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Synthèse de l’actualité internationale de février 2020

Par Axelle DEGANS*, le 1er mars 2020.

Voici une synthèse de l’actualité internationale de février 2020 qui sera fort utile à tous ceux qui veulent disposer d’un point de l’actualité géopolitique, suivent la spécialité #HGGSP voire préparent un concours. Pour ne rien manquer, et recevoir nos alertes sur des documents importants, le plus simple est de s’abonner gratuitement à notre Lettre d’information hebdomadaire ou au compte twitter de veille géopolitique @diploweb (14 500 followers)

Le sort des urnes

Suite au référendum organisé au Royaume-Uni en juin 2016, le Brexit est une réalité depuis le 1er février 2020 et les deux parties doivent s’en accommoder. Il est clair que ce n’est pas une bonne nouvelle pour l’Europe communautaire qui perd un membre important, une diplomatie compétente, une armée efficace, une puissance nucléaire comme la principale place boursière du « vieux continent » en sus de tout ce que les Britanniques ont pu apporter. Outre-Manche, il faut construire un nouveau modèle. Un « Singapour on sea » ? Une multiplication des zones franches ? Tous les accords commerciaux sont à renégocier, un bras de fer oppose Londres et Bruxelles dont le médiateur est Michel Barnier.

En Iran, les élections législatives de février 2020 sont boudées par les électeurs car moins d’un sur deux s’est déplacé. La victoire des conservateurs face aux modérés s’explique par les déceptions liées à la situation économique et sociale que les réformateurs n’ont pu améliorer, l’assassinat début janvier 2020 du général Soleimani et le désastre de l’avion ukrainien abattu. L’épidémie de coronavirus qui touche le pays explique peut-être aussi cette faible participation électorale.

Au Togo, Faure Gnassingbé, qui a succédé à son père Gnassingbé Eyadema président de 1967 à 2005, est réélu en février 2020 de façon très confortable. Il aurait remporté dès le premier tour le scrutin présidentiel avec plus de 70% des voix et un taux de participation supérieur à 75%, un plébiscite donc. Son adversaire Agboyémé Kodjo dénonce des irrégularités dans la tenue des élections.

Le scrutin afghan du 28 septembre 2019 vient d’être validé en février 2020 par la Commission électorale indépendante (IEC). Elle confirme la victoire du président sortant Ashraf Ghani face à Abdullah Abdullah qui contestait un score très serré.



En Irlande, les élections législatives de février 2020 ont été remportées par le Sinn Fein. Cette formation a longtemps été le visage politique de l’IRA, l’Armée républicaine irlandaise qui a multiplié les attentats pour obtenir l’indépendance de l’Irlande du Nord et le départ des Britanniques. Ce parti défend la réunification des deux parties de l’Irlande, une victoire électorale très particulière dans le contexte très tendu du Brexit. Il devra former un gouvernement de coalition [1].

En Allemagne, la CDU de la chancelière Angela Merkel est dans la tourmente. Le land de Thuringe passe au centre des attentions. Jusqu’au 5 février 2020, la Thuringe était gouvernée par intérim par Bodo Ramelow, ministre-président sortant, issu du parti La Gauche. Celui-ci souhaitait être élu à nouveau ministre-président, au 3è tour de scrutin, mais à la tête d’un gouvernement minoritaire. Lors de ce 3e tour, Thomas Kemmerich (FDP) a été élu avec les voix de son parti, de la CDU et de l’extrême droite AfD qui a abandonné son propre candidat pour reporter la totalité de ses voix sur le candidat libéral. T. Kemmerich a d’abord accepté son élection avec les voix de l’AfD et a même accepté ses félicitations. Suite aux protestations dans la rue comme dans les médias, suite également à la critique sévère de la chancelière, T. Kemmerich a démissionné trois jours plus tard. Un nouveau scrutin doit avoir lieu le 4 mars 2020.

Autre signe d’une crise de gouvernance à la CDU, Annegret Kramp-Karrenbauer (AKK) a annoncé en février 2020 quelle ne serait pas candidate à la chancellerie lors des prochaines élections fédérales et annoncé qu’elle démissionnerait de la présidence de la CDU quand un successeur aurait
été trouvé. Ce devrait être le cas lors d’un congrès extraordinaire à Berlin le 25 avril 2020.

Le coronavirus, épidémie ou pandémie ?

