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www.diploweb.com Géopolitique de l'Union européenne et institutions françaises

"La République, une question française" ,

par Chantal Delsol

 

Dans la perspective d’une construction communautaire de type fédérale, l'auteur entend briser le lien « automatique » entre République et démocratie. D’aucuns accepteront que les fondamentaux de la vie politique française sont alors remis en question. Ce qui mérite une véritable réflexion.

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Paris, éd. Presses Universitaires de France, septembre 2002, 150 pages

Défendant une position différente de celle déjà développée ici par le Professeur Claude Nicolet, Chantal Delsol, s’attache à rompre le lien automatique entre République et démocratie. Dans un souci de pluralisme, voici une présentation du livre de C. Delsol, Professeur de philosophie à l’université de Marne la Vallée.

« Nous croyons facilement que la république (sans majuscule sous sa plume – PV) est cette panacée capable de nous éviter la xénophobie et l’intolérance, et qu’il suffit de se regrouper sous son drapeau pour échapper aux extrémismes. Je crois au contraire qu’une république devenue un mythe, vivant sur ses chimères, bâtie sur l’illusion et la nostalgie, fait le lit des exclusions et des intolérances. Le malaise français, qui nous fait avancer de non-dits en mensonges, tient à l’enracinement du tropisme républicain devenu une véritable idéologie, voire une religion, et empêchant la France de devenir une démocratie adulte. » (p. 24)

Le style est vif, la plume alerte et le propos s’inscrit dans la perspective de l’évolution des structures politiques européennes et – par voie de conséquence – françaises.

Désacralisation

Au terme d’une critique en règle du concept de République, Chantal Delsol écrit en effet : « (…) il ne s’agit pas aujourd’hui, comme le concèdent les républicains les plus tolérants, de rendre la république un peu plus démocratique. Mais de désacraliser l’idéal républicain, de le renvoyer à sa place, d’en faire enfin ce qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être : une certaine désignation du bien social, incertaines comme toutes les autres, vouée au débat et à la lente persuasion, et pas plus fondée que les autres à une direction plénipotentiaire. » (p. 121)

Eloge du fédéralisme

Dans ce cas, que mettre à la place ? La réponse fuse un peu plus loin : « Au début du XXIe siècle, le fédéralisme porte l’avenir davantage que n’importe quel autre système politique ». (p. 124) Parce que « (…) l’Etat unifié représente à présent le pays du passé (mis en italiques par C. Delsol - PV), tandis que le pays de l’avenir est une organisation indéterminée, encore inconnue, mais dont nous pouvons seulement savoir qu’elle sera plus fluide et plus ouverte, nantie peut-être de limes au lieu de frontières, peuplée de souverainetés relatives et fluctuantes. […] Par un processus qui semble inévitable à court ou moyen terme, les démocraties centralisées deviendront peu ou prou des démocraties fédérales, rejoignant ainsi le modèle des pays germaniques. » (p. 131)

Selon Chantal Delsol, cette évolution est porteuse de paix pour des raisons quasi-structurelles. « La fédération est le monde des gens qui n’ont pas ou plus de causes grandioses, qui veulent simplement vivre, et non plus tels leurs ancêtres, guerroyer contre ce qui apparaît aujourd’hui comme des moulins. Elle défend la cause de la quotidienneté. C’est un monde dans lequel les espoirs sont restreints. Délivrés de grands desseins et des grands conflits, les citoyens y cultivent des combats de broutille. » (p. 141) Il serait facile d’opposer à cette promesse les guerres de Tchétchénie pour la Fédération de Russie, ou les guerres en Irak pour les Etats-Unis, mais peu importe.

Les fondamentaux de la vie politique française sont remis en question

L’essentiel est d’observer à la lecture de cet ouvrage la rupture du lien « automatique » voire consubstantiel entre République et démocratie, dans la perspective d’une construction communautaire de type fédéral. Peu importe que l’on soit favorable ou défavorable à cette perspective. D’aucuns accepteront que les fondamentaux de la vie politique française sont ici remis en question.

Chacun accusera, bien sûr, l’autre camp d’empêcher le débat à ce sujet.  Il faut bien constater, cependant, que la discussion de cette question reste rare au journal télévisé, voire dans les émissions programmées à des heures de grande écoute. Certes, la télévision a bien des défauts. Cependant, quel autre média permet aujourd’hui de porter une idée – voire une interrogation – aussi bien dans les immeubles haussmanniens du boulevard Saint-Germain que dans les tours de la périphérie lyonnaise ou dans une ferme de l’Ariège ?

Ainsi, la construction communautaire induit-elle des évolutions majeures de nos institutions sans que cela nourrisse vraiment le débat démocratique. Dommage pour la démocratie, dommage pour l’Union européenne.

Pierre Verluise

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Date de la mise en ligne: janvier 2004

 

 

 

   

 

 

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