de cette évolution.

…en diminution relative

Puis, au XXe siècle, la transition se diffuse dans les autres continents qui voient leur population considérablement augmenter. En revanche, l’Europe connaît la seconde étape est marquée par une baisse ralentie de la mortalité et une chute de la natalité. Cette dernière résulte de la moindre nécessité de concevoir de nombreux enfants puisque leurs taux de survie se sont considérablement améliorés. L’accroissement naturel se réduit alors jusqu’à atteindre la période post-transitionnelle, avec des taux abaissés de natalité et de mortalité. Pendant cette seconde étape, la population de l’Europe se trouve aussi contenue par les effets mortifères des guerres mondiales et leurs conséquences baissières sur la natalité.

La part de la population de l’Europe chute, passant de 26,2% en 1900 à 12,8% en 2000 et se trouve au XXIe siècle en dessous de ce pourcentage, avec 739 millions d’habitants en 2010 sur une population dans le monde estimée à 6 982 millions [5]. Alors que la croissance démographique de l’Europe ralentit et que l’Europe vieillit, l’Asie et les autres continents augmentent nettement leur peuplement (document 2 : Graphique de la place de la population de l’Europe dans le monde).

La France doublée par ses voisins européens

Toutefois, le rythme de la transition démographique est fort différent selon les pays d’Europe et par exemple entre la France et le Royaume-Uni, dont la comparaison est frappante (document 4 : deux graphiques de la transition démographique de la France et du Royaume-Uni). Elle montre que la croissance due à la transition démographique peut varier considérablement selon les pays. La France n’illustre guère le schéma de la transition démographique, puisque ses taux de natalité et de mortalité baissent presque simultanément. Au contraire, au Royaume-Uni, dans une période étape qui dure jusqu’à la fin du XIXe siècle, le taux de natalité pour mille habitants reste élevé, tandis que le taux de mortalité baisse : le pays connaît une transition démographique proche du schéma. Cette différence entre la France et le Royaume-Uni se retrouve dans l’évolution globale de la population : le taux d’accroissement naturel est élevé au Royaume-Uni et faible en France. Ainsi voit-on la population du Royaume-Uni se multiplier par cinq entre 1750 et 1900, période pendant laquelle la population de la France peine à doubler.

Cette transition démographique peu marquée fait que le nombre d’habitants de la France se retrouve en 1900 presque rejoint par celui du Royaume-Uni et dépassé par l’Allemagne (document 5 : figure de l’évolution démographique de la France, du Royaume-Uni, de l’Allemagne de l’Italie et des États-Unis entre 1750 et 1900).

La contribution de l’Europe au peuplement des autres continents

Une autre caractéristique de l’Europe au XIXe siècle est sa nature de continent d’émigration. La présence des populations européennes sur les autres continents s’explique par les Grandes Découvertes, dont celle de l’Amérique en 1492 constitue le moment fort. Cet épisode inaugure la colonisation qui débute d’abord modestement dès la fin du XVe siècle en Amérique. Au XIXe siècle, les populations européennes s’installent en masse en Amérique ainsi qu’en Asie, en Afrique et en Océanie (document 6 : tableau de l’émigration européenne au XIXe siècle ; et document 7 : planisphère des principales migrations des grandes découvertes à la fin du XVIIIe siècle). Cette colonisation européenne s’accompagne aussi d’autres déplacements de population, dont la migration forcée d’Africains comme esclaves dans les plantations américaines.

Les populations européennes s’installent sur d’autres continents aussi en raison de la croissance démographique de l’Europe. Au XIXe siècle, des Britanniques, Italiens, Allemands, vivent dans des pays déjà peuplés et escomptent une vie meilleure sur des terres peu denses. Ainsi, 43 millions d’Européens quittent le vieux continent pour la seule Amérique du Nord. D’autres émigrations, moins massives, entraînent la diffusion du modèle européen aux quatre coins de la planète : Russes en Sibérie, Néerlandais en Afrique du Sud, Français en Algérie, prisonniers anglais en Australie… Les pays de départ sont surtout ceux connaissant une forte croissance démographique : Royaume-Uni, Allemagne, Italie. D’autres raisons expliquent ces départs, comme la famine irlandaise en 1840, le développement industriel insuffisant de certains pays européens (Italie, Espagne), et le fait que les régimes politiques européens laissent agir librement les entreprises spécialisées dans l’organisation de l’émigration. Toutefois, il existe un lien entre croissance démographique et émigration européenne. Aussi, les pays d’accueil connaissent-ils une nette croissance démographique. Par exemple, les Etats-Unis voient leur population passer d’environ 5 millions d’habitants en 1800 à plus de 75 millions un siècle plus tard. Cette vitalité démographique s’explique par l’apport des populations européennes qui s’installent dans ce pays.

La France est un contre-exemple validant le raisonnement ci-dessus. Peu de Français émigrent, excepté vers l’Algérie [6]. La faible croissance démographique de la France explique sans doute en partie sa faible émigration. Au contraire même, la France devient, dès le XIXe siècle, un pays d’immigration (document 8 : photo des « piqueteurs » belges venant louer leur service en France pour la moisson en 1908), le seul en Europe : Belges, Polonais ou Italiens… s’installent dans un Hexagone dont la fécondité faible limite la croissance de la population. Les besoins économiques de l’agriculture et de l’industrie expliquent en partie cet appel à la main-d’œuvre étrangère.

Copyright Septembre 2011-Duchesne-Dumont/Diploweb.com


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[1Les revues Population & Avenir de l’année en cours sont disponibles uniquement sur abonnement, pour la France (30,00 €), les DOM-TOM (35,00 €) ou l’étranger (41,00 €) via son site Voir. Tous abonnement donne lieu gracieusement à L’Atlas géodémographique commenté de Population & Avenir. Cet atlas, sous le format habituel des numéros de Population & Avenir, présente les principaux indicateurs géographiques de la France à l’échelle de ses départements, de l’Europe à l’échelle de ses régions et du Monde à l’échelle de ses pays. Les revues des années précédentes peuvent être commandées à l’unité ou en collection annuelle à un tarif préférentiel

[2Réalisés d’après Dumont, Gérard-François, Les populations du monde, Paris, Éditions Armand Colin, 2004.

[3Grâce aux progrès dans la lutte contre la mortalité, engendrant une très forte augmentation de l’espérance de vie.

[4D’après Wackermann, Gabriel (direction), Dictionnaire de Géographie, Paris, Ellipses, 2005.

[5Sardon, Jean-Paul, « La population des continents et des pays », Population & Avenir, n° 700, novembre-décembre 2010.

[6Dont des Français qui refusent l’occupation de l’Alsace-Moselle par l’Allemagne après la guerre de 1870.


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