Cette pneumonie virale a été détectée dans la province chinoise du Hubei en décembre 2019. Les autorités ne s’en préoccupent que plusieurs semaines plus tard. Après avoir confiné plusieurs villes de plus de dix millions d’habitants , avoir mis entre parenthèses une partie des festivités liées au Nouvel an, l’État communique en construisant en seulement dix jours un hôpital à Wuhan, en limogeant les responsables de cette ville. La Chine multiplie les mesures de confinement dans l’espoir d’endiguer la propagation du Civd-19 ou coronavirus.

L’épidémie du coronavirus est-elle une pandémie ? L’Organisation mondiale de la santé (OMS), organisme onusien, est habilitée à définir si le monde est face à une pandémie. Une épidémie est une maladie dont des cas sont signalés de façon concomitante dans un espace relativement limité. Une pandémie est une maladie qui se diffuse à l’échelle mondiale : un phénomène donc plus virulent et plus vaste. L’OMS n’a pas défini au 27 février 2020, le Coronavirus comme une pandémie. Cette épidémie aux multiples foyers a déjà causé la mort de plus de 2 700 personnes en Chine, et plusieurs personnes au Japon, en Corée du Sud ou en Italie. Et même si ce bilan est sans commune mesure avec les épisodes annuels de la grippe hivernale, la Chine tourne au ralenti, une part de la population de la partie orientale du pays restant confinée à domicile. Or ce qui touche la Chine, concerne le monde.

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Chine et monde économique au ralenti

Les autorités chinoises ont imposé en février 2020 des mesures de quarantaine à plusieurs grandes villes de Chine, épidémie du Coronavirus oblige. Les déplacements ont considérablement diminué pour éviter la propagation du virus. En conséquence, une partie non négligeable de la main d’œuvre travaillant dans la partie orientale de la Chine, ne peut se rendre sur son lieu de travail. Les bureaux et les entreprises fonctionnent au ralenti. Les pays asiatiques sont les plus touchés par les contrecoups de la décélération de l’économie chinoise : Corée du Sud, Japon… La baisse de la consommation chinoise – les habitants des centres urbains se déplacent le moins possible et les transports sont entravés - pénalise les partenaires commerciaux de la Chine. Les touristes chinois ne sortent plus de leur territoire, ce qui est un manque à gagner pour toutes les grandes destinations touristiques (comme la Thaïlande par exemple). Or la Chine est aussi l’usine du monde…. Les inquiétudes sont fortes dans l’industrie mondiale de l’automobile, celle des smartphones (comme la production des Apple), et surtout concernant l’industrie des médicaments car la Chine fournit l’essentiel du paracétamol ou de l’ibuprofène du monde.

Le Coronavirus est à l’évidence une épreuve pour le pouvoir Xi Jinping qui doit démontrer qu’il est apte à faire face à cette épidémie, qu’il prend les mesures nécessaires, adéquates et au moment opportun pour protéger la population chinoise. La communication est un art, l’endiguement de la propagation de l’épidémie – ou son échec – est une réalité à l’aune de laquelle sera mesurée la compétence de l’exécutif. A l’inverse, le coronavirus provoque la décrue du mouvement pro-démocratie à Hong Kong, ce dont pourrait profiter Pékin.

Si de nombreux pays asiatiques sont touchés en février 2020 par le coronavirus, c’est aussi le cas de pays européens. Souhaitant ne pas céder à la panique, Bruxelles a décidé de ne pas fermer immédiatement ses frontières aux personnes arrivant de pays asiatiques en proie au coronavirus. L’Italie est particulièrement concernée, en particulier les régions économiquement motrices du pays : Lombardie et Vénétie. Une vraie psychose s’empare du pays qui déplore plus de dix morts. Les effets risques d’être délétères sur l’économie italienne, à l’heure où les bourses mondiales dévissent. En France, le bilan des autorités du 27 février 2020 faisait état de 38 personnes infectées par le nouveau coronavirus – contre 18 la veille.

Julian Assange sera-t-il extradé ?

Le lanceur d’alerte Julian Assange est à l’origine de la plus importante fuite d’informations classifiées enregistrée jusqu’à aujourd’hui. Elles ont été mises en ligne sur le site WikiLeaks et reprises par plusieurs grands journaux comme El Pais, le New York Times ou Le Monde. Il a trouvé refuge entre 2012 et 2019 dans l’ambassade équatorienne de Londres. Sous le coup d’un mandat d’arrêt britannique, il est arrêté en avril 2019. Les États-Unis demandent son extradition, il est accusé d’espionnage et risque une très lourde peine de prison.

Ses défenseurs arguent de la nécessité de protéger la liberté de la presse, la liberté d’expression qui sont au cœur de la démocratie. Le Royaume Uni choisira-t-il d’extrader Julian Assange ?

Nouvelles d’Amérique latine

Une mission du FMI s’est rendue courant février 2020 en Argentine et estime que la dette n’est « pas soutenable ». Le pays traverse une grave crise qui n’est pas sans rappeler celle qui l’a affecté en 2001. Buenos Aires n’est pas en mesure de rembourser la dette contractée auprès de cette institution, car le pays doit faire face aux échéances de court terme qui ne lui permettent plus de rembourser les autres créances. L’Argentine est techniquement en défaut de paiement.

Le Venezuela de Nicolas Maduro organise de vastes manœuvres militaires en février 2020, ultimes rodomontades ? Ce pays s’enfonce toujours plus dans la pauvreté, le dollar est, dans les faits, préféré à la monnaie nationale car l’inflation se serait élevée à 10 000% en 2019.

Les Européens face à leurs contradictions

Munich a accueilli en février 2020 la cinquante-sixième édition de la conférence sur la sécurité. Cette réunion a de nouveau été l’occasion d’étaler les divergences qui fragmentent les Occidentaux. Une première fracture existe au sein de l’OTAN entre les États-Unis – qui souhaitent y alléger leur contribution – et les membres européens de l’Alliance. Au sein de l’Union, la France a un discours assez critique de l’OTAN (dont le président français dénonçait la « mort cérébrale ») que rejette une grande partie des autres pays européens, comme la Pologne ou la Lituanie. Une autre fracture profonde divise les Européens concernant la politique à mener envers la Russie. La France souhaite tenter un rapprochement que dénoncent avec vigueur les pays d’Europe centrale et orientale, et qui ne plait guère à Washington. La question de la dissuasion nucléaire reste ouverte. Avec le départ des Britanniques de l’Union, la France est désormais la seule puissance nucléaire de l’Europe communautaire. Certaines voix en Allemagne réclament que la France partage son dispositif de dissuasion au profit de l’UE et lui cède son poste de membre permanent au Conseil de sécurité de l’ONU. Les intérêts stratégiques sont de plus en plus divergents.

Bruxelles réunit un sommet pour définir un nouveau budget communautaire. L’Europe n’a pas été capable de se doter d’un budget élargi qui aurait permis une politique ambitieuse pour la mandature 2021-2027. Ainsi l’Allemagne, l’Autriche, le Danemark, les Pays-Bas et la Suède n’ont pas souhaité augmenter leur contribution au budget fédéral, ne voulant pas que leur contribution excède 1% de leur revenu national brut alors que le président du Conseil européen recommandait 1,074%. La fracture est ouverte comme le montre les revendications d’autres membres de l’Union, qui, comme la Hongrie, veulent que la contribution atteigne 1,3%.

Proposition de la Commission européenne pour le budget UE 2021-2027
Source : touteleurope.eu
touteleurope.eu

Le document ci-dessus – les propositions de la Commission (source Touteleurope.eu) - rappelle que les politiques régionales (politiques de cohésion) absorbent l’essentiel des dépenses devant la politique agricole commune (PAC), loin devant la recherche et l’innovation. Les lignes de fractures séparent de plus en plus les pays contributeurs nets – dont la contribution est supérieure à ce qu’ils reçoivent – des membres qui reçoivent plus qu’ils ne contribuent au budget européen, notamment grâce à la politique de cohésion. Certains pays ne veulent plus tant payer pour les autres. La fracture Est/Ouest est évidente, comme l’absence de vision commune sur le projet européen : la dynamique européenne est en berne. Les budgets de l’innovation – qui prépare le futur - et de la défense risquent de faire les frais de ces dissensions.

L’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Vietnam vient de franchir courant février 2020 une nouvelle étape, malgré l’opposition de nombreuses ONG et d’une partie de la société civile en Europe. Le Parlement européen a ratifié cet accord à une large majorité. La négociation de traités commerciaux est une compétence fédérale, les parlements nationaux doivent, dans un second temps, accepter à leur tour cet accord.

Des États-Unis sur tous les fronts

Les États-Unis de Donald Trump participent à la conférence de sécurité qui s’est tenue à Munich, conférence lors de laquelle ils prennent position contre la propension de la France à se rapprocher de la Russie.

Les États-Unis signent en février 2020 un accord commercial avec la Chine qui vise à réduire leur déficit commercial bilatéral. Un bras de fer commercial les oppose désormais à l’Union européenne, notamment en ce qui concerne les voitures ou l’aéronautique.

Washington propose en février 2020 un plan de partage du Proche-Orient entre Israéliens et Palestiniens. Israël conserverait la souveraineté sur la vallée du Jourdain, la Palestine serait divisée entre bande de Gaza et Cisjordanie, au sein de laquelle la continuité territoriale n’est pas complète. Jérusalem-Est ne relèverait plus de l’autorité palestinienne. Présentée comme le « deal du siècle », cette proposition est source de nombreux remous à l’échelle internationale. L’autorité palestinienne a fait savoir qu’elle n’accepterait pas cette proposition en l’état.

Le président américain effectue en février 2020 une visite officielle dans l’Inde de Narendra Modi. Des différents commerciaux opposent ces deux pays qui se sont rapprochés géopolitiquement depuis 2005. Leurs inquiétudes envers la Chine rapprochent aussi ces deux pays, comme les nombreux Indiens travaillant pour des firmes américaines ou aux États-Unis, en particulier dans la Silicon Valley.

Une crise qui n’en finit pas ?

En Algérie, le mouvement Hirak a désormais un an. Il a obtenu le départ du président Bouteflika de la scène politique nationale, et l’arrestation de son frère pour corruption. Ce mouvement sans incarnation réelle n’a pourtant pas abouti au renouvellement de la classe politique algérienne. Il conteste aujourd’hui le président issu des urnes, Abdelmadjid Tebboune. Un manifeste du 22 février affirme la « volonté de rupture » de ce mouvement populaire, mais le mouvement n’a pas -encore -réussi à faire de l’Algérie un État moderne.

En Irak et au Liban – désormais au bord de la faillite – les manifestations populaires continuent en février 2020. Elles n’ont pour l’instant pas débouché sur un changement politique majeur.

La Malaisie est en pleine crise politique. Le premier ministre Mahathir Mohamad vient de présenter sa démission au roi, il incarne - malgré son grand âge – une Malaisie tournée vers l’avenir. Les jeux de pouvoir déchirent un pays aujourd’hui menacé par la récession car très dépendant de l’économie chinoise qui fonctionne au ralenti. Après avoir démissionné, Mahathir propose de former un nouveau gouvernement.

L’Inde est entrée depuis l’été 2019 dans une spirale de violence. Elles se sont cristallisées dans le Cachemire, au Nord-Est du pays. En février 2020, une vingtaine de personnes ont été tuées à New Delhi et deux cents autres ont été blessées dans des violences intercommunautaire sur fond de loi sur l’identité

Bonnes nouvelles

Après que l’ancienne Commissaire à la concurrence – Margrethe Vestager – ait interdit en février 2019 la naissance d’un géant européen du rail grâce au rapprochement de Siemens et Alstom, la firme française vient d’annoncer un protocole d’achat de son concurrent canadien Bombardier. Il s’agit pour Alstom d’acquérir une taille qui lui permette de résister à la concurrence du chinois CRRC, qui restera néanmoins bien plus puissant. Bruxelles doit encore donner son accord à ce rachat, mais la France, l’Allemagne et la Pologne lui ont demandé d’amender sa politique de concurrence menée jusqu’à aujourd’hui. L’UE cessera-t-elle de se condamner à l’impuissance pour des raisons idéologiques ?

Martin Fourcade devient en février 2020 champion du monde du biathlon à titre individuel. L’équipe de France - Emilien Jacquelin, Martin Fourcade, Simon Desthieux et Quentin Fillon Maillet – a remporté la médaille d’or de l’épreuve de relai, un autre exploit.

MAJ le 3mars 2020

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*

Docteure en Géopolitique de l’Université de Reims Champagne-Ardenne. Agrégée d’histoire, Professeure de chaire supérieure au lycée Faidherbe (Lille) où elle enseigne la géopolitique en classes préparatoires économiques et commerciales. Auteure de nombreux ouvrages.

[1NDLR : Par un étonnant pied de nez de l’histoire, le Brexit sera-t-il après moult retournements à l’origine d’une réunification de l’Irlande ? Nous le saurons dans quelques années. Ce serait, pour le dire cruellement, une nouvelle « victoire » de David Cameron, à l’origine pour des raisons électoralistes de la « brillante promesse » d’organiser un referendum au sujet du Brexit. Il faut aussi avoir un œil sur les Ecossais, puisque certains espèrent organiser un référendum pour rejoindre l’UE.


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Citation / Quotation

Auteur / Author : Axelle DEGANS

Date de publication / Date of publication : 1er mars 2020

Titre de l'article / Article title : Synthèse de l’actualité internationale de février 2020

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